Techn`hom, Belfort, France
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Techn`hom, Belfort, France
Techn’hom, Belfort, France A. Adresse du site : Techn’hom, avenue des Usines, 90 000 Belfort B. Contact : Sempat Techn’hom 3 - 17 rue Sophie Germain 90000 Belfort Tel. +33 (03) 84 26 10 39 e-mail : [email protected] C. Brève description : A l’origine : Techn’hom trouve son origine dans l’implantation de deux entreprises alsaciennes : la filature Dollfus, Mieg et Cie (DMC) et la Société alsacienne de constructions mécaniques (SACM), toutes deux installées à Belfort pour conserver leur marché français suite à la signature du traité de Francfort le 10 mai 1871 prévoyant l’annexion de l’Alsace et de la Lorraine à la Prusse. L’une d’entre elle, aujourd’hui mondialement connue sous le nom d’Alstom, est toujours en activité et emploie 2700 salariés sur le site1, soit près de 40 % de l’ensemble du personnel travaillant au Techn’hom. C’est en 1879 que l’entreprise originelle, la SACM, acquiert des terrains le long de la voie ferrée Belfort-Paris et commence la construction d'une usine destinée au montage et au finissage des locomotives. Le premier bâtiment abrite l'atelier de chaudronnerie, puis successivement le montage et l'ajustage des locomotives, la trempe, la menuiserie, l'aiguiserie et la fonderie de fonte. Cette dernière, d'où sortent également des affûts de canons, sera agrandie en 1898 et 1917. Fin 1881, devant l'afflux des commandes de locomotives, les ateliers sont aménagés pour assurer leur fabrication complète. En 1888, la société se lance dans la production de machines textiles et fait construire un atelier à cet usage en 1893, agrandi en 1897 et 1899 : 9000 métiers à tisser, métiers continus à filer et peigneuses sortiront des ateliers jusqu'en 1919. En 1888 débute la fabrication de matériel électrique (câbles, dynamos, alternateurs, moteurs asynchrones, transformateurs) mis en service dans les centrales électriques pour l'éclairage public et dans le domaine de la traction électrique (équipement de tramways, locomotives pour mines et usines). L'entreprise connaît à cette époque d'importants agrandissements vers le nord : un atelier de câblerie est édifié en 1888-1889, un atelier de modelage en 1890, un atelier des grandes dynamos en 1900 (agrandi en 1910), un atelier d'enroulement et de montage des petites dynamos, un atelier de fonte de bronze en 1905 (agrandi en 1923). Une école d'apprentissage est ouverte en 1907. Les productions traditionnelles sont interrompues pendant la première guerre mondiale, remplacées par la fabrication de matériel de guerre : câbles télégraphiques et téléphoniques, matériel de TSF, alternateurs pour postes d'avions et 5 millions d'obus. A la suite du rattachement de l'Alsace à la France après la guerre, l'usine s'oriente vers les fabrications électromécaniques (turbines à vapeur, moteurs de laminoirs, groupes turbo-alternateurs) et commence la construction des locomotives électriques. Le redéploiement des activités (transfert de la fabrication des locomotives à vapeur à Graffenstaden, des câbles à Clichy et du matériel textile à Mulhouse) nécessite une réorganisation du site et la construction de nouveaux bâtiments au nord et à l'ouest : usinage des petites dynamos, fabrication des transformateurs, tôlerie, tréfilerie de cuivre et préparation des enroulements, atelier d'appareillage électrique. En 1928, la SACM s'allie au groupe Thomson-Houston et devient Alsthom. La production de l'entre-deux-guerres est tournée vers l'équipement des centrales thermiques et hydroélectriques, des sous-marins, navires militaires et civils, ainsi que l'électrification des lignes de chemin de fer. En 1946, les terrains et bâtiments de l'ancienne filature de coton Georges Koechlin et Cie sont achetés et convertis en atelier d'usinage et d'assemblage, et en école d'apprentissage. Après la seconde guerre mondiale, l'usine équipe les centrales hydroélectriques du Rhône et du Rhin ; elle fournit les groupes-bulbes de la centrale marémotrice de la Rance, puis les centrales nucléaires. De très nombreux bâtiments sont édifiés au cours du 20e siècle par l'entrepreneur belfortain Tournesac. Rebaptisée Alstom en 1998 lors de son entrée en Bourse, la société est aujourd'hui un groupe international regroupant sur le site belfortain Alstom Power, Alstom Transport et Alstom Hydro France, ainsi que de nombreuses autres entreprises dont General Electric et plusieurs sous-traitants et filiales. 1Au 1er janvier 2012. 1 A proximité au sud se développe conjointement la filature DMC. Spécialisée dans la fabrication d'indiennes puis dans la production de fils à coudre et à broder (coton, lin et soie), l’entreprise achète des terrains cette même année de 1879 et commence la construction de son usine textile (retorderie) qui ne cessera de s’agrandir jusqu’à la seconde guerre mondiale avec la construction d'un atelier de finissage (1902-1903), une filature à étages, une salle des machines et des chaudières, une cheminée, un magasin de coton et filés, un bâtiment de services divers (buanderie, séchoirs, magasin de soude et déchets) et une cantine (1904-1905), l'agrandissement de l'atelier de blanchiment du fil, l'extension vers l'ouest du magasin de coton et le prolongement méridional de 143 m de l'atelier de finissage (1910-1912), un nouvel atelier de retordage (vers 1930) et le prolongement de l'atelier de teinturerie (1939). Le regroupement des activités textiles à Mulhouse entraîne la fermeture de l'établissement en 1960, lequel est aussitôt racheté par la Compagnie Française des Machines Bull. Elle y transfère de Saint-Ouen (93) les chaînes de matériel électro-mécanique (ateliers de mécanique, câblage, montage). Différents bâtiments seront construits : atelier de fabrication, bureaux, local de réception et d'expédition, restaurant d'entreprise. Achetée en 1964 par General Electric, puis par Honeywell en 1970, la société fusionne en 1976 avec la Cie Internationale pour l'Informatique. Suite à la nationalisation de la société en 1982, l'usine de Belfort devient Bull-Périphériques en 1983 et se spécialise dans les matériels périphériques d'ordinateurs. Elle connaît des difficultés à partir de 1985 et ferme vers 1992 avant d’être transformée en Technopôle un an plus tard. D. Localisation : A l’ouest de Belfort, le long de la voie ferrée. E. Datation et architectes : A l’origine : Tournesac (entrepreneur) pour la SACM, auquel s’ajoutent pour DMC : Hardy Léopold Amédée (architecte), Dion Henri de et Piketty Paul (ingénieurs), Fives-Lille et Schneider (fabricants). De nombreuses campagnes de construction se sont succédées tout au long du 4e quart du 19e siècle et du 20e siècle. Lors de la reconversion : En 2003, la reconversion est confiée au cabinet Reichen et Robert & associés, et plus particulièrement à l’un d’entre eux Marc Warnery. F. Typologie du site : Industries textile et de construction mécanique à l’origine du développement économique et démographique de la cité du Lion. G. Etendue du site : Techn’hom s’étend sur plus de 100 hectares dont 500 000 m2 de bâtiments. H. Composition du site : Techn’hom s’organise en cinq zones. Le site historique de DMC est fractionné en trois quartiers : Techn’hom 1 au sud-est, Techn’hom 2 au sud-ouest, puis Techn’hom 3 constitué des bâtiments situés le long de la rue de Broglie d’une part et du site médian d’autre part. Les deux derniers quartiers restent fidèles au découpage initial et concernent le site historique d’Alstom (Techn’hom 4) et celui de Cravanche (Techn’hom 5). En termes de bâti, Techn’hom consiste essentiellement en une architecture industrielle caractéristique de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle comprenant une série de longues halles horizontales disposées en lanières parallèles, construites en briques à deux niveaux percés de larges baies rectangulaires formant une succession de travées symétriques et surmontées de toits terrasse. Les bâtiments datés du 20e siècle se développent davantage en hauteur (Alstom). En plus d’une qualité architecturale incontestable, le site bénéficie d’un environnement naturel agréable composé d’alignements d’arbres et de deux étangs. I. Promoteurs et motivation : Dès le début, ce projet de parc urbain à vocation économique affiche son ambition et vise deux objectifs principaux. Le premier consistait à assurer le maintien et le développement de l’emploi. Autrefois dominé par la culture ouvrière et industrieuse, le site a laissé place à un univers davantage technologique et scientifique. La volonté de la Sempat était d’attirer de nouvelles entreprises non pas sur la base de locaux vacants, mais plutôt sur celle de la réussite et de l’expertise des sociétés présentes sur le site, source de richesse. Le second objectif visait à diversifier ses fonctions pour accroître l’attractivité c'est-à-dire encourager l’accueil de nouveaux 2 investisseurs et le développement de l’emploi tertiaire, en particulier dans le service aux entreprises. Rétroactivement l’analyse de ce long processus de mutation montre que l’intérêt premier des élus visait avant tout la préservation des emplois ainsi que le maintien et le développement économique, la valeur patrimoniale du lieu étant au départ une donnée secondaire. Cependant celle-ci a su s’imposer au fil du temps non seulement grâce à la qualité du geste de la maîtrise d’œuvre qui a su révéler l’objet, mais aussi à l’évolution de la perception portée au patrimoine dont la valeur ajoutée est aujourd’hui devenue incontestable pour les différents protagonistes engagés à un titre ou à un autre au sein de Techn’hom : politiques ou industriels. J. Etat de la reconversion : Techn’hom, parc urbain d’activité économique constitué en Zone d’Aménagement Concertée (ZAC), est un projet fédérateur réunissant deux sites industriels séculaires. Il est porté par plusieurs acteurs dont la communauté de l’agglomération belfortaine (CAB), le Conseil général, le Conseil régional, l’Etat, l’Europe (fonds FEDER), Alstom et la Sempat, société d’économie mixte (SEM) chargée de la gestion du bâti. Propriétaire depuis 1993 des anciens locaux de Bull, la Sempat les loue aujourd’hui presqu’en totalité. Face au succès économique de la reconversion du site Bull en Technopôle, la société a renouvelé l’opération en 2005 en rachetant 60 000 m2 environ de locaux Alstom au nord-ouest du site, puis 100 000 m2 en 2009 essentiellement occupés par General Electric. Le plan directeur destiné à l’aménagement de l’espace a été établi à l’issue d’une analyse approfondie du site, de ses potentialités urbaines mais aussi de ses dysfonctionnements. Le but : valoriser et redynamiser ce quartier industriel fonctionnant autrefois en « vase clos ». L’opération visait d’une part à ouvrir le site au contexte urbain afin de faire émerger un quartier dans la ville tout en lui conservant son identité et son histoire industrielle ; et d’autre part à appréhender globalement et dans une cohérence ces entités industrielles auparavant distinctes. Rationaliser les flux par une nouvelle organisation de l’espace viaire tout en considérant les nouvelles pratiques et les évolutions possibles, tel a été l’un des axes forts du projet dans une démarche d’urbanisme durable. En plus d’une intervention sur les espaces publics en vue d’assurer la sécurité du lieu, d’améliorer son accessibilité, sa desserte ou son parc de stationnement et afin de répondre aux exigences de la plupart des entreprises, l’intérêt accordé au paysage environnemental naturel est aussi un axe fort du projet. Le site présente des éléments paysagers de qualité avec zones de verdure et plans d’eau. Faisant partie intégrante de l’esprit du site, ce patrimoine naturel a fourni l’amorce de trames vertes pour le projet urbain encourageant la mobilité douce. Les alignements d’arbres et les bords de l’étang ont en effet constitué des outils de requalification et de valorisation de la structure du bâti et des espaces libres Compte tenu de l’ampleur du site, de sa vocation économique et du dynamisme de la gouvernance, Techn’hom reste en renouvellement perpétuel. Des projets sont en cours sur Techn’hom 3. Activité économique : industrie secondaire et tertiaire adossée à la recherche (R&D privée et recherche publique par la présence de l’université de technologie de Belfort-Montbéliard) ; Services aux entreprises : crèche, restaurant, banque, centre de remise en forme, petits commerces de proximité (coiffeur, boulangerie, etc.). K. Mémoire du monde du travail : Les témoignages du monde du travail sont constitués par des outillages (Bull). Fonds d’archives. L. Réussites ou échecs : Par son intelligence et sa fidélité à l’esprit des lieux, cette opération de revitalisation territoriale qu’incarne Techn’hom témoigne de la bonne conciliation entre impératifs économiques et respect patrimonial. Respect d’autant plus nécessaire que le site bénéficie d’un ancrage historique fort et d’une qualité architecturale dont ne profitent pas tous ces projets d’envergure. L’esthétisme des lieux se met ici au service d’une économie qui ne saurait trahir son patrimoine. Au croisement de diverses préoccupations, Techn’hom apparaît à la fois comme un support historique dynamisé c'est-à-dire un symbole fort, incarnant identité territoriale et respect d’une mémoire industrielle, mais aussi comme un espace économique en devenir autant respectueux des nouvelles politiques urbaines et environnementales qu’ouvert sur le 21e siècle en termes d’exigences industrielles, et soucieux de développer un lien étroit avec la recherche et le développement. 3 M. Coûts et investissements : - Partie aménagement : 30 millions d’euros environ Financeurs : CAB, Conseil général 90, Conseil régional Franche-Comté, Etat, Europe (Feder), Sempat, Alstom et fonds issus des ventes des charges foncières logement. - Partie investissement immobilier : 176 millions (conception et réalisation) Financeur : Sempat, investissement couvert par les loyers et les ventes. Investissements à venir dont Techn’hom 3 : Dépenses d’aménagement : 3, 5 millions d’euros Dépenses investissement immobilier : 20 millions d’euros N. Bibliographie : - BELOT, Robert et LAMARD, Pierre (dir.). « Alstom à Belfort. 130 ans d’aventure industrielle ». Boulogne-Billancourt : ETAI, 2009. 377 p. - FAVEREAUX, R. Patrimoine industriel du Territoire de Belfort. Paris : Monum éd. du patrimoine, 2004. 160 p. - FAVEREAUX, R. Architecture et industrie. Territoire de Belfort. Conflandey : Maé éditeurs, 2004. 76 p. (Images du patrimoine ; 230) - GASNIER, Marina. « Patrimoine industriel et technique. Perspectives et retour sur 30 ans de politiques publiques au service des territoires ». Lyon : Lieux Dits, 2011. 304 p. (Cahier du patrimoine) - GASNIER, M. « Techn’hom ou l’art d’une politique patrimoniale de développement économique ». Actes du colloque Le patrimoine industriel : nouvelles politiques urbaines et sens de la reconversion (Belfort, 21-24 septembre 2011). In L’archéologie industrielle en France, 60, 2012 , p. 178-188. - GASNIER, M. « Hybride entre préservation patrimoniale et innovation technologique : Techn’hom à Belfort », in revue L’homme et la Société, à paraître en 2013. O. Auteur et date de la rédaction de la fiche : Raphaël Favereaux ; Marina Gasnier ; Pierre Lamard, juillet 2012. Triangle de survie 4 Vue générale de la SACM au début du 20e siècle. Le site, ceinturé, est doublement séparé de la ville par la ligne de chemin de fer située à l’est. (AD Belfort 42 Fi-3) Vue générale de Techn’hom avant la fin des travaux d’aménagement. Au premier plan, le site historique de la Société Alsacienne de Constructions Mécaniques, actuellement Alstom et General Electric. Au fond, le site historique Dollfus, Mieg et Cie et son étang (Cliché : source Sempat, 2007). 5 Plan général de Techn’hom. Aménagement et valorisation des espaces publics. Extrait du plan directeur défini par Reichen et Robert & associés, décembre 2007. (Source : Sempat) 6 Ancien atelier de la filature DMC reconverti pour accueillir le siège européen de General Electric Energy Product © Marina Gasnier, 2011. Ancien magasin industriel DMC transformé pour accueillir les activités de recherche de l’entreprise Converteam. Anciens et nouveaux matériaux entretiennent un dialogue étroit. © Marina Gasnier, 2011. 7 Ancien atelier d’usinage Alstom converti en centre technologique pour General Electric. © Marina Gasnier, 2011. Restaurant « La Table » implanté au cœur de Techn’hom © Marina Gasnier, 2011. 8 Vue du bâtiment tertiaire Alstom dédié aux services d’ingénierie et de management de projets des centrales énergétiques. Sur toute sa hauteur, l’intérieur se pare de murs « végétalisés ». © Marina Gasnier, 2011. Scénographie lumière mise en œuvre sur Techn’hom. Document extrait de : « Aménagement du site de Techn’hom – scénographie lumière – avant projet sommaire » Concepteur lumière : l’Atelier lumière – Pierre Nègre & Lucas Goy, 2006 (Source : Sempat). 9