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Ecole Nationale Supérieure 1998 LOUIS LUMIERE L’IMAGE MESSAGE Le rôle du photographe dans le processus de communication, au travers des publicités de prêt à porter sans slogan, pour l’affichage 4x3. Laurence Valentin Photographie Option Prise de Vue Sous la codirection de Nicolas Schlaffman-Amprino, directeur de création chez Media System , et de Rolan Ménégon, professeur à l’E.N.S.L.L. Ecole Nationale Supérieure 1998 LOUIS LUMIERE L’IMAGE MESSAGE Le rôle du photographe dans le processus de communication, au travers des publicités de prêt à porter sans slogan, pour l’affichage 4x3. Laurence Valentin Photographie Option Prise de Vue Sous la codirection de Nicolas Schlaffman-Amprino, directeur de création chez Media System, et de Rolan Ménégon, professeur à l’E.N.S.L.L. 1 2 REMERCIEMENTS Je remercie mes parents, Isabelle, Sophie et Julien pour m’avoir aidée tout au long de ce parcours. Merci à Christelle B., à Guillaume, à Frédéric et Bérénice pour leur présence. Merci à Christelle C. et François, ainsi que Gervais Jassaud, directeur de l’E.S.A.D.1 pour m’avoir permis de réaliser des photographies au studio de l’école, un dimanche de mars. Merci à mes modèles, Amélie, Stéphanie D., Stéphanie et Nadège, pour leur patience et leur corps de rêve. Merci à Jean-Christophe pour ses bons conseils, PierreFranck, et Stéphanie D. pour les séances de lectures (…) Merci à Anne-Marie Hodiesne pour sa gentillesse. Merci à Damien de Foucault, Administrateur chez Affimétrie. Je tiens à remercier Eggle Toutchi, commerciale chez G.C.I., Alexandra Leca, responsable au service de presse chez CLM/BBDO pour Kookaï. Merci à Charlotte, responsable au bureau de presse Rhamsa pour Morgan. Merci à Melle Ferron de l’agence Wolkoff et Arnodin pour La City. Merci à Renaud Buenerd, directeur de communication à La City. Merci à Rolan Ménégon, professeur à l’E.N.S.L.L. et à Nicolas Schlaffmann-Amprino, directeur de création chez Media System, pour leurs conseils, leur patience et leurs encouragements. 3 SOMMAIRE Préambule Introduction 7 8 Chapitre I : Le rôle du photographe dans la communication 11 1. Le contexte a) La société de consommation b) La société des marques 11 13 2. Champs d’investigations a) Une entreprise de marque : TATI b) Le système de la mode 14 17 3. Le consommateur a) Une cible jeune : «enfant de pub» b) Une catégorie socioculturelle : tribu c) La connivence avec le consommateur 21 22 24 4. Le média a) L’identification b) Le média : affichage 4x3 c) L’efficacité du média 27 28 30 Chapitre II : Rôle du photographe dans la conception 33 1. Mode d’expression a) La photographie et l’absence de produit 33 2. Analyse de la communication de la concurrence a) Morgan, Kookaï, La City b) Vendre du rêve c) Humour et amplification d’une certaine réalité 35 39 43 3. Champs créatifs du projet a) Les expressions courantes b) L’expression littérale 48 50 1 Ecole Supérieure d’Art et de Design de Reims 4 Chapitre III : Rôle du photographe dans la réalisation 53 1. Conception des maquettes a) Exemple b) Le rough c) La Conception Assistée par Ordinateur 53 55 57 2. Maquettes finales a) Les réactions b) L’identification c) Les modifications et choix définitifs 58 59 60 3. Faisabilité a) Le budget b) La technique 61 62 4. Réalisation a) Les prises de vues b) La palette graphique 63 65 Conclusion Bibliographie Glossaire 68 70 73 Annexes : 1. 2. 3. 4. 5. Brief Concept board / Explications Tests Entretien à La City Conférence de Gilles Lipovetsky 76 82 88 90 96 5 Note à l’intention des lecteurs : ce sujet rentre dans un domaine particulier qui est celui de la publicité, il m’arrive de ce fait d’employer des termes spécifiques à cette corporation. Ce vocabulaire pratique use d’expressions anglophones qui ne sont pas traduisibles en français. Les publicités entrent dans un domaine où le vocabulaire est très précis, très changeant : la mode. Par conséquent, un glossaire est tout spécialement conçu pour une meilleure compréhension de ces termes. Afin de vous guider vers ce dernier, lors de la première écriture de ces mots, un astérisque (*) vous indiquera qu’il se trouve dans le glossaire. 6 PREAMBULE A ce jour, les marques* ont besoin de contenu pour arriver à s’exprimer. C’est grâce à une signature* qu’elles y parviennent. C’est un slogan* court qui accompagne le nom du produit*. Elle donne une certaine philosophie au travers du discours de la marque2. L’éradication du slogan publicitaire ne s’est pas faite de manière brutale. Il n’implique pas le consommateur, mais, par contre, la signature l’interpelle. Elle construit une relation avec lui. Depuis quelques années, les publicitaires tirent un trait sur l’utilisation des mots, l’absence de signature est extrêmement moderne (Kookaï, Nike.). L’interpellation se fait par les images, d’où l’importance grandissante du rôle du photographe dans la communication visuelle publicitaire. 2 Culture Pub, M6, dimanche 26 avril 1998. 7 INTRODUCTION Le thème de ce mémoire part d’un simple constat qui est l’absence de slogan et de produit dans certaines campagnes publicitaires* (notamment, les dernières campagnes de Kookaï). De ce fait, l’image prend de plus en plus d’importance. Cette étude a pour but de définir « les limites des champs d’investigations du photographe dans le processus publicitaire ». Plusieurs éléments sont à l’origine de l’évolution du rapport de l’image au slogan. Dans un premier temps, mon travail consiste à exposer et analyser les paramètres dans lesquels cette idée évolue : la société de consommation*, les marques et leurs identités visuelles*, la mode*, le consommateur averti, ainsi que l’affichage 4x3 qui s’intègre comme le média* principal de mon étude. J’établis donc la relation entre la société en général et le photographe. Quelles importances ces données ont-elles pour lui ? Comment ce dernier la perçoit-il ? Dans un deuxième temps, ma recherche tient compte des moyens de communication tel que le médium photographique, ainsi que du « nouveau » style d’image : mise en scène et absence de produit. Je me fonde sur des campagnes publicitaires qui répondent à des courants créatifs actuels dans le domaine du prêt à porter* (Morgan, Kookaï, La City). De ce fait, je souligne les liens entre elles et ce qui me conduit à cerner ma propre étude. Le photographe peut-il être considéré comme concepteur d’images ? 8 En dernier lieu, je me permets d’aborder de front le statut du photographe dans les créations publicitaires. Je me place dans le contexte où le photographe a pensé le concept* et le réalise du rough* à la prise de vue. Comment le photographe peut-il faire évoluer une idée sans entrer dans des clichés ? De l’idée de base à la réalisation, c’est tout un système de communication qui se met en place. Dans le cas présent, je représente «le système » tout en entier, ce qui me permet d’évoquer par la suite, les avantages et les inconvénients à vouloir mener de front un tel projet. C’est au travers de certains magazines féminins que j’ai établi les exemples de cette étude et construis mon projet. Il fallait que je reste proche des faits de société pour obtenir une étude en rapport avec la société de consommation actuelle. 9 « Les choix ne sont pas faits au hasard, mais socialement contrôlés, et reflètent le modèle culturel au sein duquel ils sont effectués. On ne produit ni ne consomme n’importe quels biens : ils doivent avoir quelques signification au regard d’un système de valeurs » Gervasi3, sociologue. 3 Jean BAUDRILLARD, La société de consommation, Denoël, Paris, 1970, p.94 10 RÔLE DU PHOTOGRAPHE DANS LA COMMUNICATION VISUELLE Une photographie, tout comme un produit n’existe que par le regard d’autrui. Une photographie publicitaire subsiste ainsi par le biais d’une même personne ayant deux visions distinctes : celle du spectateur et celle du consommateur. Elle perçoit ainsi l’image publicitaire d’un point de vue sensible et commercial. Le photographe a une meilleure vue d’ensemble de son travail s’il en maîtrise les tenants et les aboutissants. Il ne peut que mieux traduire un concept en images s’il connaît le contexte et les personnes à qui il s’adresse. LE CONTEXTE La société de consommation Une partie de l’économie de notre société repose sur la production de biens de consommation. Il faut faire en sorte que ces produits aient une valeur commerciale. Ils sont conçus et fabriqués pour être connus et reconnus des consommateurs afin d’être vendus. Il s’agit, certes, d’une société de consommation de produits, mais aussi d’une société de consommation de l’image. Les publicités nous permettent de connaître les différents produits. Nous sommes exposés de plus en plus à ces dernières, pour nous faire réagir ; c’est ce que nous pouvons considérer comme du matraquage visuel. Il nous amène vers un certain conditionnement. 11 Nous naissons dans un cercle familial qui s’inscrit dans la société de consommation. L’enfant, l’adolescent puis le jeune adulte est destiné à consommer c’est pourquoi depuis le tout jeune âge, l’enfant est nourri par les images. Au début, nous n’en sommes pas conscients et pourtant «dès le sein de la mère, le consommateur commence à être conditionné.4 » Il semble que nous entrons inconsciemment dans le système qui nous façonne au travers d’association d’images et de mots. La communication au sein de la société est appelée à se renouveler très souvent, pour éviter la lassitude du consommateur. Elle suit un état d’esprit tout en répondant à une attente. C’est aussi dans ce but que la mode change pratiquement tous les ans. Elle s’intègre dans la consommation ostentatoire, elle entre dans la société du spectacle dans laquelle nous vivons, un univers où le paraître domine l’être. Un style de vie où l’artifice est roi. L’article de mode, le vêtement de prêt à porter, commence à vivre dès l’instant où nous pouvons le nommer, le qualifier par une marque. Le photographe est un acteur et un témoin de cette société de consommation. Il doit avoir un regard critique par rapport à son évolution. Cela lui permet d’aller au devant des tendances* visuelles et de faire évoluer l’idée que nous avons de cette société, par rapport aux biens que nous consommons. 4 Jean BONIFACE, L’homme consommateur victime ou complice, Société coopérative d’information et d’édition mutualiste, Paris, 1982, p.101 12 La société des marques Le système de consommation est ambigu : d’une part, il permet de réduire les différences entre les classes sociales par l’accès aux mêmes produits, et d’autre part, il permet aux acheteurs de se différencier entre eux. Les «marques » permettent de créer les normes de cette «société » et offrent la possibilité à chacun de se créer une identité par des produits. Elles se doivent d’être des valeurs de référence dans leurs domaines respectifs. Les marques ont une existence si elles renvoient à la société de consommation et aux consommateurs. Pour devenir populaire auprès des consommateurs, elles utilisent les médias quels qu’ils soient (télévision, affichage, presse…) pour y diffuser leur image. Grâce à leur influence, il se crée un véritable langage autour d’elles, ce sont des slogans, des idées, des musiques… qui permettent à la publicité des marques, selon Pascal Weil, de devenir un véritable espéranto ! 5 . Jean Boniface se demande si la publicité est faite pour attirer des clients, ou pour contrer la concurrence des autres marques6. C’est un perpétuel combat si elles vendent les mêmes produits. Leurs atouts restants sont avant toute chose, l’image qu’elles émettent, le prix, la qualité des produits et la relation avec le client qu’elles entretiennent. C’est sous l’œil attentif du photographe que l’identité se révèle. Il prend du recul par rapport au concept de la marque qu’on lui propose, il la juge et réalise l’image qui sera perçu par tout un chacun. Il doit être en corrélation avec ce que la marque souhaite montrer comme étant son image. 5 Pascale WEIL, A quoi rêvent les années 90 ?, Seuil, Paris, 1993, p.17 Jean BONIFACE, L’homme consommateur victime ou complice, Société d’information et d’édition mutualiste, Paris, 1982, p.133 6 13 CHAMPS D’INVESTIGATIONS Une entreprise de marque : TATI La marque est une référence en terme de garantie, de sécurité et de practicité pour ses clients. En effet, cela leur sert de repère dans une société de consommation où tout ce qui se vend, est dans l’instant, déjà dépassé et déprécié. Seuls 6% des Français7 citent une marque comme un critère de choix pour leurs achats. Elle est en perte de vitesse. Les jeunes semblent manifester encore de l’intérêt pour ces références sans y être pour autant fidèles. En fait, elle est encore présente dans leur univers parce que sa représentation est parfois une valeur symbolique. L’entreprise de marque use de ses atouts : l’image de l’entreprise et l’image de marque*. La première dépend de son prestige, de son caractère spécifique (manière de faire…). La deuxième se représente par l’identité visuelle en se distinguant, selon l’auteur d’un dictionnaire sur le thème publicitaire8, par un nom, un logo*, une symbolique, une couleur, une typographie. L’identité d’une marque dépend de ceux qui la conçoivent, de ceux qui la perçoivent et des consommateurs. Les publicitaires conceptualisent la marque autour des notions qu’elle doit véhiculer. Des sémiologues analysent l’image qui se dégage des entreprises de marque (Geneviève Cornu, Andrea Semprini, Jean-Noël Kapferer…). Le consommateur reste, néanmoins, la première personne qui se forge une opinion sur la marque, puisqu’elle lui est destinée. 7 8 Gérard MERMET, Tendance 98 Les nouveaux consommateurs, Larousse, Paris, 1997, p.105 Rémi-Pierre HEUDE, Dictionnaire analogique de la pub et des médias, Eyrolles, Paris, 1993, p.172 14 L’exemple de «TATI » est particulièrement intéressant pour plusieurs raisons. D’une part, son image découle de son histoire et reflète les pensées d’une génération. D’autre part, c’est une entreprise de prêt à porter reconnue internationalement à ce jour. Enfin, sa communication visuelle actuelle se fonde autour des photographies sans légende. L’entreprise vit le jour en 1948. D’un modeste commerce, Monsieur Jules Ouaki en fait un des premiers discounts, où les vêtements s’entassent dans des bacs supplantés par de grosses étiquettes. Le désir de vulgariser l’achat de vêtements reste une priorité. C’est, à ce jour, une multinationale qui se développe en France et dans le monde. Dans le courant des années soixante, l’entreprise est l’empreinte de toute une génération. Le vichy rose, symbole de leur identité est créé en deux temps. D’une part, Monsieur et Madame Ouaki le composent en mêlant une étoffe de tissu noir et blanc et un emballage de parfum, Guerlain, bleu et rose. D’autre part, Brigitte Bardot déclenche l’engouement pour les couleurs de «TATI », lorsqu’elle porte des robes taillées dans ce tissu. Son identité se construit à travers l’image que donne Brigitte Bardot. Il se dégage une idée de beauté, de jeunesse, de bonheur et de dynamisme. A ses débuts, l’entreprise se crée une identité calquée sur une idole des années soixante. Maintenant, elle représente l’idée d’une génération passée. Elle ne cesse de s’étendre parce que son image est devenue une preuve de pérennité. Son succès réunit des populations cosmopolites, des personnes de statuts sociaux et de religions différentes ; tout le monde va chez «TATI». 15 Le vichy rose et blanc nous projette l’idée des magasins, des produits. Une fois l’identité construite, le consommateur est seul juge de la marque. L’entreprise est baptisée « TATI», du nom de la mère de Monsieur Ouaki, Tita. Son nom, lié directement au créateur, lui confère une dimension affective. TATI profite de son cinquantenaire pour communiquer sur sa marque. Il ne s’agit pas de communication publicitaire traditionnelle. Il y a une campagne d’affichage 4x3 ou elle expose toutes ses innovations en montrant les différents logos. De Tati Or à Tati Clic9, l’entreprise investit de plus en plus de domaines. Le leitmotiv de l’entreprise TATI pour ce demi-siècle étant : « LES PLUS BAS PRIX SONT CHEZ TATI DEPUIS 50 ANS». Les autres manifestations, lors de cet anniversaire, sont représentatives de sa notoriété et de la place active du photographe par rapport à l’image d’une marque: exposition au musée des Arts décoratifs10 de célèbres photographes, d’Edouard Boubat à Luc Choquer. Des photographies regroupées dans le catalogue «50x50»11, dont les créateurs sont de renoms : Les Guzman, Dominique Isserman, Paolo Roversi,… Des sacs décorés « par des artistes pour l’occasion »12, Andrée 9 Prêt à Photographier Tati Du 12 mars au 4 avril 1998 11 Fabien Ouaki, « 50x50 », Steidl, Paris, 1997. 12 Babeth Djian, Max MIXT(E), Où vont les modes ?, À voir, avoir, savoir, RCS France SNC, LevalloisPerret, n°4, printemps 1998, p.84 10 16 Putman, Erick Dietman, César… Une communication sans slogan, d’actualité, qui sied bien à ce type d’entreprise puisqu’il s’agit seulement de se distinguer par rapport aux autres marques. La marque permet de rassembler tout le monde, elle devient un code. Alors que le produit est dépassé, il peut continuer à être un repère grâce à son nom. Ce sont des codes attachés à une marque qui permettent au photographe de communiquer. Le système de la mode La «mode» un univers vaste où les stylistes se laissent guider par leur fantaisie, leur imagination. Je m’attache particulièrement aux tendances du prêt à porter : des modèles conçus pour une production de masse. Ce domaine reste très proche du consommateur du fait de son accessibilité. La mode apparaît comme le système le plus ambigu par rapport à celui de l’individualisme*. D’une part, elle se fonde sur de multiple canons de la beauté : taille, poids, teint… D’autre part, il semble que beaucoup de personnes souhaitent se forger une apparence très personnelle, tant en matière d’habillement que de physique13. Cependant, selon les dires de Gilles Lipovetsky14, «la spirale de l’autonomie avance», elle repose sur le système «à la mode démodé », un système binaire qui s’inscrit dans un système ternaire puisqu’elle est traditionaliste, moderniste et post-moderniste*. Elle s’inspire des phénomènes passés, elle se tourne vers des formes futuristes mais reste un phénomène post-moderniste par sa création très éphémère, non passéiste. 13 Cf. paragraphe sur les catégories socioculturelles. Gilles LIPOVETSKY, Conférence sur « L’individualisme contemporain », jeudi 16 avril 1998, Publicis, 133 av. Champs Elysée, Paris. 14 17 Dans les années 1960-1970, c’est un style jeune, une mode de la rue, un patchwork considérable, qui nous mène vers «des modes». C’est la logique post-moderniste de la mode : passer d’une mode à des modes. La minijupe, symbole de toute une génération, est l’expression d’une société en pleine mutation. Elle est inventée par Mary Quant et introduite dans la mode par Courrèges en 1965. Elle représente le début de l’individualisme parce qu’une mode ne sied pas à toutes les femmes. Ce n’est plus un seul créateur qui impose son style, la femme décide de choisir ce qui lui convient. Depuis cette époque, il n’y a plus de phénomène majeur comme celui-ci. De plus en plus, ce sont les jeunes qui imposent leur mode et non plus seulement les professionnels. Il est vrai que ce domaine est une partie ambiguë de la société, mais aussi des plus représentative de notre époque. Il n’y a plus de grande direction, de grande tendance en terme de mode mais plutôt, une multiplication de phénomènes qui mûrissent indépendamment les uns des autres. Certains font nombre d’adeptes, mais ressemblent plutôt à des «états d’esprit » puisqu’ils développent un langage, une philosophie. Tous ces microcosmes constituent «La Mode». En réalité, «la mode est réellement un alphabet »15, et cette diversité se retrouve à travers certains magazines féminins16. Ils nous montrent des jeunes filles habillées d’un style «techno» ou romantique. Tous les genres sont acceptés et acceptables. Ils vont de la tendance «sportwear »17 à la tendance «classicwear». Je ne suis pas sûre de pouvoir m’exprimer sur ce 15 Jean BONIFACE, L’homme consommateur victime ou complice, Société coopérative d’information et d’édition mutualiste, Paris, 1982, p.172 16 20 ans, Jeune et Jolie, Vital, Dépêche mode, Jalouse, Cosmopolitain, Elle 17 Le suffixe «wear » désigne une vague tendance. 18 qui se meut dans la tendance ou non (le «in» et le «out»), puisque à ce jour tout peut être amené à devenir un style. D’après certaines constantes dans la presse féminine, trois grandes tendances se détachent : la séduction, le sportwear et le minimalisme. En fait, le consommateur entre dans les tendances en se les appropriant. Il compose à sa manière, de façon à créer son univers. C’est ici que nous retrouvons réellement l’idée d’individualisme : la mode devient un sujet de confrontation aux valeurs traditionnelles. L’entreprise de mode doit fournir une multitude de possibilités pour se vêtir. Elle doit répondre à l’attente du consommateur. En fait, elle doit être en permanence à l’affût des nouvelles tendances pour rester au plus près du client : elle doit être plutôt diversifiée. Il faut qu’elle puisse satisfaire ses désirs très rapidement, sinon celui-ci se tourne vers la concurrence. Je pense que c’est un état d’esprit de la fin du siècle. Les consommateurs sont dans une attente grandissante de franchir le cap du XXIème siècle. De ce fait la mode vit à travers des cycles de plus en plus courts. Le consommateur fait un retour vers le passé, avant de parvenir à des matières et des formes nouvelles qui sont actuellement étudiées. Roland Barthes lui-même, confirme ces changements rapides et tend à nous démontrer qu’il ne s’agit que d’un perpétuel recommencement : « Au lieu de vous placer à l’échelle de quelques années, vous vous placez à l’échelle de quarante ou cinquante ans, vous observerez des phénomènes d’une très grande régularité (…) Le rythme de changement de Mode est (…) régulier (…) » 18et il ajoute, que, de ce fait, d’ici à l’an 2020, les jupes devraient à 18 Chantal THOMAS, « Roland Barthes et la mode », Art Press Spécial Art et Mode, Attirance et divergence, Art press, Hors série n°18, Paris, 1997, p.136 19 nouveau être très longues… Il me semble que ces paroles résument parfaitement les mouvements cycliques de la mode, même s’ils paraissent toujours aller de l’avant. C’est peut-être un brin de nostalgie qui reste aux créateurs, aux consommateurs : porter un habit du style «années soixante-dix », c’est encore adhérer à ces idées… La perspective d’un siècle nouveau risque de bouleverser cet état de fait car la technologie du textile se penche de plus en plus sur les matériaux du futur. Des «tissus intelligents19 » qui garderaient en mémoire la forme du corps et qui, de ce fait, se replaceraient automatiquement ou qui changeraient selon l’humeur («morpho-wear» !), des tissus antibactériens, anti-stress, anti-odeurs… Cette gamme de vêtements paraîtra dans quelque temps et laissera derrière elle tout ce que l’on porte à ce jour. L’entreprise de mode doit répondre en terme de produit, de qualité, de service, de rapidité ainsi que de changement si elle veut rester dans la course mais elle impose son caractère, sa marque. Selon les écrits de Bourdieu, «la fabrication publicitaire de marques (…) représente un cas exemplaire d’alchimie sociale, opération de transsubstantiation qui, sans rien changer de la nature physique du produit, en modifie radicalement la qualité sociale »20. Un produit n’existe pas seulement par sa forme mais aussi par son «âme », comme nous l’avons vu précédemment. La marque et son identité y contribuent, mais l’acteur principal qui la fait vivre reste le consommateur. 19 Alexandra SENES, CB News Communication, Spécial femme, Tissus intelligents, les nouveaux habits de la mode, n°514, Paris, 2-8 mars 1998, pp.14-18 20 Marie-Christine NATTA, La mode, Economica, Paris, 1996, p. 84 20 Le photographe travaille dans la même logique que celle de la mode : le domaine de l’éphémère. Pour lui, la mode est le reflet réaliste de la société, il nous le traduit par l’image. LE CONSOMMATEUR Une cible jeune-«enfants de pub » A la fin des années quatre-vingts, ces «jeunes* » n’aiment pas les publicités qui ne montrent pas le produit. Il fallait qu’ils apprennent à le connaître déjà physiquement, non qualitativement. Ils affectionnent tout particulièrement les publicités marquées par une certaine créativité et une explication claire et précise du produit. Elles renvoyaient une image moderne : Perrier, Eram, Orangina, Coca-Cola. Ces publicités sont «vivantes» et apportent un bien-être fondamental à l’équilibre des adolescents. Ce sont les mises en scène dynamiques de Hollywood chewing-gum, de Lee Cooper, tout comme l’humour d’Eram qui sont alors appréciés.21 Dorénavant, les publicitaires leur proposent des visuels qui ne présentent pas de manière directe le produit, même s’ils sont aussi riches en terme de créativité. Ces personnes se sont éduquées avec l’image. Elles finissent par les décrypter sans avoir toutes les informations. On peut pressentir qu’elles ont un engouement pour tout ce qui est innovant, leur vocabulaire est truffé d’expressions «tendance » telles que «hype*, tip top, chic… » ; en somme, elles ont besoin d’un renouveau pour s’affirmer. 21 Caroline GUILLOT et Gérard NEYRARD, Entre clips et look, les pratiques de consommation des adolescents, L’Harmattan, Paris, 1989, pp.49-52 21 Une catégorie socioculturelle : Tribu Les jeunes pensent être différents du moment où ils peuvent avoir certains codes d’appartenance à une tribu*. Ils personnalisent des codes qui les représentent. Dans le but de définir correctement la catégorie socioculturelle choisie dans cette étude, je souhaite pouvoir expliquer comment cela fonctionne dans sa globalité au travers de distinctions physiques. Le culte du corps tout comme la mode repose sur un même paradoxe par rapport à l’individualisme. Les codes sportifs ou stylistiques entrent dans une logique du combat avec soi-même. Les modèles sont un instrument de l’autonomisation, de la maîtrise de soi.22 L’étude de groupes s’étant appropriés leur corps de manière extrême m’amène à analyser ce que sous-entend le terme de tribu ainsi que d’individualisme, de façon exemplaire. C’est dans les années soixante que ces idées surgissent. Il s’agit d’imaginer des hommes-robots, nous sommes loin de cela, cependant les «mutants 23» existent. Nous sommes au milieu du monde de Warhol puisqu’il disait : « je veux être une machine ». Les implants d’acier, de corail, de Téflon nous dirigent vers une «cyborg generation 24». Les personnes portant des implants se considèrent donc, pour certaines, comme des «mutants ». Une mutation voulue 22 Gilles LIPOVETSKY, Conférence sur L’individualisme contemporain, jeudi 16 avril 1998, Publicis, 133 av. Champs Elysée, Paris. 23 « C’est l’heure », France 2, jeudi 13 novembre 1997. « Du fer dans les épinards », France 2, samedi 14 mars 1997. 24 Contraction de « organisme cybernétique ». 22 qui explique un besoin de se différencier très important. Je pourrais les qualifier de «tribus mutantes ». Elles expriment le désir, poussé à l’extrême, de changer leur apparence humaine et en devenir maître25. L’exemple le plus connu dans le monde artistique en terme de maîtrise de son corps est celui d’Orlan. C’est une femme, qui, adolescente se travestissait en homme. Maintenant, et ce, depuis 1989, elle subit des opérations de chirurgies esthétiques pour obtenir un front comme celui de Mona Lisa26, une bouche comme Europa27, le menton de la Vénus de Botticelli28… Les interventions sont filmées. Elle veut prouver au monde que le corps est «obsolète29», et qu’il faut l’aider à suivre la marche du temps, dans un monde où tout s’accélère. Ce mouvement reste proche de la simple chirurgie esthétique par les faits, mais éloigné par son concept. La chirurgie plastique présente un aspect normatif alors que les implants introduisent l’idée de singularité. Cette cyber-génération fait partie de catégories socioculturelles qui éprouvent le besoin de se démarquer par une certaine excentricité physique. 25 Jean-Marie Barbieux, DS magazine, C’est déjà demain, Cyborg generation, JYL SA, Paris, n°11, Avril 1998, pp.70-73 26 Léonard de Vinci, 1563 27 Peinte par Boucher. 28 Peinte en 1484 29 Orlan, La recherche photographique, Pour un art charnel, Maison Européenne de la Photographie, Paris, printemps 1997, n°20, pp.72-77 23 D’autres se démarquent moins agressivement par rapport à leur corps. Chacun cherche à affirmer sa personnalité comme il le souhaite. À ce moment précis la notion de référent est importante. Ils veulent se trouver une personnalité ; cette dernière est souvent fondée à partir de modèles. Je pense que nous souhaitons être quelqu’un de particulier au vu des personnes qui nous entourent ; les idéaux traditionnels sont les parents, les amis… Ils sont tour à tour des modèles ou des contre-exemples. C’est un jeu qui consiste en son amélioration, en son affirmation puisque «c’est un moyen de définition social de l’individu »30 . A partir de cette notion, relativement extrême, du système dans lequel s’inscrit une tribu, le photographe en saisit l’importance. De là, il peut, lui-même en établir une pour ses projets. Il inscrit des valeurs dans ses images au travers de codes physiques. (Le brief* qui se trouve en annexe 1, dresse tout particulièrement le portrait de la cible de mon projet). Connivence avec le consommateur Les publicitaires communiquent grâce aux codes que les tribus définissent. Ce système entraîne une grande complicité entre ces deux acteurs, car la publicité s’adresse à des consommateurs de plus en plus avertis. 30 Mac Luhan MARSHALL, Pour comprendre les média, Mame / Seuil, Paris, 1997 (texte de 1964), p.145 24 Pour être encore plus proche d’eux, le message publicitaire s’inscrit dans l’actualité. Les changements de société, quels qu’ils soient, induisent la mode. Tout est dans une même tonalité, nous écoutons une certaine musique pour un certain type de vêtement. Une véritable philosophie de vie découle de la mode. La casquette est assimilée au rappeur tandis que les baskets compensées se veulent plutôt techno… Il est facile de parler de langage au sens propre à travers certaines campagnes publicitaires. L’exemple de Sony est une approche révélatrice du rapport que l’entreprise souhaite avec le consommateur. L’entreprise utilise un moyen d’accrocher le spectateur visuellement et de créer une référence. Elle lui parle grâce à une codification. Les dessins sont compréhensibles par tous les types de consommateurs. Ils vulgarisent la communication visuelle de SONY. Il y a quatre graphiques dont trois expriment des sens physiologiques de l’être humain : l’ouïe, la vue, le toucher. Le dernier représente l’organe de phonation. L’ouïe est symbolisée par une oreille évoquant la qualité du son Sony. Elle symbolise le matériel de capture du son et l’écoute client. La vue, matérialisée par l’œil, démontre la haute définition de l’image. C’est un organe de la perception visuelle qui détient une connaissance importante. C’est pourquoi nous sommes en mesure de penser que Sony est une entreprise visionnaire. Le toucher qui nous ramène au contact du matériel et à son confort ergonomique est symbolisé par une main ouverte, tous doigts levés. Celle-ci attribue à Sony une puissance et une idée de maîtrise de ses projets. La bouche, indique les éléments de diffusion du 25 son. C’est l’organe de la parole ainsi que celui de la puissance créatrice et communicante. En somme, Sony nous montre à la fois la qualité de ses produits, de sa marque, et ses atouts : la communication, la connaissance, la puissance, la création. Elle définit l’idée que nous devons nous faire de ses produits. Ce ne sont pas les produits qui sont mis en valeur mais leurs particularités. Ils doivent être de qualités, infaillibles, fonctionnels et novateurs. L’impression qui se dégage principalement de ce graphique est une idée de suprématie par rapport au domaine de l’audiovisuel : il promeut l’idée que Sony veut nous faire ressentir à travers ses produits. En somme, Sony est l’univers des sens. Ces graphismes sont très proches des idéogrammes qui font partie des premiers systèmes d’écritures avec les caractères pictographiques. Ce sont des écritures simples et imagées qui renvoient immédiatement au concept même. Elles font ressortir plus facilement les émotions car elles sont visuellement plus imagées qu’une typographie traditionnelle. C’est le genre de procédé que le monde informatique a repris pour communiquer via le courrier électronique sur Internet. En effet, un système de symboles parcourt les réseaux du «web » pour traduire des états d’âme. Ils sont appelés «emoticon, binette31, souriant32… », et plus souvent nommés «smiley*». Leur origine remonte aux années quatre-vingts et à ce petit homme : J, nommé «smile ». Ces graphismes demandent aux consommateurs, tout comme aux internautes, d’être plus sensibles aux langages parallèles. Nous leur montrons des dessins pour les faire réagir. L’explication d’une image publicitaire se fait grâce à un support graphique qui évoque des sentiments 31 32 Terme québécois. Terme français, traduction de l’anglais «smile ». 26 définissant le produit. Le graphique renvoie donc à l’image ou à l’essence même de ce dernier. La communication visuelle devient accessible à tous. Les publicités dépassent la barrière des langues pour rentrer dans une relation plus complice avec les consommateurs par le biais de codes essentiels. La communication, comme Sony la conçoit, devient universelle. Une discussion s’établit entre une image et un consommateur. Elle l’interpelle, il cherche inconsciemment à la comprendre. Le processus est identique pour toute communication visuelle, même si l’univers de la mode est très concurrentiel, tant en matière de création que d’achat. À cet instant, le photographe cherche à souligner de manière visuelle l’idée forte du concept pour capter l’attention du consommateur. Il cherche à créer «Le Visuel» dans lequel s’intègre le logo de la meilleur façon qu’il soit. LE MEDIA L’Identification Les publicitaires pensent la cible* autrement. En 1964, un théoricien de la communication, Marshall Mc Luhan, considère que «le produit luimême compte d’autant moins que la participation du public s’accroît ». C’est une idée qui évolue au fil du temps, le jeune consommateur est considéré de plus en plus comme une personne active à part entière à qui les publicitaires s’adressent. Pour pouvoir se reconnaître à travers un produit qui lui est potentiellement destiné, le consommateur s’est donc identifié premièrement 27 à un modèle du genre humain. Il se réfère aux modèles de son vécu dans sa globalité. Le transfert se produit si le travail en amont a été bien établi. La cible peut se définir à travers l’image comme pouvant en être l’acteur. Un produit peut lui convenir de façon toute particulière. Le spectateur se l’approprie parce qu’il lui renvoie son image. Suivant les écrits de Semprini «le caractère de la marque renvoie au caractère du consommateur »33. Il faut qu’il se sente en confiance avec le produit évoqué. L’image devient miroir. Elle lui renvoie précisément les codes valorisants auquel il adhère, en tant que personne faisant partie d’un groupe. Ces signaux émis par la publicité deviennent alors des stimuli qui cherchent à réveiller ses sentiments pour faire surgir les désirs inconscients d’achat. A vêtement égal le consommateur choisit la marque dont il se sent le plus proche. L’identification se produit par associations d’images connues. Le spectateur ciblé est influencé par les images qui entourent la publicité qu’il regarde, ainsi que celles qui les précèdent et les succèdent, quelles soient présentes physiquement durant le moment de la vision ou quelles soient dans la mémoire du spectateur. Pour réussir, il faut que l’annonce englobe l’expérience du public. Le média : Affichage 4x3 L’affichage urbain est un des premiers médias publicitaires qui vit le jour. Des enseignes peintes furent retrouvées sur les ruines de Pompéi. Ce 33 Andrea SEMPRINI, Le marketing de la marque - Approche sémiotique, Liaisons, Paris, 1992, p.116 28 média évolue depuis plusieurs siècles et garde une part importante dans la communication visuelle. Les performances de l’affichage commencent à prendre une place équivalente à l’Audimat (audience de la télévision) et à 75000 (audience de la radio)34. Les premières mesures d’audience débutent dans les années cinquante. Dans les années quatre-vingt-dix, l’impact de l’affichage est de plus en plus défini. Son efficacité est quantifiée d’amont en aval d’une campagne publicitaire. Une fois cette dernière réalisée, un type de réseau d’affichage est défini. Il existe un logiciel capable de mesurer le taux d’audience que la campagne suscitera. Ce logiciel, SAM est distribuer par AFFImETRIE, une entreprise qui s’occupe de faire évoluer l’identité de l’affichage en montrant son efficacité. L’impact en terme de qualité est quantifié par des organismes de sondages comme nous pourrons le voir dans le deuxième chapitre en ce qui concerne les campagnes de La City. Selon Baudrillard, le médium publicitaire lui-même «retribalise » les consommateurs outre les facteurs de complicité et de collusion immanente…35. En somme, en choisissant un moyen de diffusion publicitaire précis, nous nous adressons déjà à une cible potentielle précise. L’affiche 4x3 est pensée pour cette dernière. Le fait qu’elle ait des atouts importants, comme la taille ou les lieux d’affichage, permettent de toucher un plus large public. C’est un média qui sensibilise particulièrement les jeunes (100% des 15-24 ans) et les femmes actives. Ils sont souvent en contact avec les images qui construisent celles de la société de consommation. 34 35 Source Affimétrie. Jean BAUDRILLARD, La société de consommation, Denoël, Paris, 1970, p.192 29 Nous ne pouvons pas éviter ce matraquage visuel. Elles sont présentes à chaque station de métro, à chaque coin de rue. Néanmoins, il faut qu’elles accrochent le regard et qu’elles ne soient pas prises comme des images fantomatiques qui font partie du paysage urbain. En général, leur importance et leur multitude font qu'elles ont un impact immédiat. Elles éveillent l’attention des personnes concernées. Pour une partie d’entre elles, l’acte de mémorisation s’établit par le consommateur ainsi que l’acte de reconnaissance. L’efficacité du média Il leur faut connaître l’impact des campagnes publicitaires et les mécanismes inconscients qui amènent le consommateur à l’achat. L’efficacité dépend en partie de l’emplacement et de l’étendue de la campagne. Les affichages durent d’une à deux semaines. Il y a les différents types d’affichages, tout en restant dans le "quatre par trois ". Les affiches peuvent être placées de façon unitaire ; par deux, ce qui permet la déclinaison d’un message ou de manière massive sur tout un quai.36 Suivant l’emplacement qu’elle a, métro, RER, bords de route… elle n’obtient pas le même nombre d’O.D.V.37. Elle n’a donc pas le même impact par rapport au consommateur. La publicité permet de véhiculer des tendances culturelles. En étant montrer sur les murs des villes, cela permet que tout un chacun puisse accéder à cette même culture. Elle ne l’uniformise pas mais donne plutôt une plus grande liberté de choix dans les différentes idées de la culture. 36 37 Source METROBUS. Occasion De Voir. 30 Par rapport à ce média, le photographe se place tel un consommateur et un réalisateur. Il doit penser à la construction de l’image qui doit être lisible très rapidement et au format spécifique du 4x3. 31 « Elle ne vante plus un produit, elle invente un emballage. Dans cette ambiance, juste reflet de la marche du temps, de la libération des mœurs et du mode de vie, l’homme s’incline devant la femme-maîtresse d’elle-même, maîtresse-femme et non plus femme-maîtresse. (…) La femme triomphe. La pub le dit. » Ginette Sainderichin, journaliste, 1986.38 38 Collectif, Mode et pub 1885-1986 Le regard deMarie-Claire, Hervé, Paris, 1986, page non numérotée. 32 RÔLE DU PHOTOGRAPHE DANS LA CONCEPTION Il faut qu’un photographe participe au processus créatif d’un projet. Il est un des maillons créatifs de la campagne publicitaire. Le photographe doit contribuer à l’évolution du concept plutôt que d’être un simple opérateur. Cela lui permet d’aller au-delà de ce qui lui est commandé. MODE D’EXPRESSION La photographie et l’absence de produit La photographie est un média de l’instant. Elle me semble en très bonne corrélation avec ce thème. La mode, phénomène éphémère, est de cette manière saisit dans son état premier, un état passager. La photographie apporte un impact plus important auprès des consommateurs, même irréelle, elle semble proche et accessible. Je ne m’engage nullement dans un historique de la photographie de mode en publicité, mais je veux servir mon projet et l’asseoir sur des idées fondées. De part et d’autre des livres, que se soit dans Une histoire de la photographie de mode39, le dictionnaire de la photographie chez Larousse ou Art Presse, spécial Art et Mode…, une même idée se dégage de l’utilisation de la photographie : servir la communication pour un produit en y reflétant un style de vie. 39 Nancy HALL-DUNCAN, Une histoire de la photographie de mode, Alpine, New-York, Février 1978. 33 La photographie commence à prendre une part dans la publicité dans les années vingt. A l’apparition de la photographie dans l’univers de la mode, la réalité photographique s’effaçait au profit de retouches sur les images. Lentement, la place de la photographie s’est construite, non plus uniquement pour montrer un produit mais pour représenter «un catalogue miniature de la culture et de la société, un révélateur des aspirations, des goûts et des interdits d’une période donnée »40. Il est étonnant de constater que cet état d’esprit date de plusieurs décennies même s’il n’est pas exploité de la même sorte. En effet en 1962, un nu fait scandale : Jean-Louis Sieff réalise une publicité pour Rosy41 (Agence Publicis) sans en montrer le produit42. Manque d’habitude ou manque d’imagination de la part des consommateurs ? Il reste un long chemin à parcourir jusqu’aux publicités de prêt à porter des années quatrevingt-dix. C’est aussi dans les années soixante que les publicitaires s’adressent à des fractions de population de mieux en mieux définies. La perception que le consommateur a du produit commence à évoluer. Il a besoin de l’essence même du produit, c’est à dire de ce qu’il peut émaner. Ce n’est donc plus seulement le produit qui est innovant mais la manière de le penser et de concevoir sa communication. Elle devient de plus en plus proche du style de vie des consommateurs. Les publicitaires ont fait progresser l’image afin de répondre à l’évolution du regard du consommateur. La communication visuelle est mieux ciblée, plus raffinée, plus spectaculaire, ainsi elle promeut de plus en 40 41 Ibidem p10. Lingerie féminine. 34 plus une philosophie pour un produit. Les publicitaires de nos jours associent le plus souvent les produits à un style de vie. Pour cela, il faut qu’ils soient reconnus auprès du consommateur de manière courante ; ils le sont à travers les publicités qui leur sont allouées43. Le consommateur a besoin de connaître l’originalité du produit, sa place dans la société et ses valeurs d’appartenance, afin d’être réconforté dans ses choix. ANALYSE DE LA COMMUNICATION DE LA CONCURRENCE Kookaï, Morgan, La City La communication visuelle d’une entreprise de mode est réalisée pour les consommateurs, mais aussi pour rester présente dans la société de consommation face aux autres marques. Elle reste très attachée à l’identité du produit et s’adresse directement à la cible. C’est actuellement une communication visuelle de proximité que produisent les créatifs. Le corpus que j’ai défini tout au long de mon projet est important pour comprendre ma propre réalisation pratique. Je voulais qu’elle puisse s’inscrire dans une réalité commerciale. Ce n’est pas seulement à travers leurs publicités mais aussi par la presse féminine que j’ai pu comprendre pourquoi ces visuels avaient une réelle emprise sur les jeunes. 42 43 Collectif, Mode et Publicité, 1885-1986, Le regard de Marie-Claire, Hervé, Paris, 1986. Cf. La société de consommation, chapitre 1. 35 Kookaï, Morgan et La City font partie des marques leaders dans l’univers du prêt à porter féminin «jeune ». D’après un indicateur de pourcentage Ipsos44, leur notoriété spontanée (sans proposition de marque) auprès des consommateurs est respectivement de 22%, 9,2% et 6,3%. Cet indicateur augmente sur Paris et L’île de France : 29%, 13,8% et 19,4%. Quant à la reconnaissance assistée (proposition de marque et reconnaissance positive ou négative), elle place Kookaï en seconde position, Morgan en quatrième et La City en cinquième sur neuf marques proposées. Les communications visuelles de ces entreprises se fondent sur un même personnage central : la femme. Si le produit n’existe plus dans ces campagnes, il est représenté au travers de l’image de la femme définie dans les visuels. Chaque femme symbolise un état d’esprit qui caractérise le produit et sa marque. Kookaï est une marque dont la communication a subi une évolution très visible tant au point de vue du concept que de la réalisation. De publicités en noirs et blancs où les adolescentes étaient de vraies pestes, elle arrive à des images colorées où la femme a mûri. Elle représente l’indépendance de la gente féminine, voire une certaine dominance. Morgan est représentative d’un romantisme ou d’un certain glamour, personnifié à travers des stars, qui sont des modèles pour nombres de jeunes aujourd’hui. La City joue de près le rôle d’ambassadrice du vêtement, en s’alignant sur le concept de Benetton. Renaud Buenerd confirme l’idée de 44 Source : dossier de presse La City 36 cette comparaison et en est fier. Benetton est une marque qui s’est affirmé au travers d’une communication révolutionnaire : des faits de société servent à la promotion de produits manufacturés. Des images qui parlent à toute une société. La City affirme qu’elle peut habiller toutes les femmes45, Benetton habille tout le monde, quelle que soit son origine. L’identité des marques se décline dans un premier temps par leur logotype. L’homme foudroyé de Kookaï signifie un certain hommes danger, qui relatif, aux approchent les "femmes Kookaï". Les petits cœurs de Morgan dégage une certaine passion. Le contraste rouge et noir a une forte connotation émotionnelle. Quant à la sobriété du logo de La City, c’est du fait qu’elle veut être une marque citadine. Le zigzag représente un toit d’usine et des coupes de tissus aux ciseaux crantés. Peut-être est-ce leur désir d’avoir une part d’universalité auprès des femmes citadines ? 45 Accroche publicitaire : La City habille toutes les femmes nus. 37 Ces marques sont développées par les agences publicitaires respectives : CLM/BBDO, Select Communication, Wolkoff et Arnodin, en ce qui concerne la saison 1998. Le photographe prend une part importante dans ces créations puisque les agences les choisissent pour leur talent. Dans un deuxième temps, l’identité se crée donc par le regard de celui-ci. Kookaï fait appel aux Guzman, Constance Hansen et Russel Peacock, de leur vrai nom, pour leur dernière campagne aux couleurs des années soixante (cf. Les campagnes Louis Vuitton, Wonderbra, TamTam…). Ce sont deux photographes qui respectent l’idée du concept, et retouchent eux-mêmes les photographies, c’est pourquoi Anne de Maupeou (Directrice de Création chez CLM/BBDO) les a choisis46. C’est une question de confiance dont il s’agit, d’un savoir-faire et d’un caractère qui leur est propre. Il est important de souligner qu’il se dégage un style très particulier de leurs images. Un rien surfait, les femmes ressemblent à des poupées Barbie et les hommes objets, parfois, à de simples pantins. Quant à Morgan, ce n’est pas anodin si elle a confié sa campagne 1997 à Dominique Isserman et celle de 1998 à Jean-Baptiste Mondino. Ce sont tous deux des photographes contemporains reconnus. Elle travaille sur des films, sur des reportages où elle gère les photographies ainsi que le texte, puis fait du portrait de stars. En publicité, nombreuses sont ses références : Sonia Rykiel, Nina Ricci, Yves Saint Laurent, Lanvin, Dior… et Kookaï. Elle eut l’oscar de la photographie de mode en 1987. Quant à Jean-Baptiste Mondino, il est directeur artistique, puis roughman, il 46 Geneviève Petit, CB News Communication, Les Guzman en abus de position dominante, n°499, Paris, 3-9 novembre 1997, pp.64-65 38 travaille sur des clips vidéo et réalise des publicités pour Yves Saint Laurent, Dim, Le Printemps… C’est pour leur polyvalence et leur notoriété que les agences les ont choisis. La campagne 1998 de La City est vu sous le regard choisi de Thierry Le Goues «pour son talent à exprimer à la fois une étrangeté extra terrestre des créatures représentées et un rappel de la féminité terrienne47 ». C’est de leur regard pertinent que dépend une campagne publicitaire, puisqu’ils réalisent généralement des images pour toute une année, voire plusieurs. Leur vision doit être celle qui attire le regard du consommateur sur l’affiche. Vendre du rêve Cette idée ressemble aux principes publicitaires employés pour les promotions des destinations balnéaires. Une similitude qui croît de plus en plus dans le monde publicitaire. Nous sommes dans une société de consommation où le public désire une part de rêve. Les entreprises de mode se définissent comme créateurs de désirs mais aussi comme ceux qui aident le consommateur à le réaliser. Chacun a une vision différente, une histoire différente pour des vêtements censés être différents ! 47 Source : dossier de presse La City 39 Si nous sommes arrivés à un moment donné à ne plus montrer le produit, c’est peutêtre qu’il ne suffisait plus à susciter de réel désir chez le consommateur. Il ne satisfaisait plus à l’identification dont nous avons parlé dans le chapitre précédent. Le client a besoin d’être proche de l’image, voire de sa propre communication image. La visuelle de Morgan est intéressante en ce qui concerne ce point de vue. C’est une marque qui laisse une grande part d’imagination au spectateur dans un domaine éternellement remis au goût du jour depuis Roméo et Juliette : l’Amour. Un thème représentatif du mois de février du fait de la St Valentin ! Il est utilisé par les médias comme un outil commercial48. « Depuis que l’amour est à la mode », le dernier slogan de Morgan entre dans la société de consommation actuelle tant au point de vue des biens que des valeurs. La preuve en est faite par Morgan. La plupart 48 Selon les certains magazines féminins de ce mois de février 1998. 40 des jeunes rêvent que leur amour sera parfait pour parer aux autres problèmes sociaux. Morgan apporte une part d’idéal depuis le début de sa communication visuelle. Depuis ces premières campagnes en 1988, elle utilise cet axe. Il y a toujours trois acteurs dans ses images : la femme, l’élément central, Morgan, l’objet du désir et un homme qui semble s’immiscer dans cette relation. Au fil du temps, il pénètre dans les visuels et prend aussi une place de plus en plus importante dans le triangle qui se forme. C’est par sa dernière campagne que Morgan précise typographiquement cette relation à trois (les trois noms se relient avec un cœur) . Pour les créatifs de cette campagne «les triangles amoureux se font et ne se déferont pas, parce que le triangle est la plus solide des géométries humaines »49. C’est une pensée qui laisse plutôt songeuse en ce qui concerne la société actuelle. Les magazines féminins nous prônent le fait que 1+1=150. Morgan nous fait réaliser que cette équation fonctionne grâce à un autre élément, qui est par conséquent, le vêtement. Il sert à cimenter une relation, c’est un intermédiaire. Sans cette magie du vêtement, ces couples n’existeraient pas. Elle a montré cette union avec le vêtement par des visages connus tels ceux de Carla Bruni, David et Estelle Hallyday, Jean Galfione, David Ginola, Laetitia Casta…51 L’homme semble jouer un rôle de plus en plus 49 Source :dossier de presse Morgan 1998. Couverture de Jalouse d’avril 1998. 51 Photographies de la campagne 1997 par Dominique Issermann, source sur le site Internet, Morgan . 50 41 important, il attise le désir féminin. Les stars masculines sont des sportifs, en général, beaux, musclés, intelligents, l’archétype, soit disant, de l' «homme parfait ». La femme doit porter un vêtement Morgan qui séduira l’homme, qu’elle-même séduire. Ces puisse pour le vêtements prennent des valeurs de séduction et de passion. Aujourd’hui, Morgan nous rappelle les figures mythiques de l’amour. Adam et Eve, Roméo et Juliette ou des histoires d’amour passionnées qui finissent pourtant tragiquement. Elle unit ces mythes à son image ; ce qui fait qu’elle en devient un. Morgan entre dans l’histoire, elle est devenue l’idée de l’amour, elle est devenue l’amour universel. L’universalité est un désir dans toutes les communications quelle que soit leur thématique (Cf. Sony, Tati), les entreprises rêvent toutes elles aussi, d’atteindre beaucoup de femmes. 42 Humour et amplification d’une certaine réalité Dans les campagnes publicitaires qui sont étudiées, la femme nous est dépeinte de plusieurs manières, mais ce n’est pas pour autant une révélation sur le monde présent. Bien au contraire, il s’agit d’amplifier la représentation de notre univers pour mieux le rendre visible. Kookaï est très certainement un des exemples le plus facile à comprendre. A ces débuts, la marque nous dépeint des jeunes filles plutôt impertinentes : les Kookaïettes. Des adolescentes qui apprennent à jouer le rôle de séductrices, tout en restant aux jeux de leurs âges. 52 « L’homme objet » de Kookaï est exprimé au point de départ par des mots : « Pour m’endormir, je compte les garçons » (campagne de1992)53. Les hommes ont commencé par être de petits moutons. En 1996, l’homme est tour à tour un chocolat, un coton, un poisson… c’est de manière visuelle et littérale que l’idée est exprimée. L’homme devient un outil, un objet de désir, et la femme s’est libérée de son emprise. C’est une femme indépendante et plutôt dominatrice qui est représentée. 52 53 Campagne publicitaire 1993. Source : dossier de presse Kookaï. 43 Les femmes n’ont pas réellement cette attitude envers la gente masculine, c’est uniquement une réplique à l’idée que l’homme pouvait se faire de la femme. La «femme-objet » appartient à un mythe, que certains hommes de notre société s’obstinent à perpétuer. Un article dans «stratégies »54 pense que «les rapports hommes/femmes n’ont pas autant changé que ça dans la réalité. La publicité est un pied de nez à cette situation qu’elle tente de bousculer ». La publicité cherche à mettre en valeur les atouts que peut avoir une femme. C’est une réponse au désir de l’égalité mouvements des sexes, aux féministes, à l’indépendance de la femme tout simplement. Quelques dizaines d’années après «mai 68», la femme se sent libre d’agir. À travers la presse féminine, c’est l’indépendance de la femme qui est une des valeurs acquises la plus importante. C’est une campagne qui semble avoir de fortes notions temporelles. Ce concept ne pouvait pas être conçu avant les années quatre-vingt-dix. C’est une idée qu’il fallait faire accepter à une génération tout entière. Elle est 54 Xavier-Vincent MORVAN, Stratégies, Tant qu’il y aura des hommes… objets, n°1015, Paris, 6/6/1997, p.8 44 entrée dans les mœurs, puisque de nos jours, les filles désirent subvenir à leur propre besoin en travaillant. La société accepte de regarder la réalité de manière humoristique, quitte à en ridiculiser certains acteurs, hommes ou femmes, afin d’obtenir un impact d’autant plus fort, que cette provocation peut faire réagir. Cependant, il est surprenant de constater que les publicités peuvent être censurées par les consommateurs eux-mêmes. La limite à la création se trouve en amont et en aval d’une réalisation. En effet, les gens n’aiment pas le ridicule, et le font savoir auprès des organismes publicitaires. Peut-être est-ce aussi bien que Kookaï n’ait pas de slogan sur un sujet concernant « l’homme objet », puisqu’il suscite des controverses. En vérité, l’image a d’autant plus de valeurs puisqu’elle s’exprime seule. Il est à noter que la campagne Kookaï 1997 a été primée par le Club des directeurs artistiques, composé d’une quarantaine de créatifs publicitaires. Elle a reçu le Grand Prix pour deux annonces presse. « En affichage comme en presse, il faut désormais parler du choc des photos. 45 Pas du poids des mots. »55 Déjà en 1996, elle reçoit le prix Epica pour la meilleure publicité. L’amplification, images dans publicitaires, les peut s’étendre à un autre domaine tel que l’univers et de considérer la marque comme interplanétaire avant d’être internationale. La femme est transformée en extraterrestre, rien d’original si ce n’est le fait que ce soit pour promouvoir un produit bien réel. Serait-ce l’influence de la «tendance X-Files » sur notre système terre ? Une série culte de ces dernières années où se mêle extraterrestre et paranormal, de quoi nous faire perdre le fil de la raison. A l’approche de l’an 2000, cette tendance intéresse beaucoup les jeunes générations56. 55 56 Christina ALONSO, Stratégies, Le print inspire les créatifs, n°1049, Paris, 27 mars 1998, p.7. Renaud BUENERD, directeur de communication de La City, mercredi 29 avril 1998. 46 Plus les publicités de mode s’adressent à une cible spécifique, plus elle donne à réfléchir sur le monde qui nous entoure. Le paradoxe est bien visible ici. Alors que les consommateurs vivent dans une société individualiste, ils cherchent à dépasser les limites des transformations physiques. La City répond à ce phénomène de mutation. Ce sont des femmes qui représentent des habitantes interplanétaires, ce qui en laisse songeur plus d'un… Ces trois campagnes publicitaires se déclinent sur une même source : celle du cliché. Autrement dit la publicité du prêt à porter s’établit d’après des constats sur leur cible. Elle recherche «Le Point Commun » qui apportera une connexion entre plusieurs consommateurs, pour attirer le plus de regards possibles. Morgan parle de l’Amour, Kookaï des femmes indépendantes et La City part du principe que elles n’ont jamais rien à se mettre pour se vêtir. 47 C’est à partir de cet état de fait que je fonde le concept que j’ai constitué pour mes recherches. En effet, ce sont des lieux communs se rapportant aux vêtements qui me permettent de construire une campagne publicitaire. Nous vivons différemment avec une base culturelle identique qui nous relie tous. C’est la culture commune qui permet à la communication d’exister et au photographe de la développer. CHAMPS CREATIFS DU PROJET Les expressions courantes L’écrit et la parole constituent tous deux notre langue, et l’enrichissent mutuellement. Tout un labyrinthe de mots qui restent propre au français. Mon projet se heurte à un problème qui est celui de la langue précisément. Il trouve ses limites aux barrières de notre langage car il faut maîtriser certains aspects du français pour comprendre ces dites expressions. Les langues étrangères n’emploie pas les mêmes métaphores pour exprimer une idée équivalente. En anglais, nous ne parlons pas d’ «être 48 comme cul et chemise » mais de s’entendre «comme larrons en foire57 » ; il n’y a pas d’histoire de «moine » dans les apparences mais «il ne faut pas juger sur les apparences parce qu’elles sont souvent trompeuses »58. La culture anglo-saxonne, moins imagée et plus pudique, limite mon concept. Les lieux communs sont partagés par tous ceux qui ont un vécu et une culture similaires. C’est une richesse commune à toute une population. En effet, ces expressions ont traversé de nombreux siècle à travers lesquels leur sens a pu se modifier. Elles suivent l’évolution de la société, les mœurs nouvelles... «plus que le langage des mots, le langage des expressions est le reflet de l’homme et de son temps, le reflet de la société. »59 Elles font parties intégrantes de notre éducation. Elles prennent le même statut que les images que nous associons aux mots : nous les apprenons inconsciemment Il s’agit de réactualiser une méthode employée au XVIème siècle par Turnèbe60 qui consistait à mettre en scène des expressions familières. Le but est de travailler avec des médias actuels, grâce à des expressions qui sont assises sur un passé socialement et significativement important. La publicité est un média qui permet de vulgariser des idées. Les expressions communes à toute une population cimentent ces dernières. Ces expressions proverbiales restent énigmatiques par leur brièveté et par leur image. Cependant, elles restent efficaces et très claires en tant que messages parce qu’elles font partie d’une mémoire collective. 57 « To be as thick as thieves ». « Appearances are sometimes deceptive, do not judge by appearances ». 59 Bernard C. GALEY, Du coq à l’âne L’Etymo-jolie 2, Tallandier, Paris, 1995, p.8 60 Adrien TOURNEBOUS (dit TURNEBE), humaniste français, 1512-1565, La comédie des proverbes 58 49 Les jeunes emploient très souvent ce genre de métaphore pour rendre plus parlant leurs idées ou tout simplement pour imager leurs paroles. Le prêt à porter ne reste pas en marge de ces idées. Actuellement nous pouvons voir dans les magasins, connus sous la marque Pimkie, des publicités sur les lieux de ventes (P.L.V.) qui utilisent des expressions détournées : «En mai, mets ce qu’il te plaît »61. Ces proverbes nous renvoient à des images comme une impression de «déjà vu » parce que cela fait partie de notre éducation. Autrement dit les publicitaires semblent jouer l’idée de proximité avec les consommateurs. Ils leur racontent des histoires. Ce n’est plus du terme «raconter » qu’il s’agit mais réellement montré. En tant que consommateurs, nous avons une certaine connaissance, ils s’en servent habilement par les images. Pour avoir une idée claire de ces réutilisations, les dernières publicités pour SFR sont très explicites : la dernière tentation de Cendrillon ou l’histoire du mobile SFR. Les publicitaires font appel à notre imaginaire. L’expression littérale Il semble que beaucoup de publicités s’expriment de manière littérale. La preuve est telle que Cendrillon s’enfuit toujours dès minuit en perdant sa chaussure. Les expressions sont semblables à des contes de fées. Elles ont pris naissance par des images. En les illustrant littéralement, je les utilise de 61 Vient du proverbe : « En mai, faits ce qu’il te plaît. » 50 manière originelle. Pour illustrer très simplement cette idée, je m’emploie à décrire l’exemple suivant : «Tiré à quatre épingles ». Il existe plusieurs hypothèses voulant expliquer le chiffre «quatre ». D’une part, il s’agirait du fait qu’il faille quatre épingles pour ajuster un tissu, d’autre part, cela correspondrait aux quatre coins d’une étoffe qui doit être fixé pour être tendu correctement.62 Je me retrouve parfaitement dans le cadre de l’illustration réalisée pour cette expression. Alain Rey, auteur du dictionnaire des expressions et locutions, souligne que «le sens des mots relie arbitrairement une forme –des sons, des lettres- à des objets de connaissances, à un découpage du monde.63 ». L’association des images et des mots, nous place dans une certaine manière d’illustrer. Le processus d’identification se retrouve à ce niveau de la conception. Les images publicitaires renvoient à d’autres images présentes ou mémorisées. Les expressions entraînent le même cheminement intellectuel. Notre esprit interprète des images d’après ces mots grâce à notre vécu visuel. Cette association d’images, de codes, apporte à la phrase une toute autre signification que leur sens premier des mots. Ceci évolue suivant les époques, suivant les modes puisque les codes changent. 62 Sophie CHANTREAU et Alain REY, Dictionnaire des expressions et locutions, Le Robert, Paris, 1989 p.365 63 Ibid. P.XVI. 51 « Une image vaut mille mots »64. Mao Tsé-toung 64 Jacques Séguéla, La Publicité, , Milan, Toulouse, 1997, p.31 52 RÔLE DU PHOTOGRAPHE DANS LA REALISATION Le photographe, selon sa part de talent et de renommée peut être assez libre dans sa créativité. Il s’agit du cas où il n’anticiperait pas sur la conception de ses photographies, en participant aux idées, aux maquettes… En les réalisant, le photographe réfléchit aux façons de faire ses prises de vues, tant en terme de faisabilité que de budgétisation. Les maquettes lui donnent une première vision globale du résultat final. Elles peuvent, par conséquent l’amener à aller au-delà des premières idées pour parvenir à un travail encore plus abouti. CONCEPTION DES MAQUETTES Exemple Pour comprendre plus facilement le rôle du photographe au travers d’un exemple précis, je reprends celui de La City. Les reproductions des maquettes m’ayant été permis, cela montre que le photographe, a su prendre du recul par rapport à certaines idées ou y coller parfaitement. Tous les visuels de cette partie ne sont que des maquettes servant à la réalisation des prises de vues montrées au chapitre 2. 53 Les maquettes créées par l’agence sont présentées à La City. Elles sont acceptées ou non. Elles sont réalisées à base de photographies déjà existantes comme le premier visuel ci-dessus, qui fut repris de la même manière avec le même modèle. D’autres sont des roughs si l’idée définie n’est pas trouvée à partir de visuels préexistants. Quant à la typographie, elle est conçue par Sammantha Kern à partir de polices retravaillées. Ce qu’il est intéressant de constater, c’est la manière dont le photographe à travailler à partir de ces maquettes. Il en a repris des éléments, mais il a bouleversé la plupart des idées. Tant au niveau colorimétrique qu’expressif. Il est très libre de créer bien que les publicitaires lui soumettent des idées. Il fait la sélection des images lui-même, la soumet à l’agence, qui accepte les choix ou non. Thierry Le Goues a réalisé des photographies sans avoir de maquettes comme support de départ. En fait, La City lui a laissé la liberté d’interpréter l’idée qu’il se faisait d’une «extra terrestre ». Elle lui a permis de réaliser sa propre vision. 54 Cependant, les maquettes ont dû l’aider dans sa recherche visuelle en lui soumettant un regard, autre que le sien. Les recherches iconographiques sont longues à faire, les maquettes lui ont servi de support pour développer sa propre vision. Le rough Avant une réalisation technique, il faut que les premières idées soient couchées sur du papier. Cela permet au photographe de savoir quelles photographies sont nécessaires à la réalisation finale du visuel. Photographies magazine a mis en place une rubrique concernant la conception d’images à partir de roughs ou de maquettes, courant 199765 : « Vu », par Sophie Bernard. Des enquêtes très intéressantes prouvent l’importance de la préconception et de la post conception, vis à vis de l’informatique. La réalisation d’un rough s’exécute après un nombre de recherches très importantes au niveau des concepts-boards, je peux traduire cet anglicisme comme un panel d’idées. Certains sont visibles en annexe numéro 2, pour comprendre l’évolution de mon travail. En réalité ce n’est pas évident de transposer un concept en image. C’est un choix de couleurs, de lumière qui va faire toute la différence. 65 Analyse d’une image de publicité pour les Galeries Lafayette dans le n°83 de mars 1997, EDF dans le n°84 d’avril, Audi dans le n°86 de juin. 55 Le rough sert pour une mise en forme et une mise en couleur assez rapide. Il permet d’affiner le concept choisi. Il est à noter que des notions de dessins m’ont été nécessaires à cet instant. Ce ne sont pas de simples compétences mais le savoir d’harmoniser des teintes qui se veulent tendres et pastels aux tendances de ces collections d’été. Les couleurs pastel font référence à l’univers dans lequel ma cible évolue. La lumière d’ambiance très diffuse semble donner un univers diaphane. Il est important de créer un volume aux idées de base. Des visuels fonctionnent relativement bien à l’aquarelle et d’autres sont plus difficiles à rendre compréhensibles techniquement à l’ordinateur. Le fait est qu’il ne s’agit plus de maîtriser le domaine sensible qu’est celui du dessin mais d’acquérir un savoir-faire numérique. Ce qui sera de plus en plus utile au photographe dans un avenir proche. 56 La Conception Assistée par Ordinateur Selon Sophie Bernard, «le numérique permet de travailler vite et bien. Histoire d’un puzzle reconstitué.66 » Les maquettes conçues par ordinateurs sont des images composites. Afin de réaliser des maquettes qui ressemblent de très près à ce que sont les idées des roughs et à ce que seront les photographies, j’effectue des recherches iconographiques. Elles se font à travers des magazines, et pour ce qu’il me reste difficile à trouver, ce sont de rapides prise de vue. Le numériseur à plat permet de travailler à même l’appareil pour des objets tels que les épingles, la corde ou la chemise. En ce qui concerne les prises de vues, une sélection est réalisée à la suite d’une numérisation sur ordinateur. En effet, certains scanners à film permettent de réaliser des planches contacts directement visibles sur l’écran. Cela signifie un gain de temps et un gain de papier. Cela permet au budget comme nous le verrons ci-dessous d’être moins élevé. La conception des maquettes est faite sur le logiciel Photoshop67, l’insertion du logo est faite sous Pagemaker68. Ceci requiert un savoir-faire au niveau des fonctions informatiques et graphiques. A ce stade du projet, les maquettes réalisées en rough n’ont plus le même impact. Pour démontrer la valeur de chaque outil, j’ai pris l’exemple le plus percutant de mes recherches plastiques. L’idée pour «être tiré à 66 Sophie BERNARD, « Vu… Des photographies, 1 image », Photographie magazine, n°86, Paris, juin 1997, p42 67 Logiciel de traitement de l’image chez Adobe. 68 Logiciel de mise en page chez Adobe. 57 quatre épingles » de l’axe 1, a de suite été retenue dès les propositions des concepts-boards. Le rough est une mise en couleur. Quant à la maquette sur ordinateur, elle n’a cessé d’évoluer vers d’autres paramètres : plus graphique, les épingles moins marquées… Tout ceci de sorte à entrer de plus en plus vers une approche minimaliste de mes visuels. Il me fallait cependant chercher à savoir si ce que je concevais prenait réellement un sens pour une femme, potentiellement consommatrice. MAQUETTES FINALES Les réactions Ces premiers tests me permettent de prendre du recul par rapport à ce qui est déjà réalisé. Dans l’ensemble, les réactions sont très positives. Je n’ai interrogé que des femmes d’une vingtaine à une quarantaine d’années. Les adolescentes ne percevraient que peu de choses dans ces visuels. Je voulais cependant voir comment une personne considérée hors de la cible interpréterait mes images. Les maquettes intriguent les femmes. Elles les trouvent intéressantes. En général, elles restent songeuses devant elles. Peut-être estce dû à leur ambiguïté : les corps cachés, montrés, en plans rapprochés, détails accentués... L’axe 1 est celui que préfère la majorité. (Cf. annexe 2) 58 En effet les gens sont toujours hésitant sur deux points de vue, les images leur paraissent saines à cause des couleurs, voire aseptisées, puisqu’ils me parlent souvent de médical mais aussi à fortes connotations sexuelles ! Les femmes les plus âgées pensent de suite qu’elles sont pour des hommes parce qu’il y a des nus féminins. A cet instant je me trouve dans la même position que La City lorsque des hommes leur demandaient des catalogues69… Je les laissais dire ce qu’elles voyaient, peu importe leurs réponses. Ensuite je leur expliquais le concept de base : les expressions courantes. L’une d’entre elle, jeune mère de famille, répondit à «l’habit ne fait pas le moine » : « ça permet de rentrer dans l’abbaye ! ». Mon concept fonctionnait puisque les idées de l’apparence sont ancrées dans notre société et utilisées à toutes sortes de fins. L’identification Les réactions s’entrecoupent avec des interrogations. Les femmes ne sont pas restées muettes à mes maquettes. Cependant, j’ai remarqué que l’influence de la société de consommation ainsi que celle des médias est venue s’interposer entre mon projet et leurs réflexions. Certaines ont vu des nœuds dans trois de mes visuels, pour elles, il s’agissait de publicité pour le régime. Elles m’ont très souvent parlé de crèmes amincissantes parce qu’il y avait de belles courbes bien dessinées 69 cf. annexe 4. 59 qui s’opposaient à de l’acuponcture ou à une corde pour se resserrer la taille. Il est vrai que beaucoup de femmes sont en période de régime comme le préconisent les magazines féminins à partir du mois d’avril. Un corps bien fait suscite de suite des réflexions sur l’apparence de la femme, sur l’entretien de celui-ci : les crèmes pour le corps, les régimes… Etrangement elles ne font pas d’associations entre l’image de l’arrondi de la fesse et la chemise. Peut-être cette dernière n’est-elle pas assez voyante ? Les choses anormales sont remarquées : la chemise nouée dans le dos, ainsi que la femme «moine », anormales mais trop réalistes pour certaines. L’abstraction d’ «être comme cul et chemise » de l’axe 1 n’est pas assez forte pour certaine, en comparaison avec les autres images. Les références à la sexualité ont souvent été évoquées, tout particulièrement sur l’axe 1, la tresse fait penser à un spermatozoïde, les fesses suscitent de petites réflexions, et notre jeune moine pointe le bout du doigt… Notre société est, hélas, rivée sur les mêmes schémas quel que soit l’âge des gens. Les modifications et choix définitifs Le fait que les femmes soient influencées à cette période de l’année par les médias me fait supposer qu’une campagne d’affichage de cette catégorie ne doit pas se faire dans les trois mois précédents les vacances d’été. 60 Les premières modifications vont se faire au niveau de l’axe 1 pour «être tiré à quatre épingles ». Ce visuel à un élément dominant qui ne permet plus de le comprendre : la tresse. Il faut que je puisse la refaire plus graphique et moins sinueuse tel un serpent. Il me semble que de la reprendre de manière plus graphique serait intéressant pour pouvoir mieux placer le logo par la suite. Cela m’a permis de conforter mon choix à la réalisation de l’axe 1. Il me semble intéressant de l'exploiter de manière graphique et plastique même si la confrontation des images dans l’axe 2 reste encore à explorer, peut-être à d’autres fins publicitaires. J’ai réalisé les photographies de manière consciente, vis à vis de consommatrices potentielles. Il m’est d’autant plus agréable de savoir que mes maquettes les laissaient songeuses. Ce qui est étrange, voire curieux, peut susciter le désir d’aller au-delà d’une simple image. L’ambiguïté laisse une part de questions, à laquelle le produit doit néanmoins répondre à l’achat. FAISABILITE Le budget Le budget dépend de plusieurs facteurs : le temps, le studio, Les mannequins, les matériaux employés dus aux faisabilités pratiques. La construction d’éléments en grandeur nature telles que les épingles nécessite plus de temps à la fabrication pré-photographique. Le fait de les réaliser 61 virtuellement prend plus de temps à la post-conception mais il n’y a pas de frais de matériaux supplémentaires. Ce qui est pris en compte à l’intérieur d’un budget pour une campagne publicitaire est plus vaste que mes limites. En effet, de la conception à la réalisation, il faut pouvoir diviser le budget de manière à financer tous les acteurs du projet. La conception se fait habituellement en agence de pub, la réalisation en studio de photographie, le stylisme, le casting, le mannequin, le maquillage, les droits… Tout ceci augmente considérablement des charges pour arriver à l’aboutissement d’un projet. Le mien, supprime un intermédiaire, l’agence. Il me reste à savoir s’il est rentable pour le photographe de proposer un concept et de le réaliser par rapport à un temps et un prix définis pour une prise de vue déjà pensée. La technique Les prises de vues que je réalise sont techniquement faisables sans autre apport que de réels matériaux. La conception d’aiguilles géantes est réalisable mais cependant coûteuse. Le coloris du bouton de manchette est quelque peu difficile à être celui qui est désiré. D’une part la période printanière n’est pas propice aux chemises à grandes manches et par conséquent à leurs accessoires. D’autre part, il faudrait pouvoir les réaliser à partir d’un design précis pour obtenir une forme et une couleur que l’on recherche absolument. Tout ceci n’étant que pure supposition, puisque le budget attribué ne me le permet pas dans le cas présent. Au niveau des prises de vues, la mise en place du matériel est pensée dès lors que mes maquettes, faites par 62 ordinateur, furent terminées. Il ne me semble pas intéressant d’expliquer le matériel employé. Ce qui importe ici, c’est d’avoir traduit de la maquette à la prise de vue, la lumière que je souhaitais avoir pour des effets précis. REALISATION Les prises de vues L’exécution technique des prises de vues s’est réalisée en trois jours. Un jour défini par maquettes. L’utilisation des maquettes est à cet instant précis d’être une base de travail. Elles me servent à la mise en place de la prise de vue : l’éclairage, l’angle de prise de vue, … Ce n’est pas un calque de la maquette mais plutôt un aboutissement technique. Ces prises de vues nécessitent à la base d’avoir un styliste en ce qui concerne le shopping des éléments utiles à la réalisation : les vêtements, le bouton de manchette, le tissu… Il faut une maquilleuse pour connaître plus précisément les produits à utiliser sur la peau et ce qui accroche plus facilement la lumière. Un casting pour les mannequins est nécessaire, même si cela n’est que très superficiel. Certaines prises de vues furent réalisées avec deux modèles différents, puis, l’image finale est choisie en comparant les résultats photographiques. 63 J’ai dû, l’instant des prises de vues, réaliser toutes ces fonctions. Tous ces détails prennent du temps à la réalisation, ainsi qu’à sa préparation. Les points positifs de ces travaux préparatoires sont multiples. D’une part je peux définir exactement ce que je veux et le réaliser, à cet instant j’établis une relation privilégiée avec mes modèles. Cela permet à la séance de se dérouler dans de bonnes conditions relationnelles. D’autre part, le fait de ne pas avoir à employer de tierces personnes pour le faire me permet d’économiser sur le budget. Qui plus est, le modèle est plus à l’aise, lorsqu’il est novice en la matière, lorsqu’il n’y a personne d’autre qui pourrait créer un stress supplémentaire à celui du photographe. Lors des prises de vues, deux phases sont importantes : la relation avec le modèle pour tenter d’obtenir un maximum de compréhension de sa part et le fait de faire évoluer le concept vers de nouveaux horizons. 64 Je pense que l’axe créatif choisi m’a permis d’aller au-delà des maquettes établies. Ce qui m’est apparue intéressant dans les trois réalisations, c’est le fait d’être partie d’une image plane, une vue de l’esprit et de me trouver face à des corps qui évoluaient dans un univers tridimensionnel. Je pouvais tourner autour de mon sujet, le faire évoluer pour trouver le meilleur point de vu par rapport à mon concept. Les images finales sont très minimalistes et léchées pour ne laisser transparaître que l’idée première : les expressions. J’ai néanmoins découvert lors de la prise de vue de «tiré à quatre épingles », un concept graphique qui m’amène à d’autres idées. Cette évaporation de la matière peut entrer dans une déclinaison complète pour une campagne. En réalité, le fait d’avoir assimilé correctement mon propre concept me permet de rebondir sur d’autres idées en matière de photographies. En effet, ma campagne me semble aboutie, tant dans ses idées qui se répondent les unes aux autres que dans sa réalisation. Même si un concept est inépuisable en terme de créativité, il me semble, malgré tout le recul que j’ai pris face à ce projet, avoir répondu photographiquement parlant, correctement. La palette graphique Si une photographie est retravaillée sur ordinateur, nous pouvons appeler cela une «technique mixte », cette expression serait tout aussi valable pour de la photographie et de la peinture. En fait, elle représente 65 l’utilisation de plusieurs moyens techniques pour la réalisation finale d’un projet. A l’origine la palette graphique ne devait être qu’un élément aidant à la réalisation. Il est apparu que cette dernière fait partie intégrante du travail. Le logotype lui-même, nécessite cet apport pour un montage définitif de l’affiche. Il est utile d’y avoir recours pour différentes retouches, ne serait-ce qu’au niveau des formes corporelles qui ne sont pas tout à fait comme on le souhaiterait. Les petits défauts disgracieux disparaissent sous la palette magique. En travaillant sur l’ordinateur, cela me permet de régler plus précisément les données colorimétriques et graphiques qui deviennent interchangeables à souhaits. Je me suis heurtée aux problèmes de sorties d’imprimante. Les tons pastel sont très difficiles à obtenir, c’est pourquoi, pour chaque visuel, j’ai changé les paramètres de contraste, de saturation et de luminosité. De cette manière j’ai pu obtenir un résultat satisfaisant. 66 La palette graphique peut amener un plus, auquel je ne pensais pas. Effectivement, elle permet d’innover en terme de création. Lors du passage de la prise de vue à l’ordinateur de nouvelles idées me sont apparues intéressantes à exploiter dans l’avenir. Peut-être dans la continuité de mon travail, pour faire évoluer les visuels. Elle permet en effet de construire l’image différemment. Après avoir tourné autour d’un sujet en trois dimensions, il s’agit de lui donner le meilleur aspect possible qu’il soit. C’est un atout pour le photographe que de pouvoir manipuler ses images de la sorte. Son travail est en perpétuelle mutation. Il est alors difficile de pouvoir dire si un projet est réellement aboutit du fait des apports graphiques. 67 CONCLUSION Tous les paramètres étudiés relèvent de l’éphémère : la mode, les codes d’une tribu, le média 4x3 et la photographie publicitaire. La publicité de prêt à porter nous le fait ressentir, puisque c’est une communication claire et rapidement assimilable. Le système de la mode s’inscrit dans la société de consommation de manière très complexe. Le photographe doit être actif face à lui pour l’appréhender de manière objective et l’intégrer dans ses réalisations. Les codes évoluent suivant les paramètres de la société elle-même. Tout ce qui entre dans les normes est déprécié, et délaissé par les personnes qui en usent. Les publicitaires suivent ce schéma pour pouvoir communiquer auprès d’elles. Ils ne les devancent pas mais tentent d’en recréer. Le média 4x3 est proche des consommateurs. Le photographe pense l’image précisément pour cette utilisation, il construit l’image de sorte à ce qu’elle soit rapidement identifiable. Le statut du photographe évolue vers de nouveaux horizons. Une formation pluridisciplinaire peut lui être utile, par exemple en art plastique pour coucher un concept sur le papier, ou en vidéo pour réaliser de bonnes mises en scène. Le photographe publicitaire de mode travaille à partir d’éléments rapidement dépréciés : le vêtement et l’image publicitaire. Il doit strictement définir les paramètres de son concept pour le réaliser au mieux. 68 De manière objective, si le photographe détient les qualifications requises et a le souhait d’entreprendre un projet, du concept à la prise de vue, c’est réalisable. Néanmoins, il faut qu’il soit entouré de personnes qui le guideront vers les dernières tendances du moment (directeur de communication, directeur artistique). En effet, concevoir un projet demande de considérer ses goûts personnels tout comme ceux qui génèrent un engouement particulier sur l’instant. L’image n’est pas facile à créer et analyser. La publicité sans slogan permet de laisser le consommateur songeur tout en lui imposant une vision du monde encore plus forte que celle définie par les mots. Cette espace de liberté est réservé à la curiosité que suscitent les «images messages ». L’image détrône la position du texte dans la communication publicitaire. C’est une revanche sur la place qu’elle détenait jusqu’alors : l’illustration d’un slogan. Maintenant, l’image est le slogan lui-même. Elle obtient un impacte de plus en plus conséquent. À l’avenir, un logotype ou un simple graphisme définira sans aucun doute la marque. L’image dépasse le statut de slogan, elle délivre une identité complète Qui plus est, il semblerait qu’il s’effectue un renversement dans les rôles que détiennent l’image et le slogan. Ce n’est plus l’image qui illustrera le slogan mais plutôt un mot qui soulignera le concept du visuel. Les mots illustreront l’image. Ils la définiront. 69 BIBLIOGRAPHIE GENERIQUES ROSENBLUM Naomie, HISTOIRE MONDIALE DE LA PHOTOGRAPHIE, Cross River Press, New-York, 1984. BARTHES Roland, MYTHOLOGIES, Seuil, Paris, 1957. BOURDIEU Pierre (sous la direction), ESSAI SUR LES USAGES SOCIAUX DE LA PHOTOGRAPHIE, Minuit, Paris, 1965. 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CIBLE : Ensemble d’une population définie selon des critères CONCEPT : Définition de l’idée forte, fondement d’une campagne. CONCEPT-BOARD : Crayonné rapide du concept : un dessin, une phrase. HEDONISME : système moral qui fait du plaisir, le principe ou le but de la vie. HYPE : Ce qui se fait de mieux dans la mode actuellement (synonyme : in, top, génial…) IDENTITE VISUELLE : Ensemble des éléments graphiques d’une marque (le nom, le logo, le symbole, la couleur, la typographie). IMAGE DE MARQUE (ou goodwill) : Synthèse des cinq éléments cités pour l’identité visuelle. Image subjective d’une entreprise, indépendante de sa renommée. Elle représente l’image de ses produits, de son image institutionnelle, de son image professionnelle, de son image relationnelle. INDIVIDUALISME : doctrine qui fait de l’individu le fondement, soit de la société, soit des valeurs morales, soit des deux. 73 JEUNE : En langage publicitaire, il s’agit d’une tranche d’âge de 18 à 25 ans. LOGO : Le logotype représente la marque par un graphisme spécifique. MAQUETTE : Dessin ou Conception Assistée par Ordinateur (CAO) au stade du projet. MARQUE : Ce qui définit de manière nominale un produit. MEDIA : Il est le véhicule du message publicitaire, l’affichage fait partie des cinq grands médias avec le cinéma, la presse, la télévision, la radio. C’est un support qui constitue à la fois un moyen d’expression et un intermédiaire transmettant un message à l’intention d’un groupe. MODE : Manière passagère d’agir, de vivre, de penser, etc., liée à un milieu, à une époque déterminée. POSTMODERNISME : Orientation du goût propre, ces vingt-cinq dernières années, caractérisée par une certaine liberté formelle, de l’éclectisme, de la fantaisie, rompant ainsi avec la rigueur sévère du style moderne. PRÊT À PORTER : Traduction littérale du «ready to wear», ce terme prend naissance en 1947, lors du premier congrès de l’industrie du vêtement féminin. PRODUIT : Article proposé sur le marché par une entreprise. ROUGH : Terme anglais qui signifie un crayonné plus ou moins élaboré, un avant projet publicitaire. SIGNATURE : Base Line, inclus le caractère d’une entreprise sans rien affirmer, en interpellant le consommateur, ex : Nous allons vous faire aimer le train (SNCF). SLOGAN : Affirmation d’une entreprise, en imposant ses dires aux consommateurs, ex : « SNCF, tout est possible ! ». SMILEY : Symbole utilisé dans le langage entre internautes dans le courrier électronique. Groupe de caractères typographiques conventionnels, 74 qui, observés sous un certain angle, de profil par exemple, ressemble à un visage, à des personnages, des objets… SOCIETE DE CONSOMMATION : Société à l’intérieur de laquelle il y a utilisation de biens et de services. TENDANCES : On peut définir ce terme en le comparant à celui de la mode. En réalité, ce sont des mouvements d’idées naissants dont l’avenir est incertain. TRIBU : Groupe de personnes qui sont tournées vers les mêmes sensibilités vestimentaires, culturelles, philosophiques… Ce terme est employé en publicité très souvent de façon à définir une certaine cible. 75 ANNEXE 1 76 BRIEF Afin de réaliser le projet au mieux, il est important que je réponde à des questions essentielles. Ces dernières sont établies dans le cadre du brief. Je me place dans le rôle d'un photographe qui appréhende son sujet en amont de sa réalisation technique. CONTEXTE Le consommateur fait de la technique du zapping, un mode de vie. C'est une personne qui recherche son identité. Pour cela, il va d’un produit de marque à un autre, d’une tendance à une autre naissante. Certains entrent dans la vie active, d'autres sont encore étudiants. Le fait de passer d'un monde scolaire au monde du travail perturbe souvent les habitudes vestimentaires, c'est une chose à ne pas omettre. A l’approche du troisième millénaire, il semble que tout bouge de plus en plus rapidement, la mode suit ce chemin. Je me place dans une situation où la marque définie ci-dessous, ne bénéficie d’aucune notoriété auprès des consommateurs. CONTRE QUOI LUTTONS-NOUS ? Nous luttons contre la méconnaissance de cette nouvelle marque. Il faut que la première campagne publicitaire frappe, interpelle et crée une reconnaissance auprès des consommateurs. Nous luttons contre la concurrence sur ce marché. La mode du prêt à porter est un secteur très concurrentiel. Les clients ne nous attendent pas. Nous luttons contre les barrières sociales du langage pour que quiconque puisse accéder à un minimum d’informations détenues par la publicité. 77 A QUI NOUS ADRESSONS-NOUS ? Nous nous adressons à une clientèle constituée de jeunes femmes qui ont une culture française. Nous nous tournons vers une génération intitulée sociologiquement : " Les jeunes ". Ce sont des personnes âgées de dix-huit à vingt-cinq ans. C'est une cible qui aime beaucoup la nature mais s’adapte aux nouvelles technologies (type : multimédia). Elle aime être dans un univers au design sophistiqué, qui reste dans la sobriété : un espace clair, minimaliste où le végétal côtoie le minéral. Elle aime la pureté et les formes simples, plutôt douces, voire rondes. Elle s’entoure de couleurs pastel ainsi que du blanc et du noir, des non-couleurs, simples et contradictoires de part leur nature physique et psychologique. C’est une personne raffinée qui se plait à découvrir toujours plus de choses. Elle est curieuse, cultivée, voire éclectique. Pour faire plus ample connaissance avec une de ces jeunes femmes, j’ai dressé un portrait chinois, succinct mais évocateur. Une matière Microfibre Un matériau Verre opaque Une couleur Bleu Une forme Ronde Un métal Argent Une pierre Aigue-marine Un élément Eau Une fleur Arum 78 Un animal Un chartreux (chat) Un fruit Kiwi Un effet Fluidité Une technologie Internet Une musique Expérimentale/ New age QUELS SONT LES POINTS FORTS ET LES POINTS FAIBLES DU PRODUIT ? Points forts Caractère Qualité Naturel Jeune Diversité de modèles Marque internationale Points faibles Inconnu Cher Entretient plus difficile Trop ciblé Choix difficiles Campagne nationale QUE VOULONS-NOUS QU'ELLES PENSENT ? Nous voulons qu’elles pensent que c’est un produit de grande qualité qui se veut différent des autres. Nous voulons qu’elles sachent que c’est un produit de leur “âge” et pour leur caractère. Les images doivent faire ressortir une certaine chaleur, une ambiguïté pour intriguer le consommateur. Il faut que les gens puissent s'interroger sur cette "nouvelle" marque. Les photographies doivent être énigmatiques pour le consommateur. Il doit être appelé, non parce qu'il s'agit de vêtements mais par la curiosité qu’ils inspirent. 79 CONCEPT DE LA CAMPAGNE PUBLICITAIRE Le concept de la campagne : Le concept de la campagne se base sur l’originalité, la différence et l’ambiguïté. Elles sont révélatrices au niveau des vêtements. Ils sont là pour cacher et découvrir la femme à chaque fois. Souples et près du corps à la fois, ils soulignent les formes sans les montrer pour intriguer encore plus. Les axes créatifs : Le support commun aux deux axes créatifs sont des expressions courantes concernant le port du vêtement. Le premier axe concerne des visuels comportant une image simple, assez graphique et monochrome. Ces visuels reflètent surtout la vie de la cible. L’ambiguïté se dessine à travers des dissimulations et des identifications inéluctables. Le deuxième axe se construit grâce à une juxtaposition de deux images, l’une concernant le corps, l’autre reflétant une certaine opposition selon la citation. Cela amène un décalage qui se retrouve notamment dans les phénomènes de mode actuels. Les trois supports pour la création visuelle sont des expressions courantes française. « L'habit ne fait pas le moine » « Être comme cul et chemise » « Être tiré à quatre épingles » 80 Le logo : Il se construit simplement, grâce au monde technologique qui entoure la cible. Il est emprunté à l’Internet pour être réemployé dans un univers de création visuelle. Il s’agit d’un smiley représentant la marque : o(8<. Les tonalités : Les couleurs suivent les tendances actuelles, des pastels jaunes, bleus, roses, en monochromie ou en ton sur ton. Ces couleurs deviennent les codes couleur de la marque, et son univers. 81 ANNEXE 2 82 CONCEPTS BOARDS/ MAQUETTES : EXPLICATIONS 83 84 « L’HABIT NE FAIT PAS LE MOINE » : INDISCERNABLE AXE 1 APPARENCE : Il s’agit de montrer que l’apparence peut être trompeuse, qu’il ne faut surtout pas s’y fier. Cela ressemble à «l’homme est une femme comme les autres70 ». Une connotation très ambiguë qui intrigue le spectateur qui devient quelque peu voyeur en voulant en savoir plus. La connivence avec le spectateur se fait grâce au mouvement de la main : « Chut ! … ». AXE 2 DUALITE : Des courbes douces suggérant une présence féminine sont mises en opposition avec une corde rêche. Un rapport de force qui donne une certaine ambiguïté à l’image. La force du nœud et la douceur du corps s’affrontent dans un même espace. L’esprit est double dans ses façons d’être. Nous sommes faits de contradictions. 70 Titre du film de Jean-Jacques Zilbermann, 1997. 85 « ÊTRE COMME CUL ET CHEMISE » : INSEPARABLE AXE 1 ALLIANCE :Un rapport intime qui s’établit entre le vêtement et le corps de manière privilégiée. Il reste la «chose » unique poser tout le temps sur le corps. C’est une longue amitié, il colle l’un à l’autre et se mettent en valeur mutuellement. Un contraste s’établit entre les formes arrondies du corps et les angles de la chemise. AXE 2 FUSION : Le vêtement se fond avec le corps, il ne forme plus qu’un. Ils forment un tout. Les formes se répondent les unes aux autres, coïncidant parfaitement pour donner un écho. Elles s’opposent et se complètent. 86 « TIRE À QUATRE EPINGLES » : IMPECCABLE AXE 1 FEMME PAPILLON : Le vêtement est un élément gracieux à l’image du papillon. Il est une protection tel un cocon. Il se déploie majestueusement sur le corps de la femme. Il la dessine, la libère et l’emprisonne. AXE 2 PROLONGEMENT : Le vêtement est une continuité pour une femme comme la femme est le prolongement du vêtement. Une prolongement forme de naît du matières si éloignées… et si proche à la fois. Les pointes contrastent avec les courbes du nu. 87 ANNEXE 3 88 TESTS -A quoi vous fait penser l’image ? -A votre avis, à qui s’adresse cette photographie ? ( jeune, moins jeune, hommes, femmes, enfants) -Que dit cette publicité ? -A votre avis pour quel type de produit est-ce ? -Comment qualifieriez-vous les vêtements ? 89 ANNEXE 4 90 Entretien avec Renaud Buenerd, directeur de la communication de La City. Cet entretien avait pour but de comprendre les relations entre l’agence de publicité, l’entreprise et les photographes, ainsi que de les situer par rapport aux tendances. Comment avez-vous briefé l’agence de publicité pour la dernière campagne ? - En réalité, il n’y avait de réel brief puisque nous travaillons avec la même agence depuis le début. La seule recommandation que nous leur avons faite est de «désérotiser » les images de La City… (étonnement de ma part) - …Ou de les «désexualiser » si vous préférez. Pourquoi ? - Les images de La City ont subi un boycotte de la part d’associations féministes. De quoi s’agissait-il ? - La dernière campagne publicitaire a provoqué des problèmes. Les associations pensaient que la jeune femme qui se trouvait dans des starting-blocks avait une position sexuelle, «la levrette ». La jeune femme qui avait un nœud dessiné dans le dos était, d’après eux, la représentation d’une femme scarifiée. Des hommes demandaient des 91 catalogues de La City… Des mères envoyaient des protestations…(alors qu’aucune partie intime n’est jamais dévoilée !) Que signifiait pour vous le fait de «désexualiser » vos publicités ? - Nous voulions faire évoluer les images de façon à créer un choc. Nous souhaitions toujours que la femme fasse partie des visuels tout en modifiant la perception que les gens en avaient. Est-ce l’agence qui vous a proposé l’idée des extra terrestres, d’après votre seul impératif ? - Oui, c’est eux qui nous ont présenté cette idée. Pourquoi l’idée d’extra terrestre vous séduit-elle ? - Nous sommes une entreprise franco-française, nous voulions aller audelà. En fait, c’est un pied de nez à notre position. Avant d’être une entreprise internationale, nous sommes une entreprise intergalactique. C’est une vague de tendance à l’approche de l’an 2000. Est-ce un peu en référence aux séries cultes telle qu’»X-Files » ? - Oui, tout à fait. Ainsi que tout ce qui tourne autour de ce type de phénomène. Les jeunes y sont très sensibles. Le fait de vouloir une certaine universalité de vos produits me fait penser à Benetton, est-ce un axe commun pour vous ? - Oui, d’ailleurs on nous compare parfois à leur communication, je trouve cela plutôt flatteur vu l’impact qu’ils ont sur le public. Vos visuels rentrent bien dans les tendances : la sobriété, l’exotisme… 92 - Tout à fait, cette image précisément à des idées de tribalisme. Hélas, certains, au sein même de l’entreprise, y ont vu une muselière (du cuir), donc une image sado-masochiste ! Quant au fond blanc, il fait partie intégrante de notre communication visuelle depuis le début, une certaine simplicité. Que signifie le logo de La City ? - (Sourire de sa part) Oui, je sais la typo n’est pas régulière. En fait, à l’époque je n’avais pas d’ordinateur et je l’ai réalisée à la main, un peu tremblante. Non, c’est plutôt sympathique, mais que représente le zigzag ? - En fait, c’est l’idée d’un coup de ciseaux, d’un toit d’usine. Je voulais qu’il représente l’idée de confection dans le prêt à porter. En revenant aux propositions de l’agence, comment vous présente-t-elle ses idées ? - Ce sont des maquettes à partir de photos existantes telle que celle prise par Nick Knight de Naomie Campbelle. Le problème étant de ne pas trop rester dans l’esprit de l’original pour ne pas être accusé de plagiat. Malgré cela nous avons fait une image qui reste très proche de la maquette pour une autre prise de vue. La même idée et le même mannequin… ! Et s’ils ne trouvent pas d’images existantes par rapport à une idée, ils la réalisent en rough. La seule de cette campagne à avoir été faite de cette sorte n’a pas été retenue au final. Donc, l’agence vous montre les maquettes et c’est vous qui décidez de ce qui se fera ou non, ainsi que les modifications à apporter ? 93 - Oui, mais je ne suis pas seul. Il y a le directeur artistique, le directeur commercial, la directrice stylistique, le directeur et moi-même. Nous choisissons les maquettes qui nous paraissent intéressantes et puis après un photographe est choisi pour les réaliser. Quel rôle joue le photographe dans votre communication visuelle ? - Nous en avons toujours qui sont de simples exécutants, mais pour les publicités, ils sont surtout choisis pour leur savoir-faire et leur caractère photographique. Si on veut le style de Sarah Moon, c’est elle qu’il faut choisir et non pas un photographe qui va travailler à la manière de Sarah Moon, comme le fait actuellement Cacharel avec un plus jeune photographe ! C’est intéressant pour nous de travailler avec un photographe qui à déjà un style, cela donne un plus à nos images. Cette année pour notre catalogue, il n’y a même pas eu de maquette. Nous avons choisi un photographe pour son talent. Le seul impératif qui lui a été donné est le thème : l’Afrique. Il choisit les vêtements, mes mannequins, les lieux… Est-ce le photographe qui fait le choix des images en définitif ? - Il fait un premier choix qu’il nous montre, puis, je reprends cette sélection pour des petits détails comme celui de l’expression sur cette photo, refusée à l’unanimité parce qu’elle faisait peur. Il a effectué des photographies qui n’avaient pas de maquette d’origine. Que pensez-vous des publicités de mode sans slogan ? - Nous ne nous plaçons pas comme les grands couturiers…Mais plutôt comme Morgan ou Kookaï… 94 C'est à ces derniers que je faisais justement allusion, pourquoi utilisez-vous encore un slogan par rapport à la tendance des images sans slogan ? - C’est pour éviter toutes sortes de confusion, nous préférons avoir encore un slogan. Les phrases qui accompagnent les visuelles justifient les campagnes publicitaires, il y eut «je n’ai rien à me mettre », la phrase donne une philosophie au message. Cette phrase a, néanmoins, suscité des remarques d’ordre sexuel à nouveau. Il faut toujours faire attention à ce que l’on dit pour que ce ne soit pas pris d’une autre manière. Pensez-vous que vous aller évoluer vers des publicités sans slogan, ni phrase ? - Peut-être, mais pour le moment il faut que La City se fasse connaître de plus en plus. Cela fait huit ans que l’entreprise existe mais nous ne communiquons que depuis deux ans et demi. Peut-être qu’il suffira un jour d’une image et du zigzag du logo pour faire une publicité de la city ? L’agence m’a dit que vous vous situez dans les dix premières marques reconnues pour sa notoriété. - Oui, si cela vous intéresse, je peux vous donner les chiffres exactement. Oui. - La City obtient un pourcentage de 6,3 pour une notoriété spontanée et de 42,5 pour une notoriété assistée. Sa notoriété s’est multiplié par 10 en 2 ans.71 71 Chiffre Ipsos d’avril 98. 95 ANNEXE 5 96 Gilles LIPOVETSKY, conférence du jeudi 16 avril 1998, 133 av. Champs Elysée Publicis. Prise de notes sur le thème : L’INDIVIDUALISME CONTEMPORAIN. (l’individualisme est un concept majeur en philosophie et sociologie) Et développement de l’humour dans les mécanismes publicitaires à ce jour (très peu développé). L’hypothèse : les sociétés occidentales européennes et Nord américaines sont entrées dans un cycle nouveau de l’histoire de l’individualisme, dans le cycle post-moderne. (tendanciellement de type narcissique). Ce cycle apparaît du fait de la conjoncture de six traits distincts. 1-culte de l’autonomie 2-culte hédoniste 3-culte du corps 4-culte psychologique et relationnel 5-culte du marché 6-faillite des grandes utopies historiques de la modernité L’individualisme n’est pas une invention récente mais elle fait partie du code génétique des sociétés modernes. Il met en jeu une invention historico-social. La société était fondée sur la hiérarchie où les hommes n’étaient pas égaux, ils ne disposaient pas de beaucoup de mobilité, de choix. La vie s’établissait suivant les ordres sociaux. 97 Selon Dunan, l’idéologie individualiste est un principe de liberté et d’égalité. Nous sommes tous, reconnus libres et autonomes de nos actes. L’atome individuel devient plus important, l’ordre social se construit, la mobilité devient permanente. On se réinvente soi-même. La société moderne repose sur la liberté individuelle et l’égalité. Cependant l’autonomie a été longtemps contre carré par des dispositifs socioculturels ancrés dans nos sociétés. Ils peuvent se compter au nombre de trois : la persistance dans les traditions religieuses, les grandes idéologies politiques (l’individu représente le zéro, le parti est le tout), les logiques disciplinaires tels que le Taylorisme où l’individu obéit au personne d’en haut. Tout est pensé par les autres. Pour commencer à voir les grandes évolutions, il faut se référer à mai 68 où la fin de la socialisation morale et autoritaire ainsi que la socialisation inégalitaire selon les sexes débutent. A cette époque, on commence à sortir de ce cadre. Un bref historique pour situer l’individualisme dans la société : 1700-1950 : cycle héroïque de la modernité, première révolution individualiste. L’individualisme est alors inachevé. 1950 :seconde révolution de l’individualisme post moderne. Il se met en place une société de consommation de masse. Toute la société de consommation repose sur le culte hédoniste. Tout d’abord le plaisir matériel puis s’étend à tout. La culture hédoniste est une théorie hyper critique de la société de consommation et l’individu devient plus qu’un simple consommateur. La société de consommation arrache les individus aux traditions, elle déclenche une désappartenance sociale et culturelle, elle permet de vivre pour soi-même. L’hédonisme culturel mine la culture sacrificielle au profit du présent. 98 La tradition appartient au passé, le moderne au future et le postmoderne est mis en place par la société de consommation pour le présent (en fonction de ses propres coordonnées). L’autonomie individuelle se forge par des transformations de la famille. Les mariages, les divorces, les familles nombreuses, les familles monoparentales, les naissances hors mariages (1/3 en France), autant de paramètres en pleine mutation. La fécondité devient maîtrisable, et la sexualité dans son ensemble est admise dès l’instant où tout le monde est consentant. La mode apparaît comme le système antinomique le plus frivole par rapport à l’individualisme du fait des canons de la beauté…Cependant la spirale de l’autonomie avance quand même, elle repose sur le système «à la mode démodée », soit un système binaire. A partir des années soixante, la minijupe décline une mode qui n’est pas faite pour tous. 1960-1970, un style jeune, une mode de la rue, un patchwork considérable, de là, il y eut des modes. C’est la logique post-moderniste de la mode de passer d’une mode à des modes. Il ne s’agit plus d’un seul créateur qui impose un style, la femme décide de choisir ou non. Un éclatement stylistique de la mode survient dans les années quatre-vingts. Au milieu des années quatre-vingtdix, ce fut le retour des jupes longues, les jeunes femmes ont acheté suivant ce qui leur allaient ou non, pas uniquement pour suivre une tendance. Le cas religieux prend une ampleur sans précédent (l’Amérique étant mise de côté), l’emprise et le contrôle sur les familles sont en perte de vitesse. Même les catholiques pratiquants se refusent à adopter les idées du pape. L’individualisme signifie ici, que les gens prennent du recul par 99 rapport à l’emprise des institutions sur la façon de penser. Cela ne signifie pas pour autant l’athéisme. L’individualisme à la carte est une nouvelle puissance de l’autonomie, désappartenance d’une collectivité et recul. Le travail, l’entreprise. En trente ans, la légitimation des femmes pour le travail. Dans une société moderne travail et loisir se répondent, le loisir inspirant le travail. L’individualisme a signifié le «j’m’en foutiste ». Ce n’est pas sa définition principale, la logique de la méritocratie passe par le travail. Il y a de plus en plus de turn-over, cela remet du sang neuf au sein des entreprises. Le sens du travail n’en est pas miné. Le culte du corps est un paradoxe. Il y a beaucoup de normes qui font partie d’une entreprise considérable comme celle de la minceur. C’est la logique de l’individualiste par rapport à des normes imposées par la société. La contradiction n’est qu’en surface, mais il y a une réelle cohésion. Les normes du corps signifient que celui-ci doit être «gagné », «entretenu ». Le corps est ce que l’on reçoit, à soi de s’en occuper. Les codes du sport entrent dans la logique du combat avec soi-même. Les modèles sont un instrument de l’autonomisation, de la maîtrise de soi. Les conséquences de l’effondrement des grandes idéologies : une dynamique qui n’a plus de vrai modèle réel externe, plus de promesse, l’impact grandissant de l’individualisme sur la montée simultanée des revendications particularistes tels que les identités nationales linguistiques, ethniques ou minorités religieuses. L’individu ne se replie pas sur lui mais il se réapproprie lui-même. 100 Qui dit individualisme, ne veut pas dire égoïsme. L’irresponsabilité est juste une des pentes de l’individualisme. Il y a des mouvements individualistes responsables comme les mouvements écologiques, le bénévolat… Il ne s’agit pas d’un effondrement des valeurs morales mais un changement : recomposition des sens, des limites. On fait reculer l’individu égoïste pour arriver à le responsabiliser. Culture individualiste : identité moderne. Humour Société disciplinaire---------distance Société de conso-------------hédoniste---------proximité-----------humour 101