Corrigé des exercices sur les Opérateurs
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Corrigé des exercices sur les Opérateurs
Corrigé des exercices sur les Opérateurs ∗ 31 mars 2008 1 1.1 Exercice 5 Énoncé Sur l’espace de Hilbert H = L2 ([−π, π]), on considère l’opérateur intégral T qui à tout x ∈ H associe la fonction T x définie par Z π cos(t − s)x(s)ds (t ∈ [−π, π]). (1) (T x)(t) = −π 1) Vérifier par calcul direct que T x ∈ L2 ([−π, π]) et que |||T ||| ≤ π. 2) Calculer l’adjoint T ∗ de T sans utiliser les théorèmes du cours. 3) Démontrer que pour tout x ∈ L2 ([−π, π]), la fonction T x est 2 fois dérivable et vérifie une équation différentielle qu’on précisera. 4) Donner une expression explicite de T x de deux façons différentes : i) en utilisant la question 3, ii) par calcul direct. 5) Vérifier que T est (à une constante multiplicative près) un opérateur de projection orthogonale sur sous-espace vectoriel de L2 ([−π, π]) qu’on précisera. En déduire la valeur exacte de |||T |||. 6) Déterminer les valeurs propres et les vecteurs propres de T . Le théorème de diagonalisation s’applique-t-il à T ? Si oui, préciser la forme diagonale de T . (indication : Dans les questions 5 et 6, on pourra utiliser la base hilbertienne des sinus-cosinus de L2 ([−π, π])). 1.2 solution 1) Pour t ∈ [−π, π] fixé, on a Z π |T x(t)| ≤ | cos(t − s)|.|x(s)|ds −π Z π ≤ (2) ≤ √ 1/2 Z | cos(t − s)| ds π 2 −π 2 1/2 |x(s)| ds −π 2π||x||, ∗ Notes du cours sur les espaces de Hilbert de M. L. Gallardo, Licence 3-ième année, Université de Tours, année 2007-2008. 1 grâce à l’inégalité de Cauchy-Schwartz et en majorant le cosinus par 1. D’où Z π 2 |T x(t)|2 dt ≤ 4π 2 ||x||2 < +∞, (3) ||T x|| = −π ce qui prouve 1) mais on obtient seulement |||T ||| ≤ 2π. En fait la majoration (2) est trop grossière : on peut calculer Z π Z π 2 cos2 (s)ds = π, | cos(t − s)| ds = (4) −π −π √ et on peut remplacer (2) par π||x||, ce qui donne |||T ||| ≤ π. 2) Pour x, y ∈ H, grâce au théorème de Fubini, on a Z π Z π Z π < T x, y > = (T x)(t)y(t)dt = cos(t − s)x(s)ds y(t)dt −π −π −π Z πZ π x(s)y(t) cos(t − s)dsdt = −π −π Z π Z π Z π = x(s) cos(s − t)y(t)dt ds = x(s)T y(s)ds −π −π −π =< x, T y > . Comme d’autre part par définition de T ∗ , < T x, y >=< x, T ∗ y >, on a donc < x, T y >=< x, T ∗ y > pour tout x ∈ H, d’où T y = T ∗ y et par conséquent T est autoadjoint. 3) Par le théorème de dérivation sous le signe intégrale, on a Z π 0 (5) (T x) (t) = − sin(t − s) x(s)ds −π ∂ (cos(t − s) x(s)) = − sin(t − s)x(s) et on a la domination (En effet ∂t | − sin(t − s)x(s)| ≤ |x(s)|, où x est intégrable et indépendante de t). De la même manière, on peut encore une fois dériver sous le signe intégrale et on obtient Z π 00 (6) (T x) (t) = − cos(t − s) x(s)ds = −(T x)(t). −π La fonction T x vérifie l’équation différentielle y 00 = −y. 4) i) D’après 3), il est clair que (T x)(t) = a cos t + b sin t, où les constantes a et b sont telles que Z π a = T x(0) = x(s) cos s ds −π Z π Z π π π x(s) cos( − s) ds = x(s) sin s ds b = T x( ) = 2 2 −π −π ii) En écrivant cos(t−s) = cos t cos s+sin t sin s dans la formule (1), on obtient aussitôt Z π Z π (7) T x(t) = x(s) cos s ds cos t + x(s) sin s ds sin t. −π −π 2 5) Dans la base hilbertienne des sinus-cosinus1 on peut écrire x(s) = +∞ X an cos(ns) + bn sin(ns), n=0 en tant que série convergente dans L2 ([−π, π]), où les an et bn sont les coefficients de Fourier de x. On voit alors que (8) (T x)(t) = π(a1 cos t + b1 sin t) = πPV (x)(t), où PV désigne la projection orthogonale sur le sous-espace V de (dimension 2) de L2 ([−π, π]) engendré par les deux fonctions cos et sin. Ainsi T = πPV est, au coefficient multiplicatif π près, la projection orthogonale de H sur V (pour ceux qui n’en sont pas convaincus voir la remarque à la fin de l’exercice). De plus comme pour x ∈ V , on a PV (x) = x, donc ||T x|| = π||x||, il en résulte que |||T ||| ≥ π. Grâce à la question 1, on en déduit que |||T ||| = π. 6) Compte tenu de ce qui précède, l’équation aux valeurs propres T x = λx est équivalente à : (9) π(a1 cos t + b1 sin t) = λ +∞ X (an cos(nt) + bn sin(nt)) . n=0 L’unicité du développement implique (10) πa1 = λa1 , πb1 = λb1 , λan = λbn = 0 si n 6= 1. Discussion du système d’équations (10) : 1) si a1 6= 0 : il est nécessaire que λ = π et dans ce cas an = bn = 0 pour tout n 6= 1. 2) si a1 = 0 et b1 6= 0 : alors λ = π et on a aussi an = bn = 0 pour tout n 6= 1. 3) si a1 = 0 et b1 = 0 : il y a deux sous-cas : i) si l’un des an ou bn (n 6= 1) est non nul, nécessairement λ = 0. ii) si λan = λbn = 0 pour tout n 6= 1, λ pourrait être quelconque mais ce cas est impossible (pas de vecteur propre x 6= 0). Conclusion : λ = 0 ou π. Récapitulons pour préciser les vecteurs propres : si λ = 0, les vecteurs propres sont toutes les fonctions (11) x(t) = a0 + +∞ X (an cos(nt) + bn sin(nt)) . n=2 si λ = π, les vecteurs propres sont les fonctions (12) x(t) = a1 cos t + b1 sin t. L’opérateur T est de Hilbert-Schmidt car c’est un opérateur à noyau et il est autoadjoint donc il est diagonalisable d’après le cours. En fait la forme diagonale est donnée par (8) : (13) T x = π < x, φ1 > φ1 + π < x, φ2 > φ2 , 1 attention ici les fonctions sinus-cosinus ne sont pas de norme un pour le produit scalaire usuel de L2 ([−π, π]) mais ceci n’a aucune importance si nous utilisons les formules correctes du développement d’une fonction en série de Fourier come il est expliqué dans la remarque à la fin de l’exercice. 3 sin t cos t où φ1 (t) = √ et φ2 (t) = √ (voir la fin de la remarque suivante). π π Remarque (commentaire détaillé de la formule (8) de la question 5) : L’expression usuelle des coefficients de Fourier sinus-cosinus (voir chapitre 3, paragraphe 2.1, formule (11)) est (14) Z π Z Z 1 π 1 π 1 f (t)dt, an = f (t) cos nt dt, bn = f (t) sin nt dt (n ≥ 1), a0 = 2π −π π −π π −π on les obtient en considérant l’espace L2 ([−π, π]) muni du produit scalaire avec lequel on a travaillé dans le chapitre 3, i.e. Z π 1 < x, y >= x(t)y(t)dt, 2π −π est pour lequel les exponentielles complexes : eint , n ∈ Z forment une base hilbertienne. Dans cet espace il faut normaliser les sinus et cosinus pour √ obtenir une autre base √ hilbertienne : ce sont les fonctions : f0 = 1, f2k−1 (t) = 2 sin(kt) et f2k (t) = 2 cos(kt) k ≥ 1 qui forment la base hilbertienne qu’on appelle des «sinus-cosinus» (voir le corollaire 1.4 du chapitre 3). La série de Fourier d’une fonction P x dans cette base hilbertienne est par définition la fonction +∞ k=0 < x, fn > fn (s) mais il se trouve qu’elle coïncide avec l’expression traditionnelle : (15) +∞ X k=0 < x, fn > fn (s) = +∞ X an cos(ns) + bn sin(ns), n=0 où les an et bn sont donnés par (14). Donc la projection PV (x) de la fonction x sur le sous-espace V engendré par les fonctions cos et sin est PV (x)(s) =< x, f1 > f1 (s)+ < x, f2 > f2 (s) = a1 cos(ns) + b1 sin(ns), On remarque donc que la formule traditionnelle donnant la série de Fourier en «sinus-cosinus» est bien adaptée pour faire des projections orthogonales. On notera aussi que la projection étant une opération géométrique, le vecteur PV (x) est intrinsèque, il ne change pas si on modifie le produit scalaire par une constante multiplicative. Par exemple si, comme on l’a supposé, on munit L2 ([−π, π]) du produit scalaire Z π < x, y >= x(t)y(t)dt, −π Pour ce produit scalaire la base hilbertienne des «sinus-cosinus» est composée des fonctions : φ0 = √12π , φ2k−1 (t) = √1π sin(kt) et φ2k (t) = √1π cos(kt) k ≥ 1 et pour laquelle on a aussi une formule analogue à (15) où on remplace les fk par les φk , ce qui explique qu’on à aussi la formule (13) qui représente la fonction T x. 4 2 2.1 Exercice 6 Énoncé Soit f ∈ L2 ([0, 1]). On considère le problème aux limites x00 (t) = f (t) (16) x(0) = x(1) = 1. 1) Montrer que (16) a une solution unique de la forme Z 1 k(t, s)f (s)ds (17) x(t) = (Kf )(t) = 0 où s(t − 1) t(s − 1) k(t, s) = (18) si si 0≤s≤t 0≤t≤s≤1 2) Réciproquement, vérifier que pour toute f ∈ L2 ([0, 1]), la fonction Kf définie en (17) est deux fois dérivable sur [0, 1] et vérifie (16). 3) En déduire que 0 n’est pas valeur propre de l’opérateur K et que λ 6= 0 est valeur propre de K de fonction propre associée f si et seulement si f 6= 0 est deux fois dérivable et vérifie 00 f (t) − λ1 f (t) = 0 (19) f (0) = f (1) = 0. 4) Montrer que les seules valeurs de λ telles que (19) ait une solution non nulle 1 sont de la forme λk = − 2 2 avec k ∈ N∗ et que le sous espace propre de K π k associé à λ est de dimension 1 et engendré par la fonction φk : t 7→ φk (t) = k √ 2 sin(kπt). 5) Que peut-on dire de la famille des fonctions φk (k ≥ 1) de la question 4) relativement à l’espace L2 ([0, 1]) et à l’opérateur K ? 2.2 solution 1) En intégrant directement, on obtient Z t 0 x (t) = f (u)du + A 0 et Z t Z x(t) = 0 u f (s)ds du + At + B, 0 où A et B sont des constantes. Mais grâce au théorème de Fubini-Tonelli, on a Z t Z u Z t Z t Z t f (s)ds du = f (s) du ds = (t − s)f (s)ds, 0 0 0 s 0 d’où Z (20) t (t − s)f (s)ds + At + B. x(t) = 0 5 R1 Mais la condition x(0) = 0 implique B = 0 et x(1) = 0 exige A = − (1 − 0 R R 1 t s)f (s)ds. Ainsi en écrivant A = 0 + t (1 − s)f (s)ds et en remplaçant dans (20), on obtient Z 1 Z t (21) s(t − 1)f (s)ds + t(s − 1)f (s)ds x(t) = 0 t Z 1 k(t, s)f (s)ds, = 0 où la fonction k est donnée par laRformule (18).R t 1 2) Grâce à (21), (Kf )(t) = (t − 1) 0 sf (s)ds + t t (s − 1)f (s) ds et en dérivant deux fois cette fonction de t, on obtient immédiatement (Kf )00 (t) = f (t), (22) d’où le résultat car les conditions aux bords sont évidentes. 3) Si Kf = 0, (22) implique f = 0 donc λ = 0 n’est pas valeur propre, c’est à dire que l’opérateur K est injectif. Si maintenant λ 6= 0 et une fonction f 6= 0 sont telles que Kf = λf , en dérivant deux fois cette relation et en utilisant (22), on obtient aussitôt (19). Réciproquement si f 6= 0 vérifie (19), en utilisant (22), on obtient Kf = λf . 4) L’équation différentielle (19) est du second ordre homogène et à coefficients constants ; son équation caractéristique est r2 − λ1 = 0 dont les racines sont p p r = ± 1/λ si λ > 0 et r = ±i −1/λ si λ < 0. Ainsi si λ > 0, la solution générale de (19) est √ √ −t 1/λ t 1/λ f (t) = C1 e + C2 e , p mais f (0) = p 0 impose C2 = −C1 donc f (t) = −2C1 sh(t 1/λ), puis f (1) = 0 exige 2C1 sh( 1/λ) = 0 i.e. C1 = 0. D’où f = 0 et donc λ > 0 n’est jamais valeur propre. si λ < 0, la solution générale est √ √ f (t) = C1 e−it −1/λ + C2 eit −1/λ p et f (0) = 0 implique C2 = −C1 donc f (t) = −2iC1 sin(t p −1/λ). La condition f (1) = alors qu’on ait sin( −1/λ) = 0. Nécessairep0 et f non nulle impose ∗ ment −1/λ = kπ avec k ∈ N . Les seules valeurs propres possibles sont donc les nombres 1 (23) λk = − 2 2 avec k ∈ N∗ , π k et une fonction propre associée à la valeur propre λk est de la forme f (t) = −2iC1 sin(kπt), où C1 est une constante complexe arbitraire. L’espace propre associé est donc de dimension √ un et si on veut ||f || = 1, il suffit de prendre le vecteur propre φk (t) = 2 sin(kπt) comme vecteur de base du sous-espace propre associé à λk . 5) Comme K est un opérateur de Hilbert-Schmidt d’après le cours et qu’il est autoadjoint car son noyau k est réel et symétrique, il est diagonalisable et pour toute f ∈ L2 ([0, 1]), on a (24) Kf = +∞ X k=1 − 1 k2π2 6 < f, φk > φk , où, a priori, la série converge au sens de L2 . D’autre part, comme K est injectif, on sait d’après le cours que les fonctions φk (k ≥ 1) forment une base hilbertienne de L2 ([0, 1]). De plus le noyau k étant continu, un exercice de la feuille sur les opérateurs, montre que la série de fonctions (24) est uniformément convergente sur [0, 1] et de somme Kf . 7