L`Afrique à la croisée des chemins dans la lutte antitabac
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L`Afrique à la croisée des chemins dans la lutte antitabac
L’Afrique à la croisée des chemins dans la lutte antitabac Si les tendances actuelles continuent, d’ici 2030, le tabagisme entrainera huit millions de décès par an – et dont 80% dans le monde en voie de développement, selon les estimations de l'Organisation Mondiale de la Santé Les pays en voie de développement qui affichent déjà des taux élevés de consommation du tabac de manière alarmante seront les plus touchés. Mais, à moins que les mesures de contrôle soient grandement intensifiées, les pays d'Afrique compteront un grand nombre de décès liés au tabac, ajoutant un nouvel élément au lourd fardeau de maladies mortelles qui les accable déjà. Selon les normes internationales, la plupart des pays africains affichent des taux de tabagisme relativement faibles. Les taux sont bas même comparés aux autres pays en voie de développement, comme suggéré dans le tableau cidessous. Pourcentage de la population qui fume tout type de produit du tabac Pays africains sélectionnés Pays Burkina Faso Rep Dem du Congo Ghana Kenya Mali Nigéria Afrique du Sud Uganda Hommes 20.3% 13.8% Femmes 8.2% 1.6% 8.2% 24.1% 19.2% 11.7% 27.1% 17.3% 0.7% 1.6% 2.5% 0.9% 8.9% 2.5% Autres pays en développement sélectionnés Pays Hommes Femmes Argentine 34.6% 24.6% Mexique 37.6% 12.4% Vénézuela 33.4% Egypte 26.0% Pakistan 31.7% Bangladesh 44.5% Inde 30.8% Chine 60.8% Malaisie 55.5% Source: Rapport de l’OMS sur l’Epidémie Mondiale du Tabagisme, 2008 27.8% 4.1% 5.1% 2.9% 2.8% 4.2% 2.5% Le problème est que la consommation du tabac à travers l’Afrique est en nette croissance en réponse à un assaut de marketing par des sociétés multinationales du tabac, qui cherchent à compenser leurs pertes de ventes dans les pays plus riches en exploitant des nouvelles opportunités en Afrique. Un rapport de la Banque Mondiale a montré que la consommation de cigarettes dans la région africaine a augmenté de 38,4 % en cinq ans seulement, entre 1995 et 2000. Et dans la plupart des pays africains, les taux de tabagisme chez les adolescents sont considérablement plus élevés que dans la population générale, ce qui ne s'annonce pas bon pour l'avenir. Les stratégies délibérées et semi-clandestines des multinationales du tabac pour cibler les jeunes dans les pays africains ont été exposées à maintes reprises par des journalistes d'investigation L’Afrique au bord du précipice En bref, l’Afrique se trouve au bord du précipice. Le continent a toujours une possibilité de s’en sortir relativement légèrement endommagée par l’épidémie mondiale du tabagisme. Mais profitera-t-elle de cette occasion? Ses décideurs auront-ils la prévoyance de donner priorité à la lutte antitabac, en introduisant des mesures intransigeantes dans l'intérêt de prévenir les maladies? Ou ne seront-ils persuadés uniquement lorsque les taux de mortalité commenceront à grimper et à concurrencer le nombre de décès causés par le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose? Les défenseurs africains de lutte antitabac de 22 pays estiment que les décisions prises par la délégation africaine à la 3ème Conférence des Parties à la Convention-cadre pour la lutte antitabac seront critiques pour déterminer l'avenir de l'épidémie. Lors de leur récente réunion à Abuja, Nigéria, sous les auspices de l’Alliance pour la Convention cadre, ce groupe d’activistes bien informés ont décrit la propagation de l’épidémie du tabac en Afrique comme alarmante. "Ses effets sont dévastateurs sur la santé, l'économie et l'environnement de notre continent," a déclaré leur communiqué de conclusion. Ils ont fait appel aux délégués des gouvernements africains pour soutenir les mesures les plus fermes possibles pour la mise en œuvre des articles de la CCLAT sur: Le conditionnement et l’étiquetage. (L’Article 11 exige des mises en garde et interdictions sanitaires obligatoires sur les informations trompeuses de l'industrie sur le conditionnement.) La publicité, la promotion et le parrainage. (L’Article 13 exige des interdictions sur la publicité, la promotion et le parrainage du tabac.) La protection de la politique sur la santé publique de l’ingérence de l’industrie du tabac. (L’Article 5.3 traite spécifiquement de cette question) Il est temps de récupérer l’héritage de la CCLAT Le rôle de l’Afrique dans le développement et l'adoption de la CCLAT a été exemplaire: Un groupe de pays africains a joué un rôle clé dans rédaction de ce traité influant. La région a travaillé de manière constructive avec les ONGs au cours des négociations. Le continent a refusé d'être divisé en blocs de pays producteurs et consommateurs de tabac, mais a au contraire voté dans l'unité pour la CCLAT. En outre, un total de 36 nations dans l'Afrique subsaharienne a adhéré à ou a ratifié la CCLAT, s’engageant volontairement à adopter des lois et à élaborer des programmes pour donner effet au traité. L’attitude des pays africains indique un désir de protéger leur peuple de l'assaut d'une épidémie qui est entièrement évitable. Il est dommage que dans la plus grande partie de l'Afrique – comme dans de nombreuses autres parties du monde en voie de développement, et dans certains pays riches – il existe un fossé énorme entre l'intention et la lutte antitabac efficace. Par exemple, l'Organisation Mondiale de la Santé estime qu’uniquement 9% des pays à revenus élevés, 4% des pays à revenus moyens et 3% des pays à faibles revenus ont des lois interdisant le tabagisme dans toutes les institutions et les lieux évalués. Et, à l'autre extrémité de l'échelle, 15% des pays à revenus élevés affichent une absence totale de législation interdisant le tabagisme ou une législation si faible qu'elle ne parvient même pas à couvrir les institutions de santé et d’enseignement. Les chiffres correspondants pour les pays à moyens et faibles revenus sont de 49% et 31% respectivement. (Rapport de l'Organisation Mondiale de la Santé sur l’Epidémie Mondiale du Tabagisme, 2008) Les défis et les difficultés pour la mise en œuvre la CCLAT de manière efficace ne sont donc pas uniques à l'Afrique. Mais le continent africain a plus à gagner en prenant une action concertée maintenant – et beaucoup à perdre si elle n'en prend pas. L'adoption de directives fermes et explicites par la 3ème Conférence des Parties est, comme souligné par les défenseurs africains du tabac, d’un intérêt critique au peuple du continent. _______________________________________________________________ L’Alliance pour la Convention cadre est un réseau international de plus de 350 organisations non gouvernementales dédiées à la réalisation des dispositions de la CCLAT