HISTORIQUE du 1 REGIMENT D`ARTILLERIE COLONIALE

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HISTORIQUE du 1 REGIMENT D`ARTILLERIE COLONIALE
HISTORIQUE
du
1er REGIMENT D'ARTILLERIE COLONIALE
1
e r
H I S T O R I Q U E D U
R E G I M E N T D ' A R T I L L E R I E
C O L O N I A L E
Des "Compagnies franches" au Régiment de "L'Orient"
Avant 1621, l'artillerie aux colonies, comme l'infanterie d'ailleurs, étaient
s e r v i e s p a r l e s "Compagnies franches de la marine".
Ces compagnies é t a i e n t mises sur pied au moment où une campagne s ' e n g a g e a i t et
l i c e n c i é e s quand la guerre é t a i t terminée. Leurs hommes ne portaient pas d ' uniforme.
Peut-être v a udr ai t- il mieux dire q u ' i l s é t a i e n t d e s aventuriers et non des soldats.
En 1622, Richelieu crée les "Compagnies Ordinaires de la marine" dont les bombardiers
étalent les Artilleurs. Ceux ci portaient sur leur coiffure la fière devise : " A l t e r post
fulmina terror" ce qui veut dire modestement : "L'autre terreur après la foudre".
Ces compagnies sont la véritable origine des Troupes coloniales
La compagnie devint successivement :
− En 1626 : le Régiment de la marine qui périt, en grande partie, dans un naufrage.
− En 1632 : le Régiment Royal-Vaisseaux;
− En 1667 : le Régiment des navires;
− En 1669 : Le Royal Marine
L'ordonnance du16 av ri l 1689 c r é a d e u x compagnies de b o m b a r d i e r s , l ' u n e pour Brest,
l ' a u t r e pour Toulon. Elle i n s t i t u e aussi tro is compagnies d'apprentis canonniers, une
peur chacun des p orts de Brest, Toulon et Rochefort. Ces c i n q compagnies sont
commandées par des o f f i c i e r s de vaisseau.
En 1675, les Bombardiers de la Marine, choisis parmi les matelots des classes, sont une caserne de Port
Louis. Leur instruction est l'objet des plus grands soins et, une fois par semaine, au moins, ils sont
exercés au jet de bombes.
L'ordonnance du 18 f é v r i e r 1692 crée l ' a r t i l l e r i e de la m a r i n e , en fusionnant les
commissaires d ' a r t i l l e r i e et les o f f i c i e r s de vaisseau des compagnies de bombardiers
et d ' a p p r e n t i s c a n o n n i e r s e n u n s e u l c o r p s , p o r t a n t l e n o m d e C o r p s d e
l'artillerie de la marine.
La première organisation de l'artillerie de la marine donne 35 o f f i c i e r s et 5
compagnies;ce corps est chargé du service de l ' a r t i l l e r i e d a n s les p o r t s , d e la
formation d e s canonnière ma r i n s , du service des mortiers dans les escadres, ainsi que
du commandement de l'artillerie dans les descentes.
Les Officiers d ' a r t i l l e r i e d e la marine sont employés dans les directions des trois grands
ports, Brest, Rochefort et Toulon, ainsi que dans celles des ports secondaires de Lorient, du
Havre et de Dunkerque.
Cette première organisation, à laquelle tant d' au t re s succéderont est appelée à durer
très longtemps; elle subsiste, sans grand changement, pendant une période de
soixante neuf années.
La marine, après avoir été négligée pendant les premières années du règne de Louis
XV et avoir subi les guerres désastreuses de 1740 et 1756, se trouve dans le plus
pitoyable état. Afin d'y remédier, Choiseul, qui est à la fois ministre de la guerre et
ministre de la marine, fusionne complètement des deux départements. Tout le détail
de l'artillerie est remis au département de la guerre. Leur choix est laissé aux officiers
servant dans l'artillerie de marine d'entrer dans les nouvelles brigades de l'artillerie de
terre créées par l'ordonnance du 5 novembre 1761; mais aucun n'accepte.
Aussi, une nouvelle ordonnance vient elle corriger la précédente en affectant à la
marine les trois nouvelles brigades d'artillerie.
Chaque brigade est composée d'un é t a t m a j o r e t de 8 compagnies dont une de bombardiers et
sept de canonniers. Les Officiers sont au nombre de 5 par compagnie,1 capitaine, 2
lieutenants en premier et 2 lieutenants en second. Les compagnies sont de 100 hommes.
Une brigade est affectée à chacun des ports de Brest, Rochefort et Toulon; une école
d'artillerie est établie dans chacun de ces villes.
Les artilleurs des brigades sont destinés à servir de chefs de pièce sur les bateaux
de guerre; en vertu de l'ordonnance du 27 juillet 1762, ils embarquent dans une la
proportion de 7 à 8 pour 10 pièces.
A la suite de la désastreuse paix de 1763, les trois brigades sont réduites à 2; la brigade de Rochefort étant
supprimée, ce port reçoit 3 compagnies de Toulon.
L'institution des brigades ne donna pas de bons résultats; "on reçut dans les brigades d'artillerie attachées
à la marine, des hommes tout à fait inexpérimentés. Quel service pouvait-on attendre de recrues ayant le
mal de mer et pouvant à peine se tenir sur leurs pieds ?"
L'ordonnance du 5 novembre 1766 rétablit les compagnies d ' a p p r e n t i s canonniers. Le
détail de l'artillerie est rendu à la marine à c o m p t e r du 1er janvier 1767, et la
séparation entre les deux départements devient dé f in it i ve par l'ordonnance du 24
septembre 1769.
L'ordonnance du 24 septembre 1769 crée le Corps royal d ' a rt il l e ri e et d'infanterie
de marine, remplacé deux ans plus tard par le Corps royal de la marine. Ce dernier se
compose de 8 régiments portant les noms de Brest, Toulon, Rochefort, Marseille,
Bayonne, Saint-Malo, Bordeaux et le Havre.
En f a i s a n t rendre au roi l ' o r d o n n a n c e du 26 décembre 1774, le Ministre Sartine revient
à l'organisation de 1692. On reconstitue les directions d'artillerie et les 3
compagnies de bombardiers qui doivent se recruter parmi les apprentis canonniers les
plus instruits et les meilleurs matelots des classes.
Les bombardiers doivent être employés sur les galiotes à bombes et même sur les
vaisseaux. Dans les descentes, ils remplissent les fonctions de grenadiers.
Cette organisation donne de bons résultats pendant la guerre de l'indépendance
américaine; les bombardiers et les canonniers de la marine se couvrent de gloire non
seulement sur mer, mais encore sur terre, notamment à la prise de Grenade (Antilles)
et au siège de Trinquemalé (Indes) .
Le Maréchal de Castries, ministre de la marine, prend, en ce qui concerne l ' A r t i l l e r i e ,
d e s mesures radicales et c o n s t i t u a n t une organisation toute différente de celles qui
précédent. Par l'ordonnance du 24 octobre 1784, il remplace les canonniers bombardiers
coloniaux, créés en 1774, par le Corps Royal de l ' A r t i l l e r i e des Colonies
L'uniforme du corps comportait : veste et culotte bleu de roi, hautes guêtres blanches.
Habit bleu de roi à parements, revers, col et épaulettes écarlates, retroussis écarlate
avec ancre et fleur de lys, chapeau bicorne avec pompon rouge et cocarde blanche.
Le drapeau est à quatre quartiers, deux v e r ts , deux rouges, séparés par une c r oi x
blanche semée de fleurs et de lys en or e t, au m i l i e u , une ancre en or.
Le premier Régiment du Corps Royal de l 'artillerie fut formé le 1 e r avril 1785 à
Port Louis et prit l'appellation du Régiment de l'Orient, dénomination
évoquant le temps où la ville , le port et la Place, port Louis, sur la rive
droite du Scorff ne comprenait que les magasins de la compagnie des
Indes.
Le Premier Régiment d'Artillerie de la Marine
Le 25 octobre 1795, une nouvelle organisation est décrétée. Il est institué un Corps
d ' a r t i l l e r i e de la marine, comprenant 7 demi brigades, 3 compagnies d'ouvriers et 4
escouades d'apprentis c a n o n n i e r s . Ces troupes réunissent les f o n c t i o n s a t t r i b u é e s
précédemment aux régiments d ' a r t i l l e r i e et d ' i n f a n t e r i e de m a r i n e .
Les soldats d ' a r t i l l e r i e d e l a m a r i n e se signalèrent par d'éminents et importants
services lors des expéditions d ' I r l a n d e (1796), de la batailla navale d'Abouklr
(1796), de la Campagne d'Egypte (I798-I801). L'artillerie de la marine particip a
également à la prise et à la défense de l ' î l e d e Malte (I798-1800). Par décret du 3
f é v r i e r 1799 elle e s t à l'honneur " pour a c t e s d ' intrép i d i t é et de dévouement dans le
combat de la corvette f r a n ç a i s e La Bayonnaise contre la frégate anglaise l'Ambuscade,
prise à l'abordage le 14 décembre 1798".
Les troupes d ' a r t i l l e ri e de la Marine q u i , d é j à en 1793 a v a i e n t été envoyées en
Vendée, y retournèrent e n c o r e , lo rs de l'insurrection de 1799. Elles furent employées à l'armée
de l'Ouest, du 21 novembre 1799 au 19 avril 1800, époque de la pacification. Ces troupes furent
ensuite destinées au corps expéditionnaire que Murat devait conduire dans le sud de
l'Italie où elles ne cessèrent de se d i s t i n g u e r .
Dans le brillant fait d'armes d'Algésiras (6 juillet 1801) les canonniers acquirent une
gloire éclatante. L'arrêté des consuls, en date du 10 août, accorde des récompenses à
de nombreux militaires de l'artillerie de marine.
Lors de l'expédition de Saint Domingue (1802-1803) les troupes d'artillerie de la marine,
embarquées en grand nombre sur l'escadre, donnèrent dans maintes circonstances
l'occasion de se distinguer. Le 20 juin1802, il fut formé un ba taillon d ' a r t i l l e r i e de la
marine, à d e s t i n a t i o n de la Martinique, et le 20 ju il le t suivant, un autre bataillon
pour la Guadeloupe. Ces troupes prirent part aux différentes actions qui eurent lieu dans
ces colonies, mais elles f u r e n t décimées par la fièvre jaune.
Par l'arrêté du 5 mai 1803, les 7demi-brigades d'artillerie de la marine sont remplacées
par 4 régiments. Ces régiments sont le 1er et le 2ème, à 4 bataillons, et les deux autres à
2.
L'état major du 1er régiment comprend :
1 colonel, 1 major, 4 chefs de bataillon, 4 adjudants-majors, 1 quartier maître
trésorier, 1 officier de santé, etc….
Chaque bataillon comporte 6 compagnies ainsi composées :
1 capitaine commandant, 1 capitaine en second, 150 hommes au complet de paix et 200
au complet de guerre.
Les 4 bataillons du1er Régiment sont stationnés à Brest.
Le régiment se recrute par des enrôlements volontaires, puis à partir du mois de décembre
1808 par la conscription comme les régiments de l'armée de terre.
Le décret du 29 février 1812 porte chacune des compagnies du régiment de 150 à 200
hommes, on revient à peu près a l ' e f f e c t i f d e s anciennes demi -brigades.
Le 1er février 1813, l' artiller ie de Marine passe au compte du département de la guerre.
Les régiments sont réformés. Le 1er régiment de Brest est porté de 4 bataillons à 8,
chaque bataillon comportant 6 compagnies comptant chacune ; 1 capitaine,1 lieutenant,
1 sous- l i e u t e n a n t e t 1 3 7 h o m m e s . Soit un effectif t o t a l de 844 hommes par
bataillon.
Les cadres des officiers des 24 nouvelles compagnies du 1er régiment sont formés à l'aide
des capitaines en second et des lieutenants en second qui passent lieutenants en
premier. Quant aux 48 sous-lieutenants nécessaires, il sont tirés de l'école de Saint-Cyr,
des vélites de la garde et des sous-officiers d'artillerie de la marine ayant fait campagne
sur terre.
Les six premiers bataillons du 1er Régiment doivent être dirigés s u r Mayence, les deux
autres d o i v e n t rester au dépôt et être complétés à l'aide d ' u n appel de conscrits.
La bataille de Lutzen et les campagnes de 1813 et de 1814
Le 1er Régiment d'artillerie de la marine, commandé par le colonel Emond et comptant 6
bataillons et 3338 combattants, arriva à Mayence au milieu de mars et forma partie du
6ème corps d'armée, commandé par le général Marmont, duc de Raguse. Il formait avec le
3ème Régiment, la brigade Cacault de la 1ère division, commandée par le général
Compans.
Dans son rapport au major général de la Grande Armée, le Duc de Raguse rend a i n si
compte d e s opérations à la bataille de Lutzen (2 mai 1813):
"Immédiatement après un feu terrible, la cavalerie ennemie s'ébranla et fit une
charge vigoureuse dirigée contre le 1er Régiment d'artillerie de la marine. Cet
excellent régiment, commandé par le brave colonel Emond, montra, en ce
moment, ce qu'une bonne artillerie peut contre la cavalerie, et les efforts de
l'ennemi vinrent échouer contre ses baïonnettes. D'autres charges furent
également faites et toutes également sans succès."
"L'ennemi, comptant qu'après la f a t i g u e d ' u n e aussi longue journée, les soldats
s e r a i e n t couchés et les armes au fourreau, a r r i v a , à d i x heures, avec 4 régiments de
cavalerie de choix. Ces 4 régiments se j e t è r e n t avec une impétuosité extraordinaire au
milieu de nous, m a i s ils trouvèrent chacun à son poste. Tous les ordres donnés f u r e n t
exécutés ponctuellement et l'ennemi enveloppa de ses morts nos carrés sans en enfoncer aucun.
300 hussards restèrent s u r la p l a c e , e t les rapports des P r u s s i e n s a n n o n c e n t que le
régiment des gardes a été d é t r u i t entièrement."
"Ainsi a fini une belle journée. C'est le 6ème Corps, dans cette mémorable campagne, a
eu l'honneur de tirer les premiers coups de canon et les derniers coups de fusil. Je ne
saurais donner trop d'éloges aux troupes dont Sa Majesté m'a confié le
commandement. Les soldats de marine se sont montrés dignes de l'armée dans
laquelle Sa Majesté les a attachés".
D'après le Moniteur du 9 mai, le 1er Régirent d'artillerie de marine "couvrit le champ de
bataille de l ' é l i t e de la cavalerie ennemie".
Les pertes du 1er Régiment furent considérables : 742 tués et 350 blessés, soit le 1/3 de
son e f f e c t i f hors de combat.
"La disproportion entre le chiffre des tués et celui des blessés s'explique par le long
et violent t i r à boulet que le régiment eut à subir au commencement de la journée et
q u ' i l supporta sans broncher. C 'e s t, sans doute, en songeant à cette circonstance, que
le duc de Raguse écrivit dans ses Mémoires : "Les régiments d'artillerie de la marine, faisant le fonds
de mon corps d'armée, méritaient beaucoup d'éloges pour leur bravoure et leur bon esprit. Jamais
soldats ne se sont exposés de meilleur grâce au canon de l'ennemi et n'y sont restés avec plus de
fermeté."
"Quant aux alliés, devant une constance aussi héroïque et aussi vigoureuse résistance,
trompés aussi par les longues capotes bleues dont l'artillerie de la marine était vêtue, ils crurent
avoir affaire aux restes de la vieille garde, échappés au désastre de Moscou.
Le 1er Régiment d'artillerie de la marine devait encore se distinguer aux batailles de
Bautzen (20 mai) et de Wurtechen (21 mai) qui lui écoutèrent 226 tués et 322 blessés
sur un effectif de 2000 combattants environ.
Le Colonel Emond du 1er Régiment fut promu Général et désigné pour servir au 14ème Corps.
Le brave Emond, blessé grièvement à Lutzen ne devait pas survivre à ses blessures;
il mourut le 26 décembre 1813, après une vie toute de gloire.
Le 17 a o û t , à la rupture de l ' a r m i s t i c e , les 4 régiments d ' a r t i l l e r i e de la marine
é t a l a n t toujours distribués dans le 6ème corps. Le 1er Régiment, commandé par le major
Deschamps, faisait partie de la 1ère brigade (Pelleport) de la 1ère Division (Compans).
II se composait de 5 b a ta i l l o n s , a u to t a l 2 . 9 3 0 c o m b a t t a n t s .
D a n s l e s a f f a i r e s d e B o h ê m e (2 6 a o û t – 1 0 s e p te m b re ) l e 1 e r R é g i m e n t f u t
p a r t i c u l i è re m e n t c i té ; c e f u t e n c o re l u i d i t s u p p o r t é l e p lu s d e p e r t e s : i l s e u t 1 9 1
tués et 227 blessés.
Lors de la bataille de Leipzig (16 au 19 octobre), l'ennemi f i t une furieuse charge de
cavalerie ans laquelle plusieurs bataill o n s appartenant aux 1er et 3ème régiments
d ' a r t i l l e r i e de la marine furent littéralement écrasés. Dans ces d i f f é r e n t e s journées, le
1er Régiment perdit 1420 hommes.
Le 2 novembre, le 6ème Corps repassait le Rhin à Mayence et eut à supporter les atteintes d'une
cruelle épidémie.,
Les pertes subies par le 1er Régiment d'artillerie de la marine pendant la campagne de 1813, telles
qu'elles résultent des documents du ministère de la guerre sont les suivantes :
1 / Troupe
E f f e c t i f envoyé an Allemagne :
Tués
Restés dans les hôpitaux d'Allemagne
Prisonniers ou restés en arrière
Passés dans l'artille rie de la Garde
L a i s s é s à Erfurth
Effectif le 2 novembre 1813
5.357
1.166
2.. 271
8I5
198
350
557
2/ Officiers
Les pertes en o f f i c i e r s du 1er Régiment n ' o n t p u ê t r e é t a b l i e s , m a i s il
est c e r t a i n q u ' e l l e s furent de beaucoup supérieures à celles d'autres régiments. Il n ' a
pas été possible de c o n n a î t r e les noms de tous les o f f i c i e r s tués ou blessés pendant
la campagne, en p a r t i c u l i e r , on n ' a à peu près rien trouvé concernant les sousl i e u t e n a n t s venus de Saint-Cyr et des sous-officiers.
Avant la bataille de Leipzig, l'Empereur a v a i t accordé au 1 er R é g i m e n t d ' A r t i l l e r i e de
la marine, 9 croix d ' O f f i c i e r de la Lésion d ' h o n n e u r et 66 croix de Chevalier.
Les restes de la Grande Armée furent refondus le 7 novembre 1813. Ceux du 1er
Régiment d ' a r t i l l e r i e d e l a m a r i n e entrèrent dans la com p osi t i on de 2ème Brigade
de la 20ème Di v i s i o n qui correspondait à l'ancien 6ème Corps. Le 1er Régiment prit part à
t o u t e la campagne de 1814. Il e u t en p a r t i c u l i e r la gloire du combat de Vauchamps (14
février). "L'ennemi ayant été obligé d'opérer sa r e t r a i t e , l ' a r r i è r e g a r d e é t a n t f a i t e par
la di v i s i o n russe, f u t attaquée par le 1er Régiment de marine du duc de Raguse, abordée
à la baïonnette et rompue; on lui f i t 1000 prisonniers, dont le lieutenant-général Ourousoff,
qui le commandait, et plusieurs colonels" (Moniteur du 16 février).
Après l ' a b d i c a t i o n d e Fontainebleau, l es troupes d'artillerie de la Marine furent
dirigées sur leurs dépôts. Le 5 mai, le 1er Régiment rentra à Brest. Il comptait, en ce
moment : 12 officiers, 98 hommes. Les 18.000 hommes des 4 régiments d'artillerie de la
marine envoyés à la Grande Armée de 1813 se réduisaient à 695 combattants.
L'Artillerie de la marine de 1814 à 1854
Mexique (1838)
L ' a r t i l l e r i e de la marine est réorganisée, le 1er Juillet 1814, sous le nom de Corps Royal
des Canonniers de la marine, puis le 1er avril 1816 sous le nom de Corps Royal
d ' A r t i l l e r i e de la marine comprenant 8 bataillons. En 1819, l'existence de l'Artillerie
de la marine est mise en question. Une commission fut instituée pour d é c i d e r si
l ' a r t i l l e r i e de la marine devait être maintenue, c ar son u t i l i t é ét ait contestée par
quelques O f f i c i e r s Généraux de la Marine. Cette commission était composée de 6
Officiers de vaisseau, 2 Conseillers d'état et de l'Inspecteur général de l' ar t i ll er ie
de la marine, le général Thirion.
"Que peut-on reprocher à ce corps ? s ' é c r i a le général en s ' a d r e s s a n t à l a
c o m m i s s i o n ; il à acquis tant de réputation que t o u s les généraux qui l' on t connu
en Italie et dans les dernières guerres d'Allemagne ne cessant d ' e n faire l'éloge; il ne
s'est pas moins distingué sur mer, où les soldats servaient non seulement comme
canonniers, mais y remplaçaient souvent les matelots…"
Mais la cause était entendue d'avance, et la commission émit l'avis que les troupes
d'artillerie de la marine n ' é t a i e n t nullement indispensables à bord des vaisseaux, et le
ministre d é c i d a q u ' i l s e r a i t apporté d e s modifications dans l ' o r g a n i s a t i o n et les
a t t r i b u t i o n s du corps.
L'ordonnance du 7août 1822 remplace les 8 b a ta i l lo n s d ' a r t i l l e r i e de la marine par
1 régiment d'artillerie destiné au service des ports et des colonies. Le régiment possède
un état m a j o r et 24 compagnies, son effectif comporte 117 o f f i c i e r s et 1950 hommes.
Certaines de ses unités participent à diverses opérations: Expédition de Madagascar ( 1 8 2 9 ) ,
d ' A l g e r (1830), de Kouma, Sénégal (1833). En décembre 1835, le Régiment d ' a r t i l l e r i e de la
marine est r é d u i t d e 24 à 12 compagnies. Il est ainsi distribué :à Lorient, l'état major, 4
compagnies, plus celle de dépôt et hors rang, à Brest, la Martinique et la Guadeloupe, 2
compagnies, à Bourbon 1compagnie, à Cayenne et au Sénégal, 1 demi-compagnie;
Un bataillon d'artillerie de la marine, fort de 3 compagnies de 100 hommes, prit part, du mois d'août 1838
au mois de juin 1839, à l'expédition du Mexique. Un détachement de 50 vieux bombardiers fut également
embarqué pour le service des mortiers sur 2 bombardes. Ces troupes contribuèrent à la prise du fort St
Jean d'Ulloa, les 27 et 28 novembre 1838. Ce fut une bombe, lancée par l'une des deux bombardes qui fit
sauter le magasin à poudre et le parc à bombes de San-Miguel et amena la reddition du fort. A l'attaque de
vive force de Vera-Cruz, le général mexicain Arista fut fait prisonnier.
En 1840, un conflit avec l'Angleterre menaçant de se produire, on s'empressa
d'augmenter l'artillerie de la marine, il n' é t a i t p a s possible de mieux reconnaîtra
l 'u til i té et la nécessité de cette arme. L'ordonnance du 14 août 1840 porte de 12 à
18 le nombre des compagnies du régiment. Les chances de guerre s'accentuant de plus en
plus, l'ordonnance du 19 septembre 1840 prescrit que le régiment serait porté de 18
compagnies à 40 a v e c un effectif de 4.372 hommes. Mais la paix avec l'Angleterre
ayant été maintenue, on trouve inutile d'avoir un régiment d'artillerie fort de 40
compagnies; ce nombre est réduit à 30 par 1'ordonnance du 4 janvier 1842.
Par la d é c is i o n royale du 26 octobre 1842, le régiment d ' a r t i l l e r i e de la marine reçoit un
drapeau; il é t a i t p r i v é d e c e t emblème d e p u i s la chute de la Restauration. Le
drapeau fut remis solennellement au régiment le 1er mai 1843 et, à ce tte occasion, le
colonel Preaux prononça une vibrante allocution dont voici quelques passages :
" O f f i c i e r s , s o u s - o f f i c i e r s , caporaux et canonniers du corps royal d ' a r t i l l e r i e
de la marine ,
"Le Roi, chef suprême de l'armée, remet les nobles couleurs de France à votre valeur,
à votre f i d é l i t é .
"Marchez sans hésitation à la v o i x du Roi; prenez pour g u i d e s e t pour modèles
ces jeunes princes déjà vieux de gloire; n ' o u b l i e z j a m a i s que l ' a r t i l l e r i e de
la marine a c o n q ui s, au prix de son sang, sa noble part dans les fastes
brillants de l'Empire.
"Brave Régiment. C ' e s t un vieux soldat mutilé de l'Empereur qui vous confie, au
nom du Roi, la garde de ce drapeau.
"Peut-être entendez vous, pour la dernière fois, la v o i x de votre colonel.
"Rappelez vous que les dernières paroles de votre colonel prononce, et que
vous devez regarder comme son dernier ordre du jour, sont :
"Le Roi, l'Honneur et la Patrie".
L'A rti l lerie de la Marine participe à de nombreuses expéditions à partir de 1843,
notamment à la campagne de Crimée (1854-1856).
Sébastopol (1855)
Le 3 mai 1854, les 3ème, 13ème et 14ème compagnies d'artillerie de la marine furent
désignées pour l'armée d'Orient. Embarquées le 21 juin suivant à Toulon, débarquées le
28 du même mois au Pirée, ces trois compagnies firent partie du camp établi près
d'Athènes jusqu'en février 1855, époque à laquelle elles débarquèrent à Kamiesh, en
Crimée.
En mars 1855, deux autres compagnies du régiment, les 6ème et 12ème , allèrent rejoindre les 3
autres
Pour i n d i q u e r la part prise par l ' a r t i l l e r i e d e l a m a r i n e au siège de Sébastopol, nous
passerons en revue les principales ba t te rie s servies par cette arme, d'après
l'historique officiel au service de l 'a r t il ler i e devant cette place.
Batterie des attaques de gauche contre la ville
Batterie n°30
10 canons obusiers de 30.
Ouverture du f e u la 9 a v r i l 1855.
Suppression de la batterie f i n j u i n 1 8 5 5 .
Elle a rendu de b o n s se r vi ce s et a parfaitement rempli sa d e s t i n a t i o n .
Batterie des attaques de droite contre Malakoff
Batterie n°4
4 canons anglais de 32, remplacés en a o û t 1855 par des canons f r a n ç a i s d e 30.
Les canonniers d'artillerie de la marine la servirent avec un entrain remarquable dans tous les
engagements d'artillerie, et notamment aux 6 et 7 juin, où ils eurent à soutenir une lutte des
plus vives avec l'artillerie russe des Ouvrages blancs, de la place et du Mamelon vert, dans
cette dernière lutte, la batterie eut 15 hommes hors de combat.
Batterie n° 31
2 canons obusier de 80de la marine.
Elle a concouru efficacement à chasser les bateaux à vapeur qui cherchaient à
s ' e m b o s s e r à l ' e n t r é e de la baie du carénage.
Batterie n° 41
4 m o r t i e r s de 27.
Elle causé beaucoup de mal à l'ennemi tant par les pertes qu'elle lui fit éprouver que par le désordre
occasionné dans les ouvrages de la Pointe. Elle a rempli pleinement l'objet de sa construction. Son c
été utiles dans la journée du 8 septembre et son tir très bien dirigé.
Rive sud de la rade, partie gauche
Batterie n° 8
4 mortiers de 32 de la marine.
La b a t te rie s ' e s t f a i t remarquer par la grande justesse de son t i r et par les effets
qu'elle a produits dans le fort du Nord.
L ' e f f e c t i f des troupes d ' a rt i l l e r i e d e l a m a r i n e e m p l o y é e s au siège de Sébastopol fut
de 800 hommes environ et de 34 officiers. La troupe eut 31 tués et 91 blessés. Il y eut parmi les officiers
3 tués et 7 b l e s s é s .
2 capitaines,1sergent major et 3 caporaux furent cités à l'ordre du jour du 1er corps
de l'armée d'Orient le 31mal 1855. Fut mis à l'ordre du jour général de l'armée, le 15 ju i n
1855 : Schweitzer, 1er canonnier servant : "S'est précipité d a n s une embrasure, le 6
j u i n , p o u r la dégager, quand un a r t i l l e u r v e n a i t d ' y être t u é peu de temps
auparavant".
Plusieurs officiers reçurent de l'avancement pour leurs s e r v i c e s pendant le s i ège ,
e t de nombreux a r t i l l e u r s furent nommés dans la légion d'Honneur.
L'Empereur autorisa l'inscription du mot SEBASTOPOL sur le drapeau du Régiment.
L'Artillerie coloniale
En 1900, toutes les formations de l ' A r m e sont toujours dispersées à Cherbourg, Brest,
Rochefort, Toulon et aux Colonies et portent le nom de N° Batterie du Régiment
d ' A r t i l l e r i e de Marine dont le colonel est à Lorient.
Le 1er ju i l l e t 1900, sa produit un événement sensationnel : les Troupes de la marine sont
enlevées au ministère de la marine et affectées à celui de la guerre. Elles prennent la
dénomination de "Troupes coloniales". L'artillerie de marine devient l'artillerie coloniale.
L ' u n i q u e r é g i m e n t d'artillerie coloniale reste à Lorient.
Groupes de tradition, attachées à leurs souvenirs de gloire, les troupes coloniales, les
anciennes infanterie et artillerie de marine gardent un souvenir ému de leur passé
"marine" et restent fidèlement attachées à leur origine. Quand en 1915, en même temps
que la tenue bleu horizon, on donnera comme écusson aux "bigors" l'ancre que l'infanterie
avait toujours en remplacement de leur grenade – leurs sentiments seront partagés entre
la nostalgie de leur grenade traditionnelle et la joie de porter l'ancre.
En 1910, le 1er Régiment d'artillerie colonial, qui porte un numéro depuis 1906, date de la création de
plusieurs régiments de l'arme, reçoit la croix de la Légion d'Honneur, récompense de trois siècles de
sacrifices et de grandeur militaires. A cette occasion le président de la république prononce l'allocution
suivante :
"En décernant la Croix de la Légion d'Honneur au Drapeau du 1er Régiment d'infanterie coloniale et
à l'Etendard du 1er Régiment d'artillerie coloniale, le gouvernement de la République, fidèle
interprète du sentiment unanime du pays, donne à l'armée coloniale toute entière, une
marque éclatante de justice et de reconnaissance.
Depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, sur tous les points de globe, ainsi que sur
le territoire envahi, l'héroïsme des Troupes coloniales a fourni des pages impérissables à notre
glorieuse histoire militaire
Que les nobles insignes, que je suis fier de confier à la garde de deux de leurs régiments, soient
pour tous comme le gage des vertus séculaires qui font la force de nos armées et sont l'orgueil de la
Nation".
Il est à l'époque, le seul régiment d'artillerie titulaire de cette décoration.
Des éléments du Régiment d'artillerie de la marine participèrent aux diverses
expéditions du Sénégal (1862-1863, 1865, 1869-1870) et aux affaires de Cochinchine
(1866-1867).
Au début de la guerre franco allemande de I 870-1871, 4 b a t t e r i e s d ' a r t i l l e r i e de la
marine furent d e s t i n é e s à faire p a r t i e de la d i v i s i o n q ue le Général Trochu d e v a i t
commander au Danemark.
Après nos premiers revers, 3 de ces batteries firent partie de l'armée de Châlons, et toute l'artillerie de la marine
disponible partit pour Paris où elle forme, pendant le siège, 16 batteries, dont 5 montées et 2 à pied, et fournit un
grand nombre d'officiers à l'artillerie de terre.
De plus, des batteries et des détachements s'élevant au nombre de28, furent organisés et combattirent en
province.
Enfin, 7 batteries prirent part à la répression de la Commune.
Le Régiment d'artillerie de la marine a donc fait des efforts considérables pendant la guerre de 18701871, puisqu'il a pu mettre sur pied 47 batteries ou détachements; c'est sans doute ce qui a fait dire au
général Suzanne dans son "Histoire de l'artillerie française" : "L'artillerie de marine est une ressource
précieuse pour les moments difficiles et que l'on doit se réjouir de posséder comme réserve et appoint".
Le 14 juillet 1880, le régiment d'artillerie de la marine reçoit, en même temps que les autres
régiments de l'armée, un nouvel étendard sur lequel sont inscrits les quatre noms :
Lutzen (Saxe) 1813, Vera Cruz (Mexique) 1838, Sébastopol (Crimée) 1854-1855, Puebla
(Mexique) 1863.
Sontay-Langson (1883-1884) – Dahomey (1892) – Madagascar (1895)
6 batteries d'artillerie de la marine, numérotées 1 bis, 2 bis, 3 bis, 4 bis, 5 bis et 6 bis, armées d'un
matériel de 4 de montagne sur affûts de 65 de débarquement formèrent l'artillerie du Corps
expéditionnaire pendant la guerre du Tonkin (1883-1885).
Toutes les batteries prirent part aux combats de Phu-Sa (14, 15 et 16 décembre), qui
amenèrent la prise de Son-Tay; elles concoururent efficacement au succès en tirant
1.142 coups à petites distance.
Les batteries prirent également part aux différentes affaires qui amenèrent la prise de Lang-Son le 13
février 1885, et aux combats livrés autour de Lang-Son : Dong-Dang (23 février et 21 mars), Bang Bo (23
mars) et Ki Lua (29 mars).
Parmi les récompenses obtenues par l'artillerie de la marine pendant la longue campagne de
l'Indochine, signalons de nombreuses nominations en grade et dans la Légion d'Honneur; il y eu, en
outre, une cinquantaine de médailles militaires distribuées à la troupe.
La magnifique épopée coloniale de la France se poursuit à travers les immenses territoires de
l'Afrique et de Madagascar. Nos grands bâtisseurs d'Empire, tels que Faidherbe, Savorgnan de Brazza,
Galliéni, Achinard , Gouraud, auront comme plus sûrs soutiens les artilleurs de la marine. Partout, dans
n'importe quelles circonstances, tant qu'il y aura des territoires à placer sous le contrôle de la France, des
insoumis à mater, on fera appel au Régiment d'artillerie de la marine et l'Etendard du régiment verra ses plis
s'orner successivement des noms de : SONTAY-LANGSON (1883-1884) – DAHOMEY (1892) –
MADAGASCAR (1895).
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Nota: Ce document a été réalisé à partir d'un original dactylographié (auteur inconnu).