EC.DebatsInterventionJUsticeSociale
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SES. Terminale Epreuve composée Consignes: Vous traiterez soit les deux premières parties de l'EC, soit la troisième. Durée: 2 heures. Cette épreuve comprend trois parties. 1 – Pour la partie 1 (Mobilisation des connaissances), il est demandé au candidat de répondre aux questions en faisant appel à ses connaissances personnelles dans le cadre de l’enseignement obligatoire. 2 – Pour la partie 2 (Étude d’un document), il est demandé au candidat de répondre à la question en adoptant une démarche méthodologique rigoureuse de présentation du document, de collecte et de traitement l’information. 3 – Pour la partie 3 (Raisonnement s’appuyant sur un dossier documentaire), il est demandé au candidat de traiter le sujet : - en développant un raisonnement ; - en exploitant les documents du dossier ; - en faisant appel à ses connaissances personnelles ; - en composant une introduction, un développement, une conclusion. II sera tenu compte, dans la notation, de la clarté de l'expression et du soin apporté à la présentation. Première partie : Mobilisation des connaissances (6 points) 1/ Distinguez logique d'assurance et logique d'assistance en matière de protection sociale. (3 points) 2/ Vous expliquerez, à l'aide d'un exemple, pourquoi les pouvoirs publics luttent contre les discriminations. (3 points) Deuxième partie : Étude d’un document (4 points) Vous présenterez le document puis analyserez ce qu'il nous permet d'apprendre sur la redistribution en France. Montants moyens de prélèvements et de prestations par unité de consommation en 2012 (en euros par unité de consommation) Fractiles de niveau de vie avant la redistribution D1 Q1 Q2 Q3 Revenu avant redistribution 4128 7266 15591 21474 28623 55292 72195 25649 Prélèvements -165 -333 -1010 -2066 -3501 -10707 -15886 2066 Prestations 5985 4332 1266 Revenu disponible 9948 11266 15847 736 Q4 480 Q5 335 D9 345 20145 25602 44919 56654 Ensemble 1430 23556 Remarque : D : décile 1… ; Q : Quintile 1. Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un ménage dont le revenu est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante. Source : INSEE « La redistribution en 2012 ». Troisième partie : Raisonnement s’appuyant sur un dossier documentaire (10 points). En vous appuyant sur vos connaissances et le dossier documentaire, vous expliquerez à quels débats doivent faire face les pouvoirs publics dans leur action en matière de justice sociale. Document 1: Source: Piketty et al. (2012) Pour une révolution fiscale, Le Seuil. Document 2: Note: la notion de régime général fait référence à la protection sociale de la plupart des salariés, la CNAM est branche maladie de la sécurité sociale, la CNAV la branche vieillesse. Source: D.Lefebvre « Avis sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 » n°2298, Assemblée nationale, 15 octobre 2014. Document 3: La fraude fiscale : Remarque : Mds = milliards SES. Terminale Epreuve composée: Correction Consignes: Vous traiterez soit les deux premières parties de l'EC, soit la troisième. Durée: 2 heures. Cette épreuve comprend trois parties. 1 – Pour la partie 1 (Mobilisation des connaissances), il est demandé au candidat de répondre aux questions en faisant appel à ses connaissances personnelles dans le cadre de l’enseignement obligatoire. 2 – Pour la partie 2 (Étude d’un document), il est demandé au candidat de répondre à la question en adoptant une démarche méthodologique rigoureuse de présentation du document, de collecte et de traitement l’information. 3 – Pour la partie 3 (Raisonnement s’appuyant sur un dossier documentaire), il est demandé au candidat de traiter le sujet : - en développant un raisonnement ; - en exploitant les documents du dossier ; - en faisant appel à ses connaissances personnelles ; - en composant une introduction, un développement, une conclusion. II sera tenu compte, dans la notation, de la clarté de l'expression et du soin apporté à la présentation. Première partie : Mobilisation des connaissances (6 points) 1/ Distinguez logique d'assurance et logique d'assistance en matière de protection sociale. (3 points) Consignes: - Comme l'indique le verbe de la question, il s'agit de distinguer les deux logiques d'Etatprovidence et non simplement de les définir l'une après l'autre. - La réponse devra être introduite (vous devrez indiquer combien de différences vous recensez entre les 2 logiques) et structurée (vous mobiliserez des connecteurs logiques). Au lendemain de la seconde guerre mondiale, s'impose en Europe une nouvelle conception de l'intervention de l'Etat, selon laquelle celui-ci doit jouer un rôle actif dans la recherche du progrès économique et social. Selon les pays, cet Etat-providence va se construire selon deux logiques différentes: l'assurance et l'assistance qui se distinguent sur six critères. Premièrement, leur objectif diffère. Dans le modèle assuranciel, il s'agit de garantir le niveau de vie des travailleurs et de leur famille en les protégeant contre les risques sociaux. Dans le cadre assistanciel, l'objectif est de réduire les inégalités entre les habitants du pays. Deuxièmement, et par conséquent, le fondement des droits n'est pas le même. Dans le premier cas, il réside dans l'emploi, dans le second au niveau de la citoyenneté. Ainsi à la solidarité professionnelle du premier s'oppose la solidarité nationale. Troisièmement, le type de prestation versée varie: si les prestations dans le modèle bismarckien sont contributives (et dépendent donc du niveau de revenu), les prestations du modèle assistanciel sont dites universelles (dépendant du niveau de risque vécu). Quatrièmement, les deux modèles changent selon leur mode de financement. L'assurance repose sur les cotisations sociales alors que l'assistance est financée par l'impôt. Cinquièmement, le type de redistribution principal mobilisé diverge: la redistribution est essentiellement horizontale ( des actifs vers les inactifs, des bien-portants vers les malades...) dans la premier modèle, alors qu'elle est surtout verticale (des riches vers les pauvres) dans le second. Ainsi, si l'objectif des deux logiques est le même (protéger la population contr les risques sociaux), l'assurance consiste à transformer des risques individuels en risques collectifs en garantissant le paiement d’une somme en cas de réalisation du risque à ceux qui ont préalablement versé une prime ou une cotisation, l’assistance protège toutes les personnes exposées à des risques sociaux, même si celles-ci n’ont pas ou peu cotisé. 2/ Vous expliquerez, à l'aide d'un exemple, pourquoi les pouvoirs publics luttent contre les discriminations. (3 points) Consignes: - Il ne s'agit pas ici simplement d'illustrer ce qu'est une discrimination. Bien sûr définir ce concept est important... mais pour expliquer en quoi il justifie l'action des pouvoirs publics. - Le rappel de ce que sont les pouvoirs publics (l'Etat) constitue un bon moyen permettant d'expliquer leurs raisons d'intervenir. Selon la Halde, une discrimination est une inégalité de traitement fondée sur un critère prohibé par la loi, comme l’origine, le sexe, le handicap etc., dans un domaine visé par la loi, comme l’emploi, le logement, l’éducation, etc. Cette inégalité illégale justifie l'intervention des institutions supposées agir au nom de l'intérêt général. En effet, le fait pour une femme par exemple d'être rémunérée moins que ses collègues masculins (alors qu'elle a le même niveau de diplôme et d'expérience qu'eux) remet en cause les trois formes d'égalité qui peuvent fonder la justice sociale dans une société. D'une part, l’égalité des droits (et notamment l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui stipule que « Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationales ou sociale, de fortune, de naissance ou de tout autre situation. »). En effet, cette discrimination salariale fondée sur le genre remet en cause le principal « à travail égal, salaire égal ». D'autre part, cette discrimination remet en cause également l'égalité des chances, puisque dès le départ et en fonction de leur sexe les individus hommes et femmes n'auront pas les mêmes probabilités d'accéder au même niveau de rémunération. Enfin, cette remise en cause de l’égalité des droits et des chances va se traduire par des inégalités de situations, en particulier des inégalités dans l’accès au logement, aux loisirs, voire face à la santé. Disposant de revenus inférieurs à ceux de leurs collègues masculins, les femmes auront par exemple plus de risques de connaître une situation de pauvreté en cas de divorce ou encore de devoir sacrifier leur carrière professionnelle au profit de leur rôle de mère. Deuxième partie : Étude d’un document (4 points) Vous présenterez le document puis analyserez ce qu'il nous permet d'apprendre sur la redistribution en France. Montants moyens de prélèvements et de prestations par unité de consommation en 2012 (en euros par unité de consommation) Fractiles de niveau de vie avant la redistribution D1 Q1 Q2 Q3 Revenu avant redistribution 4128 7266 15591 21474 28623 55292 72195 25649 Prélèvements -165 -333 -1010 -2066 -3501 -10707 -15886 2066 Prestations 5985 4332 1266 Revenu disponible 9948 11266 15847 736 Q4 480 Q5 335 D9 345 20145 25602 44919 56654 Ensemble 1430 23556 Remarque : D : décile 1… ; Q : Quintile 1. Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un ménage dont le revenu est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante. Source : INSEE « La redistribution en 2012 ». Consignes: - La présentation du document doit être la plus exhaustive possible (titre, type de document, source, unités, dates, variables...). - Si définir le terme du sujet est un plus (voire est un bon moyen de repérer la logique du document), ce sont les savoir-faire qui sont évalués dans cette partie de l'EC. Montrez donc que vous les maîtriser (lecture, calculs...) - Structurer le propos est bien sûr nécessaire, tout comme l'introduire. Le tableau à double entrée intitulé « Montants moyens de prélèvements et de prestations par unité de consommation en 2012 (en euros par unité de consommation) » a été réalisé par l'INSEE. Il croise en ligne 4 variables (le revenu avant distribution, les prélèvements obligatoires, les prestations sociales et le revenu disponible) et en colonne 7 fractiles (le premier décile, les cinq quartiles et le neuvième décile de la population française métroploitaine, limitée aux personnes vivant dans un ménage dont le revenu est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante) ainsi que l'ensemble de la population. Il nous permet premièrement de quantifier la réduction des inégalités de revenus primaires qu'a permis la redistribution dans notre pays en 2012. En effet, alors que les 10% des ménages les plus pauvres gagnaient moins de 4128 euros par uc, les 10% des ménages les plus riches percevaient au moins 72195 euros par uc, soit 17,5 fois plus. Au contraire, une fois rajouter aux revenus primaires les revenus de transfert et soustraits les prélèvements obligatoires, le rapport interdécile chutait à 5,7 (9948 euros contre 56654), soit une division par 3 du niveau des inégalités. Ce tableau nous permet également d'expliquer comment une telle baisse des inégalités de revenus est atteinte. La redistribution fonctionne d'abord grâce aux prélèvements, qui sont 96,3 fois plus élevés pour les 10% des plus riches que pour les 10% les plus pauvres. Non seulement les montants prélévés sont plus importants pour les riches que pour les pauvres, mais également les taux (22% pour le décile 9, contre 4% pour D1), suggérant l'idée d'une progressivité des prélèvements obligatoires. La redistribution joue également par le niveau des prestations, qui sont 13 fois plus élevés pour les 20% de la population la plus pauvre que pour les 20% les plus riches. Ainsi, les pouvoirs publics, en prélèvant des sommes importantes (et des taux croissants) aux ménages riches et en redistribuant ces sommes collectées aux ménages les plus modestes, parviennent-ils à réduire très sensiblement les inégalités de revenus primaires dans notre pays. Troisième partie : Raisonnement s’appuyant sur un dossier documentaire (10 points). En vous appuyant sur vos connaissances et le dossier documentaire, vous expliquerez à quels débats doivent faire face les pouvoirs publics dans leur action en matière de justice sociale. Consignes: - Comme le rappelle la consigne, la troisième partie de l'EC n'est pas un commentaire de documents. Si vous devez mobiliser les documents (et donc montrer vos savoir-faire en matière de sélection et d'exploitations d'informations), vous devez d'abord commencer par opérer un brain-stormin pour réinvestir votre cours. Les documents (choisis pour leur dimension factuelle) n'interviennent que pour illustrer/ prouver les idées que vous trouvez dans le cours... - Le terme clé du sujet était « débats ». Il s'agit donc de montrer que l'intervention de l'Etat, quand bien même il est supposé agir au nom de l'intérêt général, fait l'objet de critiques et de controverses. Vous pouvez ici alors réinvestir la distinction opérée par P.Rosanvallon entre crise financière, crise d'efficacité et crise de légitimité (de l'Etat-providence)... - Ce raisonnement doit bien sûr être introduit, structuré, conclu et surtout être démonstratif. Introduction: Le 18 janvier 2016, la Cour des comptes a publié un rapport mettant en garde la dette du régime d'assurance chômage français, qui menacerait l'existence même du système. En cause un régime très généreux: un «taux de remplacement élevé par rapport aux autres pays de l'OCDE», le «plus grand nombre de chômeurs couverts», une durée maximale d'indemnisation parmi «les plus élevées» et le «montant maximal d'indemnisation (6200 euros nets par mois) le plus élevé parmi les pays comparables». Le remède alors proposé, entre autres pistes d'économies, consisterait à baisser les allocations perçus par les chômeurs indemnisés. Une telle proposition n'a pas manqué de faire réagir, certains estimant que cette décision, également évoqué par le président de la République, risquerait d'aggraver la situation des sansemplois et d'accroître les inégalités. Nous verrons que l'intervention des institutions chargées d'agir au nom de l'intérêt général fait l'objet de nombreux débats, lorsqu'elle porte sur ce qu'est la juste répartition des ressources rares dans une économie, mais également sur les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre cet idéal mais aussi sur les objectifs atteints. I- En matière de justice sociale, l'intervention des pouvoirs publics fait l'objet de débats d'abord en ce qui concerne les objectifs à atteindre... - Si on distingue trois formes d'égalité, deux grands types de justice sociale peuvent être recherchées dans une démocratie. - Aujourd'hui, l'Etat-providence serait confronté à une crise de légitimité, témoignant du fait que le voile d'ignorance sous lequel il fonctionnait s'est levé, et en raison du retour des idées libérales. (le doc 3 peut ici illustrer cette crise: la fraude fiscale témoignant d'un « ras le bol » des contribuables...) II- … mais également en ce qui concerne les moyens à mettre en oeuvre... Pour atteindre les objectifs qui leur ont été fixés par le peuple, les pouvoirs publics peuvent agir via: - la fiscalité (de nombreux choix sont à opérer: assiette, type d'impôt, progressivité ou non...) → le doc 1 peut être utilisé pour mettre en évidence le choix (assumé ?) d'une fiscalité régressive pour les très hauts revenus... - la protection sociale (opposition entre assistance et assurance) - les services collectifs gratuits (définition du périmettre de l'Etat). III- mais aussi en ce qui concerne les résultats obtenus. - Idée d'une crise financière: comptes de l'Etat soumis à un effet de ciseaux entraînant un effet boule de neige de l'endettement public. (doc 2 comme illustration). - Idée de crise d'efficacité: l'Etat peinant à atteindre ses objectifs (hausse des inégalités, du chômage, de la pauvreté), voire créant des effets pervers (critique libérale illustrée par le trop d'impôt tue l'impôt et autres trappes).