Consultez l`article des DNA du 24 mai 2015

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ECONOMIE
19
Q DIMANCHE24MAI2015
ENTRETIEN Bernard Stirnweiss, président de la CCI de Région
« Pour une fusion complète
des CCI d’Alsace »
Dans la perspective de la réforme territoriale, le nouveau
président de la CCI Alsace Bernard Stirnweiss prône une fusion
complète du réseau consulaire dans la région. Sa ferme
volonté est d’aboutir dès cette année.
Vous avez été élu président de la
CCI Alsace le 29 avril, succédant
à Jean-Louis Hoerlé. Quel est
votre agenda et le calendrier de
l’institution ?
« Les prochaines élections consulaires doivent se tenir fin
2016. Pour ce qui me concerne,
je ne ferai qu’un seul mandat.
J’ai besoin, dans la période actuelle, d’une liberté d’action totale. Je n’ai aucun intérêt personnel ou de carrière, ni de près
ni de loin, dans ce mandat. J’ai
aussi l’avantage d’être indépendant de toute attache patronale,
n’étant adhérent ni du Medef ni
de la CGPME. »
De toute
«
évidence, on ne va
pas réduire les
services d’appui aux
entreprises, qui sont
notre raison d’être »
Vous jugez la tâche à accomplir
très difficile face aux différentes
sensibilités en présence ?
« Disons que les deux syndicats
patronaux n’ont pas forcément
la même approche de la fusion
des trois CCI territoriales que
celle que je défends. Mais des
initiatives ont déjà été prises
par mon prédécesseur JeanLouis Hoerlé. Il y a eu un gros
travail de prospective mené par
un groupe d’élus consulaires
depuis un peu plus d’un an. Ce
groupe a été formé à la suite de
l’annonce du projet de fusion
qui avait abouti à un certain
blocage. Ces seize élus, qui représentent tous les territoires et
toutes les “familles” composant
les CCI, ont énormément travaillé et je suis un des pilotes de
ce groupe. Ce sont ces personnes qui m’ont désigné pour me
porter candidat à la suite de
Jean-Louis Hoerlé. Ce groupe de
travail a fortement marqué les
élus, aujourd’hui convaincus
qu’il faut avancer plus vite. Ma
position personnelle a toujours
été constante et claire : je suis
favorable à une fusion complète
des trois chambres de commerce et d’industrie d’Alsace… »
Le président Hoerlé souhaitait
également cette évolution.
Est-ce une mission impossible ?
« Je ne le crois pas ! Impossible
n’est pas français et en allemand, une langue qui m’est
chère, on dirait “Wer will, der
kann”. La tâche n’est pas facile
mais elle a été très largement
préparée en amont et je vous
rappelle que le groupe prospective que nous avons formé est
antérieur à tous les projets de
réforme gouvernementaux. Au
départ, nous militions plutôt
pour une simple amélioration.
Mais le rapport de l’Inspection
générale des finances à propos
des CCI françaises était sanglant. Arnaud Montebourg puis
Emmanuel Macron ont maintenu la pression. Par ailleurs,
nous ne partons pas de rien et je
crois pouvoir affirmer que les
CCI d’Alsace sont très en avance.
La mandature de Jean-Louis
Hoerlé nous a ainsi permis de
mutualiser un maximum de
missions. Aujourd’hui, les esprits continuent à évoluer sous
l’effet des contraintes budgétaires et du nouveau découpage
territorial qui nous sont imposés. »
Q Q COMMENTAIRE
Une fenêtre de tir étroite
L
es CCI d’Alsace sauront-elles saisir leur chance de s’unir durablement et, par là, de peser sur les arbitrages futurs dans la grande
région qui se prépare entre Rhin et Meuse ? Elles en ont en tout cas la
possibilité, si ce n’est l’envie. Et cela tout en poursuivant l’exigeant
travail de réforme interne et de repositionnement qui leur est imposé,
comme à toutes les CCI de France, par le calendrier de resserrement
budgétaire du gouvernement.
S’unir plus fortement en respectant les équilibres territoriaux, les
personnalités locales et l’essentiel du cœur de métier des chambres de
commerce et d’industrie - et tout cela pour moins cher - c’est en tout cas
le projet qu’exprime sans détour le nouveau président de la CCI de
Région Bernard Stirnweiss, loyal successeur de Jean-Louis Hoerlé.
S’il y a une évidente différence de tempérament entre les deux responsables, leur projet est au fond le même. Il s’agit de rapprocher les institutions, de focaliser les missions, de renforcer l’autorité des CCI comme
porte-parole au service de dizaines de milliers d’entreprises d’Alsace, en
contribuant à leur croissance. Ce sursaut d’organismes plus que bicentenaires, légitimes mais pas immortels, est nécessaire dans la recomposition territoriale qui s’annonce. Il suppose de forcer un peu la main du
destin.
Bernard Stirnweiss se présente lui-même comme un « homme de dossiers ». Par formation, expérience et caractère, il est davantage porté à
construire patiemment des solutions juridiques et techniques aux
problèmes posés qu’à produire des effets de tribune. Il affirme, et il n’y
a aucune raison de douter de sa parole, qu’il ne briguera pas le mandat
suivant. En revanche, il entend bien laisser sa marque sur le processus
en cours. Son temps est compté puisque les prochaines élections doivent se tenir fin 2016. Le certificat de naissance de la nouvelle CCI
territoriale d’Alsace doit donc être signé avant la fin de l’année en cours.
Cette urgence est peut-être l’atout clé du mandat du président.
A.L.
TTE-RTE 07
Il reste à régler des questions de
gouvernance entre Strasbourg,
Colmar et Mulhouse, mais aussi
à appliquer le programme d’économies budgétaires décidé par
le gouvernement pour l’ensemble des CCI françaises ?
« C’est vrai, c’est un effort très
important. Il nous faut trouver
10 millions d’euros d’économies par an. L’État opère des
prélèvements très importants
sur notre trésorerie. C’était
5 millions en 2014, 12 millions
en 2016. Nous avons en Alsace
un budget de l’ordre de 60 millions d’euros, dont 50 % alimentés par des recettes fiscales.
Nous devons le ramener à
50 millions d’euros d’ici 2017.
La baisse des ressources sera de
17 % cette année, puis de 10 %
en 2016 et encore de 10 % en
2017. »
Avec inévitablement un effet
sur le nombre de collaborateurs
des CCI…
« Ce plan va se gérer sur trois
ans. Il y aura clairement une
réduction de voilure, donc des
réductions de postes. Un plan
social basé sur des départs volontaires est déjà en cours. Nous
devons passer d’un effectif de
480 agents à environ 380. C’est
l’objectif si l’on veut rééquilibrer les comptes.
C’est un arrachement pour
certains, compte tenu d’un fort
attachement à la culture consulaire…
« C’est vrai. Il y a un fort esprit
“maison” et, il faut le reconnaître, un personnel d’un excellent
niveau. »
Mon projet est
«
très clair :
c’est la fusion,
en travaillant
avec beaucoup
de méthode »
Cette réforme suppose aussi que
vous fassiez évoluer les missions de la CCI…
« C’est exact, mais la réflexion à
ce sujet est en cours et les élus
se prononceront dès cet été.
D’une façon générale, nous ne
devons pas proposer de services
qui sont déjà assurés par
d’autres acteurs. Mais, de toute
évidence, on ne va pas réduire
les services d’appui aux entreprises, qui sont notre raison
d’être. À titre d’exemple, personne ne fait mieux en matière
d’export que nous, et nous travaillons en partenariat très
étroit avec la Région Alsace qui
nous a confié cette mission. »
Bernard Stirnweiss, nouveau président de la CCI de Région Alsace.
derons de prérogatives en Alsace au sein de la future grande
région. Notre terrain de jeu naturel est davantage l’espace rhénan que la grande région que
l’on nous impose. Cependant, le
Parlement a décidé d’une nouvelle circonscription, nous
jouons le jeu. Par rapport à la
Lorraine, nous avons indiscutablement des complémentarités,
notamment sur le massif vosgien, et nous saurons en trouver
avec Champagne-Ardenne. »
Quels sont les freins au rapprochement entre Alsaciens ?
« À Mulhouse, par exemple, certains redoutent que la perte de
la personnalité morale d’une
chambre territoriale ne crée des
difficultés pour la gestion des
ports ou la représentation dans
l’EuroAirport. À Strasbourg, on
peut être tenté de miser sur
l’Eurométropole. Je crois que les
freins sont bien identifiés par
les élus consulaires et qu’ils
sont surmontables. Il y a des
solutions techniques et juridiques à toutes ces questions et j’y
travaille avec détermination.
Nos objectifs doivent être formalisés dans une sorte de “pacte d’associés” ou un règlement
intérieur. L’accord politique en
découlera. »
Qu’en sera-t-il de l’équilibre de
gouvernance entre les trois
chambres ?
Êtes-vous assez avancé sur ce
sujet ?
« Je suis partisan d’une fusion
complète pour créer une seule
CCI territoriale d’Alsace. Plus
nous serons unis, plus nous gar-
« Nous avons déjà une première
version “martyr” qui nous sert
de base de discussion. Je pense
que de nombreuses difficultés
se résoudront par la mise en
place de délégations d’élus territoriaux disposant d’une large
autonomie dans les trois CCI
actuelles. Nos élus ont besoin
d’être rassurés, à Mulhouse
comme à Colmar ou à Strasbourg. »
Vous avez devant vous un mandat plutôt court, surtout si vous
ne vous représentez pas, pensez-vous arriver à vos fins ?
« Je suis trésorier depuis dix
ans, je connais très bien les
dossiers. Si nous voulons aboutir, il faut aller très vite et mettre en place une CCI territoriale
d’Alsace avant fin 2015. En
2016, ce ne sera plus possible.
Nous ne pourrons plus procéder
à une modification de nos structures l’année même des élections consulaires. Si nous réussissons, ça se passera dans les
six prochains mois. Mon projet
est très clair : c’est la fusion, en
travaillant avec beaucoup de
méthode dans le sens d’un consensus et en veillant aux intérêts de chacun des territoires. »
Comment voyez-vous l’économie alsacienne dans son ensemble ?
« Nous avons une économie
marquée par une forte concentration industrielle, avec une
culture d’entreprise rhénane
qui n’est pas la même
qu’ailleurs en France, avec un
mode de gouvernance collégial
et plus ouvert aux salariés.
L’économie alsacienne est une
PHOTO DNA – MICHEL FRISON
Bio
express
Naissance à Metz le 4 juin
1947. Études de sciences
économiques à Strasbourg
et d’expertise comptable à
Paris.
Auditeur et associé du
cabinet Salustro Reydel de
1971 à 1982 ; de 1982 à
2007 fondateur et PDG du
cabinet SFA Stirnweiss
Finck et Associés ; de 2007
à 2015, associé de SFA
Audit. Nombreux mandats
régionaux et nationaux
dans la profession, dont la
présidence de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes en 1995
et 1996.
Trésorier de la CCI de Strasbourg et du Bas-Rhin de
2005 à 2011 puis trésorier
de la CCI de Région Alsace.
Président de la commission
« économie numérique »
de la CCI de Région. Membre de la commission des
finances de CCI France.
passerelle entre la France et
l’Allemagne, pas seulement sur
le plan économique, mais aussi
culturel. C’est notre force ! C’est
pour cela qu’il faut continuer à
encourager le bilinguisme et
l’apprentissage transfrontalier.
Nous avons également une économie de proximité forte et une
industrie touristique en pleine
croissance. »
RPROPOS RECUEILLIS
PAR ANTOINE LATHAM

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