lumières

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lumières
lumières INTÉRIEURES
otre objectif, avec le Grand
Prix du Design points de
vente, est d’inciter les commerçants, notamment indépendants, à
recourir à des professionnels pour créer,
rénover et/ou éclairer leurs espaces. A
l’heure de la revitalisation des centres
villes, le design, qui améliore l’image
d’un commerce, peut le dynamiser »,
explique Philippe Poizat, conseiller technique au commerce à la CCI de Lyon. Le
principal critère d’appréciation du jury
fut le ressenti, la sensation générée par le
décor auprès du visiteur. Marc Fontoynont,
membre du jury, chercheur à l’ENTPE, à
qui l’on doit la ligne du cahier des
charges consacrée à la lumière, estime
qu’elle a bien joué son rôle dans ce
domaine : « Le dénominateur commun
aux réalisations lauréates est que la
lumière s’est mise au service de la
séduction du produit et de l’adaptation
sensorielle. Elle invite à entrer, s’attarder, acheter. » De fait, les designers et
architectes concernés confirment : la
lumière, même si elle n’est pas le principal critère du cahier des charges, est
vitale pour l’ambiance. Visite.
“N
Photo Mediterra Design
1. Carré d’Artistes
2. Pâtisserie Bouillet
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LUX n° 228 - Mai/Juin 2004
COMMERCES
La lumière
qui donne envie
CARRÉ D’ARTISTES
L’art est dans le bac
Carré d’Artistes est un concept inédit
de vente d’œuvres d’art contemporain
en libre-service. Stéphanie Tosi, galeriste à Aix-en-Provence, l’a exporté à
Lyon. Il consiste à proposer des formats
carrés d’originaux, présentés dans des
bacs comme les bacs à disques. Un
comptoir en U supporte la caisse et permet de poser les œuvres. Le décor est
neutre, les teintes aussi (noir ou gris).
Ici, l’halogène est la règle : pour les
spots encastrés avec lampes QR111 de
70 W, qui éclairent les œuvres dans les
bacs ; et pour les suspensions placées
au-dessus du comptoir (QRB 111,
50W) suffisamment bas pour qu’il n’y
ait pas d’interférence avec l’éclairage
ambiant. « Le décor noir et gris évite
les effets réfléchissants, et l’on peut
plus facilement focaliser la lumière sur
les œuvres, commente le designer
Pascal Bodin, Mediterra Design. Le
choix des halogènes est lié au produit :
un tube fluorescent “tue” la peinture –
or il nous faut un bon IRC – et ne permet pas de focaliser sur l’œuvre. »
Touche d’animation, la plinthe du
comptoir de caisse est bordée d’un cordon de diodes blanches qui créent un
halo subtil sur le sol sombre. Pour le
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jury, le parti pris de la simplicité au service de l’art et l’originalité du projet ont
été déterminants.
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• Carré d’Artistes,
57, passage de l’Argue, Lyon 2e
• Mediterra Design,
17, rue Michelet, Nice
PÂTISSERIE BOUILLET
La (ca)bosse de la gourmandise
Fondée par Henri Bouillet en 1977,
gérée par toute la famille, la pâtisseriechocolaterie Bouillet affiche, depuis la fin
2002, un design chaleureux et luxueux.
Signé de l’architecte Richard Bagur, il
rend compte à la fois de la tradition et de
l’évolution profonde de l’offre chez ce
commerçant de la Croix-Rousse. « J’ai
fait mener une étude de marché par l’école de presse EFAP, confie-t-il, et je me suis
imprégné des personnalités du père et du
fils pour mettre en phase la tradition
paternelle et les fabrications originales du
fils. » Des grandes tables de présentation
sombres, en wengé, à plateau réfrigéré,
rappellent l’origine paternelle bressane.
La déclinaison graphique (mobilier, couleurs, formes) est liée au travail du fils
Sébastien : la base orangée, chaleureuse,
des murs, peints de cabosses, l’épure du
mobilier, les petits fours présentés dans
Photo Bagur
Le 20 mars dernier, à Lyon, 5 lauréats
ont reçu les trophées du Grand Prix
du Design points de vente, pendant
le salon Vitrines & Tendances. Ce
concours, organisé par la CCI de Lyon
et ses partenaires, récompense
des binômes commerçant/designer.
Il vise à promouvoir le design dans
l’aménagement des commerces.
Photo Boucharlat / Vavro
Photo Chaduc
lumières INTÉRIEURES
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des niches, comme des bijoux. Richard
Bagur pousse à l’extrême le souci de tout
designer : masquer le fonctionnel par l’esthétique. L’éclairage général est neutre :
des spots très basse tension ont été installés sur deux rangées au droit des vitrines
de pâtisserie à gauche et chocolats à
droite : « Il montre le produit, attire l’œil
loin du plafond et pare à la petitesse du
volume, déjà corrigée, en hauteur, par le
contraste entre le mur orangé et le plafond
clair. » La fibre optique apporte sa note de
préciosité. Elle se loge dans les niches
côté “chocolats” : niches des petits fours,
meurtrière soulignant sur toute sa longueur la vitrine, et niches carrées à bocaux
où le générateur de fibres optiques est
équipé de filtres colorés. « Nous avons
voulu donner envie de circuler, de regarder. La fibre optique introduit un équilibre
par rapport à la vitrine plus imposante
des pâtisseries, en vis-à-vis. »
■
• Bouillet
15, place de la Croix-Rousse, Lyon 4e
• Richard Bagur,
21, rue Claudia, Lyon 2e
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niveau d’éclairement sur les tables élevé
(180 lux). Pour le confort visuel, mais
aussi pour soutenir l’esthétique
dépouillée, les sources sont masquées
dans les gorges de staff périphériques du
plafond. » Une touche de rouge, couleur
de la Chine, et des lumières de bar
réchauffent l’atmosphère : au-dessus du
bar, situé au fond du restaurant, des spots
munis de sources rouges sont encastrés,
tandis que 50 % des tubes fluorescents
contribuent aussi à l’ambiance nocturne
rouge. Le designer a joué l’économie :
deux types de luminaires (réglettes fluorescentes et spots), tubes T5. « Pour ce
petit restaurant de 300 m2, nous avons
pu tenir un budget d’investissement en
éclairage très serré (1 500 €) et réduire
au minimum les coûts de fonctionnement. » Marc Fontoynont a apprécié le
confort de l’éclairage et l’utilisation de
la couleur sans ostentation.
■
• Restauration Mendo,
26, quai Augagneur, Lyon 3e
• By Boucharlat/Vavro
(Yves Boucharlat architecte,
Alain Vavro designer)
2, place du Petit Collège, Lyon 5e
RESTAURATION MENDO
Lumière sobre pour dîner zen
Restauration Mendo, situé dans un
quartier universitaire, propose des
menus asiatiques à une clientèle jeune,
mais suffisamment aisée pour s’offrir un
repas à 18 €. Sobre, minimaliste, le design joue les murs beiges, le bois blanc
pour les plateaux des longues tables
communes. Plinthes et pieds de tables en
inox renvoient les reflets d’un éclairage
totalement intégré. « La restauration est
l’une de mes spécialités, annonce Yves
Boucharlat, architecte du cabinet By
Boucharlat/Vavro. Je travaille la lumière
dès l’amont d’un projet. Dans ce restaurant, où l’on ne reste pas longtemps,
nous avons choisi un éclairage par tubes
fluorescents de température de couleur
assez chaude (2 700 K) mais avec un
LE GABION
Souper à la lueur des pierres
Pour un restaurant nommé Le Gabion,
quoi de plus naturel que de mettre en
scène les galets du Rhône à la manière
de ces ouvrages d’art, paniers de grillage
emplis de blocs de pierre, qui renforcent
berges ou forment digues ? D’autant que
la couleur claire de ces galets renvoie
une lumière particulièrement douce et
chaleureuse si l’on sait les mettre en
valeur. C’est ce qu’a fait Pierre Chaduc
pour créer l’ambiance de ce restaurant
très convivial. Dans un décor à coloration monochrome, plutôt sombre, un
mur de cailloux ovoïdes et polis reçoit la
lumière de spots halogène basse tension
de 50 W en lavage de mur. Orientables,
3. Restauration Mendo
4. Le Gabion
placés à 50 cm en retrait des panneaux
de gabion, ils diffusent un faisceau large.
Les tables sont éclairées par des spots
TBT AR 111, directifs, orientables à
360°, qui créent un centre de table très
éclairé, mais non éblouissant.
L’ambiance doit rester un peu sourde.
L’événement
Inspiré d’une idée de la ville de
Montréal, le Grand Prix du Design
points de vente est organisé par les
CCI de Lyon avec le concours
du Centre du Design Rhône-Alpes et
du Mat Electrique.
Les prix, remis dans le cadre du
salon Vitrines & Tendances, organisé
par CDO Organisation, consistaient
en un trophée et une mise en lumière
à l’occasion du 8 décembre 2004.
Le jury a, par ailleurs, décerné une
mention spéciale (voir encadré)
et un prix de la vitrine virtuelle
au point de vente Café & Co.
Des luminaires décoratifs – lampes à
poser et appliques en PVC translucide,
suspensions en tissu ornées de franges
en perles rouges – auxquels est assorti le
bouquet de fleurs du bar, donnent la note
intimiste. Tous les éclairages sont reliés
à un système de gestion informatique,
développé par l’architecte, qui déroule
quatre programmes : midi, apéritif du
soir, repas du soir, fin de repas du soir.
Pour cette réalisation, le jury a mentionné,
dans ses critères d’appréciation, la très
haute qualité de l’éclairage.
■
• Le Gabion
13, bd Eugène Deruelle, Lyon 3e
• Cabinet Chaduc
29, quai Saint-Vincent Lyon 1er
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lumières INTÉRIEURES
MARIE’M
Pierres à porter
MAISON BORIE
Le cuisinier et ses artistes
Pour sa première boutique, la créatrice de
bijoux Marie Michaud a fait appel à
Bernard Garcier, designer pour Concept
& Result. Les couleurs sont vives, l’ameublement composé de parallélépipèdes :
vitrines sur tables ou encastrées dans les
murs, comptoir. Ici, la lumière, très composée, apparaît comme l’élément majeur du
décor, sur lequel elle prend le pas. Sur fond
d’éclairage général assuré par une corniche
éclairante circulaire en tubes de néon blanc,
de petits spots TBT halogènes envoient un
flux serré sur les bijoux. Dans les vitrines
extérieures, des spots aux iodures métalliques contrebalancent l’effet des petits
halogènes qui ont tendance à “écraser” les
formes. Le designer a ensuite créé des zones
diffusantes éclairées par des diodes qui
changent très lentement de couleur au creux
de l’apostrophe de Marie’M, reproduite en
grande taille à hauteur d’appui. « La lumière attire les clients, commente-t-il. Dans
une bijouterie, il faut absolument révéler la
forme et respecter l’aspect du produit. La
couleur du bijou ne doit pas se modifier de
façon perceptible lorsqu’une cliente sort à
la lumière du jour. C’est pourquoi, pour
éclairer les créations de Marie’M, qui
mêlent or et pierres de couleur, nous avons
choisi un éclairage très blanc (plus de 4 300
K) et des sources offrant un très bon IRC. »
De nombreuses contraintes liées à la sécurité compliquent l’introduction de l’éclairage
dans les vitrines, sur le plan esthétique, et
parce qu’il faut ventiler les vitrines fermées
où l’on place des halogènes.
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• Marie’M, 18, rue Tupin, Lyon 2e
• Concept & Results,
31, rue du Président Edouard
Herriot, Lyon 2e
Mention spéciale du jury, la Maison
Borie, nouveau restaurant du chef
Manuel Viron, est à elle seule une œuvre
d’art collective, pilotée par le peintre
Pierre Gangloff et l’heureux propriétaire
des lieux. Dans cette maison bourgeoise,
réaménagée par l’architecte Renaud
Balaÿ, le cuisinier et l’artiste ont imaginé
des zones dédiées chacune à l’un des
quatre éléments : feu, terre, air, eau. Rezde-chaussée et terrasse, correspondant
aux deux premiers, viennent d’être achevés. La lumière à été confiée à l’éclairagiste François Fouilhé (T-I-L-T). Son travail tient tout entier dans les lustres, créés
sur mesure, complétés ici ou là par de la
fibre optique ou des lampes d’appoint.
Dans le salon bar, la lumière dorée invite à la transition que marque, entre le feu
de l’accueil et la terre du restaurant, cette
pièce en cuir et kraft. Elle provient de
très grosses lampes nues à incandescence, de 500 W, portées par un lustre
mêlant ferronnerie d’art et matériels
électriques de récupération (des isolateurs). Joli symbole du feu, auquel le
lustre suivant, présent dans la salle de
En savoir plus sur l’éclairage des commerces
Le Syndicat de l’Eclairage vient d’éditer une plaquette de 12 pages, coéditée
avec l’Ademe : “Eclairage des Commerces”. Elle est destinée aux installateurs,
commerçants et agenceurs de magasins. Le fil conducteur : bien éclairer pour
mieux vendre. L’art de combiner, associer, doser les sources en fonction de
l’activité constitue la base de la réussite. Catégorie par catégorie, des solutions
sont proposées pour le choix des lampes, luminaires et systèmes de gestion ;
elles sont complétées par des conseils et des règles de bonne pratique adaptés
à la diversité des commerces. La brochure est accompagnée d’un référentiel de
l’AFE, outil diagnostic en forme de questionnaire d’évaluation de l’éclairage,
pour en améliorer les performances suivant six domaines d’exigences :
ambiance, valorisation des produits, ergonomie et confort, consommation
d’énergie, maintenance et qualité des matériels. Cette brochure est disponible
gratuitement auprès du Syndicat de l’Eclairage : 01 45 05 72 72.
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Photo Concepts & results
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LUX n° 228 - Mai/Juin 2004
Photo DR
5. Marie’M
6. Maison Borie
restaurant – élément terre – n’a rien à
envier : au plafond, des racines du
Rhône, entrelacées d’une cinquantaine
de petits spots TBT sur des tiges de
6 mm, créent un ciel étoilé (3 000 K).
Un luminaire posé sur une table et composé de verres agglutinés comme un
essaim de guêpes attire l’attention vers
la cave à vins. Dans la véranda, une série
de petits spots TBT renvoie dans des
miroirs sur tiges colorés leur flux parsemant le plafond de confettis multicolores. Toutes les sources sont gradables
pour éviter l’éblouissement et pour
modifier les ambiances. Elles assurent
en même temps une parfaite visibilité :
« Ici, on change 6 fois d’assiette, chaque
assiette s’accordant en forme, en couleur avec le plat et l’élément qu’il
évoque » Réservez dès aujourd’hui. ■
• Maison Borie, 3, place A-Perrin,
Paris 7e
• Pierre Gangloff,
10, rue Jean-Jacques Rousseau,
38 Vienne
• Décoration, fabrication luminaires :
collectif Pachiderme Créations.
• Concept lumière : T-I-L-T,
François Fouilhé, www.t-i-l-t.com