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Contribution à l’utilisation des situations-problèmes en sciences physiques dans l’enseignement secondaire en cote d’ivoire : cas du cycle d’observation Par Nguessan Kouamé Département des Sciences de l’Education, Ecole Normale Supérieure (ENS) d’Abidjan (Côte d’Ivoire) Résumé La majorité des situations proposées aux élèves en classe d’observation ne leur permettent pas d’entrer dans une démarche de recherche. Ces situations mettent en exergue certes des confrontations entre élèves pour aboutir à des solutions parfois diverses mais elles ne tiennent pas assez compte de ce qu’ils sont et les empêchent de se poser leurs propres questions. Ce travail s’inscrit essentiellement dans une perspective de faire des propositions pour améliorer des situations soumises aux élèves en cycle d’observation. L’étude réalisée par comparaison des situations-problèmes proposées par des professeurs de sciences physiques et destinées aux élèves des classes de sixième (6ème) et cinquième (5ème), niveau collège a permis de constater que d’une part, l’utilisation des bandes dessinées semimuettes en lieu et place des textes améliore l’exploitation des situations-problèmes, et d’autre part, contribue à la motivation et à l’acquisition des compétences langagières chez ces derniers. Abstract The majority of the situations the school boys in class observation do not allow them to enter into a process of research. These situations highlight certainly confrontations between students to achieve various solutions but sometimes they do not take enough account of what they are and prevent them from asking their own questions. This work is primarily with a view to making proposals to improve situations subject to students in observation cycle. The study by comparison of problem situations offered by physical science’s teachers and for the pupils in first and second grade of junior school showed that on the one hand, the use of semi comics strips instead of texts improves the exploitation of problem situations, and on the other hand, contributes to the motivation and the acquisition of language skills among the latter. Introduction Un nombre important de travaux de recherche en didactique ont été menés depuis les années 1990 et ont pris une grande ampleur à partir de 2000 sur les situations problèmes en sciences physiques. Ceci reflète l’importance qu’occupe cette activité dans les processus d’enseignement/apprentissage. Partie intégrante de l’approche par compétences, la situation problème apparaît comme un concept clé, fondamental dans la construction des savoirs de l’apprenant. En effet, le concept de situation problème est conçu comme un outil de réflexion et d’analyse autour d’une question à résoudre donc un obstacle à franchir pour motiver davantage et canaliser le besoin d’échanges des apprenants. En Côte d’Ivoire, dans le souci d’une part, de lutter contre l’échec scolaire et de cadrer le programme pour répondre efficacement aux nouvelles réalités de l’école ivoirienne ; et d’autre part, de garantir la qualité scientifique de notre enseignement et son intégration dans son environnement, l’utilisation des situations problèmes dans les classes d’observation apparaît comme une nécessité pour aider l’élève dans l’acquisition patiente du savoir et le développement de ses compétences. Aujourd’hui, les situations problèmes sont à la mode. Pourtant, quand on se penche sur les situations données par beaucoup d’enseignants en séance d’enseignement on voit mal ce qui les différencie d’un banal problème ouvert. Ces situations problèmes sont-elles encore un leurre, une dérive pédagogique, comme il en existe beaucoup ? Ou cela correspond-il réellement selon De Vecchi (2002) à une avancée didactique qui mérite d’être prise en compte et développée ? Les séquences d’enseignement données en classe par l’enseignant ont-elles toutes le label de situations problèmes ? Revue RA N°12 Page 236 En faisant le point des caractéristiques des situations problèmes, nous convenons avec De Vecchi (2004) que pour qu’une situation soit pertinente, elle doit : - être organisée autour d’un franchissement d’obstacle ; - avoir un sens (interpeller, concerner l’apprenant) ; - être liée à un obstacle repéré, défini, considéré comme dépassable et dont les apprenants doivent prendre conscience à travers l’émergence de leurs représentations mentales - faire naître chez ces derniers un questionnement, les provoquer pour donner du sens à l’activité. A l’analyse de ces caractéristiques, la préoccupation majeure demeure la mise en œuvre des situations problèmes adéquates qui puissent permettre à la majorité des apprenants l’émergence de leurs représentations mentales. Cependant, force est de reconnaître que de nombreuses difficultés existent au niveau des enseignants pour l’élaboration de véritables situations problèmes. Or, l’un des objectifs essentiels des situations problèmes est d’amener les élèves à être partie prenante dans la construction de leurs connaissances à partir des activités pratiques et manipulatoires. Malheureusement, l’enseignement donné dans ces classes est inefficace, le savoir scientifique scolaire des élèves est difficilement opérant ainsi beaucoup d’entre eux ne suivent pas ; et d’ailleurs, la plupart des activités ne les concernent toujours pas véritablement. Ce qui guide essentiellement les élèves, c’est de satisfaire l’enseignant. Bien que tous les enseignants reconnaissent l’importance que peut jouer l’utilisation des situations problèmes dans l’enseignement et dans l’apprentissage, nous constatons que dans leurs mises en œuvre, ils éprouvent d’énormes difficultés. En effet, certains d’entre eux pensent que les situations problèmes doivent consister en des activités concrètes où il faut manipuler, d’autres imaginent que ces situations doivent impliquer les problèmes de la vie courante de tous les jours. Il ressort de ces deux positions qu’il existe des problèmes notables quant à la mise en œuvre de véritables situations-problèmes pour faciliter l’apprentissage chez les élèves. En plus de ces deux positions, une variante supplémentaire s’ajoute lors de l’exploitation des différentes situations problèmes : le questionnement de l’enseignant. Dans le but de contribuer à atténuer les difficultés relevées, une expérience originale est entreprise en collaboration avec l’Inspection Générale de l’Education Nationale (IGEN) de l’enseignement secondaire pour proposer à partir d’une analyse de deux différents types d’activité, un choix d’activité conduisant l’élève à comprendre et à agir par la sollicitation de son imagination, par la suscitation de sa réflexion et le développement de son esprit critique à propos de ses observations. Nous présentons dans ce travail de recherche la démarche suivie et quelques résultats obtenus. I/ Contexte et situations «problématisantes» Jusqu’en 1995, l’enseignement des sciences physiques était conduit de façon classique. L’enseignant détenteur exclusif du savoir fait son cours, les élèves sont censés prendre. Les contenus sont très chargés et plus propices au bourrage de crâne qu’à l’assimilation ; en conséquence, les connaissances acquises par imitation et répétition par les élèves sont inertes et volatiles. Il faut l’avouer que ce type de transmission réussissait surtout aux « bons élèves». Au demeurant, les réussites des élèves en sciences physiques n’étaient pas spectaculaires. Pourtant, l’échec en sciences physiques est chose courante. C’est une discipline qui a un caractère plutôt abstrait et il n’est pas surprenant de ne pas réussir en sciences physiques. C’était en fait la représentation qu’avaient les enseignants, les élèves et les parents. Puis, au début des années 1996, la pédagogie par objectifs (PPO) fait son apparition : les objectifs sont décomposés. Lesquels sont abordés les uns après les autres, l’apprenant prend part à la découverte progressive des contenus. Ainsi, tous étaient certains : Revue RA N°12 Page 237 l’enseignement et l’apprentissage seraient beaucoup plus faciles pour les professeurs et les élèves. En définitive, l’échec a dépassé les espérances. C’est pourtant à cette époque que l’inspection générale de l’enseignement secondaire s’est penchée sérieusement sur les difficultés de l’enseignement et de l’apprentissage des sciences physiques. A partir de 2009, la formation par compétences (FPC) basée sur l’utilisation des situations problèmes remplace la PPO. Le contexte pédagogique est alors valorisé à travers un réalisme que les élèves découvrent et vivent au quotidien : une pédagogie qui amène chacun à faire appel au vécu, de confronter des expériences personnelles afin de les partager, de les analyser et d’en tirer des conclusions. Cependant, nous constatons en effet, que peu d’éléments sont retenus alors que le temps passé en salle de cours est non négligeable. De plus, l’enseignement et l’apprentissage du contenu sont souvent pénibles et mal vécus par les élèves. En effet, les enseignants ne leur apprennent pas comment utiliser les situations ni dans les exercices d’application ni pour résoudre les problèmes rencontrés dans la vie courante. La situation se résume en quelques mots : « A quoi ça sert de faire des choses qui ne serviront jamais ? ». Avec l’avènement de la formation par compétences (FPC) les difficultés des élèves de s’approprier des connaissances n’ont pas évolué. En effet, avec cette démarche pédagogique, le principe d’utiliser le vécu des élèves comme support du développement des connaissances est insatisfaisant. D’ailleurs, les élèves ne sont pas engagés dans leur apprentissage, de ce fait, ils ne sont pas motivés et ils ne trouvent ni sens ni intérêt aux sciences physiques. L’emploi des situations-problèmes qui demande rigueur et méthode est souvent dévalorisé par les enseignants eux-mêmes qui considèrent la réaction des élèves comme une fatalité : « les élèves ne suivent pas et le niveau est très faible ». En fait, cette séquence d’enseignement reste le point noir de certains élèves qui sont très hermétiques et peu intéressés : « les situations-problèmes, ça ne sert à rien ! ». Comment remédier à une telle situation ? Ainsi, il nous paraît plus facile d’adapter le module aux besoins des élèves même s’il faut simplifier certaines parties pour le rendre attractif. Nous avons décidé de changer notre approche de ce module. La question se pose alors de savoir comment faire évoluer cette situation. N’existerait-il pas des méthodes susceptibles d’optimiser l’apprentissage des sciences physiques à partir des situations-problèmes dans les classes en cycle d’observation? Sinon comment construire des situations qui puissent avoir l’adhésion des enseignants et des élèves ? Autrement dit, comment rendre utile puis efficace une situation (situation problème d’amorce) dans un cours de sciences physiques en cycle d’observation? Nous postulons que l’utilisation des situations problèmes basées sur des bandes dessinées semi muettes, s’inscrivant dans une perspective socioconstructiviste pourrait motiver les élèves, et faciliterait l’enseignement et l’apprentissage des sciences physiques en cycle d’observation. Deux objectifs principaux sont visés dans ce travail : le premier est de recueillir à partir des grilles d’observation, la manière dont l’enseignant exprime les représentations des élèves à travers des activités, se comporte, exploite ces activités, et comment les élèves réagissent ; le second objectif est de choisir à la suite de ces comportements observables, le type d’activité qui parle aux élèves, qui crée l’intérêt, puis l’envie et enfin le plaisir d’apprendre. II/ Matériel et méthodes 1. Cadre d’étude Ces travaux ont été menés pendant l’année scolaire 2011/2012 lors de nos différentes visites de classe en liaison avec l’Inspection Générale de l’Education Nationale ((IGEN) de l’enseignement secondaire. Nos travaux ont porté essentiellement sur les situations problèmes (d’amorce) des classes d’observation : classes de sixième (6ème) et cinquième (5ème), niveau Revue RA N°12 Page 238 collège. Nous avons eu à travailler avec des enseignants qui ont en moyenne 12 ans d’ancienneté et des élèves dont leur âge est compris entre 10 et 15 ans. 2. Echantillonnage Afin de faire un travail objectif, nous avons identifié dix (10) chapitres (05 chapitres en 6ème et 05 autres en 5ème) appartenant aux différentes Compétences de Base (C.B.). Les chapitres concernés en classe de sixième (6ème) sont : je cherche une panne dans un circuit électrique pour la réparer, je manipule des solides et des liquides pour les distinguer (C.B.1 : J’utilise des modèles pour mieux comprendre des phénomènes), je mesure le volume d’un liquide et d’un solide de forme quelconque pour déterminer l’espace occupé (C.B.2 : Je mesure des grandeurs pratiques pour vérifier les lois de la physique et me familiariser avec les appareils et instruments de mesure), je découvre les constituants de l’air pour identifier le gaz nécessaire à la combustion, je lutte contre les incendies pour préserver l’environnement (C.B.3 : J’acquiers de bonnes attitudes pour préserver l’environnement) ; Et ceux sélectionnés au niveau de la classe de cinquième (5ème) sont : j’adapte le générateur au récepteur pour un fonctionnement normal, je fais chauffer un liquide pour découvrir la dilatation (C.B.1 : J’utilise des modèles pour mieux comprendre des phénomènes), je mesure l’intensité du courant électrique pour sécuriser les appareils et les utilisateurs (C.B .2 : Je mesure les grandeurs physiques pour vérifier les lois de la physique et me familiariser avec les appareils et instruments de mesure), je découvre différentes méthodes de séparation des constituants d’un mélange pour obtenir de l’eau potable, je découvre des réactions chimiques pour préserver l’environnement (C.B.3 : J’acquiers de bonnes attitudes pour préserver l’environnement). Pour chaque niveau d’enseignement, nous avons constitué dix (10) classes et dans chaque classe, il y a 45 élèves. Chaque établissement possède deux groupes d’élèves numérotés : groupe n°1 et groupe n°2. L’activité a porté pour les : - groupes n°1 sur les textes écrits, scannés puis projetés à l’aide d’un rétroprojecteur au tableau pour leur exploitation, soit un total de cinq (05) textes ; - groupes n°2 sur les mêmes cinq (05) textes mais traduits en planche de bandes dessinées, scannées puis projetées sur le tableau pour leur exploitation. Chaque enseignant a eu droit à deux (02) groupes d’élèves dont un de chaque type, soit un total de 10 enseignants dans les 10 établissements retenus. Le tableau n°1 donne la répartition des différents élèves par établissement par classe et par type d’activité : Revue RA N°12 Page 239 Classes 6ème 5ème Le type de groupe n°1 ; n°2 Etablissement Collège Moderne de Cocody Nombre d’élèves 45 + 45 = 90 n°1 ; n°2 n°1 ; n°2 Collège Moderne d’Adzopé Lycée Moderne d’Aboisso 45 + 45 = 90 45 + 45 = 90 n°1 ; n°2 Lycée Sainte Marie de Cocody 45 + 45 = 90 n°1 ; n°2 n°1 ; n°2 Lycée Moderne d’Abengourou Collège Expérimental Jean Piaget 45 + 45 = 90 45 + 45 = 90 n°1 ; n°2 Lycée Mamie Faitai de 45 + 45 = 90 Bingerville n°1 ; n°2 Lycée Moderne d’Abengourou 45 + 45 = 90 n°1 ; n°2 Lycée Moderne d’Adzopé 45 + 45 = 90 n°1 ; n°2 Lycée Garçon de Bingerville 45 + 45 = 90 Tableau n°1 : Répartition des élèves par établissement par classe et par type de groupe 3. Instrument L’instrument utilisé dans cette recherche est un test de diagnostic dont les questions sont volontiers exprimées sous forme de question à choix dichotomique ou multiple, administré par écrit. L’ensemble des questions a été soumis à un collège de six (06) enseignants : 02 professeurs de français dont 01 linguiste de l’ENS et 03 professeurs de sciences physiques exerçant dans le premier cycle de l’enseignement secondaire pour analyser les éléments pertinents qui entrent en ligne de compte pour avoir une situation problème porteuse de sens pour les élèves. Après l’analyse des items appropriée, l’évaluation du contenu du texte ou de l’information véhiculée par la planche de la bande dessinée semi muette s’est faite à partir de quatre (04) grilles de questions détaillées, retenues pour le test final. Ainsi, pour l’enseignant, notre système d’évaluation s’est faite par l’intermédiaire de deux (02) grilles détaillées dont l’une est en fonction de la pertinence, la faisabilité du contenu des textes ou des bandes dessinées semi muettes et l’autre en fonction de la manière d’exploiter l’activité par ce dernier. Pour l’élève, nous avons envisagé une évaluation à partit de deux (02) grilles : la première grille tenant compte du comportement de l’élève face à l’activité et la deuxième tenant compte de son appréciation de l’activité. Chaque item des deux premières grilles concernant l’enseignant est une question suivie de deux (02) réponses, parmi lesquelles chaque enseignant observateur/examinateur devrait utiliser comme base d’analyse pour caractériser ou examiner le texte ou la planche de bande dessinée semi muette, le questionnement et les éventuels obstacles en cochant une seule réponse ; contrairement à la dernière grille qui offre quatre possibilités aux 900 élèves pour tester leurs attitudes pour les différents types d’activité (textes écrits ou planches de bandes dessinées), l’avant dernière grille a les mêmes caractéristiques que les deux premières. Ainsi, la première grille porte sur le contenu du texte ou de la bande dessinée semi muette et comprend 19 items ; la deuxième grille porte sur l’exploitation du texte ou de la bande dessinée exécutée par l’enseignant et comprend 24 items ; la troisième grille porte sur les obstacles éventuels issus du degré de compréhension du sens du texte ou de l’information véhiculée à travers la bande dessinée soumis aux élèves pendant l’exploitation de l’activité et comprend 15 items ; la quatrième et dernière grille porte sur le degré de mobilité des élèves au type d’activité (texte ou bande dessinée) et comprend 11 items. 4. Modalités d’investigation Revue RA N°12 Page 240 Pour cibler notre travail, nous avons décidé de commencer notre recherche par ce travail prospectif. Il vise à mettre en évidence par confrontation les deux types d’activité pour dégager lequel permettrait une meilleure plus value et ce, à travers quatre (04) grilles. Tout d’abord, nous avons procédé par des séances d’observation. Lesquelles se sont déroulées au sein des dix (10) établissements cités plus haut. Nous avons visité tour à tour les vingt (20) classes soit 02 classes par établissement avec l’équipe rotatoire de trois (03) membres (l’enseignant de l’ENS, un conseiller de l’antenne pédagogique régionale, le professeur responsable du conseil d’enseignement (RCE) des sciences physiques de l’établissement concerné) pour assister à la séquence d’enseignement animée par l’enseignant observé, munis des grilles n°1, n°2 et n°3. L’enseignant est tenu d’animer le même cours avec une classe du groupe n°1 et une classe du groupe n°2. L’utilisation de la grille se fait selon que l’enseignant exploite le texte ou la bande dessinée (le texte ou la planche de la bande dessinée est scanné par l’enseignant afin de pouvoir être projeté au tableau). Le conseiller pédagogique est de la même ville que le professeur RCE et l’enseignant visité, mais les deux derniers sont issus du même établissement. La grille n°4 destinée aux élèves, leur a été partagée à la première séance mais ramassée après la dernière séance, c’est-à-dire à la fin du deuxième trimestre de l’année scolaire 2011/2012. Nous avons ensuite après les deux séances du professeur visité, en plus de remplir les grilles, chacun de nous trois devrait communiquer, par écrit, son appréciation, ses commentaires et ses suggestions quant à son déroulement puis désigner, des deux grilles, celle qu’il jugeait la plus adaptée à l’observation de la séance qui s’est déroulée sous nos yeux. III/ Résultats Chaque item est évalué 3 fois par type d’activité, soit 6 fois par item par enseignant pour les deux types d’activité. Pour les 10 enseignants, chaque item a reçu 30 réponses de la part des trois (03) observateurs : pour le même item, on a eu 15 réponses en 6ème et 15 autres en 5ème. Les résultats obtenus dans les 10 établissements sont combinés par item. 1. Le contenu du texte ou l’information véhiculée par la bande dessinée. Cet examen va nous permettre de savoir si le contenu est adapté au niveau des élèves, et tient compte de leurs représentations mentales ou prend en compte ce que les élèves savent déjà sur le sujet. Le point des réponses des trois observateurs évaluateurs pour l’ensemble des textes ou des bandes dessinées pour les 10 établissements donne les résultats suivants : Texte écrit Questions Bande Le contenu du texte/de la bande dessinée… dessinée Oui Non Oui Non 58% 42% interpelle, concerne l’élève ? 92% 8% 77% 23% tient-il compte des acquis initiaux des élèves? 80% 20% 62% 38% est-il adapté à l’âge et au niveau de l’élève ? 100% 0 72% 28% est-l organisé autour du franchissement d’un obstacle pour 75% 25% l’élève ? 75% 25% fait-il émerger des représentations mentales des élèves? 90% 10% 53% 47% est-il captivant? 97% 3% 65% 35% comporte-t-il un obstacle? 85% 15% 52% 48% a-t-il un sens pour les élèves? 90% 10% 68% 32% est-il authentique : un produit qui ressemble à ceux que l’on 95% 5% trouve dans la vie courante ? 47% 53% comporte-t-il des éléments pouvant rejoindre chacun des 100% 0 styles différents d’apprentissage (auditif, visuel) ? 58% 42% crée-t-il une ou des ruptures amenant à déconstruire les 80% 20% modèles explicatifs initiaux de l’élève? Revue RA N°12 Page 241 62% 38% 65% 35% suscite-il un intérêt pour les élèves ? 97% 3% donne-t-il des informations nouvelles qui peuvent aider 77% 23% personnellement l’élève? 80% 20% suscite-il un questionnement chez l’élève ? 92% 8% 53% 47% émeut-il les élèves? 82% 18% 47% 53% distrait, amuse-t-il les élèves ? 98% 2% 57% 43% se réfère-t-il aux représentations mentales des élèves ? 85% 15% 37% 63% a-t-il un caractère interdisciplinaire ? 97% 3% 87% 13% permet-il à l’élève d’interagir et de collaborer avec les 92% 8% autres ? Tableau n°2 : Pourcentages des réponses adaptées au contenu par item selon les 3 examinateurs. Analyse des séances L’analyse du contenu du texte ou de l’information véhiculée par la bande dessinée semi muette s’est faite à partir de 19 items. Ces items tiennent compte de la clarté, de la faisabilité et de la pertinence du contenu du texte ou de l’information véhiculée par la bande dessinée semi muette. La première analyse de l’ensemble des résultats obtenus montre que l’information véhiculée par la bande dessinée semi muette est plus accessible, compréhensible et motivante pour les élèves. Ainsi, il ressort du tableau que 92% des réponses des examinateurs indiquent que l’information véhiculée par la bande dessinée interpelle, concerne l’élève contre 58% pour le contenu du texte ; leurs réponses montrent aussi que la bande dessinée est adaptée à l’âge et au niveau de l’élève pour 100% contre 62% pour le texte ; 90% des résultats obtenus mentionnent que la bande dessinée semi muette fait émerger des représentations mentales des élèves contre 75% pour le texte. La bande dessinée est captivante pour 97% contre 53% pour le texte, et elle comporte des éléments pouvant rejoindre chacun des styles différents d’apprentissage (auditif, visuel) pour 100% contre 47% pour le texte. Les réponses des examinateurs mentionnent que la bande dessinée semi muette distrait, amuse les élèves pour 85% contre 57% pour le texte, et elle a un caractère interdisciplinaire pour 97% contre 37% pour le texte. En plus, son contenu suscite un questionnement chez les élèves pour 92% contre 80% pour le texte et les réponses des examinateurs prouvent que pour 95%, la bande dessinée est authentique : un produit qui ressemble à ceux que l’on trouve dans la vie courante contre 68% pour le texte. Cependant, nous avons noté des pourcentages sensiblement égaux à 75% pour la bande dessinée et 72% pour le texte concernant l’organisation du contenu autour d’un franchissement d’un obstacle pour l’élève, et 87% pour le texte et 92% pour la bande dessinée concernant l’interaction et la collaboration entre les élèves quant au contenu. L’ensemble des résultats obtenus montre un écart de sens et d’engouement entre les deux types d’activité. Les items ont les meilleurs scores avec la bande dessinée semi muette. Ce qui signifie que la bande dessinée est plus proche de leur environnement. Apparemment, l’utilisation de la bande dessinée semi muette permet à la majorité des élèves de se faire une meilleure représentation du problème posé. 2. L’exploitation de l’activité par l’enseignant Ce tableau fournit des informations sur l’exploitation de l’activité par l’enseignant observé. 32 items ont été retenus pour analyser son questionnement, sa manière de sensibiliser ses élèves, et comment il conduit la classe : énonciation et critique des hypothèses, l’ambiance dans la classe. C’est un instrument de recueil et d’interprétation des informations relatives à l’animation pédagogique dans la classe pendant le déroulement de l’activité. Ici c’est le stagiaire qui est évalué par les trois observateurs évaluateurs. Revue RA N°12 Page 242 Texte écrit Bande dessinée Oui Non Oui Non 73% 27% s’assure-t-il qu’il existe un problème à résoudre pour tous les 90% 10% élèves ? 63% 37% pousse-t-il habilement les élèves à formuler le problème ? 65% 35% 53% 47% présente-il une activité qui motive ou intéresse les élèves ? 93% 7% 62% 38% s’assure-t-il que le problème à résoudre est compris par tous les 88% 12% élèves ? 87% 13% a-t-il fait apparaître les objectifs de l’activité aux élèves ? 95% 5% 68% 32% fait traduire l’évènement pour s’assurer de la compréhension de 93% 7% son sens ? 58% 42% a-t-il mis en place un protocole d’exploitation du texte ? 88% 12% 48% 52% pose-t-il des questions d’analogie, de synthèse, de déduction, 51% 49% d’argumentation, d’évaluation ? 80% 20% a-t-il suscité l’intérêt des élèves pour l’activité ? 95% 5% 90% 10% a-t-il encouragé la participation des élèves ? 92% 8% 55% 45% pose-t-il des questions qui permettent aux élèves de faire ressortir 57% 43% leurs représentations mentales ? 75% 25% est-il enthousiaste ? 93% 7% 46% 54% pose-t-il des questions factuelles, d’observation, de rappel, 75% 25% d’identification ? 90% 10% note-t-il des hypothèses au tableau ? 93% 7% 53% 28 donne-t-il l’initiative aux élèves ? 92% 8% 55% 45% fait-il prendre conscience aux élèves de l’insuffisance de leurs 38% 62% représentations pour surmonter l’obstacle ? 52% 48% a-t-il stimulé l’apport des élèves ? 93% 7% 57% 43% favorise-t-il un débat interne entre les élèves ? 93% 7% 58% 42% reformule-t-il les questions pour s’assurer de la compréhension 62% 38% de leur sens ? 88% 12% s’intéresse t-il aux réponses des élèves ? 85% 15% 56% 44% pose-t-il des questions précises, claires, concises et explicatives ? 60% 40% 75% 25% a-t-il une idée des connaissances des élèves sur le sujet ? 87% 13% 55% 45% pose-t-il des questions de comparaison, de classification ? 53% 47% 60% 40% pose-t-il des questions guides ? 55% 45% 67% 33% guide-t-il les élèves dans leurs réponses aux questions ? 78% 22% 65% 35% tient-il compte de l’âge des élèves dans la formulation des 75% 25% questions ? 65% 35% arrive-t-il à atteindre son objectif ? 70% 30% 56% 44% pose-t-il des questions fermées ? 68% 32% 48% 52% a-t-il un questionnement qui permet de faire ressortir l’obstacle ? 55% 45% 58% 42% identifie-t-il avec les élèves les mots ou éléments clés ? 70% 30% 64% 36% pose-t-il des questions ouvertes ? 49% 51% 67% 33% tient-il compte de la représentation des élèves pour poser les 80% 20% questions? Tableau n°3 : Taux du degré d’appréciation par item des 3 examinateurs pour l’exploitation de l’activité par l’enseignant. Analyse des séances Revue RA N°12 Questions L’enseignant … Page 243 L’analyse du tableau n°3 donne les observations suivantes : l’exploitation avec la bande dessinée est plus aisée pour le professeur avec une moyenne d’ensemble de 85% contre 67% pour le texte. En effet, selon 97% des résultats, le professeur observé pose des questions qui permettent aux élèves de faire ressortir leurs représentations mentales pour la bande dessinée contre 65% pour le texte ; les idées qu’il a de l’activité est mieux traduite par une bande dessinée que par un texte, même si de façon générale, le questionnement n’est pas adapté : les questions ne sont pas précises, claires, concises et explicatives. Ce qui est observé par une moyenne de 58.5% pour la bande dessinée contre 55% pour le texte : en effet, avec la planche de bande dessinée, on a plus : 68% de questions fermées ; 49% de questions ouvertes ; et 55% de questions guides contre 56% de questions fermées, 64% de questions ouvertes et 60% de questions guides pour le texte. Le professeur maitrise bien le sujet ; ce qui lui permet d’avoir une idée des connaissances des élèves sur le sujet pour 87% avec la bande dessinée contre 75% avec le texte, de guider les élèves dans leurs réponses aux questions pour 78% pour la bande dessinée contre 67% pour le texte, et d’avoir un questionnement qui permet aux élèves de faire ressortir l’obstacle pour 55% pour la bande dessinée contre 48% pour le texte. Les résultats sont meilleurs dans la (re) formulation et la traduction de l’évènement par les élèves pour la bande dessinée avec 93% contre 68% pour le texte. Nous notons aussi que le professeur observé suscite l’intérêt des élèves plus pour la bande dessinée avec 95% que pour le texte avec 80% et la participation motivée des élèves est plus importante avec la bande dessinée (92%) qu’avec le texte (57%). Cependant, nous notons des pourcentages sensiblement voisins quant à la notation des hypothèses au tableau avec 93% pour la bande dessinée contre 90% pour le texte, et à l’attention que le professeur accorde aux réponses des élèves avec 88% pour le texte contre 85% pour la bande dessinée. Les meilleurs scores obtenus sont du côté de la bande dessinée. Ce qui signifie que le professeur se sent plus à l’aise dans son exploitation, et son questionnement semble plus approprié. Nous avons noté deux types de difficultés chez le professeur observé : des difficultés linguistiques littéraires (lexique, grammaire, orthographe) et des difficultés linguistiques et scientifiques qui s’expliquent pour le nombre important et varié des termes et des définitions scientifiques (langage des sciences physiques). 3. Le comportement des élèves vis-à-vis de l’activité Ce tableau recense à travers 15 items l’attitude des élèves pendant l’exploitation de l’activité : Texte écrit Questions Bande dessinée Oui Non Oui Non 58% 42% Les élèves émettent-ils des hypothèses par écrit au brouillon ? 83% 17% 57% 43% L’activité donne-t-elle envie de chercher à comprendre le 88% 12% problème posé ? 83% 17% Les élèves discutent-ils entre eux des hypothèses qui sont notées 83% 17% au tableau ? 53% 47% Les élèves travaillent-ils en groupes ? 85% 15% 47% 53% Les préférences sensorielles (visuelles, auditives) sont-elles 100 0 utilisées ? % 52% 48% Est-ce que les élèves participent-ils de façon significative ? 93% 7% 53% 47% Les hypothèses sont-elles en rapport avec le thème ? 90% 10% 83% 17% Les élèves émettent-ils des hypothèses à l’oral ? 87% 13% 53% 47% L’activité permet-elle de développer les compétences 100 0 langagières ? % 67% 33% Les propositions des élèves sont-elles discutées ? en groupes ou 85% 15% collectivement ? Revue RA N°12 Page 244 42% 58% L’activité permet-elle de développer ou fait appel à d’autres 97% compétences ? 83% 17% L’activité se déroule sur une période de temps suffisant (ne pas le 88% pousser à agir rapidement, hésiter à s’investir ? 77% 23% L’activité est-elle adaptée au degré de compréhension des 93% élèves ? 53% 47% L’activité comporte-t-elle des consignes claires (pour réduire 57% l’anxiété et le doute, vérifier la compréhension des consignes) ? 53% 47% Y-a-t-il un élément déclencheur d’intérêt : humour, défi, 87% curiosité ? Tableau n°4 : Pourcentages du niveau de réaction des élèves par item vu par examinateurs. 3% 12% 7% 43% 13% les 3 Analyse des séances L’analyse des items relatifs à l’attitude des élèves pendant l’exploitation de l’activité donne les résultats suivants : de façon générale, on note que plus de 83% des réponses sont satisfaisantes pour la bande dessinée contre une moyenne de 60% pour le texte. En effet, les observateurs ont noté que l’activité comporte des consignes claires pour 57% pour la bande dessinée contre 53% pour le texte ; les hypothèses émises par les élèves sont en rapport avec le thème pour 90% pour la bande dessinée contre 53% pour le texte ; la bande dessinée donne envie de chercher à comprendre le problème posé pour 88% contre 57% pour le texte ; l’activité permet de développer de compétences langagières pour 100% pour la bande dessinée contre 53% pour le texte ; en plus, elle comporte un élément déclencheur d’intérêt : humour, défi, curiosité pour 87% pour la bande dessinée contre 53% pour le texte, et nécessite un travail coopératif pour 85% pour la bande dessinée contre 53% pour la texte ; les préférences sensorielles (visuelles, auditives) sont utilisées pour 100% sur la bande dessinée contre 17% pour le texte ; les élèves participent de manière significative pour l’activité pour 93% pour la bande dessinée contre 52% pour le texte. Nous avons constaté que les élèves commettent énormément de fautes d’orthographe et grammaticales et changent même quelque fois le sens d’une phrase. 4. Appréciation des élèves sur les deux types d’activité Ce tableau évalue l’avis des 900 élèves (dont 450 élèves pour les textes et 450 autres pour les bandes dessinées) ayant participé à l’expérimentation sur les deux types d’activité à travers 11 items: bien que les participants aient mieux performé quand il s’agit des bandes dessinées dans le tableau n°4, il ressort du tableau ci-dessous que les résultats obtenus sont sensiblement voisins. Bande dessinée Texte Toujours Souvent Rarement Jamais Toujours Souvent Rarement Jamais En général, trouvez-vous que… les activités vous ont été 51% 35% 12% 2% 20% 32% 21% 8% proposées sont motivantes? les activités ont exigé de vous que vous accomplissiez 55% 36% 6% 3% 29% 26% 30% 15% différentes tâches ? les activités ont comporté un 57% 33% 8% 2% 51% 32% 10% 7% défi à relever ? les activités vous mobilisent ? 54% 39% 5% 2% 42% 35% 15% 8% les activités avaient un rapport 51% 42% 5% 2% 48% 37% 10% 5% Revue RA N°12 Page 245 avec ce qui vous intéresse dans la vie ? les activités sont plus claires, 55% 37% 5% 3% 39% 33% 20% 8% compréhensibles ? les activités ont exigé que vous vous serviez des connaissances 53% 38% 7% 2% 54% 36% 7% 3% acquises dans d’autres cours (de mathématique, de français, de géographie, etc.) ? les activités se sont déroulées 57% 44% 8% 1% 52% 37% 8% 3% en collaboration avec vos collègues de classe ? les questions de votre 25% 22% 31% 12% 23% 27% 31% 19% professeur sont claires, compréhensibles ? dans le cadre de ces activités, on vous a laissé assez de temps 39% 31% 20% 10% 38% 29% 23% 10% pour que vous fassiez du bon travail ? les activités prennent en compte les éléments pouvant 53% 37% 7% 3% 31% 35% 22% 12% rejoindre chacun des styles différents d’apprentissage (auditif, visuel) ? Tableau n°5 : Taux du degré d’appréciation des élèves selon le type d’activité proposée. L’analyse des pourcentages du tableau n°5 montre que les élèves trouvent les activités toujours motivantes pour 51% pour la bande dessinée contre 20% pour le texte, et qu’elles se sont toujours déroulées en collaboration entre les élèves de la classe pour 57% pour la bande dessinée contre 52% pour le texte ; les élèves trouvent que les activités sont toujours plus claires, compréhensibles pour 55% pour la bande dessinée contre 39% pour le texte , et ils estiment que les activités prennent toujours en compte les éléments pouvant rejoindre chacun des styles différents d’apprentissage (auditif, visuel) pour 53% pour la bande dessinée contre 31% pour le texte. Cependant, les élèves de notre échantillon estiment que les questions de leur professeur sont rarement claires et compréhensibles pour les deux types d’activité avec un pourcentage de 31%, et que le professeur ne leur a laissé rarement assez de temps pour faire du bon travail pour 20% pour la bande dessinée contre 23% pour le texte. IV/ Discussion Cette recherche montre que l’utilisation des situations problèmes en sciences physiques en cycle d’observation dans les lycées et collèges dont les élèves ont participé à l’enquête, comme dans tous les autres établissements du secondaire en Côte d’Ivoire, a une influence significative dans l’acquisition des connaissances. Si l’on considère que le rapport aux situations problèmes peut être décrit à partir des éléments pris en compte dans les quatre (04) grilles, on peut constater que les résultats obtenus nous permettent de dégager un certain nombre de remarques : En ce qui concerne le contenu du texte ou de la bande dessinée semi muette, les situations proposées aux élèves sont plus ou moins ouvertes. Elles portent, autant que possible, sur des phénomènes que l’on peut retrouver dans la vie courante. Ces situations sont facilement abordables par les élèves, elles sont généralement connues par ces derniers parce que Revue RA N°12 Page 246 révélatrices de difficultés ou de fausses représentations. De l’analyse des résultats obtenus et en tenant compte du pourcentage élevé de réponses favorables pour la planche de bande dessinée semi muette (68%), on en déduit que les professeurs sont plus à l’aise avec les bandes dessinées ; ce qui corrobore les idées des psychologues qui disent 85% de nos connaissances sont dues à nos impressions visuelles. Ainsi, comme disaient les chinois de l’ancien temps, une image vaut dix mille mots. La bande dessinée semi muette permet un apprentissage efficace Jung (1993) car sont prises en compte les différences développementales dans les domaines physique, intellectuel, émotionnel et social de l’élève. Dans cet environnement interactif et collaboratif, l’élève a l’opportunité de réfléchir et prendre des décisions qui l’amèneront à développer ses capacités intellectuelles, sociales et morales. La bande dessinée offre ainsi un cadre de discussion ou de débat prenant appui sur les représentations initiales des élèves, ce qui engendre de grandes évolutions dans leurs conceptions car la parole, ou l’argumentation d’un de leurs camarades arrivait à les influencer et à modifier leurs conceptions. Les résultats moyens obtenus à la lecture du tableau (environ 70%) montrent aussi que la bande dessinée permet à l’enseignant de se sentir plus à l’écoute de l’élève, de se sentir plus proche des élèves, et de nombreux élèves faibles s’investissent dans le travail parce qu’ils n’avaient pas l’impression de faire des sciences physiques (Kasher et Ofer, 1996). Certes, il ya un changement radical des habitudes scolaires, mais l’utilisation de la planche de bande dessinée semi-muette amène non seulement le professeur à avoir une connaissance approfondie de la notion concernée mais aussi et surtout à maitriser les processus de raisonnement des élèves et de comprendre les différents points de vue de ces derniers et les compléter en imaginant les différentes directions dans lesquelles ceux-ci vont s’orienter au départ des situations. Par ailleurs, la planche de bande dessinée permet à l’enseignant de comprendre en profondeur le sens des contenus à enseigner pour mieux adapter la situation. Les élèves voient (Lyster, Gagnon et Rebuffot, 2009) que l’enseignant tient compte de leurs idées : une grande motivation nait, laquelle favorise chez ces derniers une réflexion et un raisonnement en vue d’augmenter leur compréhension. En fin de compte, l’utilisation de la bande dessinée fait naître chez l’élève un climat de sécurité et de motivation ; lequel climat lui permet de partager avec les autres ses idées et participer activement au processus d’apprentissage. Du côté de l’exploitation de l’activité par l’enseignant visité, l’interaction professeurélève est presque exclusivement pilotée par le professeur. Elle se présente sous la forme d’une succession de séquences « Initiative du professeur (souvent : une question), Réponse de l’élève, Feed-back du professeur. La boucle est stable, elle tourne régulièrement sur ellemême et à haute fréquence. Dans l’exploitation des deux types d’activité, le professeur visité pose des questions qui font appel à la mémoire et à des automatismes qu’à des raisonnements de haut niveau. Trois types de questions sont utilisés par l’enseignant pour s’ajuster aux conduites des élèves: des questions fermées (56% pour le texte contre 68% pour la bande dessinée) pour obliger l’élève à se couler dans un moule ; des questions ouvertes (64% pour le texte contre 49% pour la bande dessinée) pour stimuler la réflexion, la recherche, l’expression d’idées, de jugements ou de sentiments au niveau des élèves ; et des questions « guides » ( 60% pour le texte contre 55% pour la bande dessinée) pour les amener à utiliser des procédures cognitives et métacognitives. Les questions posées par le professeur dans le cadre de l’exploitation du texte provoquent chez les élèves des hésitations, des malentendus et des erreurs (44%) : les questions sont moins précises, moins succinctes et claires ; ce qui brise le rythme de l’exploitation alors que les questions posées pour l’exploitation de la bande dessinée sont simples, des questions factuelles, d’observation et d’identification (68%) : les questions simples, précises et succinctes sont plus nombreuses : les élèves ont une bonne compréhension des informations données; ce qui permet une progression très rapide dans l’exploitation. La mauvaise conception ou compréhension des textes dans les classes de Revue RA N°12 Page 247 physique est constatée dès lors l’enseignant n’a pas une idée claire de la notion et les phénomènes qui y sont associés. Quant à l’attitude des élèves, nous avons observé que les élèves ont souvent, dans le cadre de la planche de la bande dessinée semi muette, témoigné d’une grande inventivité dans leur recherche de solution. Nous avons constaté un changement radical des habitudes scolaires de ces derniers. En effet, ce type d’enseignement demande également de la part du professeur une connaissance approfondie non seulement de la notion enseignée par la situation, mais aussi des processus de raisonnement des élèves : celui-ci doit pouvoir comprendre les différents points de vue des élèves et les compléter, imaginer les différentes directions dans lesquelles ceux-ci vont s’orienter au départ des situations, comprendre en profondeur le sens des contenus à enseigner afin de déterminer une situation qui soit adaptée. Le bon climat dans la classe permet aux élèves d’exprimer leurs idées et d’échanger leurs points de vue avec les autres élèves. Nos résultats (97% pour l’activité type bande dessinée) sont en conformité avec ceux de Robin (1974) et de Schneider (2001) selon lesquels les élèves sont plus à l’aise avec la planche de la bande dessinée. En effet, cette activité leur permet de faire appel à des connaissances acquises dans d’autres disciplines comme les mathématiques, le français, la géographie, etc.). La bande dessinée donne ainsi l’occasion aux élèves d’utiliser, de développer et de donner du sens aux notions étudiées et de pouvoir progresser (Douady, 1994) et ils prennent facilement possession de la situation et s’engagent aisément dans des essais, des conjectures, des projets de résolution (Arsac et Mante, 2007). Cela a également été observé par Arsac et Mante (2007) que d’une façon générale les situations qui utilisent les bandes dessinées permettent aux élèves de voir les sciences physiques autrement : non plus comme des activités souvent dénuées de sens qui consistent à appliquer des techniques, mais comme des lieux d’énigmes qui stimulent l’imagination, la créativité. En conséquence, les élèves apprennent à travailler en groupe, à débattre et deviennent plus autonomes. La bande dessinée semi muette exige de l’élève, la mise en œuvre de méthode et de compétence peu travaillées par ailleurs : essayer, organiser sa démarche, mettre en œuvre une démarche originale, en mesurer l’efficacité, argumenter à propos de sa réponse ou de celle d’un autre. Pour ce qui est du degré de motivation au niveau des élèves, nous avons constaté que le travail par groupes permet d’augmenter le nombre d’interactions sociales, condition nécessaire au développement intellectuel et donc, la probabilité d’apparition de conflits sociocognitifs est importante. Certes dans les deux types d’activités, nous qualifions les différentes situations d’efficace en termes de motivation des élèves, d’intérêts, et de résultats obtenus promoteurs dans les évaluations, mais nous avons senti un public motivé et averti, volontaire et mentalement complice dans l’activité type bande dessinée. En effet, nous avons senti un enseignant plus à l’écoute et plus proche des élèves, et ces derniers voient en lui celui qui tient compte de leurs idées. Nos résultats corroborent avec les résultats des travaux de Forceville (2005) selon lesquels l’apprenant ne se contente plus d’être spectateur mais adopte le rôle d’acteur. Nous avons noté comme Tsakona (2009) que la bande dessinée non seulement transmet et ancre durablement les informations et connaissances recherchées, mais aussi et surtout favorise l’apprentissage par l’erreur et le tâtonnement pour une efficacité de compréhension et de mémorisation accrues. Conclusion Nous estimons que la recherche de situations par l’enseignant peut, en elle-même, être riche d’un point de vue didactique. En effet, en cherchant à construire des situations, l’enseignant doit parcourir les méandres du sens par lesquels passent les élèves pour comprendre ; ils sont conduits à buter sur les obstacles qu’ils ont appris à contourner. L’enseignant est amené à chercher comment faire, à la fois pour amener les élèves à se poser les « bonnes » questions ou au contraire comment les aider à se les poser sans leur faciliter trop la tâche. Ainsi, l’activité menée à partir des textes montre de manière évidente que les processus et les Revue RA N°12 Page 248 cheminements d’apprentissage suivis par les élèves sont très compliqués : il y a des progrès et des reculs, des développements parallèles, et des impasses également. D’ordinaire, un développement vers le point de vue de la science devient visible seulement après un temps long. Le mélange complexe d’argumentations incorrectes dans l’exploitation de l’activité type texte montre que l’enseignement ne conduit généralement pas à une représentation claire des concepts utilisés en physique et chimie en cycle d’observation. Quant à l’activité type bande dessinée, des recherches antérieures (Akir, 2009) laissent entendre également que les bandes dessinées constituent un point de départ efficace à la lecture de textes suivis et qu’elles contribuent au développement de l’intelligence perceptive (la capacité de comprendre une image et d’y réagir). Ces résultats corroborent avec les nôtres avec un pourcentage remarquable dans l’utilisation des planches de bandes dessinées (70%) contre 51% pour le texte) ; en plus, ce type d’activité permet aux élèves de développer leur vocabulaire, apprendre à lire sans stress et surtout «découvrir le langage familier, les onomatopées et les expressions. Mais au-delà de cela, la recherche a montré de manière générale que les conceptions des élèves sont spécifiques du contexte, c’est-à-dire qu’elles dépendent du type d’activité concrète qui est représentée. Si la situation change entre un premier exercice et un autre similaire (du point de vue du physicien), les élèves peuvent employer des conceptions très différentes pour résoudre la tâche demandée (Varnum et Gibbons, 2001). Les influences culturelles et de groupe pouvant avoir un impact sur l’élève notamment et aussi comme un moyen d’accès à la culture, son orientation de l’apprentissage et ses différentes façons de penser, un travail de fond doit être fait pour lui permettre de voir ce qui doit être vu, de lui donner des critères et des repères pour s’orienter et choisir en vue de développer son intelligence perceptive, sa capacité de comprendre une image et de réagir à celle-ci. Dans les deux types d’activité, l’enseignant a mobilisé des connaissances sur les difficultés des élèves, des connaissances sur les programmes, des connaissances sur les stratégies d’enseignement. Ce travail ne constitue en rien une forme achevée, c’est une expérimentation certes difficile à mettre en place et qui reste insuffisante en ce qui concerne l’évaluation mais apparait comme un moyen idoine pour tenir compte des deux modes d’évocation des élèves : visuel ou auditif. Ces types d’activité doivent être utilisés en classe d’observation mais quelle serait la part de chaque type d’activité pour éviter la monotonie, l’ennui dans l’apprentissage en classe de sciences ? Références bibliographiques AKIR, T. “The study of speech acts used in comic strip of “Garfield” and “The Calvin and Hobbes” “Petra Christian University-Online Catalog”, 2009. <<http://digilib.petra.ac.id/viewer.php?submit.x=19&submit.y=16&submit=prev&page=2&q ual=high&submitval=prev&fname=%2Fjiunkpe%2Fs1%2Fsing%2F2000%2Fjiunkpe-ns-s12000-11494034-713-comic-chapter1.pdf>. ARSAC, G., Mante, M. Les pratiques du problème ouvert. Lyon : Scéren CRDP de Lyon, 2007. DE VECCHI, G. Une banque de situations-problèmes, tous niveaux, Hachette Education. Tome1. 2002, 377 pages. DE VECCHI, G., Carmona-Magnaldi, N. Faire vivre de véritables situations-problèmes, Hachette Education. Collection 24- Edition 03, 2004, 251 pages. Douady, R. 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C.B.3 : J’acquiers de bonnes attitudes pour préserver l’environnement/5ème Planche de bande dessinée Revue RA N°12 Page 251 Texte En période d’harmattan, le père de MOHAMED décide de se rechauffer avec du charbon dans un fourneau dans sa chambre à coucher. Son fils, élève en classe de 5ème n’arrive pas à le convaicre sa pratique est dangeureuse pour sa santé. Aide MOHAMED à convaincre son père. Revue RA N°12 Page 252