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Alexandre Najjar : "Beyrouth est autre chose que la guerre"
10 Juillet 2009
Articles choisis
Josyane Savigneau - le Monde
Avocat, écrivain, responsable de L'Orient littéraire, Alexandre Najjar, 42 ans, a écrit
plusieurs romans, dont Le Roman de Beyrouth (Plon), ainsi que des essais et des
biographies. Son nouveau roman, Berlin 36, paraîtra le 1er octobre (Plon).
Quelle est la signification de la désignation, par l'Unesco, de Beyrouth comme Capitale
mondiale du livre 2009 ?
Elle est double. Cela nous permet de renouer avec notre passé glorieux. Beyrouth était
considérée comme "l'imprimerie du monde arabe". Mais c'est aussi un moyen d'effacer
l'image négative de Beyrouth, toujours assimilée à la guerre, à des tragédies... On va
ainsi montrer un visage plus culturel de cette ville où, malgré tout, l'art et les lettres se
portent bien, où la jeunesse fait montre d'une grande vitalité et où la liberté
d'expression, plus qu'ailleurs dans le monde arabe, est réelle.
La censure au Liban est rare et elle est combattue par les intellectuels et les jeunes,
qui rejettent toute forme d'obscurantisme, surtout quand il émane d'instances
religieuses ou du Hezbollah, accusé de vouloir "iraniser" le pays. Récemment, quand
on a voulu interdire le film Persépolis (de Marjane Satrapi), il y a eu un tollé et une
intervention du ministre de la culture lui-même, ce qui a obligé la sûreté générale à
revenir sur sa décision. Il fallait donc un événement pour bien montrer que Beyrouth
est autre chose que la guerre.
Pourquoi avez-vous plaidé vous-même la cause de Beyrouth à l'Unesco ?
Pour toutes les raisons que je viens d'avancer. Je voulais aussi souligner combien
Beyrouth est une ville de la diversité et de tradition ancienne de l'écrit - l'alphabet
phénicien est né au Liban -, qui a la volonté aujourd'hui de redynamiser le livre et la
lecture. Nous voulons ainsi reconstruire notre Bibliothèque nationale. Elle était au
centre-ville, place de l'Etoile, et a été détruite pendant la guerre. Heureusement, nous
avons pu sauver 300 000 volumes. Grâce à des aides de l'Union européenne et de la
Principauté de Monaco, nous les avons triés et classés. Ils sont désormais en attente
d'un lieu. Nous l'avons trouvé : face à la Banque du Liban, dans l'ancienne faculté de
droit de Sanayeh : un site ancien et agréable qui permettra une alliance de la tradition
et de la modernité. Nous allons lancer un concours d'architectes et le Qatar devrait
financer le projet à hauteur de 25 millions de dollars. Nous arrivons au terme de dix
ans de travail. Et, bien sûr, cette bibliothèque sera aussi à la pointe de toutes les
nouvelles technologies. Je crois que ce projet a été un facteur positif dans notre dossier
de candidature pour Beyrouth Capitale mondiale du livre.
Quelles villes étaient en compétition ?
Quatre, dont Bangkok, qui compte 8 millions d'habitants - deux fois la population du
Liban - et Le Cap. Le comité de sélection était constitué de représentants de l'Unesco
et des principales associations internationales de libraires et d'éditeurs. Le choix s'est
porté sur Beyrouth en raison de l'accent mis sur "la diversité culturelle, le dialogue et
la tolérance".
Depuis notre désignation, la ville et le ministère libanais de la culture se sont beaucoup
impliqués. Environ 5 millions de dollars ont été alloués à l'événement. Et un comité de
pilotage chargé de sélectionner les projets s'est constitué. Je n'en fais pas partie, mais
je suis ses travaux et je constate un réel engouement pour Beyrouth Capitale mondiale
du livre. Plus de 250 projets ont été sélectionnés. Cela dit, je déplore un peu cet
éparpillement. J'aurais préféré qu'on se concentre sur vingt ou trente projets phares.
L'un des plus intéressants est Beyrouth 39, une opération qui va conduire à l'invitation,
et au soutien, de trente-neuf écrivains du monde arabe de moins de 40 ans. En outre,
la première pierre de la Bibliothèque nationale vient d'être posée. D'autre part,
l'accent sera mis sur les deux Salons du livre - francophone et arabe - de Beyrouth qui
se tiennent chaque année en octobre et en décembre. Le Salon francophone de
Beyrouth accueillera, outre des écrivains de renom, le Prix des cinq continents de la
francophonie, et le projet "Ulysse 2009 ", initié par l'écrivain et ambassadeur à Malte
Daniel Rondeau : un navire de la marine nationale fera la jonction entre La Valette et
Beyrouth avec, à son bord, des auteurs du monde francophone.
Lokman Slim, cofondateur de la maison d'édition Dar al-Jadid, déclarait dans "Le
Monde" du 15 mai : "Dans quelle mesure le folklore de Beyrouth Capitale mondiale du
livre apportera-t-il quelque chose à l'édition arabe ?"
La réaction de M. Slim me semble sévère, car un travail sérieux a été fait. L'Etat et la
ville de Beyrouth se sont engagés financièrement. Cette manifestation apolitique et
areligieuse est menée avec le plus grand souci d'ouverture. Et l'édition y a sa place,
notamment l'édition jeunesse, qui a une grande vitalité. Certes, il y a un aspect qu'on
peut dire "folklorique", mais il n'affecte pas le sérieux de l'ensemble. Evidemment,
Beyrouth Capitale mondiale du livre ne va pas résoudre tous les problèmes de l'édition
25/11/2009 17:27
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arabe. On ne peut pas se cacher les difficultés de l'édition et de la diffusion des livres
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dans le monde arabe. Il y a trop de piratage, trop de publications à compte d'auteur
et, souvent, un manque de professionnalisme. Il y a aussi, on le sent par exemple à la
Foire de Francfort, un manque de réactivité sur le plan international, un manque de
volonté et de savoir-faire en termes de négociation des droits. Tout cela exige un
travail de fond que l'Union des éditeurs arabes devrait initier.
Choisir Beyrouth, n'était-ce pas pour l'Unesco une manière d'arbitrer la vieille rivalité
entre Beyrouth et Le Caire en matière culturelle ?
Le Caire n'a pas présenté sa candidature. L'Egypte occupe une place culturelle
importante dans le monde arabe, même si l'on constate une régression en ce domaine.
Les structures culturelles sont sclérosées, le Salon du livre du Caire est assez pauvre et
la censure continue de sévir : des dizaines de livres sont saisis ou interdits chaque
année. Au fond, la compétition n'est plus avec Le Caire, mais avec les Emirats arabes
unis. Forts de leur puissance financière, les Emirats prennent des initiatives
audacieuses et tentent de s'imposer dans le domaine culturel. Le Salon du livre d'Abou
Dhabi, par exemple, s'est associé à la Foire de Francfort et attire de plus en plus de
monde. Il ne faut pas s'en plaindre, mais Beyrouth doit tenter de se maintenir au
niveau, ne pas se laisser distancer.
Beyrouth va aussi accueillir en septembre et en octobre les Jeux de la francophonie.
Qu'en pensez-vous ?
C'est une manifestation culturelle et sportive. J'y vois un intérêt pour dynamiser la
francophonie au Liban et pour réaffirmer l'importance de la francophonie en général, à
l'heure où elle est combattue de l'extérieur (par l'anglais) et de l'intérieur (par les
défenseurs du concept de "littérature-monde" et par ceux qui, chaque année, réduisent
dangereusement les budgets destinés à promouvoir la présence du français dans le
monde). Les Jeux seront l'occasion de montrer que la francophonie est synonyme de
fraternité, de convivialité, de dialogue interculturel... autant de thèmes qui revêtent un
sens dans la capitale libanaise !
25/11/2009 17:27

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