ANTOLOGÍA DE LA MATERIA DE DESARROLLO HUMANO 4

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ANTOLOGÍA DE LA MATERIA DE DESARROLLO HUMANO 4
ANTHOLOGIE DE LA MATIÈRE DE
DÉVELOPPEMENT HUMAIN 5
Automne 2012
1
TABLE DE MATIÈRES
Programme
Lectures
1. La personne dans une organisation.
2. La personne dans la philosophie de l’organisation.
3. Le travail dans le développement humain.
4. Les 7 habitudes des gens très efficaces.
5. La gestion des talents.
Annexes
Test pratique.
Pp.
3
7
8
9
12
31
35
49
50
2
PROGRAMME DE DÉVELOPPEMENT HUMAIN V
Automne 2010
Heures par semaine : 10 h.
Durée du cours : trois semaines.
Objectif général.
L’étudiant sera capable d’identifier l’importance de se développer dans une organisation tout en respectant les normes et philosophie de cette
institution. Il saura appliquer ses connaissances et potentiel pour atteindre ses objectifs.
leçon
1
2
3
4
5
sujet étudié
La personne dans une
organisation.
1.1. Le département de
gestion des ressources
humaines.
1.2. Planification et contrôle
de la gestion.
2. La personne dans la
philosophie
de
l’organisation.
2.1. Le succès de la
philosophie.
2.2. La
relation
entre
l’association,
l’entreprise collective et
les membres dans une
structure
de
type
coopératif.
3. Le travail dans le
développement humain.
3.1. Le sens du travail.
1.
Révision générale.
objectifs spécifiques
Connaître le rôle d’une
personne
dans
une
organisation.
activités
Se placer dans une
entreprise. Raconter
des
expériences
vécues.
matériel
Anthologie,
lecture basique,
pp. 8.
produit
Incorporer le concept de
« philosophie » dans la vie
des élèves comme un
élément
recteur
d’un
comportement.
Comparer
les
différentes
philosophies de vie
des élèves.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 8-9.
Rechercher quels sont les
départements
qui
composent
une
organisation.
Être capable d’apprécier
l’importance des éléments
d’une organisation.
Quels
sont
les
éléments
indispensables
qui
assurent
le
fonctionnement
de
l’ICUM ?
Envisager son futur
dans l’ambiance du
travail.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 10-12.
Rechercher
philosophies
entreprises
gastronomie.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 12-14.
Réflexion : quels sont les
piliers de ma vie ?
Comparaison avec ceux
d’une organisation.
Révision générale du
Anthologie,
Connaître
travail.
qu’est-ce
le
de
trois
trois
de
3
Premier examen partiel.
6
3.2.
L’évolution du concept
du travail.
Différence entre travail
et emploi.
Connaître
l’histoire
du
travail à côté de l’évolution
humaine.
Pourquoi
travaille-ton ?
Travail et santé.
Savoir la raison pour
laquelle le travail est
important dans la vie.
Qu’est-ce que le sens
du travail ?
La centralité du travail.
Qu’est-ce
que
représente le travail ?
Reconnaître la signification
du travail à nos jours.
La
cohérence
du
travail.
3.10. Stimuler l’engagement
des employés.
3.11. Le
modèle
sociotechnique.
Révision générale.
Deuxième examen partiel.
Connaître l’importance de
l’engagement
et
du
compromis
dans
le
développement du travail.
3.3.
7
3.4.
3.5.
8
3.6.
3.7.
3.8.
9
10
11
12
contenu.
3.9.
4.
Les 7 habitudes des
gens très efficaces.
4.1. La pro activité.
4.2. « Commencer avec la
fin en tête ».
4.3. « Mettre les premières
choses en premier ».
4.4. Pensez
« gagnantgagnant ».
4.5. Chercher tout d’abord
à comprendre, ensuite
à être compris.
4.6. Créer des synergies.
Faire un axe du
temps
avec
les
périodes historiques
et
la
forme
de
travailler.
Réflexion :
est-il
vraiment
indispensable
de
travailler ?
lecture basique,
pp. 8-14.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 14-16.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 17-21.
Réflexion : qu’est-ce
que
le
travail
représente
maintenant
pour
moi ? Et dans l’avenir
proche ?
Débat :
Jusqu’où
arrive
l’importance
des
collaborateurs
dans
une
organisation ?
Anthologie,
lecture basique,
pp. 21-26.
Révision générale du
contenu.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 26-31.
Reconnaître les « clefs au
succès »
Analyser
les
erreurs comme une
voie d’apprentissage.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 16-31.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 31-33.
Reconnaître les « clefs au
succès »
Débat : quels sont
mes habits pour avoir
du succès ?
Anthologie,
lecture basique,
pp. 33-35.
Réflexion : pourquoi suisje
unique
dans
le
monde ?
Quels
avantages
représente
cela ?
Recherche sur les modes
de
production
économique :
comment
gagnait-on
l’argent
autrefois ?
Réflexion :
comment
balancer le travail pour
qu’il n’affecte pas la santé
et la vie privée ?
Réflexion :
que
représente le travail pour
ma famille ?
Recherche sur les droits
des employés et leur
importance
sur
le
développement
d’un
employé.
Réflexion :
quand
et
pourquoi est-ce que je
considère que quelqu’un
a eu du succès ?
4
13
14
15
4.7. Aiguiser votre lame.
5. La gestion des talents.
5.1. Émergence
du
management
des
talents.
5.2. Attitudes au travail et
pratiques managériales
« atypiques »
5.2.1. Le cas de Silicon
Valley.
5.3. Les
conditions
d’existence
du
management
des
talents.
5.4.
Qu’est-ce
que
le
talent ?
5.4.1. Des
facteurs
« internes ».
5.4.2. Des
facteurs
« externes ».
5.4.3. Des
facteurs
« relationnels ».
5.5. La relation symétrique
et duale entre individu
et organisation.
5.6. L’économie du talent.
5.7. Le
modèle
du
management
des
talents.
Révision du cours.
Troisième examen partiel.
Connaître
talent.
qu’est-ce
un
Réflexion : quels sont
mes talents ?
Anthologie,
lecture basique,
pp. 35-39.
Réflexion : comment puisje
appliquer
les
7
habitudes à mes affaires
quotidiennes ?
Être capable de gérer les
talents propres.
Lecture commentée :
comment développer
mes
talents
personnels ?
Anthologie,
lecture basique,
pp. 40-47.
Recherche :
qu’un talent ?
Révision de tout le
cours.
Anthologie,
lecture basique,
pp. 31-48.
qu’est-ce
5
6
Évaluation.
A. Note.
Évaluation
1e partiel
2e partiel
3e partiel
Examen final
Total
Rubrique
Examen
Exposé
Devoirs
Examen
Exposé
Devoirs
Examen
Exposé
Débat
Devoirs
40%
40%
20%
40%
40%
20%
40%
30%
30%
20%
Valeur
20%
20%
20%
40%
100%
Attention. Aucun examen n’est accumulatif, hormis le final.
L’élève ne peut pas dépasser la quantité d’absences aux séances établie par l’Institut.
La note minimale est 7,0.
Il est obligatoire de se présenter avec tout le matériel didactique à chaque leçon.
Il est indispensable de porter l’uniforme complet afin de pouvoir entrer à la classe.
Bibliographie
Anthologie du cours.
Sources.
Bourdieu, P, Les règles de l’art, Editions du Seuil, Paris 1992.
Emery, M. Participative Design for Participative Democracy. Canberra, Centre for Continuing
Education- Australian National University 1993.
Emery, F. Future we are in. Leiden, Pays Bas, Martinus Nijhoff 1976.
Netchum, L. D. & Trist, E. All Teams Are Not Created Equal. How Employee Empowerment
Really Works. Newbury Park, Sage 1992.
Morin, E. M. Stimuler la santé par le travail? Le cas des cadres supérieurs du
Réseau de la santé et des services sociaux au Québec. 58e congrès du département des
Relations industrielles de l’Université Laval. Santé mentale et travail. L’urgence de
Penser autrement l’organisation. Québec, 6 mai 2003.
Morin, E. M. Le sens du travail pour des gestionnaires francophones. Revue
Psychologie du travail et des organisations, 3 (2 et 3), (paru en 1998), 26-45.
Morin, E. M. L’efficacité organisationnelle et le sens du travail. In : T. C. Pauchant
et coll. (coord.), La quête du sens. Gérer nos organisations pour la santé des
personnes, de nos sociétés et de la nature, Montréal, Québec/Amérique, et Paris,
Éditions de l’organisation, Collection Manpower, 257-286 1996.
Morin, E. M. & Cherré, B. Les cadres face au sens du travail, Revue Française de Gestion,
126, 83-93 1996.
Sources électroniques.
http://devenir-consultant.fr
http://www.cepes.uh.cu
http://www.frontiercollege.ca
http://www.santepsy.ulaval.ca
7
LECTURES
8
1. LA PERSONNE DANS UNE ORGANISATION
Compte tenue de l’importance de la personne dans une organisation,
puisqu’elle est le cœur de n’importe quelle institution, il faut toujours être
capable d’analyser son rôle et son importance.
Dans une entreprise le département chargé de l’analyse pour le recrutement du
personnel et la maintenance de l’ordre dans l’organisation est le département
de gestion des ressources humaines.
1.1. Le département de gestion des ressources humaines.
La gestion des ressources humaines est un ensemble de pratiques ayant pour
objectif de mobiliser et développer les ressources humaines pour une plus
grande efficacité et efficience, en soutien de la stratégie d'une organisation.
C’est une activité essentiellement fonctionnelle de l'entreprise, de nature
transversale par opposition à une activité hiérarchique.
En simplifiant, elle se divise en deux grandes branches :

d'un côté l'administration des ressources humaines (paie, juridique,
contrat etc.) qui est une activité plus verticale.

et de l'autre le développement des ressources humaines (gestion des
carrières, gestion des compétences, recrutement, formation etc.) qui est
de plus en plus souvent partagée avec les managers opérationnels.
1.2. Planification et contrôle de la gestion.
Dans les années 90, des concepts jaillissent et complémentent la théorie
administrative : stratégie, structure et culture.
L’adaptation des ressources et habiletés de l’organisation s’envisage comme
indispensable dans une entreprise ou organisation. Ceci à cause du contexte
9
changeant et afin de profiter les opportunités tout en évaluant les risques selon
les buts et objectifs poursuivis.
À ce moment-là déjà les stratégies se cherchaient en commençant par le
générique pour aller au spécifique. Aujourd’hui on peut considérer qu’une
stratégie est des actions o upas qu’une entreprise doit faire pour atteindre ses
objectifs et mission.
De nombreuses études ont déterminé que beaucoup d’entreprises, dans de
différentes périodes ou de différents contextes ont plus de succès si elles
emploient une gérance stratégique. Les entreprises ayant une planification
stratégique formelle surpassent celles qui l’ont informellement.
2. LA PERSONNE DANS LA PHILOSOPHIE DE L’ORGANISATION.
La philosophie d’une entreprise représente un processus par lequel la haute
direction montre ses valeurs et croyances à ses membres, la manière sur
laquelle on conduira les politiques de l’entreprise, et la manière d’agir de
l’entreprise devant ses fournisseurs, clients, actionnaires, employés, société,
gouvernement et publique général.
Avec la philosophie de l’organisation on établit un guide de comportement afin
d’agir de la même façon avec tous les acteurs-relations avec l’entreprise. Elle
est une déclaration permanente qui normalement est créée par la personne qui
gère l’organisation. La philosophie peut être vue dans une manifestation écrite
et/ou avec le comportement du (de la) responsable de l’organisation.
Elle doit toujours être appliquée, même si les circonstances ou les crises
éventuelles posent des barrières.
2.1. Le succès de la philosophie.
On pourra considérer qu’une entreprise a eu du succès lorsqu’elle a été
capable de transmettre ses idéaux à ses membres. Toute sorte d’organisation a
10
besoin d’une synergie de ses membres, afin qu’elle puisse atteindre ses buts
collectifs.
Le rôle du département des ressources humaines est capital dans ce point,
puisqu’il doit être le garant de l’application de la philosophie dans toutes les
actions de l’entreprise.
Analysons, donc, cette image et réflexion.
2.2. La relation entre l’association, l’entreprise collective et les membres
dans une structure de type coopératif.
La figure empruntée de l’ouvrage présente
les trois piliers d’une entreprise collective.
On peut le comparer à un petit tabouret à
trois pieds. Lorsqu’un un des trois piliers
casse il est pratiquement impossible qu’il
reste debout !
Le premier pilier est constitué par les
membres – dans ce cas économiquement
actifs - qui d’une part sont des adhérents de
leur
association
actionnaires
et
d’autre
clients
des
part
des
services
marchands.
Le deuxième pilier est le groupement des producteurs poussés par des
motivations associatives, solidaires autres que le bénéfice pécuniaire. Ici
l’union, la concorde font leur force et les rend incontournables.
Le troisième pilier est l’entreprise coopérative fournisseur de services
concurrentiels (rapport prix/qualité intéressant) à ses « clients ». Il s’agit de
l’acteur entrepreneurial actif sur le marché.
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Le tout est interconnecté par un système de règles qui assure la cohésion entre
les trois pivots du siège. Si l’un des trois casse, évolue à une vitesse différente
ou se sépare du reste, le tout devient instable et finalement tombera.
Le rapport entre chacun des trois éléments doit être bénéfique et ce de manière
réciproque. Par exemple la relation de l’individu est différente vis-à-vis de son
groupement qu’envers sa coopérative.
Le lien 1 : Le client cherche auprès de l’entreprise des produits qu’il achètera à
bon prix et qui l’aideront à développer son entreprise, puisque c’est là qu’il
trouve ses revenus (pas en premier lieu dans les ristournes). Il s’attend à un
prix honnête, pour une qualité appropriée recherchée, disponible dans les
délais et en quantités voulues et éventuellement à crédit. C’est-à-dire, le client a
une relation avec l’entreprise pour améliorer la société en demandant un
meilleur service à chaque entreprise, de cette manière l’entreprise et la société
en général se développent en même temps et les expectatives des personnes
remontent.
En contre partie l’entreprise vend à un prix rentable à des nombreux clients
fidélisés et loyaux, qui ne cherchent pas à la tromper ni à l’endetter jusqu’à
causer des problèmes de trésorerie. Assuré d’un marché fidèle et loyal
l’entreprise pourra travailler à une échelle qui le permet d’atteindre son seuil de
rentabilité. C’est-à-dire, l’entreprise reconnaît l’effort fait par la société en lui
offrant de bons prix pour se faire gagner une clientèle fidèle.
Le lien 2 : Le membre attend de son association des avantages sociaux autres
que financiers. Il ne payera pas ou symboliquement pour ces services. Le
membre reçoit les avantages suivants : un cadre d’échange d’idées pour
l’amélioration de son entreprise et au-delà ; des formations professionnelles
subventionnées ; une solidarité en dehors du système de crédits lors des
moments difficiles ; un coup de pouce (moral et matériel) lors du démarrage
d’une nouvelle activité ; une cogestion effective et démocratique des affaires de
l’association ; une copropriété pour la partie de la richesse à laquelle il a
contribué. Maintenant on parle du client interne ou des membres de l’entreprise.
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Pour ce lien on étudie la relation qu’il y a entre l’entreprise comme ensemble
d’actionnaires et les membres comme ensemble de travailleurs ; quand les
travailleurs réalisent bien leurs travaux et le font de la manière correcte,
l’entreprise devra leur répondre en leur donnant des avantages sociaux, tels
que : la sécurité sociale – IMSS au Mexique –, des emprunts pécuniers pour
construire les maisons des membres – INFONAVIT au Mexique – et d’autres
qui représentent un aide de la part de l’entreprise envers ses travailleurs.
En contrepartie il participe bénévolement aux activités, il défend les intérêts de
la coopérative contre les « prédateurs » divers, il se mobilise pour réaliser des
apports en nature, il paye des parts sociales, il contribue gratuitement avec des
idées constructives, il fait jouer son réseau social (capital social) pour obtenir
des appuis, etc.… C’est-à-dire, lorsque le travailleur reçoit un soutien de la part
de l’entreprise, il lui répondra en lui offrant son engagement et sa fidélité,
comme dans une équipe de football.
Le lien 3 : L’entreprise génère des bénéfices dont l’association dispose.
L’association investira une partie pour entretenir le lien 2. L’entreprise doit donc
veiller à ce qu’il y ait des marges et éviter à vendre au prix de revient aux
clients. Il faut respecter un bon équilibre entre d’une part les services aux
individus – éventuellement des tarifs différentiels entre membres et clients nonmembres – et la rentabilité de l’ensemble. L’association ne pourra garantir et
stimuler la loyauté des membres vis-à-vis de leur coopérative que si elle peut
offrir d’autres avantages, comme des formations, une caisse de solidarité, etc.
En contrepartie l’assemblée générale doit veiller à ce que l’entreprise ait un
gérant et équipe complète de personnes dévouées et motivées avec des
moyens adéquats pour fonctionner de manière viable dans un contexte de
concurrence libre. Écrémer tous les bénéfices et rendre tout investissement et
donc développement de l’entreprise impossible prépare sa mort ! L’AG doit
donc déléguer des pouvoirs à un conseil d’administration qui est un véritable
allié de la direction de l’entreprise. C’est-à-dire, tout l’ensemble de l’entreprise
doit chercher le même but et représenter un seul corps devant la société.
13
3. LE TRAVAIL DANS LE DÉVELOPPEMENT HUMAIN
(Comprend des extraits de l'article “DONNER UN SENS AU TRAVAIL”, par Estelle M. MORIN)
Dans cette partie nous nous pencherons sur la relation entre travail et
développement humain. À partir de cela, nous serons mieux à même de
comprendre comment le bien être d'un individu dans son contexte professionnel
peut contribuer à l'exercice effectif de son travail.
Nous nous efforcerons
d'approfondir des notions introduites lors des cours précédents – Psychologie
Industrielle – afin de mieux saisir les sujets traités dans cette partie.
Le travail joue un rôle important dans le développement de la personne. À
prime abord, il lui permet d’assurer sa subsistance, c’est certain, mais ce n’est
pas là son seul intérêt. Le travail est avant tout une activité par laquelle une
personne se définit, s’insère dans le
Monde, actualise son potentiel, et crée de la valeur, ce qui lui donne, en retour,
le sentiment d’accomplissement et d’efficacité personnelle, voire peut-être un
sens à sa vie.
Qu’est-ce que le travail ? Qu’est-ce qui lui donne du sens ? Comment peut-on
organiser le travail pour qu’il ait un sens, préserve la santé des employés et
stimule leur performance au travail ? C’est à ces questions que ce document
tentera de répondre.
3.1. Le sens du travail.
Il faut bien admettre que nous n’avons jamais réellement posé la
problématique du travail dans le contexte de l’existence humaine ; nous avons
surtout adressé le problème de l’emploi, dans une perspective économique et
sociologique, avec des méthodes positivistes et quantitatives. C’est James
Hilmand qui, dans ses réflexions sur le travail, pose ces questions troublantes.
Je veux simplement parler du travail comme d’un plaisir, comme d’une
gratification instinctuelle — au lieu d’en parler comme d’un droit, « le droit au
travail », ou comme d’une nécessité économique, ou comme un devoir social,
14
ou comme une pénitence imposée à Adam après qu’il eut été chassé du
paradis terrestre. Les mains veulent faire des choses et l’esprit aime à s’y
appliquer. Le travail est vital, irréductible à quelque autre valeur. Nous ne
travaillons pas pour ramasser le fruit de la cueillette, pour acquérir du pouvoir
dans la tribu, pour acheter une nouvelle voiture, et ainsi de suite.
S’il apparaît qu’il y peu d’intérêt pour l’étude des caractéristiques du travail, il
semble toutefois y avoir une certaine curiosité au cours des trois dernières
années, à en juger par l’accroissement relatif du nombre de publications sur ce
sujet.
Or, faut-il se rappeler ce que Sigmund Freud lui-même affirmait : le travail,
comme l’amour, est une nécessité vitale pour le développement de la personne
et de la société démocratique. Ses portées sont à la fois matérielles, sociales,
économiques, psychologiques, psychiques et biologiques. Il est temps de
s’intéresser sérieusement au travail, à ce que signifie l’activité même du travail
dans l’existence des personnes.
3.2. L’évolution du concept de travail.
La conception qu’on a du travail est intimement associée aux fondements
idéologiques et religieux des civilisations, ainsi qu’au développement de la
technologie. D’après Fox (1980), trois périodes historiques ont marqué la notion
du travail. Dans les sociétés dites primitives, la cueillette, la chasse et la pêche
étaient les principales formes de travail. Dans les sociétés dites traditionnelles,
les communautés avaient tendance à être plus sédentaires ; il s’ensuivit le
développement de l’agriculture, la formation de gouvernements plus centralisés,
et des modes de fabrication plus rationnels et plus complexes. Avec
l’avènement de l’industrialisation, les structures d'autorité et les systèmes de
gestion de la main-d'œuvre devinrent encore plus complexes. L’organisation du
travail encouragea la spécialisation des compétences et renforça les caractères
utilitaires du travail. Durant les deux premières périodes, le travail faisait partie
intégrante des autres activités de la vie quotidienne, comme le sont la famille,
les loisirs et la spiritualité. C’est le développement de la société industrielle qui
15
entraîna la dissociation et l’émiettement du travail. Weil (1949) va même jusqu’à
dire que notre civilisation moderne, dont nous sommes si fiers, est malade de
ne pas savoir quelle place ou quelle valeur accordée au travail physique et à
ceux qui l'exécutent. Cette philosophe engagée rappelle le sens du travail dans
la Genèse.
Le caractère pénal du travail, indiqué par le récit de la Genèse, a été mal
compris faute d'une notion juste du châtiment. On lit à tort dans ce texte une
nuance de dédain pour le travail. Il est plus probable qu'il a été transmis par
une civilisation très antique où le travail physique était honoré par-dessus toute
autre activité. Plusieurs signes indiquent qu’il y a eu une telle civilisation, qu'il y
a très longtemps le travail physique était par excellence une activité religieuse
et par suite une chose sacrée. Les Mystères, religion de toute l’Antiquité
préromaine, étaient entièrement fondés sur des expressions symboliques du
salut de l’âme tirées de l'agriculture. Le même symbolisme se retrouve dans
l’Évangile. (...)
En tout cas, toutes les traditions religieuses de l’Antiquité, y compris l’Ancien
Testament, font remonter les métiers à un enseignement direct de Dieu.
Les observations de Firth (1948) vont dans le même sens. Cet anthropologue
montre que, dans des sociétés dites primitives, le travail impliquait
essentiellement une variété d’incitatifs comme la récompense de l'effort
qu'apportent
les
produits
fabriqués,
le
prestige social
associé
à
la
reconnaissance de la compétence et la création d'un réseau social supportant
l'individu. Dans les sociétés primitives, le travail impliquait une forme
d’organisation qui permettait la répartition des tâches selon les compétences
individuelles et la coordination des activités en vue d'accomplir quelque chose
d’utile à la communauté et à l’individu.
Il supposait aussi l’exercice d’un
leadership pour initier et diriger les activités, le recours à des contrôles pour
ajuster la progression du travail et des normes techniques pour assurer la
qualité de l’exécution.
16
Avec l’avènement de l’industrialisation, le travail et ses modes d’organisation se
sont considérablement transformés. Le travail est dorénavant organisé selon le
principe d’efficience, instaurant des routines et des réponses mécaniques à des
commandes opérationnelles. Les relations humaines se sont imprégnées de
l’économique et de la technique, abrogeant le social tout autant que le spirituel.
Firth (1948) établit la principale différence entre les sociétés primitives et les
sociétés développées dans le rapport du travail aux autres activités de la vie et
dans la nature des rétributions qui lui sont associées. Par exemple, dans les
sociétés primitives, les rétributions du travail prenaient une variété de formes :
1. Une rétribution matérielle (manger, boire, chaleur),
2. Une
sécurité
(c’est-à-dire
une
stabilité
et
un
support
dans
l’environnement social),
3. Une activité physique et mentale (qui agit comme un stimulant),
4. Une variété d’expériences (qui agit aussi comme un stimulant),
5. Une expérience esthétique, c’est-à- dire qui procure du plaisir à celui qui
l’accomplit,
6. La reconnaissance et le prestige social,
7. La création de liens d’amitié, et
8. Le service à autrui. Dans les sociétés industrialisées, les rétributions sont
souvent limitées au salaire et aux avantages sociaux (régime de retraite,
congés divers, assurances collectives, etc.).
3.3. Différence entre travail et emploi
Quand on songe au travail, on pense souvent à l’emploi. C’est vrai qu’à bien
des égards, le travail et l'emploi ont beaucoup de caractéristiques en commun.
Toutefois, ce sont des notions différentes, et la confusion qui règne à leur sujet
a causé beaucoup de malentendus dans la recherche. Cette confusion provient
en grande partie de l’évolution de la conception du travail, du moins dans les
sociétés occidentales.
Le travail est une notion qui comporte plusieurs définitions. Brief et Nord (1990)
soutiennent que le seul élément qui rallie les multiples acceptions soit une
17
activité qui a un but (purposeful activity). Généralement, on le définit comme
une dépense d'énergie à travers un ensemble d'activités coordonnées visant à
produire quelque chose d'utile (Firth, 1948; Fryer et Payne, 1984; Shepherdson,
1984). Il peut être agréable ou désagréable, et il peut être associé ou non à des
échanges de nature économique. Il peut être exécuté ou non dans le cadre d'un
emploi. D’après les entrevues réalisées par Fryer et Payne (1984), le travail
serait une activité utile, déterminée par un but défini au-delà du plaisir engendré
par son exécution.
L’emploi, c’est l’occupation de l’individu définit par l’ensemble des activités
rétribuées, dans un système économiquement organisé. Selon Fryer et Payne
(1984), l’emploi implique des relations d'échanges institutionnalisées.
Il est
aussi associé à une rétribution sous forme de salaire. Il implique souvent le
consentement de l'employé à laisser quelqu’un d’autre lui dicter la nature de
son travail et la manière de l’exécuter.
3.4. Pourquoi travaille-t-on?
Firth (1948) soutient que le travail ne doit pas impliquer seulement des relations
fondées sur les exigences techniques et économiques; il doit également
impliquer un ensemble de relations fondées sur les nécessités humaines et
sociales sans quoi on met en péril le sain développement de la société. En
effet, le caractère des relations qu’entretiennent les
individus a un effet
important sur leur décision de s’engager dans leur activité productive et sur la
qualité de leur production.
Brief et Nord (1990) arrivent aux mêmes conclusions : donner au travail le sens
d’une activité que l'individu fait pour gagner un salaire, entraîne des
conséquences fâcheuses autant personnelles qu’institutionnelles.
En outre,
cette restriction du sens du travail à son aspect économique engendre ou
renforce les rapports contractuels entre l’individu et l’organisation qui l’emploie,
conférant une importance à la rémunération au détriment de l’esprit de service
et de communauté.
Elle dévalue également les activités non-rémunérées
comme le bénévolat et le travail domestique ; celles-ci n’étant plus considérées
comme du travail, elles ne sont plus reconnues. Au niveau institutionnel, cet
18
usage de la notion de travail crée également une situation où le traitement
salarial attire plus l’attention des négociateurs que le traitement des relations
humaines dans l’organisation ou le traitement psychologique qu’y trouvent les
individus.
Quoiqu’on en dise, le travail est une activité très importante pour les humains et
pour la société. Le travail est avant tout une activité par laquelle une personne
s’insère dans le monde, exerce ses talents, se définit, actualise son potentiel et
crée de la valeur qui lui donne, en retour, le sentiment d’accomplissement et
d’efficacité personnelle, voire peut-être un sens à sa vie. Erich Fromm (1975)
écrit :
La conscience que l’homme a de lui-même, comme vivant dans un monde
étranger et tout-puissant, et le sentiment d’impuissance qui en résulte pourrait
facilement le submerger. S’il s’éprouvait comme entièrement passif, comme
pour un pur objet, il perdrait le sens de sa propre volonté, de son identité. Pour
compenser cela, il doit acquérir le sentiment d’être capable de faire quelque
chose, de remuer quelqu’un, de marquer son empreinte, ou, pour utiliser le mot
anglais le plus juste d’être effective (efficace). On se sert aujourd’hui de ce mot
à propos d’un orateur ou d’un vendeur « efficace » pour désigner celui qui
réussit à obtenir des résultats. Mais c’est une altération de sens originel de to
effect (effectuer) du latin ex făcěre, faire. [...] C’est, en dernière analyse, la
preuve qu’on est. Le principe peut être exprimé ainsi : je suis, parce que
j'effectue. (pp. 249-250)
Parce qu’il permet à la personne de produire des résultats qui lui sont
singuliers, parce que ses produits sont utiles, servent à quelque chose, le travail
permet à la personne de faire la preuve de son existence, de se reconnaître et
d’être reconnue. En raison de ses routines et de sa quotidienneté, le travail est
aussi un formidable moyen de gérer l’angoisse du vide.
Pour s’en convaincre, on n’a qu’à écouter la détresse des gens qui se
retrouvent au chômage du jour au lendemain, ou encore celle des personnes
qui prennent leur retraite à un âge précoce.
19
3.5. Travail et santé
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS, 2001); la santé n’est pas que
l’absence de maladie ou de déficience, c’est aussi un état de bien-être
physique, mental et social. Elle définit également la santé mentale comme un
état de bien-être qui permet à la personne de se réaliser et de s’ajuster aux
exigences normales de la vie, qui lui permet également de travailler de manière
efficace et productive, et d’apporter ses contributions à sa communauté.
L’OMS rapporte plusieurs facteurs déterminants de la santé mentale. Par
exemple, elle relate des facteurs socio-économiques et de l'environnement,
comme le chômage, la pauvreté, le niveau d’éducation, la situation du pays,
etc. La vulnérabilité des personnes qui vivent dans des conditions défavorables
peut être accrue par des conditions déficientes d’hygiène de vie, le sentiment
d’insécurité, le désespoir, l’exposition à des mouvements sociaux radicaux,
l’exposition à des risques de violence et de maladies.
L’OMS indique aussi que la santé mentale est associée aux comportements
des personnes.
Par exemple, la consommation d’alcool et de drogues, les
comportements violents, les comportements abusifs, etc. affectent la santé
mentale. Également, des problèmes de santé physique comme des troubles
cardiovasculaires, des problèmes neurologiques ou physiologiques peuvent
entraîner des troubles de santé mentale.
Enfin, l’OMS reconnaît enfin que le travail et les conditions dans lesquelles il
s’accomplit ont un impact sur la santé mentale, notamment le stress, l’iniquité,
les pratiques discriminatoires, etc. À cette liste de facteurs, il faudrait ajouter le
sens que donne un individu à son travail.
Les facteurs de souffrance au travail ont été clairement déterminés par les
travaux sur le stress au travail (Karasek et Theorell, 1990; Kasl, 1992; Dejours,
1993; Davezies, 1999).
Ce sont généralement : la charge et le rythme de
travail ; les horaires de travail (horaires rotatifs, horaires variables, horaires
20
imprévisibles, horaires de nuit, nombre d’heures de travail) ; le futur de l’emploi
(sécurité) ; la reconnaissance et le soutien ; l’autonomie et l’exercice des
compétences. Lorsqu’ils sont inadéquats, ces facteurs peuvent engendrer des
problèmes de santé affectant la capacité des personnes à travailler.
Ils
constituent donc la cible de la prévention de la maladie et de la détresse
psychologique dans les milieux de travail.
Les facteurs de plaisir au travail sont moins connus et reconnus dans les
milieux de la recherche. Nos enquêtes sur la qualité de vie au travail nous ont
permis d’en déterminer plusieurs : les occasions d’apprentissage et de
développement ; l’utilité sociale du travail ; la rectitude morale des processus,
des pratiques et des résultats ; la qualité des relations (connections positives).
Ce n’est que depuis récemment (depuis 20 ans) que l’on apprécie à sa juste
valeur l’importance du travail pour préserver et stimuler la santé des personnes.
Et c’est encore plus récemment que des gestionnaires reconnaissent les
impacts que peut avoir le travail sur la santé. Aux États-Unis d’Amérique, le
premier recensement des écrits sur cette question est à notre connaissance
celui de Danna et Griffin datant de 1999. Pourtant, on continue de gérer le
travail de façon à produire des résultats financiers attendus, mais pas
nécessairement pour réaliser la raison d’être de l’organisation qui rend légitimes
ses activités, ni pour contribuer au développement des personnes ou celui de la
société. Se posent alors des questions éthiques importantes mettant en cause
le travail dans ces organisations.
En effet, le travail est déshumanisé dans beaucoup d’entreprises, y compris
celles des services publics : les personnes sont des ressources, les temps de
travail sont réduits à l’état d’urgence, les rythmes de travail s’accélèrent, les
frontières entre les espaces et les sphères de l’existence se fondent et se
confondent, le travail lui-même devient incertain et, quant à l’avenir, encore plus
incertain. Encore aujourd’hui, des soupirs d’impatience, d’impuissance voire de
résignation se font entendre à tous les paliers des organisations. Cependant, il
est grand temps d’y voir, car les problèmes de santé engendrés par le travail ou
21
les conditions dans lesquelles il s’effectue augmentent à tel point que cela
pourrait devenir un problème de santé publique.
Dans les organisations, nombre d’efforts ont été faits au cours des dernières
années pour soulager la souffrance, notamment par le biais des programmes
d’aide aux employés.
Beaucoup de programmes ont été mis en place pour aider les gens à
reconnaître les signes et les symptômes du stress avant que la situation ne
s’aggrave, grâce à des programmes de mieux-être, des activités de
sensibilisation, des séminaires de perfectionnement ou des politiques d’hygiène
de vie et de promotion de la santé. Ces efforts ont essentiellement porté sur le
développement de stratégies individuelles pour faire face au stress ou pour
recouvrer la santé. Il faut féliciter les employeurs qui ont eu le courage de
soutenir ces programmes et qui veillent à les enrichir.
Cependant, le problème de santé au travail qui existe actuellement et qui tend à
se répandre ne sera pas endigué tant et aussi longtemps que les facteurs qui
sont à son origine ne seront pas déterminés, reconnus et corrigés. Le National
Institute for Occupational Safety and Health émettait déjà cette opinion en 1990
(Sauter et al. 1993). S’il est juste que les problèmes de santé des employés
peuvent être engendrés par des dispositions personnelles, des styles de vie
désorganisés, ou des problèmes personnels, il est temps de reconnaître
également
qu’ils
peuvent
aussi
être
engendrés
par
des
problèmes
d’organisation du travail et des mauvaises conditions de travail.
La fièvre des restructurations et des rationalisations des entreprises s’est
accompagnée de la perte de sens dans les organisations (Pauchant et coll.
1996). De quoi s’agit-il au juste?
3.6. Qu'est-ce que le sens du travail ?
Yalom (1980) définit le sens en se référant à la cohérence, à l'intention qui est
exprimée par quelque chose. La quête de sens implique une recherche de
22
cohérence. Yalom fait la différence entre le sens et le dessein (purpose); ce
dernier terme a pour référent l'intention, le but, et la fonction. Il distingue
également entre le sens et la signification (significance); bien que ces deux
termes soient interchangeables, la notion de signification implique l'idée
d'importance ou de conséquence, du moins en anglais.
La notion de
signification met en évidence les valeurs qui sous-tendent le sens de même que
les résultats auxquels l'individu aspire.
D'après Weisskopf-Joelson (1968), il est nécessaire que l'individu maintienne
une cohérence entre les sphères privée (intérieure) et publique (extérieure) de
sa vie pour qu’il puisse trouver du sens dans le travail. Il semble que ce soit
une condition sine qua non d’engagement personnel dans divers projets de vie,
dans les causes qu'il doit servir. Il semble que l'individu a besoin d'une histoire,
d'un système de croyances qui lui permette de comprendre et d’interpréter
plusieurs, sinon tous, les aspects de sa vie, pour qu’il y trouve du sens. En
dernier lieu, la présence d’un but ou d’une cause qui transcende la vie de
l'individu, ou qui embrasse une grande période de sa vie, constitue une autre
composante du sens. La recherche de Frankl (1969) tout comme celle de
Yalom (1980) appuient cette proposition.
Brief et Nord (1990) affirment que le sens de toutes les activités humaines est
obtenu de deux sources : la compréhension et l’intention. À celles-ci, il semble
qu’il soit utile de considérer la cohérence. Brief et Nord (1990) expliquent qu'il
est possible de comprendre l’interprétation qu’il fait de son travail et ses
intentions à propos de son travail en mettant au jour les facteurs de son
développement personnel et de la perception de sa propre histoire (en termes
des événements qui l’ont marqué et de ses besoins passés, présents et futurs).
Il faut toutefois reconnaître que d’autres facteurs méritent aussi d’être
envisagés comme pouvant déterminer le sens du travail. C’est le cas
notamment de l’idéologie dominante et la socialisation, des normes sociales, la
technologie, l’économie, et bien entendu, le langage lui-même.
23
3.7. La centralité du travail
Dans les années soixante, on a forgé l’expression « la société des loisirs » pour
caractériser cette époque où les loisirs étaient mis de l’avant comme activités
de développement et d’épanouissement personnel. Cela en a conduit plusieurs
à croire que la place occupée par le travail dans la vie des gens était
dévalorisée au profit des loisirs. Or, il semble que cela ne soit pas le cas.
Morse et Weiss (1955) ont posé la question suivante à 401 personnes ayant
des emplois variés (professionnels, managers, vendeurs, ouvriers spécialisés et
non-spécialistes, fermiers, etc.) : Si vous héritiez suffisamment d’argent pour
vivre confortablement sans travailler, pensez-vous que vous travailleriez de
toute façon ou non? Quatre-vingts pourcent (80 %) ont répondu qu’ils
continueraient de travailler.
Les raisons qu’ils donnent pour justifier leur
réponse sont par exemple, le travail les tient occupés; il leur donne un intérêt;
C’est bon pour la santé; c’est agréable de travailler. Morse et Weiss (1955) ont
retenu trois observations de cette enquête : (1) le travail n’est pas seulement un
moyen de gagner sa vie pour la majorité des travailleurs, (2) il ne faut pas être
près de la retraite, ni menacé de perdre son emploi pour savoir ce que le travail
signifie pour soi, et (3) le travail remplit d’autres fonctions que la fonction
économique. D’après ces chercheurs, le travail donne à l’individu le sentiment
d’appartenir à une plus grande société, d’avoir quelque chose à faire et d’avoir
un but dans la vie.
Cette enquête fut reprise par Tausky (1969), cette fois avec 100 cols bleus. Il a
trouvé que 82 % d’entre eux continueraient de travailler de toute façon. En
1974, avec Kaplan, Tausky a repris cette étude. Leur échantillon consistait
alors en 275 individus sans emploi, inscrits à un programme d'emploi de la
Nouvelle Angleterre. Ils ont posé la question précédente, formulée d'une façon
appropriée. Kaplan et Tausky (1974) ont obtenu 80 % de réponse positive.
Vecchio (1980) a révisé cette question, pensant qu'un élément de rêve pouvait
biaiser la réponse. Il a plutôt demandé : Si vous aviez assez d'argent pour vivre
confortablement, de la façon qui vous plaît, le reste de votre vie, continueriezvous de travailler ou arrêteriez-vous de travailler?
Des 1 099 personnes
24
interrogées, 72,2 % ont répondu qu’elles continueraient de travailler de toute
façon. Gini et Sullivan (1987) rapportent une recherche effectuée en 1983, à
l’Université du Kentucky, auprès de 7 281 adultes et trouvent un pourcentage
de 64 % de répondants qui continueraient de travailler.
L’équipe internationale de recherche sur la signification du travail (MOW, 1987)
ont obtenu un pourcentage de 86,1 (de 9 290 sujets). La consistance de ces
résultats à travers le temps indique clairement que le travail est important dans
la vie pour la majorité des individus. Maintenant, est-ce que cela implique que
le travail occupe une place centrale par rapport aux autres activités de la vie ?
C’est ce que Dubin a voulu savoir.
Dubin (1956) a mis au point le questionnaire Central Life Interests, comprenant
40 énoncés, et mesurant les préférences exprimées par le sujet pour accomplir
une activité dans un lieu ou une situation qu'il définit comme étant soit celui du
travail ou en-dehors du travail. Quatre aspects de l'expérience du travail sont
évalués : la possibilité de créer des liens d'amitié, le plaisir procuré par l'activité,
l'appartenance à l'organisation et le rapport à la technologie. Dubin (1956) a
mené son enquête auprès de 491 ouvriers d'usine.
Selon ses résultats,
seulement 24 % des ouvriers situent le travail au centre de leur vie. Ces
résultats ont par contre soulevé beaucoup de controverses, car d’autres
chercheurs ont trouvé des résultats forts différents dans d’autres échantillons.
Par exemple, Orzack (1959) a interrogé 150 infirmiers; 79 % des répondants
situaient le travail au centre de leur vie.
Il explique ce résultat par les
caractéristiques des identités professionnelles étudiées. Maurer (1968) a
également obtenu des résultats qui infirment ceux de Dubin (1956), cette fois
chez 111 superviseurs dans l'industrie.
Mannheim et Cohen (1978) ont construit une échelle composée de 7 énoncés
pour mesurer la centralité du rôle du travail chez les individus. Le contenu de
cette échelle est le suivant :
1. L'intérêt pour le travail,
2. L'importance de réussir au travail,
25
3. La présence de préoccupations non-reliées au travail, durant la période
de travail,
4. La présence de préoccupations reliées au travail, en-dehors des heures
de travail,
5. L'importance d’être au courant de ce qui se passe au travail,
6. La juste répartition du temps entre le travail et le non-travail, et
7. L'intériorisation des rôles associés au travail.
D'après leurs résultats, la centralité du travail varie surtout en fonction des
perceptions qu'ont les employés de leur emploi et plus particulièrement des
caractéristiques de leur travail. La centralité du travail pourrait ainsi être
déterminée par le sens que donnent les sujets à leur travail.
3.8. Qu'est-ce que représente le travail?
À partir des études menées sur la centralité du travail, England et Whiteley
(1990) font trois propositions.
Premièrement, le travail est important et
significatif pour la majorité compte tenu du temps que chacun y consacre dans
sa propre vie. Deuxièmement, le travail permet d'obtenir des résultats autant
économiques que psychosociaux. Troisièmement, le travail est associé avec
d'autres aspects importants de la vie quotidienne comme la famille, les loisirs, la
religion et la communauté.
La représentation du travail a également été étudiée par le biais des attitudes à
l’égard du travail. Wrzesniewski, McCauley, Rozin et Schwartz (1997) ont en
effet trouvé trois attitudes typiques concernant le travail : l’emploi, la carrière et
la vocation. Ce résultat s’appuie sur les travaux de Bellah et al. (1985).
Il y a des personnes pour qui le travail est un emploi. Elles ont tendance à
penser que le travail est un moyen de gagner sa vie. Elles n’ont pas d’autre
attente que celle d’obtenir un salaire et des avantages sociaux en échange de
leur temps et de leurs efforts. Le travail est plutôt un mal nécessaire qui assure
les revenus suffisants pour profiter de la vie en dehors du travail.
26
Il y a des personnes pour qui le travail est une carrière. Elles ont tendance à
croire que ce qu’elles font dans leur travail leur permettra d’avancer dans leur
plan de carrière et d’atteindre leurs objectifs professionnels. Elles ont ainsi
tendance à investir beaucoup d’énergie dans leur travail afin d’obtenir
l’avancement qu’elles convoitent et elles n’hésitent pas à adopter des attitudes
de compétition pour se tailler la meilleure place au sein de l’organisation. Les
opportunités d’avancement, les primes au mérite, les concours stimulent leur
intérêt, car ils attisent leur goût pour l’accomplissement et le dépassement.
Il y a aussi des personnes pour qui le travail est une vocation. Elles ont
tendance à concevoir le travail comme une activité essentielle qui leur permet
de s’accomplir et de contribuer à leur communauté. Travailler leur procure du
plaisir et de la gratification.
D’après les enquêtes qu’a réalisées Wrzesniewski et al. (1997), les personnes
qui ont une attitude « vocation » sont en meilleure santé et trouvent plus de
satisfaction dans leur travail que les autres. Cela s’expliquerait par le fait que
ces personnes ont tendance à se donner des défis dans l’accomplissement de
leurs tâches. À partir de ces observations, Wrzesniewski et Dutton (2001) ont
proposé le concept « fabriquant d’emploi » (job crafter) pour désigner le
phénomène par lequel l’attitude typique d’une personne à l’égard du travail la
conduit à percevoir son emploi d’une certaine consistante avec son attitude et
par conséquent, à lui attribuer le sens correspondant. Ainsi, le sens qu’un sujet
donne au travail serait en partie déterminé par son attitude typique à l’égard du
travail en général.
3.9. La cohérence du travail
Le sens du travail peut être conçu comme un effet de cohérence entre le sujet
et le travail qu’il accomplit, le degré d’harmonie ou d’équilibre qu’il atteint dans
sa relation avec le travail. Le concept de cohérence, développé surtout en
psychologie existentielle (Yalom, 1980), peut être apparenté à celui de la
consistance (Heider, 1946) ou à celui de la congruence (Osgood et
Tannenbaum, 1955) : les idées que l’on a à propos de quelque chose tendent à
27
s’organiser en systèmes d’équilibre et, par conséquent, toute incohérence
entraîne des activités (intellectuelles, émotionnelles, comportementales, etc.)
pour réinstaller l’équilibre. La cohérence que le sujet trouve dans son rapport au
travail lui procure un sentiment de sécurité psychologique et de sérénité qui
l’aidera à faire face aux épreuves que comporte inévitablement l’exercice même
de ses fonctions.
Yalom (1980) soutient que l’être humain à besoin de sens pour comprendre et
interpréter ses expériences dans le monde et pour se définir les valeurs sur
lesquelles il pourra fonder ses actions. Ce psychiatre affirme également que le
sens est nécessaire à l’hygiène mental de l’être humain : l'individu a besoin
d’une raison d’être, d'avoir un but, des valeurs ou des idéaux, sans lesquels il
connaîtrait une condition de détresse que Frankl (1967) qualifie de spirituelle.
Ces absolus inspirent ses attitudes et ses conduites et lui servent de guides
d'actions. En soi, le monde ne comporte pas d’absolu, de sens, d’idéal, ou de
valeur; ce sont les individus qui créent le sens, les valeurs et les idéaux, par
leurs actions et leurs interactions. Dès lors, la quête de sens est en essence
une expérience existentielle.
Dans le contexte du travail, Kasl (1992) explique qu’un employé peut s’adapter
à une situation qui lui paraît absurde, c’est-à-dire qui n’a pas de sens, mais
cette adaptation se fait au prix de quelque chose : ajustement des aspirations,
modification des valeurs de travail; détournement de l’attention vers les
relations professionnelles, augmentation de la valeur attribuée au salaire,
désaffection à l’égard du travail et de l’employeur, mésestime de soi, etc.
La quête de sens se manifeste par un état d’anxiété qui n’est pas toutefois
anormal ni pathologique (Tillich, 1952). En fait, l’être humain est constamment
en quête de sens, impliquant par le fait même qu’il en manque toujours. Frankl
(1967) abonde dans le même sens : la quête de sens est inhérente à
l’existence humaine.
Toutefois, cet état anxieux doit aussi s’accompagner
d’état de plaisir et de joie pour que l'individu demeure en santé (Maslow, 1968).
28
Dans ses études cliniques, Baumeister (1991) a déterminé quatre besoins qui
concourent à donner un sens à la vie :
1. Avoir une raison d’être, une raison de vivre,
2. Avoir le sentiment d’avoir un contrôle sur son destin et de l’efficacité
dans ses projets,
3. Avoir le sentiment d’être une personne correcte, dont la conduite est
moralement justifiable, et
4. Avoir un sentiment de dignité et de valeur personnelle.
Selon ce psychiatre, ces besoins sont inter-reliés et leur satisfaction se
manifeste par le sentiment de cohérence et de sens de sa vie.
Pour Isaksen (2000), le sens du travail est perçu comme un état de satisfaction
engendré par la perception de cohérence entre la personne et le travail qu’elle
accomplit. D’après son analyse de 28 entrevues avec des employés dans le
secteur de la restauration, il est possible pour une personne de donner un sens
à son travail, malgré les conditions difficiles dans lesquelles il s’effectue. Huit
caractéristiques du travail contribuent à lui donner un sens :
1. La possibilité de s’identifier à son travail et à son milieu de travail,
2. La possibilité d’avoir des bonnes relations avec les autres et de se
préoccuper de leur bien-être,
3. Le sentiment que le travail est utile et contribue à l’accomplissement d’un
projet important,
4. Le sentiment que le travail accompli est important pour les autres, est
bénéfique pour autrui,
5. La possibilité d’apprendre et le plaisir de s’accomplir dans son travail,
6. La possibilité de participer à l’amélioration de l’efficacité des processus
et des conditions de travail,
7. Le sentiment d’autonomie et de liberté dans l’accomplissement de son
travail, et
8. Le sentiment de responsabilité et de fierté du travail accompli.
29
Isaksen (2000) a également observé que les sujets qui donnaient un sens à
leur travail supportaient mieux le stress que les autres. De tels travaux nous
ont amené à formuler des hypothèses quant aux effets protecteurs voire
bénéfiques du sens du travail pour la santé des personnes.
3.10. Stimuler l'engagement des employés.
Dans des travaux sur l’organisation du travail, le sens du travail est défini
comme un effet de cohérence entre les caractéristiques qu’un sujet recherche
dans son travail et celles qu’il perçoit dans le travail qu’il accomplit.
Les caractéristiques d’un travail stimulant ou motivant ont fait l’objet de
plusieurs recherches depuis 1960. Tout un champ de connaissances en ont
émergé, qu’on a appelé «organisation du travail» ou en anglais «job design».
L’organisation du travail consiste à agencer les activités et des conditions dans
lesquelles il doit se faire, selon des caractéristiques qui lui donnent du sens
(Ketchum et Trist, 1992). L’étude de l’organisation du travail amène à
déterminer les conditions de la qualité de vie au travail. Par définition, la qualité
de vie au travail est un état général de bien-être des personnes dans leur milieu
de travail. On le décrit généralement à l’aide des indicateurs suivants : le sens
du travail, l’engagement organisationnel ou le sentiment d’appartenance à
l’organisation, le sentiment de dignité et d’accomplissement dans son travail et
l’atteinte de l’équilibre entre le travail et la vie privée.
Dans ce domaine de recherche, le modèle sociotechnique de Trist (1978) est
prédominant.
3.11. Le modèle sociotechnique.
Dès 1950, Eric Trist, à l’Institut Tavistock de Londres, montrait que
l’insatisfaction des travailleurs, dans le secteur des mines en Grande Bretagne,
était moins causée par le salaire que par l’organisation du travail. Dans les
enquêtes qu’il a faites auprès des travailleurs, il a cherché à comprendre
quelles étaient les conditions qui présidaient à l’engagement des employés pour
30
leur travail. Avec ses collègues, il en est venu à proposer une approche qu’on
appelle le design des systèmes sociotechniques (en anglais, Socio Technical
System Design, STSD). Ce modèle vise à organiser le travail de telle sorte que
l’engagement des employés pour leur travail soit stimulé et que la performance
organisationnelle s’en trouve améliorée. Il s’agit en fait d’organiser le travail de
façon à correspondre aux motivations intrinsèques des employés aussi bien
qu’à leurs besoins extrinsèques (Ketchum et Trist, 1992).
Le tableau 1
présente les propriétés que devrait avoir un tel travail.
Conditions de l’emploi
Le travail lui-même
Un salaire juste et acceptable
De la variété et du défi
L’assurance de l’emploi
De l’apprentissage continu
Des avantages convenables
Une marge discrétionnaire de l’autonomie
La sécurité
De la reconnaissance et du support
La santé
Une contribution sociale qui fait du sens
La justice et l’équité des procédures
Un futur désirable
D’après les recherches faites par Trist (1978, 1981) et Emery (1976, 1964), le
travail doit présenter donc six propriétés pour stimuler l’engagement de celui qui
l’accomplit :
1. La variété et le défi : Le travail doit être raisonnablement exigeant,
autrement qu’en termes d’endurance, et comporter suffisamment de
variété : cet aspect du travail permet de reconnaître le plaisir que
peuvent donner l’exercice des compétences et la résolution de
problèmes.
2. L’apprentissage
continu
:
Le
travail
doit
offrir
des
occasions
d’apprentissage sur une base régulière : cet aspect du travail permet de
stimuler le besoin de croissance personnelle.
3. Une marge discrétionnaire et l’autonomie : Le travail doit faire appel à la
capacité de décision de la personne; cela reconnaît le besoin
31
d’autonomie et le plaisir tiré de l’exercice du jugement personnel au
travail.
4. La reconnaissance et le support : Le travail doit être reconnu et soutenu
par les autres, dans l’organisation; cet aspect du travail stimule le besoin
d’affiliation et d’appartenance.
5. Une contribution sociale qui fait du sens : Le travail doit permettre de
relier l’exercice des activités et leurs conséquences sociales; cela
contribue à la construction de l’identité sociale et sauvegarde la dignité
personnelle. Cet aspect du travail reconnaît le plaisir de contribuer à la
société.
6. Un futur désirable : Le travail doit permettre d’envisager un futur
désirable; il peut comporter des activités de perfectionnement et
d’orientation professionnelle. Cet aspect du travail reconnaît l’espérance
comme un droit humain.
En plus de ces aspects intrinsèques du travail, le design des systèmes
sociotechniques prend en considération plusieurs aspects extrinsèques pouvant
affecter l’engagement au travail, tels que le salaire, les conditions matérielles et
physiques et les règles organisationnelles. Bien qu’il existe des différences
individuelles et des facteurs contextuels qui peuvent influencer l’engagement au
travail, il semble que ces 12 facteurs contribuent sensiblement à l’amélioration
de la qualité de vie au travail et de la performance organisationnelle.
4. LES 7 HABITUDES DES GENS TRÈS EFFICACES
Si l’on considère que le développement de l'individu est fondamental pour la
réussite d’une entreprise/organisation, nous sommes en mesure d’affirmer que
cette dernière est tributaire de la réussite de chacun des employés. Une équipe
est en mesure d’atteindre ses objectifs seulement lorsque ses membres
atteignent les leurs.
Stephen Covey, dans son ouvrage “Les sept habitudes des gens efficaces”
publié en 1989 énumère sept principes qui, si établis en tant qu'habitudes, sont
censés aider une personne à gérer efficacement son quotidien et ses projets
32
dans tous les aspects de son existence : professionnel, mais aussi familial et
civique. Selon Covey, cela demande essentiellement le respect de quelques
principes universels et d'ailleurs intemporels.
Les méthodes et les principes compris dans les 7 habitudes peuvent permettre
de relever des défis réels, de résoudre de vrais problèmes et de produire des
résultats concrets.
Quelles sont vraiment ces 7 habitudes pour être parmi « ceux qui
accomplissent de grandes choses » ?
4.1. La pro activité.
Ce concept est le contraire de la « réactivité ». La majorité des gens sont
réactifs : ils se plaignent de ce qui leur arrive, ils rejettent la faute et la
responsabilité sur autrui, ils sont toujours victimes et se conduisent comme tel,
ils ont du mal à prendre des initiatives.
Par contre, une personne « proactive » se conduit en admettant qu'elle est la
seule responsable de ce qui lui arrive, de ses actions. La personne proactive
agit, et ne se plaint pas. Elle cherche l'opportunité dans les problèmes, elle voit
les solutions ? Et non les obstacles.
Dans l'entreprise, elle donne le courage de prendre des risques et d’accepter
de nouveaux défis en vue d’atteindre des objectifs.
4.2. « Commencer avec la fin en tête ».
Face aux problèmes, face aux projets que nous élaborons, nous avons toujours
tendance à chercher des « solutions faciles et rapides » à ce qui arrive.
Mais dans la majorité des cas, ces « remèdes rapides » ne résolvent pas les
problèmes en profondeur, et les problèmes resurgiront dans le futur avec une
gravité accrue : nous appliquons ces « remèdes rapides » parce que « nous ne
commençons pas la résolution des problèmes avec la fin en tête ».
33
Cette habitude, une fois assimilée, aide énormément à faire de grands
accomplissements, à instaurer l'harmonie et à éliminer efficacement les
problèmes.
Dans le cadre du travail, cette habitude aide à mener les projets à terme et
rassemble les équipes et les organisations autour d’une vision, d’une mission et
d’un but.
4.3. « Mettre les premières choses en premier ».
C'est l'habitude de la bonne organisation du temps. Savoir quelles sont les
priorités, les tâches prioritaires à accomplir. Dépensez-vous la majorité de votre
temps aux choses les plus importantes (pour vous).
Dans un cadre professionnel, cette habitude aide à réaliser d’abord les choses
les plus importantes et favorise une efficacité directe.
4.4. Pensez « gagnant-gagnant ».
C'est l'habitude du « savoir négocier » ou « savoir administrer ». C'est
l'habitude de voir les avantages possibles pour chaque parti impliqué dans une
action, un processus et de se concentrer à ce que tout le monde puisse en tirer
profit.
Dans le monde du travail, elle facilite la résolution des conflits et aide les
personnes à rechercher une victoire mutuelle, renforçant ainsi la synergie du
groupe.
4.5. Chercher tout d'abord à comprendre, ensuite à être compris.
L'habitude de la recherche de la « bonne relation ». C'est une habitude qui se
base sur l'empathie, sur l'écoute. C'est l'habitude qui permet de trouver la vraie
34
source des problèmes afin de pouvoir enfin appliquer entièrement les habitudes
2 et 4.
Dans une entreprise/organisation, elle aide les gens à comprendre les
problèmes d’abord afin de trouver les meilleures solutions, et favorise une
meilleure communication pour une résolution efficace des problèmes.
4.6. Créer des synergies
Stephen Covey explique cette habitude par la formule : 1+1 = 3, 4, 10 ou 1 000
000. Cela ne veut pas dire qu'il n'est pas très doué en calculs mais il veut dire
que « la somme de ce que peut faire chaque individu en agissant seul n'est rien
comparé à ce que peuvent faire tous les individus mis ensemble et œuvrant en
synergie ».
La synergie c'est la multiplication des compétences (et NON pas l'addition) afin
de créer des résultats bien au-delà de ce qu'une simple coopération ou d'une
simple alliance peut produire.
Au travail, cette habitude renforce le sentiment d’appartenance des membres
de l’équipe et tire profit de la diversité des gens pour atteindre des niveaux de
réussite toujours plus élevés.
4.7. Aiguiser votre lame.
C’est l’habitude de la recherche de la perfection. C’est l’habitude que les
personnes qui ne cessent de se former et de se développer ont acquis. C’est
l’habitude de ceux qui pensent que « la vie est un éternel apprentissage ».
Bref, l’ouvrage de Stephen COVEY est un must en matière de leadership, de
management et de développement personnel. Il serait dommage de s’en priver.
Dans le monde du travail, elle favorise l’amélioration continue et protège contre
l’épuisement et l’improductivité qui en résulte.
35
5. LA GESTION DES TALENTS
Extrait de l'article “Emergence d'un nouveau modèle de management”,
de Pierre Mirallès,
Directeur Général Adjoint de l’IDATE, Professeur Associé à l’IAE de Montpellier.
La communication propose un concept du talent utilisable en gestion des
ressources humaines et, sur cette base, construit un modèle de management
qui s’oppose et dépasse le modèle de la compétence. Le talent est défini
comme « excellence + différence » et vu comme une idiosyncrasie. Manager
les talents implique de mettre en œuvre un ensemble cohérent de pratiques de
gestion typiques, telles que le scouting (détection/sélection), le casting
(composition d’équipe), le coaching (accompagnement/conditionnement) et le
cocooning (protection/rétention). L’émergence dans les organisations du
management des talents exprime l’immersion d’une partie de leurs activités
dans le monde de l’hyper compétition.
5.1. Émergence du management des talents.
Avec les années 2000, plusieurs phénomènes nouveaux connaissent une
importance accrue : il s’agit en particulier des risques de pénurie de main
d’œuvre, du développement de l’hyper compétition, et du poids croissant de
l’innovation dans le coût des produits mis sur le marché mondial. Le retrait de la
vie active de cohortes nombreuses de baby-boomers risque d’entraîner un
sévère déficit de main d'œuvre qualifiée. Simultanément, la mondialisation se
concrétise par un phénomène d’hyper compétition entre firmes, tel qu’il a été
théorisé par R. D’Aveni (1995) il y a quelques années.
L’hyper compétition, c’est avant tout un contexte au sein duquel aucun acteur
ne peut prétendre à bénéficier d’un avantage concurrentiel unique et durable
(comme par exemple le coût de production ou les barrières à l’entrée), mais
dans lequel les différents compétiteurs recherchent des combinaisons
éphémères d’avantages concurrentiels variés tels que le délai de mise en
marché, la qualité, la capacité financière, la technologie, etc. Par ailleurs, nos
économies se "déforment" dans le sens du renversement de la proportion
traditionnelle entre coûts de conception et coûts de production des biens et des
services. Selon D. Pineau-Valencienne, de 30% des coûts totaux, les coûts de
36
conception – R&D, design, marketing, etc.- seraient passés à 70% du coût de
revient des produits mis sur le marché actuellement, les coûts de manufacturing
suivant l'évolution inverse. Cette déformation, rendue possible ou encouragée
par la diffusion des technologies de l'information, s'accompagne d'une
augmentation considérable de l'incertitude et des risques auxquels sont
confrontées les entreprises.
En effet, des firmes présentes depuis très longtemps sur un marché sont
désormais appelées à remettre en jeu leur position pratiquement à chaque
sortie d'un nouveau produit, ou au moins d'une nouvelle génération de produits.
Ces
phénomènes
créent
des
conditions
qui
tendent
à
renforcer
considérablement les exigences de performance et d'implication des salariés.
Dans un tel environnement incertain, il faut faire confiance avant toute chose
aux hommes et à leurs ressources personnelles. De ce fait, le rapport des
forces évolue de plus en plus en faveur des individualités capables de « faire la
différence » dans la compétition.
En effet, il semble bien que, dans de
nombreux secteurs de l’économie, la performance des organisations repose de
plus en plus sur l’excellence individuelle d’un petit nombre de personnes-clés,
personnes que désigne le qualificatif de « talents ». Ces individus ne se sont
pas nécessairement des dirigeants ou des leaders. Simplement, ils disposent
d’atouts personnels exceptionnels et contrôlent des processus déterminants
pour l’organisation. C’est par exemple le cas du présentateur du « 20 heures »
sur une grande chaîne de télévision, du styliste chez le grand couturier, du
grand joueur dans l’équipe professionnelle de football, mais aussi de nombre de
chercheurs, concepteurs, marketeurs, développeurs, etc.
Pourtant, la réflexion théorique sur le concept de talent, sur le rôle du talent
dans la performance, ou encore ses conséquences au niveau du management
des organisations, paraît à ce jour singulièrement pauvre. En fait, le terme
même de talent est pratiquement absent de la littérature consacrée à la gestion,
si on met à part quelques travaux de circonstance comme le célèbre ouvrage
The War for Talents (Michaels, Handfield-Jones et Axelrod) écrit il y a quelques
années par plusieurs consultants de Mc Kinsey. Il est vrai que cette notion
37
apparaît à première vue étrangère au monde de la gestion, et semble présenter
de sérieux handicaps pour prétendre au statut de concept scientifique : le
caractère soi-disant ineffable du talent, perçu comme une sorte de "je ne sais
quoi", son usage longtemps réservé à des professions spécifiques, la faible
prise des organisations sur la naissance et le développement des talents
singuliers, les difficultés, réelles ou supposées, de leur valorisation collective…
tout cela rendait la notion de talent d’un maniement malaisé et apparemment
d'un intérêt pratique limité. Il en va désormais différemment, comme nous allons
tenter de le montrer.
5.2. Attitudes au travail et pratiques managériales « atypiques ».
En effet, si le nombre des secteurs concernés par la « guerre des talents » ne
cesse pas apparemment de croître, les comportements de certains des salariés
qui y exercent leurs exceptionnelles capacités ne laissent pas de surprendre et
de déstabiliser leurs managers.
Au moment de la bulle Internet, c’est en masse que des consultants
expérimentés et reconnus abandonnaient les big four pour fonder des start-up.
Chacun connaît (elle défraie la chronique) l’explosion des rémunérations de
certains high flyers : présentateurs d’émissions télé, experts en placements
financiers, créatifs d'agences de publicité...Sans parler des exigences jugées
farfelues de certaines « divas » en ce qui concerne leurs conditions de travail,
allant du choix de la couleur de leur fauteuil à l’administration de massages
californiens à l’heure du déjeuner… Autant de pratiques jugées naguère
bizarres ou exotiques, en tout cas sans signification à défaut d’être sans
conséquence, mais qui, par leur développement et l’élargissement de la
population qu’elles touchent, constituent progressivement une véritable
phénoménologie dont nous faisons ici l’hypothèse qu’elle présente quelque
cohérence.
5.2.1. Le cas de Silicon Valley.
Au moins autant que celui des individus, c'est le comportement des
organisations qui peut parfois intriguer l’observateur. À cet égard, le modèle de
38
la Silicon Valley est instructif à plus d’un titre. Pour les auteurs français qui se
sont penchés sur ce complexe organisationnel au début des années 2000, la
gestion des hommes dans la Vallée présente plusieurs caractéristiques
surprenantes. Le turn-over, très important, non seulement n’y est pas considéré
comme un indicateur de mauvaise gestion, mais au contraire « correspond à
une dynamique d’entrepreneuriat associée à une quête d’excellence ».
La démarche d’intégration dans l’organisation n’est pas fondée sur des
processus formels, mais « part de l’individu, s’appuie sur ses sources de
passion et l’ensemble des moyens que celui-ci peut se donner pour devenir le
meilleur dans le domaine choisi ». L’apprentissage, la mise à jour des
compétences, et plus généralement la responsabilité de carrière, relèvent
explicitement de l’initiative des salariés, et s’opèrent aussi bien dans l’entreprise
qu’à l’extérieur de celle-ci. L’utilisation fréquente d’un système d’évaluation
relative (ranking) des personnes entre elles a pour objectif de « fidéliser les
10% meilleurs performeurs d’une population donnée, en leur offrant tous les
avantages possibles, notamment une très forte rémunération ». La place du
talent dans ce modèle managérial apparaît centrale. En effet, «les acteurs de la
Vallée sont davantage motivés par leurs idées, leurs projets, que par leur
entreprise ». La méritocratie prévaut, et le mérite se juge d’abord aux résultats.
« Les concepts de commitment (engagement) et de jeu (les gens sont joueurs
et frondeurs) sont érigés en véritables principes d’action ». La rapidité d’action
et de réaction est un paramètre essentiel de la réussite, et celle-ci se mesure
avant tout en dollars.
Ce qui est particulièrement frappant dans cette description du management
pratiqué dans l’univers des dotcoms, c’est qu’elle pourrait presque s’appliquer
telle quelle au monde du spectacle, du sport professionnel, de la mode, etc.
mais aussi de la haute finance, de la politique, de la recherche scientifique…
5.3. Les conditions d’existence du management des talents.
Quels points communs dégager entre ces divers univers professionnels, dans
lesquels la performance des organisations semble fortement corrélée au talent
personnel de certains des individus qu'elles emploient ?
39
Le premier d’entre eux est certainement la situation d’incertitude extrême qui
entoure la performance organisationnelle. Qu’elle soit inhérente au métier (c’est
le cas, exemplaire, de la « glorieuse incertitude » du sport), liée à un moment
particulier de la vie de l’organisation, notamment une de ces situations de «
crise » propices à l’émergence et à l’expression des personnalités
exceptionnelles, ou encore à l’état du marché, l’incertitude constitue un facteur
d’autant plus prégnant que les enjeux de la situation sont élevés. Enjeux
économiques (remporter un marché crucial), symboliques (devenir ou rester
leader), voire même vitaux (continuer à exister). Mais à elle seule l’incertitude
n’est pas suffisante pour créer le « besoin de talents », et pour donner à ceux-ci
une valeur élevée. Encore faut-il que l’exigence de performance qu’elle suscite
se cristallise dans l’action de quelques individus. Pour ces «hommes-clefs » qui
contrôlent des processus cruciaux pour l’organisation, le résultat individuel
entraîne le résultat organisationnel. Ce qui implique que la performance
individuelle soit visible, identifiable dans le résultat collectif, et donc à la limite
isolable et mesurable, quitte à développer les méthodes et instruments
nécessaires à cet effet. Pour le coup, les talents peuvent légitimement
revendiquer une part significative du résultat collectif,
que cette part soit
symbolique ou directement matérielle. Ces différents facteurs créent un
ensemble de situations et de métiers, pour lesquels la notion de talent apparaît
non seulement pertinente, mais constitue un axe central du management. Ces
contextes professionnels, nous les dirons talent sensitive, c’est à dire sensibles
aux talents.
Cela ne signifie pas qu’on ne puisse pas exercer tout métier avec talent, mais
simplement que le talent n’est pas toujours et partout un facteur-clé de
performance pour l’organisation. C’est pourquoi le management des talents ne
concerne ni tous les individus qui composent une organisation, ni toutes les
organisations. À la différence des modèles universalistes, il s’intéresse au
contraire aux personnes (mais aussi aux organisations) dans ce qu’elles ont de
singulier et même d’inimitable.
40
Prenons ici un exemple, celui du secteur bancaire. Dans les grandes banques
«généralistes» coexistent aujourd’hui des activités qui font l’objet d’un
management de type franchement néo-taylorien (c’est par exemple le cas des
centres d’appel, où les impératifs de qualité et de productivité prédominent) ;
d’autres
qui,
subissant
(multiplication des
de
automates
plein
fouet
bancaires,
les
évolutions
technologiques
communications
one to
one
généralisées par Internet, ouverture internationale créée par le marché unique),
sont amenées à mettre en avant les problématiques d’évolution des
compétences et de flexibilité (c’est notamment le cas du réseau des agences);
d’autres enfin qui, aux prises avec l’incertitude la plus grande (les marchés
financiers et le trading) font une large place au management des talents.
5.4. Qu’est-ce que le talent ? Et peut-on manager les talents ?
Parler de management des talents implique bien entendu de préciser la notion
même de talent, pour en faire si possible un concept utilisable en gestion. Pour
notre part, nous définissons le talent comme excellence plus différence. En
effet, si la compétence d’un individu se définit par ce qu’il sait faire, son talent
est caractéristique de ce qu’il fait mieux que les autres. Le talent est donc
d’abord excellence individuelle dans une activité donnée. Et, comme il n’existe
aucun maximum absolu qui serait par essence indépassable, l’excellence
personnelle dans une activité s’apprécie donc à un moment donné (et dans un
contexte donné) à travers une comparaison, un classement (ranking) des
professionnels en fonction du niveau de leurs performances.
Mais pour faire mieux que les autres, le talent se doit de « faire la différence ».
Pour gagner dans la plus haute compétition, il ne suffit pas d’être bon partout, il
faut surtout être meilleur que les autres « quelque part ». C’est pourquoi trouver
sa place parmi l’élite impose de choisir et de cultiver son style. À l’origine, celuici n’est autre que la projection dans l’activité de singularités personnelles, de
caractéristiques individuelles intimes. C’est ce qui fait qu’on distingue le travail
de l’un du travail de l’autre. Bien entendu cette projection est d’autant plus
marquée que l’activité est l’objet d’un investissement personnel intense, d’une
passion plus ou moins exclusive. Mais le style n’existe pas seulement par le
hasard des singularités : il est aussi et surtout le fruit d’un travail conduit
41
sciemment et patiemment par la personne pour identifier et développer ce
qu’elle fait mieux et plus facilement que les autres, ce qui lui permet d’obtenir
un avantage compétitif. Signature d’une identité professionnelle, le style
apparaît donc comme une sorte de « devoir-être » de l’individu tendu vers
l’excellence, un attracteur vers lequel tendent ses gestes et ses postures, une
singularité cristallisée dans une sorte d’habitus.
La recherche de l’excellence apparaît donc avant tout comme la recherche
d’avantages compétitifs individuels plus ou moins décisifs. De tels avantages
paraissent pouvoir être obtenus en mobilisant trois grandes catégories de
facteurs :
5.4.1. Des facteurs « internes ».
C’est à dire favorisant la mobilisation des ressources personnelles distinctives,
des qualités individuelles capables de « faire la différence » dans le jeu
concurrentiel. Celles-ci, qui constituent en quelque sorte l’infrastructure, le socle
du talent, sont relativement hétérogènes. Elles combinent notamment des
aptitudes innées, des compétences spécialisées (des « gestes professionnels »
par exemple) ou génériques, mais aussi des attitudes (notamment la « volonté
de réussir » ou la résilience) et des croyances. Dans la recherche de la
performance, il est nécessaire de détecter et de porter à leur plus haut degré de
développement et de mobilisation ces ressources distinctives. Telle est la
fonction propre du coaching : préparer l’individu de talent pour l’amener au
moment venu à l’« état de performance », l’accompagner pour lui permettre
d’exprimer son potentiel, d’être « présent à lui-même » à l’instant crucial.
Un point crucial du coaching est l’établissement entre le coach et le coaché
d’une relation de confiance. C’est notamment celle-ci qui permettra à ce dernier
de développer son « sentiment d’efficacité personnelle », qui apparaît comme
un facteur clef de succès en situation de haute compétition.
5.4.2. Des facteurs « externes ».
C’est à dire relatifs à la création d’un environnement
favorable à la
performance individuelle. Outre la dimension purement technique de l’activité,
42
qui consiste à mettre à la disposition de l’individu les « meilleurs » instruments,
les « meilleurs » spécialistes, etc. Il nous faut retenir ici l’idée que le talent doit
être protégé, mis à l’abri des perturbations, sollicitations ou incommodités
extérieures, et maintenu en état de plaisir narcissique et de confiance. Ce
cocooning n’est pas synonyme de confort, comme on le croit souvent à tort, car
n’oublions jamais que l’individu doit être maintenu en tension vers la recherche
de la performance. Simplement, il s’agit de le concentrer sur la performance, en
écartant tout ce qui pourrait disperser l’usage de ses ressources.
5.4.3. Des facteurs « relationnels ».
À la fois internes et externes ; c’est à dire plus précisément favorisant
l’interaction du talent avec les autres ressources de l’organisation, et tout
spécialement avec les autres talents dont elle dispose. En effet, à l’observation,
il semble bien que chaque talent ait dans l’organisation une « place » optimale,
c’est à dire une position (poste + statut + rôle) qui autorise sa meilleure
expression et surtout sa plus grande influence sur la performance collective.
Une conséquence importante de tout cela est la difficulté à remplacer « à
l’identique » un individu de talent. Car ce n’est pas seulement une compétence
qui fait alors défaut, à laquelle on pourrait en théorie substituer une autre
compétence équivalente. Mais c’est tout un système qui se trouve soudain
déséquilibré par la perte d’un avantage compétitif autour duquel se structure
une tactique, c’est à dire une disposition particulière des ressources, système
qu’il faut désormais reconstruire sur des bases différentes. Car pour un individu
de talent, pratiquer un certain style, c’est véritablement « jouer sur ses points
forts », c’est à dire organiser son action en fonction de ce qu’on sait faire mieux
que les autres.
Ces considérations désignent la fonction d’une compétence organisationnelle
jusqu’ici peu mise en évidence, celle précisément qui consiste à construire un
effectif, un groupe professionnel, une équipe de travail ou de direction, en vue
d’assurer la meilleure complémentarité des styles respectifs de chacun de ses
participants. Composer une « équipe qui gagne », c’est faire en sorte que les
talents s’additionnent, qu’ils se mettent en valeur réciproquement, au lieu de se
neutraliser ou même de se contrarier mutuellement. Cette compétence le plus
43
souvent tacite, ou plutôt cette pratique managériale émergente, nous la
désignons par le terme de casting.
Ainsi, contrairement à un discours trop souvent entendu, manager les talents ne
saurait se limiter à détecter et à sélectionner les meilleurs professionnels dans
une activité donnée. Compétence nécessaire mais non suffisante, le scouting
peut conduire à des échecs cuisants s’il n’est pas intégré dans un ensemble
cohérent de pratiques, dont nous venons d’évoquer certaines, et qui constituent
véritablement le contenu du management des talents.
5.5. La relation symétrique et duale entre individu et organisation
Nous concevons donc le talent d’un individu comme une configuration
spécifique de ressources personnelles, relativement stables et permanentes, en
grande partie héritées par l’individu qui en est le dépositaire (le « talent », par
métonymie). Ces ressources constituent une idiosyncrasie, c’est à dire un actif
spécifique incorporé. En parlant de ressources héritées par l’individu, nous
voulons mettre l’accent sur le fait que ces qualités ont pour le sujet qui en est
doté le statut d’un « patrimoine » reçu de la nature, de la famille ou de l’histoire
personnelle. Que ces qualités soient innées ou non est un débat qui échappe
au domaine de la gestion. Ce qui est sûr, c’est que l’héritage confère certaines
obligations au légataire.
Comme le souligne Bourdieu, pour que ce patrimoine soit conservé et valorisé,
il est nécessaire que « l’héritage hérite l’héritier », c’est à dire que l’individu de
talent reconnaisse et assume ses qualités exceptionnelles, qu’il accepte
l’investissement personnel nécessaire à leur préservation et leur mise en
valeur. En parlant de ressources incorporées dans l’individu, nous voulons
souligner le fait que ces qualités « appartiennent » à l’individu et à lui seul,
qu’elles font partie de lui et ne peuvent en être détachées. De même, ces
qualités ne peuvent être utilisées que par la personne qui les détient ou, si c’est
par un tiers, uniquement à travers elle : on ne peut pas les en « extraire »,
comme on le ferait par exemple d’un ensemble de connaissances, d’un « tour
de main » reproductible, ou encore d’un savoir-faire professionnel.
44
Ainsi, l’organisation qui en fait usage ne peut faire usage de ces qualités qu’en
s’offrant temporairement les services de l’individu qui les détient. Rare, le talent
est aussi mobile car intensément sollicité. C’est pourquoi pour l’organisation, la
détention d’un talent constitue un avantage compétitif toujours précaire, sauf à
payer à prix d’or l’exclusivité d’une relation durable. Parler de ressources
spécifiques présentes un double sens. Ce qui est singulier c’est d’abord une
association unique de qualités : le grand footballeur par exemple, un Zidane ou
un Ronaldinho, combine le plus souvent une adresse technique exceptionnelle,
les capacités physiques d’un athlète de haut niveau, et une intelligence du jeu
qui lui permet d’avoir un temps d’avance sur ses adversaires. Sans parler de la
grinta, c’est à dire de la volonté permanente de gagner, qui le maintient à un
niveau élevé de motivation malgré les difficultés, les échecs et parfois les
souffrances. Mais ce qui est singulier aussi, c’est l’adaptation de cette
combinaison de qualités à une activité et à un contexte spécifiques dans
lesquels le talent « s’exprime » le mieux. Pour rester dans le monde sportif,
extrêmement rares sont les athlètes qui manifestent des talents exceptionnels
dans des disciplines différentes. Et, à l’intérieur même d’une discipline, on
remarque très souvent la préférence d’un athlète pour un type particulier de
club, d’entourage, de compétition, pour certaines conditions ou certains
adversaires, auxquels leur style personnel convient tout particulièrement.
Analyser le talent comme une idiosyncrasie implique trois conséquences
essentielles du point de vue de la relation d’emploi :
Le talent constitue en général, au moins potentiellement, la principale source de
« richesse» de l’individu qui le détient. Cela implique une responsabilité
particulière de la personne vis à vis de son « capital talent », notamment dans
sa préservation et sa mise en valeur, mais aussi dans la construction d’un
parcours de carrière lui permettant de valoriser au mieux ce capital. Il appartient
au talent d’être « entrepreneur de lui-même » (Ehrenberg).
Ce capital ne peut se valoriser que dans une activité et dans des conditions
spécifiques. Cette spécificité du talent comme actif est à la fois un atout (si
l’activité dans laquelle s’exerce fait l’objet d’une forte demande sociale, elle le
45
place en situation de monopole) et un talon d’Achille (lorsque cette demande
baisse ou lorsque la personne n’est plus en mesure d’y répondre au niveau
d’exigence requis, la reconversion s’avère très délicate).
Si le talent appartient à la personne, son expression nécessite comme on l’a vu
la mise en œuvre de processus spécifiques par une organisation (ou un
ensemble d’organisations) apte à en tirer une valeur économique. D’où une
double dépendance : des talents par rapport aux organisations capables de leur
offrir les meilleures conditions d’expression ; des organisations par rapport aux
talents capables de leur permettre de viser l’excellence dans leur sphère
d’activité.
C’est pourquoi au management des talents, conçu comme répertoire de
pratiques organisationnelles, répond chez l’individu la gestion de son talent, qui
consiste pour lui à le reconnaître, l'assumer et le développer, puis à rechercher
les meilleures conditions de son expression et de sa valorisation. Ceci au sein
de l’organisation dont il fait partie bien sûr, mais aussi au travers de sa
trajectoire professionnelle, ainsi que dans les dimensions de sa vie privée qui
sont de nature à l’impacter. Cette nécessaire
articulation entre gestion et
management des talents peut se synthétiser dans le tableau ci-dessous.
Figure n° 1 : Gestion et management des talents comme pratiques de gestion
Actes de gestion
(Re) connaître
L'organisation (management
La personne (gestion du
des talents)
talent)
Scouting
S’exposer
Cocooning, coaching
S’entourer, se préparer
Casting
S’engager
idéntifier, capter
Protéger,
conditionner, placer en « état
de performance »
Exploiter, combiner à d’autres
ressources
46
5.6. L’économie du talent.
Dans ces conditions, le contrat qui lie la personne et l’organisation n’a plus
grand chose à voir dans son contenu et ses modalités avec un contrat de travail
traditionnel. Notre hypothèse est ici que les talents et les organisations
s’engagent non plus dans une relation de louage d’un temps de travail, ni
même dans la mise à disposition par le salarié de ses compétences pour une
mission donnée, mais dans un échange de promesses en vue de relever un
défi commun, c’est à dire dans un contrat assimilable à une sorte de joint
venture, incluant généralement des formes de partage des risques et des
profits. Dans un tel contrat les deux éléments majeurs sont le niveau (la valeur)
et la durée de l’engagement réciproque. La valeur du contrat est en rapport
avec le niveau de l’ambition affichée, et sa durée fixe l’horizon auquel l’objectif
commun se doit d’être atteint. Un tel contrat affirme nettement la préférence des
parties prenantes au talent pour un « contrat psychologique » de type
transactionnel (Schein), c’est à dire au fond une relation essentiellement
marchande. Dans un tel contexte, la régulation de l’emploi se fait avant tout par
le marché externe, en tout cas entre organisations relevant de la même sphère
d’activité. Cela ne signifie pas que les dimensions affective ou communautaire
soient absentes de la relation d’emploi. Bien au contraire, elles y prennent une
saveur particulière si on veut bien se souvenir que le talent implique un
engagement de toute la personne dans l’activité, et que celle-ci est d’abord une
passion qui anime l’individu.
Le contrôle de l’affectif, de l’émotionnel, sont comme on l’a vu une des
conditions essentielles de la performance individuelle. Mais la dimension
rationnelle et marchande domine absolument la relation contractuelle. C’est
peut-être cette dichotomie extrême, cette nécessité de gérer simultanément
une relation brutalement marchande et un engagement émotionnel intense
dans l’action, qui est à l’origine des fonctions d’impresario ou d’agent. En «
transférant » la gestion de ses contrats à un tiers l’individu de talent sépare
l’implication affective et l’implication calculée, et cette séparation lui permet tout
à la fois d’optimiser sa carrière dans le temps et sa performance dans l’instant.
47
Entrepreneuriat personnel et relation d’emploi fondée sur le modèle marchand
vont
de
pair
avec
l’impératif
de
mobilité
et
même
d’hyper-mobilité
professionnelle. En effet, la mobilité est ce qui permet au talent de multiplier les
expositions (c’est à dire les défis successifs qui lui permettent d’étalonner et de
montrer son talent), et d’exprimer au mieux son potentiel. C’est aussi et
indissociablement ce qui lui permet de tirer le maximum de valeur économique
de ce potentiel, en monnayant ses services à l’organisation qui se trouve à tout
moment la mieux placée pour lui proposer les conditions les plus avantageuses,
en fonction de ses objectifs de carrière. Ainsi, vue sous l’angle de la relation
d’emploi, la figure du talent apparaît comme le type extrême du « professionnel
». Pour cette catégorie de travailleurs, identifiés par un haut niveau de
compétence et d’autonomie, et surtout par la détention de compétences
essentielles et transférables entre diverses organisations, émerge une nouvelle
forme de relation professionnelle caractérisée notamment par :
1. Des salaires élevés et totalement dépendants de l’état actuel de la
demande pour les compétences que ces travailleurs détiennent ;
2. Un pouvoir de négociation considérable vis à vis des organisations qui
les emploient du fait de leur mobilité potentielle ;
3. Un encadrement totalement personnalisé. À travers cette relation
d’emploi du troisième type, la figure du talent n’est finalement pas sans
rappeler celle, beaucoup plus archaïque, du compagnon ou mieux, celle
du « sublime » (Gazier) qui construit son « chef d’œuvre » au fil de ses
expériences successives.
5.7. Le modèle du management des talents.
Partant de ces hypothèses, on peut esquisser la construction d’un modèle du «
management des talents », qu’on pourrait opposer presque terme à terme au
modèle de la compétence, comme à celui des qualifications. Cette construction
s’établit à partir des facteurs majeurs qui constituent la situation d’incertitude qui
caractérise l’environnement de l’organisation, et l’exigence de performance
individuelle. Selon cette vue, au risque minimum (et à l’exigence la plus faible)
correspondrait le modèle fordiste ou néo-taylorien de la qualification et au
risque maximum (et l’exigence la plus forte) le management par les talents.
48
Cette comparaison en quelque sorte « terme à terme » de ces trois modèles de
base de la relation individu / organisation considérée sous l’angle du
management ne doit pas faire penser à une grille d’évaluation (dans lequel tel
modèle serait supposé supérieur aux autres) ni à la représentation d’une
évolution historique, dans lequel un modèle serait automatiquement appelé à
succéder à un autre, et qui donc toucherait quasi inéluctablement toutes les
organisations.
À cet égard, même s’ils les évoquent, ces trois modèles de la relation d’emploi
ne recouvrent pas les trois modèles de la GRH que propose par exemple
Galambaud (2002) : modèle de l’administration, de la gestion et du marché, qui
renvoient plutôt à des styles de direction et des formes de gouvernance. En fait,
nous voyons d’abord le management des talents comme la manifestation de la
mise en place d’un étage supplémentaire dans les possibilités et pratiques du
management à l’intérieur même des organisations, et donc comme représentatif
d’un accroissement de la complexité organisation elle sous la pression de
l’hyper concurrence.
De ce fait, le management des talents ne saurait être conçu comme un modèle
à vocation universelle, mais plutôt comme un ensemble cohérent de notions et
de pratiques qui permettent de penser et de structurer des formes singulières
d’organisation, faisant une large place aux individus et à leurs talents.
Pour plus d'informations à ce sujet, voir http://devenir-consultant.fr/
49
ANNEXES
50
TEST PRATIQUE
À partir des six propriétés pour stimuler l’engagement des employés, Trist
(1978, 1981) et Emery (1976, 1964) ont créé la “Matrice de 6 critères”. Cette
matrice est une forme de validation du travail faite par l'individu, elle est
dirigée aux employés afin qu'ils puissent exprimer leurs besoins concernant
leur
travail.
À
partir
de
l'information
obtenue
dans
les
matrices,
l'organisation/entreprise est en mesure de créer les conditions optimales pour
que les employés aient un exercice effectif de leurs fonctions.
Observez l'exemple suivant :
Noms des participants
Critères psychologiques
Marie
Jean
(assistante
Marc
(manager)
(manager
administrative)
1. Autonomie
Alice
(assistante)
Jacques
(assistant)
adjoint)
-2
0
-1
-3
-2
(a) Définition d'objectifs
-4
+3
-2
-3
-3
(b) Rétro alimentation
-3
+4
0
-4
-4
3. Variété
-3
5
0
4
-3
4. La reconnaissance et le
8
4
2
8
8
(a) socialement utile
9
9
9
9
9
(b) voir le produit fini
4
10
7
3
4
6. Un futur désirable
3
7
6
2
2
2. L’apprentissage continu
support
5. Une contribution sociale qui
fait du sens
Les premiers trois critères doivent être optimales pour chaque individu: les
trois vont de -5 (trop peu) à +5 (trop), 0 étant optimale, idéel. En ce qui
concerne les critères 4, 5 et 6, il est considéré qu'on ne peut pas en avoir
trop, ils vont donc de 0 (rien) à 10 (beaucoup).
51
Observez les valeurs que les employés ont attribuées à chacun des
critères. Si vous tenez compte du poste que chacun d'eux occupe, à
quel
degré,
pensez-vous,
se
sentent-ils
engagés?
Essayez
de
justifications possibles.
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