Un poisson nommé Rameaux Libre pigiste

Transcription

Un poisson nommé Rameaux Libre pigiste
varangue
Journal-école du 4 avril 2007
>
3 questions à Maurice Gironcel, maire de Sainte-Suzanne
« Les serins, on les met en cage »
Maurice Gironcel vient de faire appel d’une condamnation
d’un an d’inéligibilité, huit mois de sursis et 5000 euros
d’amende, pour une affaire de marchés publics et
d’emplois fictifs. Vendredi soir, il a tenu une réunion
publique au stade Repiquet, dans sa commune.
n°172
COMMENT A-T-ON FETE LE 1ER AVRIL ?
Un poisson nommé Rameaux
Qui dit 1er avril dit… poisson d’avril ! Aucun doute, nous
nous sommes tous déjà, un jour ou l’autre, prêtés au jeu de
ce fameux poisson. Mais dimanche, la pêche a été bien
maigre, aussi bien du côté des commerçants que dans les
familles. Motif : l’événement a eu lien en même temps que
celui des Rameaux.
S
amedi 31 mars, veille du poisson d’avril, le filet est lancé
sur trois boutiques de farce et
attrape du centre-ville de
Saint-Denis. Constat général, dans
les rayons, rien à se mettre sous la
dent. Seul un poisson surnommé
Billy Bass, pêché à deux reprises, se
met à chanter quand on s’en approche. Vai Saiçal, gérant d’une de ces
boutiques, lance l’hameçon : « Il n’y
a pas de demande particulière pour
l’occasion, habituellement les gens
prennent plaisir à confectionner
eux-mêmes des petits poissons en
papier. »
Illustration dans cette famille du
Moufia, qui se retrouve autour d’un
déjeuner
après
la
messe.
Visiblement, la vedette de la journée
est le cari poulet et non notre poisson d’avril ! Une fois le sujet lancé,
Etienne, 9 ans, se met à rigoler et
raconte sa farce : « Ce matin en
allant à l’église, j’ai collé un poisson
dans le dos de ma maman ». Eliette
Chane-Kaï, la mère, confiera un peu
plus tard : « On ne peut pas rester
insensible aux petits, alors on entre
dans leur jeu ».
Pour Danièle Moussa, enseignante à
la retraite et grand-mère, « l’adulte
redevient un peu enfant face à l’innocence de ces bambins ». Dans la
foulée, elle ne peut s’empêcher de
partager un souvenir d’enfance : « A
l’époque, mon frère avait fait croire
à notre père que la cuisine était
inondée. Il a accouru aussitôt, des
chiffons à la main ! On était plié de
rire ». Tous les grands reconnaissent
qu’il est rare de voir les adultes se
livrer à ce jeu entre eux. Pour JeanPierre Vial, père de deux enfants, le
jeu du jour consiste à aller à la pêche
au poisson d’avril en parcourant la
presse locale. Les pronostics sont
annoncés : « La découverte du
dodo, c’est un très gros canular et
j’ai quelques doutes pour la seconde
ANTONIN AMADO, RADIO RÉUNION
Libre pigiste
Après une scolarité chaotique, bac
littéraire en poche, Antonin Amado
s’installe dans la capitale. Là, il intègre l’ESJ de Paris. Revendicateur
chevronné, il n’est pas satisfait de sa
formation : « En trois mois, nous
n’avons rien fait, je suis parti.
C’était du n’importe quoi ! », lâcheil, sourire en coin.
Le jeune homme dégote un stage de
quatre mois « formateurs » à la
documentation de «L’Equipe», puis
intègre l’IPJ. La troisième année, des
perturbations liées à l’augmentation
des frais d’inscription entravent son
cursus : « Ils m’ont renvoyé un mois
avant la fin de l’année. Je suis le seul
de la promotion à ne pas avoir été
diplômé ».
Quand il sort de sa formation, en
2002, Antonin Amado devient réalisateur à RFI. Il se rappelle de Juan
Gomez, le rédacteur en chef, « très
exigeant ». « Je l’ai détesté, mais il
m’a beaucoup appris ».
Après cette expérience, ce journaliste passionné ressent le besoin de s’éloigner du microcosme parisien. Un
détour par Rodrigues, où il travaille
pour le «Guide du Routard», puis il
éruption du volcan »…
Du côté des plus jeunes, le poisson
d’avril un dimanche est une déception. « C’est mieux à l’école, on peut
coller les poissons dans le dos des
copains », déplorent Pauline et
Emilie, en CE2. L’école semble être
un relais capital pour la motivation
des élèves, et pourtant seul un d’entre eux en a parlé en classe dans le
courant de la semaine. Monique,
mère de deux enfants, avoue avoir
« zappé » le poisson d’avril, dans
l’attente de la fête des Rameaux.
Finalement, ce dimanche, le poisson
farceur avait un goût de pas assez.
Jean-Pierre pointe du doigt les
médias : « Ils ne relaient pas assez
l’événement, comme ils le font pour
Pâques par exemple ». Tous estiment que la multiplication des fêtes
commerciales telles que la SaintValentin, la fête des grands-mères,
font de l’ombre aux fêtes traditionnelles.
« Le poisson d’avril ne tient qu’à un
fil… » reprenaient en choeur les écoliers d’autrefois. Aujourd’hui adultes, ils ressortent ce vieux refrain
mais dans un tout autre sens. Cette
année, le poisson a dû s’accrocher
pour subsister.
Jean-François FEVRIER
pose son micro à La Réunion, avec
sa compagne, ancienne directrice de
l’Alliance française de Rodrigues.
Antonin Amado frappe à la porte de
Radio Réunion en 2005. Pigiste
titulaire à 94 euros nets la prestation. Le nombre de piges étant limité à 84 par an. Une des raisons pour
lesquelles le journaliste radio se
lance dans diverses expériences
comme Kwélafé, pendant six mois.
A ce sujet, Antonin lâche avec
mépris : « J’ai du mal avec les gens
qui mentent et qui mettent plus de
quatre mois à te payer les 400
euros ». Bien conscient que le
monde de la presse n’est pas celui
des « bisounours », Antonin s’offusque de la « malhonnêteté intellectuelle ». Il apprécie donc de tra-
Je ne dirais pas que je suis serein, les
serins on les met en cage. Je dirais
simplement que je suis confiant et
que j’ai la conscience tranquille car
j’ai été par quatre fois relaxé. Même
si je ne pense pas avoir été irréprochable, j’affirme que je ne me suis
jamais enrichi. Je suis un être
humain et j’ai des valeurs. Le plus
important pour moi c’est que ma
famille soit restée soudée malgré les
épreuves et les années que nous
avons passé à attendre le verdict.
Maurice Gironcel se déclare confiant.
Concernant mon avenir dans la politique, je suis et je resterai à jamais
un militant du parti communiste. Je
ne suis pas un carriériste à la recherche de mandats à tout prix.
L’Alliance n’a toujours pas
fait savoir sur quel candidat
se porterait son choix.
>
Ce sont des élections très importantes et la campagne va mobiliser
beaucoup de monde. Je sais que mes
camarades attendent des consignes
de vote. Pour l’instant, mon choix
personnel et celui du parti se porte
sur le V de la victoire. Celle de La
Réunion avant tout. Notre candidat
sera celui qui aura su répondre de
façon pertinente, et avant le 22 avril,
à nos questions et nos attentes
concernant l’île. Nous leur avons
fait parvenir un programme à ce
sujet il y a quelque temps déjà. Ce
n’est qu’après que nous aviserons et
informerons les militants. »
Entretien : Mélodie NOURRY
PORTRAIT DE COM: ATEP
Rappeur chik
Patrice Parmentier alias Atep arbore
fièrement les codes vestimentaires
du hip hop : t-shirt noir, chaîne
dorée façon bling-bling, tatouage.
Le jeune artiste de 29 ans est l’un
des pionniers du mouvement rap
réunionnais.
Le parcours du chanteur de « Sous
le soleil » n’est pas placé sous le
signe de l’astre chéri. La galère,
Atep l’a longtemps côtoyée, dès son
enfance dans le quartier des
Camélias et au collège d’où il finit
par être renvoyé à 16 ans : « Je
séchais les cours pour aller écrire ».
Dès 1988, il crée avec quelques amis
le groupe S.O.S (Save Our Soul), qui
de la danse se dirige très vite vers le
rap. « On était pas des enfants de
coeur ». Les premiers succès c’est
avec un de ces « dalons » de S.O.S,
Laz, qu’il les partage en 2000.
Photo : A.F
Le Poisson d’Avril, ou la fête appropriée par les enfants...
Après six ans passés dans le
collimateur de la justice,
pensez vous que votre avenir
politique est compromis ?
>
vailler avec RMC Info ou La Croix,
où les rémunérations sont plus
décentes. Ce qu’il préfère dans son
métier ? Avec son caractère bien
trempé, il le clame haut et fort : «
exercer mon sens critique ».
De la Source à Trace TV, beau
parcours.
Le maxi écrit en créole reçoit un
accueil enthousiaste du public,
notamment
pour
le
titre
«Réunionnais et fiers de l’être »
éponyme de l’album. En 2005, Atep
lance « Seul contre tous », son premier album solo. Le titre « La ! la !
la ! » connaît un franc succès. Il
devient l’un des rares artistes réunionnais à signer avec une major : la
Warner Music France.
En dépit d’une assez bonne rotation
dans les clubs métropolitains, le succès ne vient pas. « Dezil’ est passé
devant moi », déplore l’artiste. En
2006, Atep sort Exotikman, album
qui l’ancre dans le paysage rap
réunionnais.
Cette notoriété, il l’utilise et prête
son image dans la campagne contre
le chikungunya. La raison de cette
implication ? La solidarité réunionnaise, mais aussi son ambition personnelle. Atep évoque sans langue
de bois le coup de pouce économique et publicitaire, de même que
les 3000 euros reçus pour le clip
« Bloques le chik ». «Tout l’argent
que j’ai gagné je l’ai investi dans
mon studio », se justifie-t-il.
Eurydice BAILLET
Aurélie MIREL
Photo : J.T
Photo : J.F.F
« C’était une façon d’être en osmose
avec la population de SainteSuzanne que je respecte énormément. Je voulais tout leur expliquer.
Il fallait qu’elle sache la vérité sur ce
dont on m’accusait et dont on m’accuse encore (Maurice Gironcel a été
entendu mardi dernier dans le cadre
d’une affaire de harcèlement moral.)
Il y a eu tout au long de mon discours une grande volonté de
transparence à l’égard de ceux qui,
en m’élisant de nouveau en 2002,
m’ont accordé leur confiance et me
soutiennent encore aujourd’hui. Une
manière pour moi de leur prouver
ma loyauté en les associant notamment à ma décision de faire appel.
Photo : M.N
> Ce meeting, c’est une façon de
se justifier ?
Un jeune journaliste critique.
1
MÉDECINS DU MONDE FÊTE SES 25 ANS
« Nous soignons ceux que le monde oublie »
Dans l’île, l’ONG se mobilise pour
l’accès aux soins des démunis.
«Nous aidons surtout les sans
domicile fixe en leur proposant une
consultation gratuite dans les boutiques solidarité ou à l’espace dionysien », a expliqué le Dr Gilbert
Potier, délégué régional de Médecins
du Monde Océan Indien, à la villa
du Département, samedi dernier,
V
ingt-cinq ans à soigner les
plus défavorisés, à lutter
contre les exclusions, à
plaider pour faire avancer
les lois et à donner à tous la possibilité d’être soigné : le slogan de
Médecins du Monde, « Nous soignons ceux que tout le monde oublie
peu à peu », s’applique dans le
monde entier.
lors d’une conférence suivie d’un
«goûter ». Une action ciblée sur le
chef lieu qui compte plus de cent cinquante sans logis mais qu’il souhaite
étendre aux autres villes réunionnaises avec le soutien des collectivités.
Proches de La Réunion, Mayotte et
Madagascar accueillent également
des médecins bénévoles. Depuis un
an, l’association a élaboré à l’Ile aux
Parfums un projet d’amélioration de
l’accès aux soins des personnes en
grande précarité et en situation irrégulière. A Madagascar, l’ONG lutte
contre les mauvaises conditions de
santé des détenus dans huit prisons
malgaches avec notamment une
réhabilitation des infirmeries et une
surveillance nutritionnelle des personnes incarcérées.
Photo : V.H
Action d’urgence à Madagascar
VITE DIT
Une équipe de Médecins du Monde toujours prête à agir
LES ARTISTES LOCAUX ET LA POLITIQUE ?
De l’art à la politique
Ces dernières semaines, politique et culture font plutôt
bon ménage. Ainsi plusieurs artistes nationaux multiplient
les apparitions publiques aux côtés de leur candidat favori.
Qu’en est-il de nos artistes locaux ? Vibrent-ils, eux aussi,
au son des discours politiques ?
vot pou intel ou intel ni pou zelektion présidan ou pou lo mer. Mé la
parol lé lib. E mi di sak mi na pou di
dési tout, dési la konsomasion, dési
la rout tamarin… Mi may pa ek
bann stratézi politik sof si sé pou
konbat la menas Le Pen…».
In ti mamzel Ségolène
A Saint-Pierre, Thierry Gauliris,
explique son soutien à Ségolène
Royal comme un choix personnel
D’ailleurs, il refuse les expositions
publiques comme le lui a demandé le
PS local. Qu’on se le dise, si un certain soir d’avril, le chanteur fait
rimer « in ti mamzel » avec Ségolène,
ce sera dans le fond de sa cour et
nulle part ailleurs !
Toutefois, le leader de Baster déplore
certaines prises de position incohérentes de ses homologues nationaux.
Photo : K.S
Joey Starr, Doc Gynéco, Johnny
Halliday et même Les Musclés, pour
ne citer qu’eux. Les artistes nationaux sont de plus en plus nombreux
à prendre part au débat politique.
Pour certains, cela relève du militantisme. Ceux-là prennent publiquement position. Ils s’impliquent et
s’affichent auprès de « leur » candidat à la présidentielle.
A La Réunion, quelle est la position
de nos artistes ? Entre exhibition et
discrétion quel est le parti pris par
nos stars « péi » Le plus engagé de
nos chanteurs locaux, Danyel Waro
précise avoir été éduqué dans une
conscience politique communiste
voire autonomiste bien avant de
devenir artiste. Mais aujourd’hui son
combat de militant, il est pour l’identité réunionnaise et le maloya :
« Zordi mi trouv pa mon kont dann
bann parti politik. Mi apel pa pou
Christophe Fruteau, un artitse qui vote
2
Plus récemment, Médecins du
Monde a dû déclencher une action
d’urgence pour aider la Grande Ile
fortement touchée par le cyclone
Indlala. L’association, subventionnée
par le financement du conseil général, s’est mobilisée pour soutenir les
Malgaches et les médecins locaux
face au bilan catastrophique (88
morts, plus de 130 000 sans abris,
près de 25 000 hectares de cultures
vivrières détruites). « En plus de la
distribution de kits d’urgence, une
équipe de trois personnes a été dépêchée sur place : un médecin, un
administrateur et un logisticien qui
sont à pied d’oeuvre », ajoute le Dr
• Journée citoyenne.
Les Master info-comm
organisent mercredi prochain
devant la cafet’ et la BU de
Lettres, une journée sur la
préservation de
l’environnement. Notons la
présence de Laurent Saget,
instigateur du projet. Rdv à
l’Amphi Genevaux , mercredi
à 18h30.
J.R.
Il se dit notamment déçu par Doc
Gynéco qui a rejoint l’UMP : « Il
devrait être capable d’expliquer clairement ses choix et de défendre les
idées de son parti ». L’association
Doc Gynéco-Nicolas Sarkozy fait
décidément couler beaucoup d’encre.
Pour Atep, le rappeur dyonisien,
c’est du businnes : « A mon avis, il
s’agit d’un partenariat. Chacun a
quelque chose à gagner dans l’histoire. » Pour lui, les artistes-policitiens,
c’est un phénomène de mode qui
vient des Etats-Unis. Quant à son
engagement à lui, il n’existe pas puisqu’il ne vote pas : « Les gens se souviennent de moi aux côtés de Xavier
Bertrand, le ministre de la santé.
Mais c’était seulement un numéro
médiatique au moment de la crise du
chikungunya ».
La musique pour rêver
Christophe Fruteau, du groupe
Verzonroots défend, quant à lui, son
statut d’artiste : « Personnellement,
je n’ai pas envie d’emmerder le
public avec la politique. Ma musique
sert à faire rêver, à raconter des histoires. Les gens sont confrontés tous
les jours à la réalité. » déclare le
chanteur.
Il ne délaisse pas pour autant son
devoir de citoyen et ira, lui aussi, le
22 avril prochain, mettre son bulletin dans l’urne.
Kristel SERAFIN
Gilbert Potier. Pour les trois mois à
venir, ils permettront aux populations d’accéder aux soins, de prévenir des problèmes alimentaires et de
surveiller le démarrage d’éventuelles
épidémies.
Malgré l’intervention de Médecins
du Monde, la remise en état du système sanitaire ébranlé par le cyclone
sera longue. « Une action que les
Réunionnais peuvent soutenir en fai-
sant preuve de générosité », suggère
le Dr Pierre Micheletti, en partance
pour Maroantsetra. L’association
compte sur les donateurs pour pouvoir continuer à oeuvrer. Des donateurs qui préfèrent visiblement donner de leur argent plutôt que de leur
temps ; ils n’étaient guère présents à
la fête…
Vanessa HOARAU
Une association de bénévoles
Créée en mars 1980 par Bernard Kouchner, Médecins du Monde est une
association loi 1901 basée sur le bénévolat de professionnels de la santé
pour apporter une aide aux populations vulnérables en France et dans le
monde. Des missions internationales (en fin de guerre froide en
Afghanistan, en Bosnie-Herzégovine en 1991 dans le cadre du conflit de
l’ex-Yougoslavie, au Rwanda pour secourir les victimes du génocide…),
des missions nationales (les campagnes d’engagement pour l’accès aux
soins des plus démunis…), et des missions locales dans toute la zone
Océan Indien sont réalisées.
Le réseau international de l’association, initié en 1989, se compose de
douze délégations qui, indépendantes les unes des autres, partagent le
même objectif associatif. Toutes les missions reposent sur une
organisation structurée et un déroulement planifié et codifié par
l’association, et surtout sur l’engagement des volontaires et des
bénévoles. Financée par les dons du privé, des subventions
administratives nationales ou internationales, les ressources totales de
Médecins du Monde atteignent aujourd’hui soixante- cinq millions
d’euros. Une somme que tout un chacun peut faire augmenter par des
dons sur le site Internet de l’association :
http://www.medecinsdumonde.org.
MOBILISATION POUR MADAGASCAR
Ambiance « malagasy »
Photo : A.M
Pour fêter ses vingt-cinq ans, samedi dernier, l’association
Médecins du Monde a organisé à Saint-Denis une aprèsmidi dédiée aux bénévoles et aux donateurs. L’occasion
pour le président national de l’association, le Dr Pierre
Micheletti, de rappeler les missions réalisées par delà le
monde.
Le groupe « Rosette » a envoûté le public.
C’est la particularité de l’action qui
Pour la centaine de personnes préa décidé Soavola à donner : « Amitié
sentes à la salle Candin samedi soir,
ensemble Mada va aller sur place
c’était l’occasion de joindre l’utile à
pour apporter les dons, ils vont
l’agréable, lors d’un show aux couaussi les filmer ». Pour Christopher,
leurs de la grande île. Les danseuses
le percussionniste du groupe
de « Magic Salegy » et de « 333 tsy
«Destyn », cette mobilisation va de
mihava junior » se sont déhanchées
soi : « Kom nout band zorizin lé
sur les rythmes familiers du salegy,
malgash, nou fé sa pou zot ». Le
mais aussi sur ceux du kawitry. Le
groupe engagé participe aussi tous
groupe « Rosette » a enthousiasmé
les ans à Mada-solidarité.
le public en interprétant des chants
repris à l’unisson par un public d’aLa présidente d’honneur de l’assovertis. Le groupe de Nossi-Bé a pu se
ciation, Gisèle Norine, satisfaite de
l’opération, prévoit d’ores et déjà
produire aux côtés de « Destyn »,
d’autres concerts : « D’autres soirées
«El diablo », « Ensamb zot »,
seront programmées, d’autant plus
«Lindigo », « Class Harmony »…
qu’il y’a un autre cyclone en vue,
Une fête marquée par la solidarité et
Madagascar a toujours besoin d’ail’espoir. « J’ai de la famille là-bas du
de».
Affaiblie
par
Indlala,
côté de ma mère, confie Laetitia, 16
Madagascar se prépare à présent à
ans une des danseuses de « 333 tsy
l’arrivée ,imminente d’un autre
mihava junior », je sais que ça va
cyclone: Jaya.
changer quelque chose ». Soavola a
grandi à Mananaranor une des villes
Aurélie MIREL
touchées par le météore Indlala. La
Journal
Ecole
Varangue
quadragénaire, plus sceptique,
Département des Sciences de
avoue ses craintes quant à l’arrivée à
l’information et de la communication.
Faculté des Lettres et Sciences
bonne destination de l’argent.
humaines. Université de la Réunion.
Directeur de la publication :
« D’habitude, je ne donne même pas
Bernard Idelson
un cent, car c’est souvent les gens
Rédacteur en chef : Laurent Decloitre.
Secrétaires
de rédaction :
bien placés qui ont les sous, les pauAlessandro Zachetta, Jérôme Robert
vres eux n’ont que les miettes ».
Diffusé auprès de 10 000 étudiants
LA POUSSE À LA RÉUNION, UN PHÉNOMÈNE CULTUREL
La fureur de vivre à 245km/h
Le mec, mort éjecté ! Il a fallu récupérer son corps perché dans un
arbre. Et là c’est atroce ! ». Olivier,
l’ex-pousseur, en a bien conscience.
« La pousse, c’est juste histoire de se
mesurer à l’autre... L’orgueil masculin, c’est comme ça ! ».
Pour Michael Vauthier, psychologue
à Saint-Denis, la voiture est « une
histoire de mecs». Sur le plan physique, elle est la continuité du corps
car l’engin représente le prolongement phallique. « La voiture est une
armure que je vais mesurer à l’autre.
J’ai besoin de me sentir exister dans
la confrontation ». En clair, « se
dépasser, un aspect typique de l’orgueil mâle ». Mais la pousse, c’est
aussi la transgression de l’interdit.
mettre en danger la vie d’autrui. Et
ça peut nous être reproché »
explique Pierre Maunier, chef de la
brigade d’information de la voie
publique de la sécurité publique.
Un phénomène
difficile à maîtriser
Aussi, les policiers essaient d’intervenir en bout de course pour le constat
des délits, en bloquant les sorties de
la voie rapide, ou avant le début de
la course, pendant les « préliminaires ». Illustration à bord d’une voiture banalisée de la brigade policière. Entre les « Bravo Papa Tango » et
les « Walter Milan Milan 2 », nous
nous approchons du Mac Do du
Photo : D.R
Les moyens d’agir de la police
Pousse rime avec vitesse et orgueil
Réelle passion pour certains, transgressions des règles
pour d’autres, ils sont plusieurs centaines de pousseurs à
se donner rendez-vous tous les soirs sur les routes de l’île.
Qui sont-ils ? Jusqu’où sont-ils prêts à pousser ? Les
opérations menées par les forces de l’ordre ne semblent
pas suffisantes pour les faire rentrer dans les rangs.
Vendredi, 00h30, aux feux de
l’Umab, c’est l’effervescence. Une
cinquantaine de bolides se sont
donné rendez-vous devant les spectateurs massés sur les bas-côtés de la
route.Voitures lustrées, tunnées, aux
lumières de vaisseaux spatiaux,
musique « à fond la caisse »... Le
but : faire vrombir son moteur et
crisser ses pneus pour attirer l’attention des spectateurs. Un peu de
« m’as-tu vu pour impressionner les
futurs adversaires et emballer les
filles venues les encourager, telles des
pompom-girls… Moyenne d’âge 1625 ans, en vêtements de marques tels
des stars de hip-hop… même si la
plupart ne travaillent pas. Avant le
départ imminent, les conducteurs se
cherchent du regard, se provoquent
par des hochements de tête, tout cela
dans un méli-mélo de cris d’encouragements des supporters… Après
trois coups de klaxon, c’est parti, la
course est lancée : démarrer le plus
vite et arriver le premier sous la bretelle du Chaudron, à une vitesse
moyenne de 140km/h !
« C’est pour l’adrénaline
qu’on pousse »
« C’est la passion pour la vitesse qui
nous entraîne. On pousse pour la
sensation, l’adrénaline », explique
Mathias, 21 ans, étudiant en comptabilité à Saint-Denis. Mathias s’adonne à sa passion tous les soirs
avec une Clio RS Sport. C’est avec
son frère qu’il a découvert la pousse.
Selon lui, « l’UMAB, c’est pour les
petits joueurs, c’est plus pour faire
leur dentel ! » ricane-t-il. « Le mieux
pour pousser vraiment, c’est à
Quartier Français le jeudi soir, ou
sur la ligne droite de Savannah
Saint-Paul ». Avec une distance de
course plus longue, il est plus facile
d’atteindre les 245km/h.
Déjà arrêté pour excès de vitesse lors
d’une pousse, le fou du volant a
écopé d’une amende de 135 euros,
d’un retrait de trois points sur le permis plus un passage au tribunal.
« Les gars te sermonnent un peu et
puis c’est tout ! Qu’est-ce qu’il peuvent faire de plus de toute façon ?»
lance-t-il simplement. « Il m’a fallu
deux ans pour récupérer mes points,
mais le lendemain, je poussais à nouveau ».
Incorrigible et récidiviste jusqu’au
bout, même les accidents ne font pas
peur à Mathias. « J’étais en train de
pousser à Quartier Français à
160km/h avec une Renault Mégane,
c’est rien 160 ! J’ai regardé un petit
coup dans le rétroviseur, et c’est là
que j’ai tapé dans la barrière de sécurité ». Bilan de cet accident, un bras
et une jambe cassés et le cou immobilisé dans une minerve. A-t-il eu
envie de se ranger ? « Une fois,mais
je n’ai pas tenu. Un gars n’arrêtait
pas de m’appeler, de me titiller, j’ai
cédé à la tentation ».
Certains accidents parviennent tout
de même à faire réfléchir les accros
de vitesse. Olivier, 22 ans, se souvient encore d’un soir de novembre,
à l’Étang Salé. « J’ai failli me retrouver dans la petite boîte. Le pire,
c’est que je roulais tranquillement à
180 km/h. Je me suis endormi au
volant et je suis parti dans le
décor ! ». Résultat, une nuit à l’hôpital pour quelques contusions. Un
véritable miraculé. Depuis, l’animateur radio a remis son moteur d’origine et s’est rangé. « Quand tu as vu
la mort en face, crois-moi tu prends
conscience de ce que c’est la vie »
confie-t-il les yeux larmoyants.
« Mais il y a des gars à qui ça ne fait
pas peur, et ils recommencent. À
son
trip
!».
chacun
Un trip qui attire également les filles
qui se mettent depuis peu à pousser.
Pas toujours celles à qui l’on pense.
On l’appellera Hélène, 26 ans, secrétaire de police. Elle a découvert le
milieu par son copain, également
policier et pousseur depuis quatre
ans. À bord de sa Subaru Impreza
STI, elle recherche le mélange de
peur, d’excitation. « J’aime la vitesse, c’est un défi ». Policière le jour et
pousseuse la nuit ? Aucun problème
de conscience ! Hélène fait bien la
distinction entre sa vie professionnelle et sa vie privée. « Si j’avais été
des services d’intervention, j’aurais
pris du recul et fait gaffe ». Et si elle
se faisait prendre ? « Si cela m’arrive
je rendrai des comptes à la justice
comme n’importe quelle citoyenne ! ».
Dans « la petite boîte »
C’est en moto que la pousse est la
plus impressionnante, les engins
montent jusqu’à 340km/h. Ce qui
n’empêche pas certains automobilistes de les provoquer. « Il m’est déjà
arrivé d’être à 210km/h en moto : là
tu te sens invincible, et voilà qu’une
Subaru t’accoste, te provoque et te
dépasse. Et bien là, tu n’acceptes pas
tu remets un petit coup d’accélérateur », témoigne Pascal, passionné
de moto et de rallye. Un jeu qui peut
être fatal. « Je me souviens d’un gars
qui a perdu le contrôle de sa moto.
La préparation du moteur et l’aménagement d’une voiture représentent
autant de modifications qui ne respectent plus le code de la route, et sont
considérées comme un délit. « Le fournisseur des pièces est lourdement
sanctionné et risque une peine de prison et une fermeture administrative
de trois ans du magasin, s’il y a preuves qu’il a modifié les paramètres de
la voiture » précise Joël Jaldoreau, policier et chef de la formation des
motocyclistes urbaine départementale Pour le tunning, toute addition de
pièces non conformes au code de la route est considérée comme
infraction, et passible d’une amende de 135? et d’une immobilisation du
véhicule sur le bord de la route.
Les pouvoirs publics ont mis en place des dispositifs d’observation sur
les points de pousse. Lors des interpellations, les policiers peuvent
immobiliser la voiture, les textes ne leur permettant pas de la confisquer
à son propriétaire. Par ailleurs, ils ne peuvent verbaliser que les excès de
vitesse, les véhicules non conformes, la mise en danger de la vie d’autrui,
et les infractions au code de la route. D’autre part, afin de suivre et de
repérer les pousseurs récidivistes, les forces de l’ordre relèvent les
numéros d’immatriculation. De plus, par le dispositif du radar
automatique embarqué sur leurs véhicules cachés à proximité des
champs de courses, l’envoi des procédures pour une convocation au
tribunal se fait de manière instantanée. La semaine dernière, sept
pousseurs ont été condamnés pour mise en danger de la vie d’autrui par
excès de vitesse. Des faits reprochés qui remontent à juin 2003. Les
peines prononcées ont été sévères : deux ou trois mois de prison avec
sursis, 500 à 1000 euros d’amende et six mois de suspension du permis
de conduire pour chacun des sept.
«Ils testent leur propre limite par le
jeu avec l’arrivée des flics. La police
symbolisant l’autorité parentale, et
donc l’interdit » poursuit le psychologue.
Selon Emmanuel Allabatre, commissaire principal de police, chef du service de sécurité de proximité de
Saint-Denis, « faire disparaître ce
phénomène est une tâche très difficile, car les textes de loi ne sont pas
adaptés à la pousse ». (Voir encadré)
Il faut également gérer les spectateurs souvent nombreux à admirer
cette forme de spectacle. « Il est déjà
arrivé qu’ils se liguent contre
nous ! ». À cela s’ajoute la difficulté engendrée par la prise de risques
que prennent les pousseurs et les
équipes de police lors d’une interpellation. « C’est dangereux car si on
les poursuit, ils prennent des risques
fous, au point de se planter ou de
centre-ville. Bonne pêche : une cinquantaine de voitures s’apprêtent à
passer la soirée le pied sur l’accélérateur. Un amateur nous repère et provoque en demandant du feu à la
fenêtre du chef de police, bière à la
main et joint à la bouche. Soudain,
tout se précipite. Les renforts arrivent. Gyrophares allumés, les officiers de la compagnie d’intervention
encerclent les lieux. Impossible de
passer à travers mailles, toutes les
rues sont bloquées. Bilan, une dizaine de pousseurs conduits au commissariat et un véhicule immobilisé
sur place. De quoi calmer la soirée.
Ce soir les pousseurs devront ronger
leur frein jusqu’à la prochaine course. Visiblement rien ne semble pouvoir les arrêter, pas même la loi,
exceptée…la mort.
Laura CHATEAU
Afin de gagner en vitesse, les pousseurs investissent beaucoup d’argent dans la préparation du moteur et
l’aménagement de leur voiture. Jusqu’à 15 000 euros, pour des changements de pièces : puce électronique à 600
euros pour gagner entre 40 à 100 chevaux, arbre à cames, filtre à air, pot d’échappement, et les jantes alu à
2000 euros, rien n’est laissé au hasard. Puis, il y a ceux qui mélangent de l’essence à du « Nos », un gaz qui
permet à la voiture de décoller plus vite au démarrage. Soit 600 euros la bonbonne pour rouler seulement 800
mètres. « C’est ce que j’appelle rouler avec une bombe ambulante. Il suffit d’une petite étincelle et la voiture
peut exploser à tout moment ! Ils prennent vraiment des risques insensés ! » déplore Olivier, ex-pousseur. Vient
ensuite la partie esthétique : le tunning. Pot d’échappement, bas de caisse rabaissé, sièges auto sport, feux et
jeux de lumières en couleur : néon de lumière noire style boîte de nuit au plafonnier intérieur à 30 euros, un
second, sous la voiture, style vaisseau spatial à 150 euros minimum… Les pousseurs font parfois des paris pour
un montant de 200 à 400 euros minimum, ou mettent en jeu leur carte grise, c’est-à-dire la voiture. Une mode
lancée par le film Fast and Furious…
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Photo : D.R
Du fric à gogo…