Traitement chirurgical de l`obstruction urétrale

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Traitement chirurgical de l`obstruction urétrale
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MALADIE DU BAS APPAREIL URINAIRE CHEZ LE CHAT
Traitement chirurgical
de l’obstruction urétrale
Lors de formes obstructives de maladies du bas appareil urinaire
chez le chat, un traitement chirurgical, temporaire ou définitif, peut être
nécessaire afin de rétablir une diurèse normale.
Résumé
u
Certaines formes obstructives de la maladie
du bas appareil urinaire chez
le chat mâle nécessitent une
inter vention chirurgicale.
Plusieurs options chirurgicales
sont envisageables. La mise
en place d’une sonde de cystotomie antépubienne permet
de dériver temporairement les
urines pour traiter un œdème
de l’urètre et restaurer sa perméabilité. Elle est également
indiquée en traitement d’attente si les circonstances
contre-indiquent une anesthésie de longue durée.
L’urétrostomie périnéale
consiste en un abouchement
de l’urètre en amont de la
région d’étranglement naturel.
Elle est indiquée lors de rupture urétrale grave ou lors
d’obstructions récidivantes.
Dans les autres cas, les
méthodes alternatives sont à
privilégier en raison de la complexité de cette technique et
des nombreuses complications
possibles (à court ou à long
terme). Si ces interventions ont
échoué ou sont impossibles,
une urétrostomie trans- ou
antépubienne constitue une
alternative de secours.
L
a maladie du bas appareil urinaire
(MBAU) du chat est, dans un premier
temps, une urgence médicale : il s’agit
de traiter l’insuffisance rénale postrénale,
voire rénale, consécutive à l’absence de
vidanges vésicales. Le traitement chirurgical de
la MBAU ne concerne que la forme obstructive
de ce syndrome et ne s’adresse donc qu’à des
chats mâles incapables d’uriner ou qui présentent une obstruction urétrale majeure. Une fois
le traitement médical mis en place, la libération
de l’urètre et le retour à des mictions spontanées
et durables sont recherchés.
Les différents types d’examens d’imagerie
envisageables lors de MBAU ont déjà été
évoqués(1). L’examen de choix semble être la
cystoscopie, qui permet une observation directe
des voies urinaires et la détermination de
l’obstacle au flux urétral : bouchon muqueux
ou mixte, calcul, rupture, spasme urétral ou
urétrite [6]. Cette technique trouve toutefois ses
limites dans son coût (endoscope souple de très
faible diamètre) et sa faisabilité (examen
impossible chez les chats mâles de petite taille),
et est à l’heure actuelle peu accessible. La
radiographie et l’échographie sont les outils les
plus utilisés. Lors d’obstruction urétrale, la
radiographie, voire le recours à l’urétrographie
de contraste, restent les techniques les plus
accessibles pour l’exploration de l’urètre du chat
mâle et de sa vessie.
Options thérapeutiques
selon les formes obstructives
de la MBAU
1. Options thérapeutiques
par Hervé Brissot*
et Bernard Bouvy*
* Clinique Frégis,
service de chirurgie,
43, avenue Aristide-Briand,
94110 Arcueil
18
• Des traitements médicaux classiques (sondage
ou simple rinçage sous pression de l’urètre) sont
parfois suffisants pour lever certaines obstructions urétrales.
En médecine humaine, la lithotripsie est utilisée
pour éliminer des formations calculeuses sans
intervention chirurgicale conventionnelle. Le
principe de base de ces techniques est de
soumettre le calcul à une énergie qui entraîne
sa fragmentation en petits éléments. Différentes sources d’énergie sont décrites : ultrasons,
laser, ondes de choc [2]. Des études expérimentales ont été réalisées chez des animaux
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domestiques et semblent encourageantes chez
le chien. En revanche, aucune preuve de l’efficacité de ces manœuvres n’a été mise en
évidence pour l’espèce féline [2]. Ces techniques
sont, selon notre expérience, associées à des
lésions sévères de la muqueuse et du tissu
urétral (chez le chat aussi bien que chez le
chien).
• Le traitement chirurgical de la MBAU obéit
toujours à la même nécessité : permettre une
élimination facile et durable des urines afin de
rétablir un fonctionnement rénal normal (voir
l’ENCADRÉ “Traitement médical : intérêts et
limites”).
Le traitement peut être temporaire (dérivation
urinaire) ou définitif (urétrostomie périnéale).
L’intervention chirurgicale est palliative dans
certains cas (une urétrostomie périnéale élimine
les signes d’occlusion urétrale sans traiter la
cause), ou plus ou moins curative (cystotomie
lors de grosse lithiase vésicale).
2. Différentes formes obstructives
de la MBAU
Lors de MBAU obstructive, différents cas de
figure existent.
• Les radiographies ou l’échographie abdominales indiquent la présence de calculs de grande
taille dont l’élimination par les voies naturelles
est hautement improbable (PHOTO 1). Dans ce
cas, l’obstruction urétrale résulte de l’irritation
de la muqueuse urétrale par des particules
délitées de plus gros calculs, par du “sable” de
lithiase, voire par l’incarcération d’un petit
calcul. L’obstruction peut également provenir
d’un bouchon muqueux de composition uniquement protéique ou mixte (en association avec
des petits calculs ou des cristaux).
Ces obstructions sont souvent facilement levées
après un sondage ou un simple rinçage sous
pression de l’urètre, au moyen d’un cathéter
atraumatique (intraveineux ou spécifique) mis
en place dans l’urètre pénien. Une fois l’obstacle levé, une cystotomie traditionnelle permet
de retirer les calculs.
• L’urètre ne peut être désobstrué et le sondage
est impossible, voire se complique d’une rupture
urétrale.
La correction et le suivi des altérations
biologiques (insuffisance rénale) après
perfusions et cystocentèses sont nécessaires
avant d’envisager un traitement chirurgical :
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dérivation urinaire (sonde de cystostomie
antépubienne) ou urétrostomie.
• Le sondage est possible, mais une récidive
rapide survient quelques jours après le retrait
de la sonde urétrale. Un traitement chirurgical
temporaire ou définitif (dérivation urinaire,
urétrostomie) est indiqué.
• Le sondage est possible, mais la vessie
présente une incapacité à retrouver une physiologie et une contractilité normales.
Ce cas de figure est observé lors de souffrance
de la paroi vésicale due à une dilatation
marquée et de longue durée. Le muscle vésical
(le détrusor) présente alors une incapacité
(parfois définitive) à se contracter efficacement.
En cas d’échec du traitement médical habituel
(vidange manuelle de la vessie, aide à la contraction du détrusor, relâchement des sphincters
urétraux), une dérivation urinaire temporaire
est associée à un traitement qui favorise la
contraction du détrusor.
Dérivation urinaire :
la sonde de cystotomie
antépubienne
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plusieurs jours, en association avec un traitement cholinergique, favorise le retour à un
fonctionnement vésical normal [4] ;
- en urgence, lors d’états instables, lorsqu’une
cystocentèse n’est plus possible et qu’une
anesthésie de longue durée est contre-indiquée :
la mise en place d’une sonde de dérivation est
recommandée car elle ne nécessite qu’une
anesthésie de courte durée (minilaparotomie),
voire une simple anesthésie locale associée à
une analgésie générale (mise en place percutanée) [4, 12, 15].
En pratique, les auteurs de cet article réservent
ce traitement aux chats qui présentent un
premier épisode d’obstruction, dont le comportement habituel et la coopération des propriétaires minorent les risques de complication
(arrachement précoce de la sonde, utilisation
impropre, etc.).
Ces sondes sont également utilisées à titre
palliatif lors de rupture de l’urètre pénien
(diagnostiquée avec certitude par une urétrographie rétrograde). La sonde est conservée huit
jours ou davantage avant de vérifier la réparation de l’urètre (urétrographie) et de pratiquer,
si besoin, une urétrostomie.
(1) C. Soyer. Conduite à tenir
devant une obstruction
urétrale chez le chat. Point
Vét. 2004;35(243):36-39.
1. Radiographie en incidence latéro-latérale de l’abdomen distal d’un chat
mâle castré présenté pour dysurie. Des calculs radiovisibles dans la vessie
(flèches blanches) et dans l’urètre pénien (flèches rouges) sont observés.
PHOTO
A
B
C
Clichés : H. Brissot, clinique Frégis
• Envisager l’épisode obstructif de la MBAU
comme la résultante d’une obstruction
mécanique et d’une réaction œdémateuse
majeure de la muqueuse urétrale permet de
mettre en place une stratégie thérapeutique
adaptée. La persistance d’une sonde urétrale
entretient l’inflammation muqueuse locale. Bien
qu’il permette d’évacuer les urines et de libérer
l’urètre d’éléments obstructifs, le traitement par
sondage urétral ne fait donc pas régresser
l’œdème urétral [2, 15].
• Éliminer les urines sans passer par l’urètre
(par exemple grâce à la cystocentèse) permet
de limiter et de traiter l’œdème pour rétablir la
perméabilité urétrale, tout en conservant l’intégrité des voies anatomiques. Il est toutefois
impossible de pratiquer des cystocentèses à
répétition jusqu’à la résolution complète de
l’œdème urétral.
Placée directement dans la vessie, à travers la
musculature abdominale et la paroi vésicale, la
sonde de cystotomie antépubienne permet
d’obtenir un résultat semblable à celui de la
cystocentèse. Contrairement à la sonde urétrale,
la sonde de cystotomie antépubienne n’empêche pas l’animal d’uriner par les voies urétrales.
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
1. Principe
2. Indications
La dérivation urinaire est indiquée :
- lors de lésions urétrales compliquées d’extravasation urinaire. Elle permet de différer une
intervention chirurgicale urétrale lors d’infiltration urineuse du périnée [4, 12] ;
- lors d’urétrite et de spasmes urétraux en l’absence
d’éléments obstructifs identifiables [4] ;
- lors des premiers épisodes obstructifs, si le
sondage est difficile [4, 15] ;
- lors de lésion du détrusor consécutive à une
dilatation trop importante et prolongée de la
vessie. La mise au repos complète pendant
PHOTOS 2. Différentes sondes de cystotomie antépubienne.
A : sonde “queue-de-cochon”, enroulée sur elle-même en spire. Inséré dans un
“guide-trocart”, l’ensemble rigide et rectiligne peut être utilisé pour pénétrer
directement dans la vessie.
B : sonde de Pezzer à tête “en champignon”. Souvent utilisée en chirurgie
gastrique, sa mise en place nécessite une incision chirurgicale de la vessie.
C : sonde de Foley. Son extrémité est pourvue d’un ballonnet qui peut être
rempli d’eau et, ainsi, former un obstacle à la migration de l’implant. Une incision
chirurgicale de la paroi vésicale est également nécessaire pour sa mise en place.
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Traitement
médical :
intérêts et limites
A
B
C
D
! Les avantages
du traitement médical :
- pas d’anesthésie générale
longue chez un animal biologiquement instable (anesthésie
parfois nécessaire pour le
sondage) ;
- préservation des voies urinaires basses et conservation de
l’urètre pénien (préservation de
la continence et prévention des
infections ascendantes récidivantes, à long terme) ;
- moins de risques de complications graves (lacérations
urétrales, immédiates lors
du sondage et/ou lors de
réobstruction).
3. Pose d’une sonde antépubienne percutanée chez un chat.
A : un kit de sonde de type “queue-de-cochon” avec son guide-trocart est utilisé.
B : la sonde, chargée sur le trocart, est mise en place directement dans la vessie après une simple
incision cutanée. Une fois la vessie pénétrée, la sonde est repoussée dans celle-ci alors que le
trocart est retiré.
C : la sonde est fixée à la peau et reliée à un sac de récupération des urines. Un aspect
hémorragique des urines, caractéristique en cas de rétention lors de MBAU, est noté.
D : l’animal dans sa cage : un pansement abdominal et une collerette protègent le montage.
PHOTOS
3. Technique
Arbre décisionnel de la MBAU obstructive
Obstruction
Oui
Sondage
Non
Traitement médical
Cystocentèse
Sondage
Oui
Non
Réanimation
Échec du traitement
étral
èse)
écoces
Sonde de cystotomie
èse
spo
Urétrostomie périnéale
Non
Oui = Traitement médical
L’urétrostomie périnéale est nécessaire lors d’échec du traitement médical avec
des récidives fréquentes, lors de rupture urétrale grave, lors d’obstructions
pour lesquelles une dérivation urinaire n’est pas réalisable, lors de récidives
d’obstruction rebelles aux autres traitements. D’après [4].
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• La sonde de cystostomie est mise en place lors
d’une minilaparotomie sous anesthésie générale
ou par voie percutanée, sous sédation légère.
Les sondes utilisées sont de différents types :
“queue-de-cochon” (Angiomed Vesico set ®,
Angiomed-Karlsruhe-Allemagne), Pezzer, Foley
(PHOTOS 2).
• Lors de la mise en place percutanée (PHOTOS 3),
la vessie pleine est palpée et plaquée contre la
paroi abdominale. Une courte incision cutanée
est réalisée et la sonde (Foley ou “queue-decochon”), insérée dans un trocart creux, est
poussée dans la vessie, directement au travers
des plans musculaires du flanc, du péritoine et
de la paroi vésicale. La sonde est alors libérée
de son trocart et cathétérise la vessie. Pour la
sonde “queue-de-cochon”, toute la section
recourbée est placée dans la lumière vésicale.
Pour la sonde de Foley, le ballonnet est gonflé.
Une légère traction est exercée de manière à
plaquer la paroi vésicale entre le ballonnet de
la sonde et la paroi abdominale [4, 12, 15].
• Lors de la mise en place par minilaparotomie,
la vessie et la pénétration de la sonde dans sa
lumière peuvent être visualisées par l’ouverture.
L’accès permet de faire une suture en bourse
étanche autour de la sonde au niveau vésical et
de placer une série de points entre les parois
vésicale et abdominale. Ces sutures assurent un
contact plus étroit entre les deux parois, limitent
les risques de “fuites” urinaires intra-abdominales, favorisent la mise en place rapide d’un
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Clichés : C. Poncet, clinique Frégis
! Les inconvénients
du traitement médical :
- entretien de l’inflammation
urétrale par la présence d'une
sonde à demeure ;
- risques immédiats d’infections
ascendantes des voies urinaires
(infections nosocomiales
souvent sévères et multirésistantes dues aux sondages) ;
- risques de lacérations graves
de l'urètre et d’extravasation
d'urine dans l’abdomen et le
périnée (source de nécroses
tissulaires graves) ;
- temps d’hospitalisation longs.
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tissu de cicatrisation étanche et réduisent les
risques d’un délogement prématuré de l’appareillage. Les sondes rétentrices (Pezzer, Foley)
permettent de plaquer la vessie contre la paroi
abdominale et d’obtenir une meilleure
étanchéité. Elles présentent moins de risques
de délogement précoce et sont souvent préférées
[4, 12, 15].
• En association avec la mise en place de la
sonde, des rinçages vésicaux et urétraux sont
pratiqués.
Après fixation à la paroi abdominale, la sonde
est reliée à un robinet à trois voies afin d’assurer des vidanges régulières. Dans un premier
temps, un drainage continu (vingt-quatre à
quarante-huit heures) est indiqué pour permettre une “mise au repos” complète de la vessie,
puis quatre à six vidanges journalières sont
pratiquées. La sonde est retirée huit à dix jours
plus tard, lorsqu’un conduit cicatriciel étanche
s’est organisé autour de la sonde entre la vessie
et la paroi abdominale. La plaie de cystostomie
cicatrise par seconde intention.
• La mise en place d’une dérivation implique
une information du propriétaire de l’animal et
une évaluation attentive du tempérament de ce
dernier. Il convient notamment d’informer de la
nécessité de vidanger la vessie de l’animal au
moyen d’une seringue et du robinet à trois voies.
Le chat doit conserver une collerette et un
pansement “tour de corps” pour diminuer les
risques de délogement prématuré de la sonde.
Il convient également d’évaluer la tolérance
probable de l’animal équipé de la sonde. Un chat
peu docile est, par nature, un mauvais candidat
pour la mise en place d’une dérivation [12].
• Un obstacle “incrusté” ou une rupture urétrale
sont des éléments à prendre en compte lors de
la mise en place d’une sonde de dérivation. Il
convient alors d’expliquer aux propriétaires que,
lors d’absence de retour à la perméabilité des
voies urétrales, une intervention urétrale définitive est indiquée. Une telle situation ne résulte
pas d’un échec de la technique car elle permet
d’intervenir chez un animal apte à supporter
une intervention longue et délicate. L’évolution
d’une obstruction est en outre souvent difficile
à prévoir et la persistance d’un obstacle est
toujours possible malgré les traitements
adaptés.
4. Résultats
Le recours à la dérivation permet d’éviter de
procéder à une urétrostomie périnéale, donc de
s’exposer aux complications potentielles d’une
telle intervention (incontinence, infection, etc.).
Bien que le recours aux sondes de cystostomie
dans le cadre du traitement de la MBAU soit
fréquemment rapporté [4, 15, 17], il n’existe pas
d’étude rétrospective chiffrée pour permettre
d’en connaître les résultats précis. Selon notre
expérience, lorsque l’obstruction n’est pas due
à des bouchons minéralisés sévèrement incarcérés, les résultats sont satisfaisants et il est
fréquent d’observer des mictions spontanées
dès le troisième ou le quatrième jour après la
mise en place de la sonde. Une sélection
correcte des animaux qui bénéficient de ce
traitement influe sur les chances de succès [12].
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L’urétrostomie périnéale
1. Principe
L’urètre du chat mâle se caractérise par une
brutale réduction de diamètre : il passe d’un
diamètre de 5 mm (urètre pelvien) à un
diamètre inférieur à 1 mm (urètre pénien) sur
une distance de 2,5 cm environ, chez un chat
européen de 4 kg. L’obstruction urétrale se
forme au niveau de cet entonnoir. L’objectif de
l’urétrostomie périnéale est d’éliminer cet
étranglement en abouchant directement à la
peau un urètre de large diamètre.
Cette intervention chirurgicale permet de lever
l’obstacle et limite le risque de réobstruction.
En aucun cas, l’urétrostomie ne peut être
envisagée comme une intervention chirurgicale
curative de la MBAU ; son objectif est d’en
éliminer les conséquences graves que sont
l’obstruction urétrale et la rétention vésicale [4].
2. Indications
• L’épisode obstructif de la MBAU ne doit pas
être considéré comme une indication systématique d’urétrostomie périnéale car cette
intervention nécessite une anesthésie longue et
une technique minutieuse. Elle implique en
outre l’amputation d’une partie de l’urètre et
expose à des complications à court terme
(déhiscence des sutures, nécroses cutanées par
l’infiltration sous-cutanée d’urine, infection
localisée) comme à long terme (incontinence,
infection urinaire chronique, sténose du site
opératoire) [4, 14].
• La décision opératoire intervient après avoir
envisagé l’ensemble des possibilités alternatives (traitement médical, dérivation urinaire) et
en prenant en compte la motivation et les
possibilités techniques (capacité à réaliser des
soins postopératoires, à “gérer” une sonde de
cystotomie antépubienne) et financières des
propriétaires.
• L’urétrostomie périnéale n’est pas une
intervention chirurgicale d’urgence ; il convient
de ne l’envisager qu’après la résolution des
signes généraux (insuffisance rénale) et locaux
(œdème, voire nécrose périnéale lors de rupture
urétrale et d’infiltration urineuse du tissu
conjonctif sous-cutané).
• Cette technique est indiquée [4, 14, 17] (voir
la FIGURE “Arbre décisionnel de la MBAU
obstructive”) :
- lors de rupture urétrale grave (large brèche ou
lacérations multiples) ;
- lors de récidives obstructives rebelles aux
autres traitements (sondage urétral impossible,
dérivation urinaire infructueuse) ;
- lors d’obstructions pour lesquelles une dérivation urinaire n’est pas réalisable (animal insuffisamment docile, limitation de la part des
propriétaires) ;
- lors de récidives fréquentes et d’échec du traitement médical à traiter durablement la MBAU.
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
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PHOTO 4. Vue peropératoire
d’une urétrostomie périnéale
chez un chat. Vue
rapprochée du périnée.
L’anus (A) est recouvert
par les champs opératoires,
l’animal est couché
en décubitus ventral.
p : pénis récliné dorsolatéralement selon un angle
approximatif de 45°.
ic : muscles ischiocaverneux
fixés sur l’arcade ischiatique
(ai).
f : fourreau et prépuce
retournés sur l’extrémité
distale du pénis.
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
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PHOTO 5. Vue peropératoire
d’une urétrostomie périnéale
chez un chat. Même position
que sur la PHOTO 4.
p : pénis libéré de ses
attaches ventrales et latérales
et récliné dorsalement.
ic : muscles ischiocaverneux
sectionnés ; il est possible de
passer le doigt ventralement
au pénis le long de la face
dorsale de la symphyse
pubienne délimitée
caudalement par les arcades
ischiatiques (ai).
3. Technique
• L’animal est couché en décubitus sternal, le
bassin surélevé par rapport au niveau des
épaules. L’ensemble du périnée et de la base de
la queue est tondu. Une suture en bourse est
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gbu
upp
Su
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
up
p
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
PHOTO 6. Vue peropératoire
d’une urétrostomie périnéale
chez un chat. Même position
que sur la PHOTO 4.
p : pénis récliné vers le bas
par le seul poids d’une pince
d’Allis clampée à l’extrémité
distale du prépuce.
up : urètre pénien incisé
dorsalement sur toute sa
longueur jusqu’à ce qu’une
sonde urinaire (Su) pour chien
(5 mm de diamètre) puisse
passer dans la lumière urétrale,
au niveau de l’urètre
postpubien (upp).
gbu : glandes bulbourétrales.
Si la dissection est suffisante,
l’apposition de la muqueuse à
la peau se fait sans tension.
8. Sténose d’une
urétrostomie périnéale
chez un chat.
A : anus.
La technique chirurgicale
est incorrecte : le pénis
et le fourreau n’ont pas été
amputés (flèches roses),
le site d’urétrostomie
(flèches noires) n’intéresse
que l’urètre périnéal. Il est
complètement refermé
et ne permet le passage que
de quelques gouttes d’urine.
PHOTO
22
mise en place sur l’anus et la queue est relevée
sur le dos. La zone tondue est préparée pour
l’intervention chirurgicale.
• Une incision elliptique qui englobe le scrotum
et le prépuce est pratiquée. S’il est encore entier,
l’animal est castré.
• Le pénis est complètement libéré de ses
attaches ventrales et latérales ; la section des
muscles ischiocaverneux (latéralement) est
réalisée précautionneusement. La désinsertion
de ces muscles est réalisée au plus près de l’os
pour limiter les risques d’hémorragie. Pour ce
faire, le pénis est récliné dorso-latéralement
selon un angle approximatif de 45° et du côté
opposé à la section (PHOTO 4). Cette manœuvre
permet la meilleure visualisation possible de
l’arcade ischiatique et des piliers du pénis
(racines fibreuses ischiales) [4, 8]. Le muscle
rétracteur du pénis (qui s’insère dorsalement
au pénis) est ensuite isolé et sectionné au plus
près de son attache pénienne.
• Le pénis est fixé par des adhérences fibreuses
ventrales (sur la symphyse pubienne) et dorsales.
Ventralement, il ne doit plus rester de points
d’attache et, dorsalement, les glandes bulbourétrales doivent être visualisées et mobilisées
jusqu’à la peau. Une dissection dorsale prudente
et la moins agressive possible est recommandée
afin de limiter les risques de dommages irréversibles de l’innervation urétrale (les afférences
du nerf honteux et de l’artère urétrale pénètrent
l’urètre pénien dorsalement en avant des glandes
bulbo-urétrales). Le recours à une dissection
simplement digitée, ventralement et dorsalement au pénis, permet de sentir correctement
le relâchement des tensions et limite les risques
d’un acte trop agressif et de lésions nerveuses
secondaires [4, 8] (PHOTO 5).
• Une fois la dissection terminée, la face dorsale
de l’urètre est incisée sur toute sa longueur et
le long de son plan médian à l’aide d’une lame
de bistouri (guidée par une petite sonde urétrale
pour chat de 3,5 French) ou de ciseaux ophtalmologiques (PHOTO 6).
À ce stade, il est possible de mettre directement
en évidence le bouchon obstructif et des prélèvements pour son analyse spectrophotométrique
sont pratiqués. La dissection doit être suffisante
pour obtenir l’abouchement sans tension de
l’urètre pelvien à la peau. Pour s’assurer d’un
diamètre urétral de taille suffisante (environ
5 mm), il convient de vérifier que l’urètre isolé
permet le passage d’une large sonde urinaire
pour chien ou d’une petite pince hémostatique.
Si le diamètre urétral est insuffisant ou que
l’urètre isolé ne peut pas être amené sans tension
aux bords de la plaie cutanée, la dissection
pénienne est reprise afin d’obtenir un abouchement satisfaisant [4].
• L’anastomose mucocutanée est débutée
dorsalement en alternant droite et gauche pour
obtenir un affrontement homogène des tissus. Il
n’est pas nécessaire de suturer la partie dorsale
de l’ouverture urétrale : dans un premier temps,
deux points sont mis en place dorso-latéralement
(à onze heures et une heure si l’ouverture urétrale
circulaire est comparée au cadran d’une horloge),
afin d’éviter un affaissement de la stomie. Les
points doivent être posés sans tension, compren-
Le Point Vétérinaire / N° 246 / Juin 2004 /
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
Se former / COURS /
PHOTO 7. Vue postopératoire immédiate
d’une urétrostomie périnéale chez un chat.
L’urétrostomie est suturée par des points
simples (fils monofilaments). La sonde urinaire
permet de vérifier la préservation du diamètre
urétral et la symétrie de la plaie par rapport
à l’urètre. Deux plasties cutanées, de part
et d’autre de l’urétrostomie, ouvrent la plaie
de stomie sans appliquer de traction sur les
sutures d’apposition cutanéomuqueuses.
Les caillots qui recouvrent la muqueuse
urétrale sont laissés en place pour ne pas
favoriser le saignement et risquer
d’endommager la muqueuse urétrale.
A : anus.
dre une large portion de tissu urétral et cutané
et assurer une apposition bord à bord de la
muqueuse urétrale et de la peau. Des fils de
suture monofilaments (irrésorbables ou à résorption lente), de faible taille (déc. 1,5 à 2), montés
sur des aiguilles rondes (peu traumatiques pour
la muqueuse urétrale) sont recommandés [4].
Une gouttière urétrale est créée sur 1 à 2 cm en
dessous de l’urètre pubien et le reste du corps du
pénis est amputé ( PHOTO 7). La muqueuse
urétrale est suturée à la peau en prenant soin de
spatuler le lambeau afin de limiter les risques de
sténose postopératoire (PHOTO 8).
4. Erreurs techniques et complications
• Une mauvaise apposition mucocutanée, des
sutures sous tension et le non-respect des règles
de chirurgie atraumatique (aseptie stricte,
manipulation douce des tissus mous, hémostase
systématique et utilisation minimale du bistouri
électrique) sont les principales causes d’apparition des complications locales, la sténose et
la déhiscence (PHOTO 9).
Afin de limiter ces risques, il convient donc
d’éliminer toute tension sur le site d’anastomose
et de pratiquer une hémostase soignée du plan
sous-muqueux, en particulier au niveau des
muscles ischiocaverneux. Il est possible de
limiter les tensions au niveau du site de stomie
en fixant au conjonctif sous-cutané les muscles
ischiocaverneux, voire les glandes bulbo-urétrales, au moyen de larges points en U. Une fois ces
points placés, l’urètre doit déjà être au contact
de la peau ; cette technique permet de simplement “poser” les points cutanéomuqueux [8].
• L’extravasation d’urine au niveau de la plaie
dans le conjonctif périnéal résulte d’une mauvaise
apposition mucocutanée [4, 14]. Les premiers
signes surviennent dans les quarante-huit heures :
réaction œdémateuse du périnée, douleur locale
et développement de zones de nécroses cutanées.
Des soins locaux (incisions de décharge et
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drainage) et une dérivation urinaire pendant huit
à douze jours sont alors réalisés le plus précocement possible [17] (PHOTO 10).
• Lors de dissection dorsale trop agressive, des
épisodes d’incontinence fécale et urinaire ont
parfois été décrits [5, 9]. Ces manifestations
correspondraient à des épisodes temporaires
de neuropraxie(2) du nerf pelvien et rétrocèdent
spontanément.
• La dissection dorsale de l’urètre est particulièrement critique. Une diminution du tonus urétral
(lésion de l’innervation honteuse) et une perte
de longueur urétrale seraient des facteurs qui
favorisent la survenue d’infections ascendantes
des voies urinaires [9]. En outre, ce type d’infec-
Page 23
tions revêt parfois un caractère occulte : compte
tenu du diamètre urétral obtenu en postopératoire, l’animal présente moins de difficultés à
uriner et les signes cliniques d’appel des
infections urinaires (polyurie, dysurie) peuvent
être discrets [17]. Un suivi urinaire régulier (en
moyenne deux fois par an) des animaux opérés
est recommandé : contrôle cytobactériologique
des urines prélevées par cystocentèse.
• Des complications plus rares, comme des
fistules recto-urétrales ou des hernies périnéales, ont également été décrites [17]. Elles
surviennent lors d’interventions agressives pour
la libération du pénis ; un traitement chirurgical correcteur (herniorraphie, excision de la
fistule et suture rectale) est alors indiqué.
(2) Neuropraxie : interruption
momentanée des fonctions
d’un nerf légèrement lésé,
qui guérit spontanément.
À lire également
a - Troncy E. Anesthésie
locorégionale. Édition spéciale de
l’Action Vétérinaire. 2001:24-29.
Différentes variantes de cette technique ont été
proposées.
• L’utilisation d’un surjet simple ne semble pas
apporter d’améliorations majeures à la
technique décrite [8]. Classiquement, les surjets
sont considérés comme d’exécution plus rapide
que les points séparés, ils équilibrent mieux les
tensions au niveau des plaies et diminuent
l’ischémie de celles-ci. Ils présentent toutefois
l’inconvénient d’être plus fragiles.
• La possibilité de conserver l’aspect “esthétique”
normal du périnée a été évoquée, en recouvrant
l’urétrostomie de la muqueuse du prépuce
épargnée lors de l’amputation du pénis [18].
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
6. Résultats
PHOTO 9. Complication à dix jours
d’une urétrostomie périnéale chez un chat.
Même animal que sur la PHOTO 7.
A : muqueuse urétrale cicatrisée, d’aspect
normal, et tissu de granulation anormal.
L’animal présentait un état d’embonpoint
important et une forte tension au niveau
de la jonction cutanéomuqueuse distale
explique la désunion et la contamination
secondaire de la plaie. La persistance
d’un phénomène inflammatoire peut favoriser
l’apparition d’une réaction cicatricielle mal
maîtrisée, qui risque d’entraîner une sténose
du site de stomie.
B : la plaie est débridée et un lambeau
d’avancement monopédiculé (lp) ventral
est prélevé. Le débridement n’intéresse pas
la muqueuse urétrale.
C : la plastie est refermée par des points
simples sans tension. Les espaces morts
sont drainés passivement avec des drains
“Penrose”. Le lambeau est fixé et la muqueuse
urétrale est préservée de tout traumatisme
excessif.
Selon les publications, le taux d’infections vésicales chroniques en phase postopératoire varie de
22 à 45 % [10, 16]. Les complications de sténose
du site opératoire sont décrites dans 17 % (37
chats sur 204 [10]) à 75 % des cas (22 sur 29
[13]). L’incontinence urinaire est observée dans
0 à 7 % des cas. Elle est généralement réversible, sauf lors de lésion grave de l’innervation
dorsale de l’urètre [9]. Ces pourcentages élevés
sont à prendre en compte dans la décision
thérapeutique finale et, surtout, pour la sélection
des animaux et l’information des propriétaires.
Si l’urétrostomie constitue le traitement définitif de l’obstruction, elle ne traite pas la cause.
Un respect attentif des indications exactes de
cette intervention chirurgicale est nécessaire
pour optimiser les résultats cliniques et la
satisfaction des propriétaires [14].
Interventions
chirurgicales de sauvetage
1. L’urétrostomie antépubienne
! Principes
Lors d’échec des interventions chirurgicales
précédentes et d’incapacité d’une nouvelle
intervention sur les sites opératoires ou lorsque
l’urètre postpubien est fortement endommagé
(sondages impropres, sévères lésions d’incarcérations), il est possible d’aboucher l’urètre
dans sa partie antérieure (urètre antépubien,
urètre pubien) directement au niveau de l’abdomen. Il s’agit d’une urétrostomie antépubienne.
© Le Point Vétérinaire - Reproduction interdite
Cliché : C. Poncet, clinique Frégis
5. Variantes
10. Complication à huit
jours d’une urétrostomie
périnéale chez un chat. Vue
rapprochée du périnée. Une
importante extravasation
d’urine au niveau du périnée
a provoqué une nécrose
cutanée marquée.
PHOTO
Points forts
! La sonde de cystotomie
antépubienne est un moyen
efficace de traiter l’épisode
obstructif sans nécessiter
une intervention chirurgicale
urétrale définitive.
! L’urétrostomie périnéale
traite l’obstruction urétrale
de façon définitive. Elle ne
soigne toutefois pas la
maladie du bas appareil
urinaire, mais l’une
de ses conséquences,
l’obstruction urétrale.
! L’urétrostomie périnéale
nécessite un abouchement
sans tension de l’urètre
pelvien (de large diamètre)
à la peau.
! L’intervention chirurgicale
de la maladie du bas appareil
urinaire n’est jamais à réaliser
en urgence ; elle est
pratiquée après la correction
et la stabilisation des
désordres biologiques.
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Anesthésie et analgésie d’un animal qui présente
une obstruction urétrale
L’intervention est pratiquée après corrections des troubles biologiques.
- propofol(2) : 4 mg/kg, par voie intraveineuse.
! Prémédication :
- diazépam(1)(3) : 0,25 mg/kg, par voie
intraveineuse
ou
acépromazine(1) : 0,05 mg/kg, par voie
intraveineuse ou intramusculaire. Elle peut
provoquer une hypotension artérielle et une
baisse de la perfusion rénale, qui doivent
être contrôlées par une fluidothérapie
adaptée. En revanche, l’acépromazine induit
une vasodilatation de l’artériole rénale ;
- chlorhydrate de morphine(3) : 0,05 à
0,2 mg/kg, par voie sous-cutanée.
! Entretien :
- isoflurane et oxygène à 100 %.
! Induction :
- kétamine(1) : 5 mg/kg, par voie intraveineuse ;
! Analgésie :
- chlorhydrate de morphine(3) : 0,05 à
0,2 mg/kg, par voie sous-cutanée, toutes
les six heures ;
- application locale d’une pommade anesthésique (lidocaïne + prilocaïne : Emla®(3)).
! Pour les premières vingt-quatre heures
et, dès l’induction de l’anesthésie, une
analgésie péridurale peut être pratiquée en
remplacement de l’analgésie morphinique
par voie injectable : administration d’un
mélange de chlorhydrate de morphine(3))
(0,1 mg/kg) et de bupivacaïne(3) (1 mg/kg).
Cliché : H. Brissot, clinique Frégis
(1)
Molécule métabolisée par le foie et éliminée par les urines ; les doses sont
à minorer lors d’insuffisance rénale ; (2) Métabolisme périphérique au niveau
de l’endothélium vasculaire pulmonaire ; (3) Médicament à usage humain.
D’après [4, a].
11. Vue postopératoire
immédiate d’une
urétrostomie transpubienne
chez un chat (l’animal est
couché en décubitus dorsal).
Une minilaparotomie est
nécessaire pour aborder la
vessie et cathétériser l’urètre,
ce qui, dans ce cas, n’était
plus réalisable par les voies
naturelles (rupture ancienne).
Le site d’urétrostomie
(où passe une large sonde
urétrale) est plus ventral
que lors d’une intervention
chirurgicale périnéale
conventionnelle.
PHOTO
En savoir plus
Garnier E, Giry M. Les sutures
en chirurgie urétrale chez le chien
et chez le chat. Point Vét.
2002;33(228):56-57.
Les références complètes
de cet article sont
consultables sur le site
www.planete-vet.com
Rubrique formation
24
! Techniques
• Une laparotomie est pratiquée. L’urètre
proximal est repéré à la sortie du col vésical et
une longueur urétrale maximale est libérée, si
nécessaire après symphysectomie pubienne. La
partie dorsale de l’urètre est préservée afin de
limiter les risques de lésions vasculaires ou
nerveuses.
L’urètre est sectionné au niveau de sa lésion et
la partie distale du segment “sain” est glissée à
travers la ligne blanche pour être suturée directement à la peau. La ligne blanche est refermée
en laissant un peu d’espace autour de l’urètre
pour limiter les risques de striction cicatricielle
[4]. À ce stade, il convient d’éviter de provoquer
un coude trop prononcé entre l’urètre et le col
vésical, et de ne pas dépasser un angle maximal
de 45° [4, 5]. L’urètre est spatulé et abouché à la
peau selon une technique comparable à la
méthode décrite précédemment ; une attention
particulière est accordée à la limitation des
tensions sur le site de stomie.
• Pour limiter les tensions, il convient, chez
certains individus, de retirer une partie du tissu
adipeux sous-cutané caractéristique de l’abdomen
postérieur des chats [5]. Il est parfois recommandé
de laisser en place une sonde de Foley (8 French)
pour une mise au repos complète de la vessie et
afin de limiter les risques d’irritation par les urines
pendant vingt-quatre à quarante-huit heures [5].
! Phase postopératoire et complications
Les soins généraux sont identiques à ceux de
l’urétrostomie périnéale.
• Des irritations locales de la peau par des
souillures urinaires sont possibles et des soins
locaux réguliers sont recommandés (par
exemple, coupe des poils autour du site de
stomie pour limiter les macérations). Le contrôle
de l’embonpoint est nécessaire afin de limiter
l’occlusion du site par des bourrelets graisseux.
• Malgré le raccourcissement urétral, la
continence est conservée.
Le Point Vétérinaire / N° 246 / Juin 2004 /
• Comme précédemment, mais plus fréquemment, des infections urinaires chroniques sont
rapportées et un contrôle régulier des urines est
recommandé.
• La complication la plus grave est la sténose
de la stomie, soit au niveau cutané, soit au
niveau du passage de l’urètre à travers la ligne
blanche. Une nouvelle intervention pour lever
la striction est alors indispensable.
! Résultats
Différentes études rapportent des résultats
intéressants, mais obtenus à partir d’effectifs
restreints :
- Bradley [5] indique 100 % de bons résultats
cliniques chez sept chats, mais aucun suivi
bactériologique des urines n’est pratiqué ;
- plus récemment, une étude de seize cas (dont
six atteints de MBAU) présente des résultats plus
contrastés [1]. Si aucun cas de sténose n’a été
décrit au cours d’un suivi moyen de trente-deux
mois, des complications ont été notées pour
onze cas (69 %). Pour six d’entre eux, une
euthanasie a été demandée par les propriétaires (nécroses cutanées, infections récidivantes
incurables). Les auteurs estiment que le raccourcissement urétral est la principale cause de
survenue de cystites chroniques et recommandent un suivi bactériologique régulier des urines.
L’urétrostomie antépubienne est donc une
intervention de sauvetage qu’il convient de
mettre en place lors d’impossibilité de pratiquer
une urétrostomie périnéale traditionnelle [1, 4,
5], voire une urétrostomie transpubienne [3],
ou après l’échec de ces dernières.
2. L’urétrostomie transpubienne
Récemment, Bernardé et Viguier ont publié une
étude au cours de laquelle dix-neuf chats étaient
traités par urétrostomie transpubienne, avec
un abouchement de la muqueuse urétrale au
niveau de l’abdomen postérieur après une
ostectomie caudale partielle de la symphyse
pubienne [3]. Cette urétrostomie intéresse la
face ventrale de la muqueuse urétrale, souvent
moins traumatisée que la face dorsale lors de
sondages difficiles (photo 11). Cette approche
aurait pour avantage d’entraîner peu de complications à court comme à long termes (dermatites de contact, trois récidives non obstructives
de la MBAU résolues après traitement médical)
et de permettre le retour à une diurèse normale.
Initialement envisagée comme une procédure
de sauvetage en cas d’échec de l’urétrostomie
périnéale, les auteurs indiquent que cette
technique pourrait être utilisée en première
intention. Cette procédure originale limite les
indications de l’urétrostomie antépubienne.
Le traitement de l’épisode obstructif de la MBAU
est un challenge pour le praticien. Plus que tout
autre affection, la MBAU est en effet un syndrome
aux multiples facettes dont l’évolution est peu
prévisible (récidives, complications postopératoires). Une connaissance parfaite de la physiopathologie et des différentes causes d’obstruction
et une démarche systématique cohérente sont
nécessaires afin de mettre en œuvre un traitement satisfaisant pour le praticien, pour l’animal
et pour son propriétaire.
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© Le Point Vétérinaire - Reproduction interdite

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