Rapport - Région Rhône

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Rapport - Région Rhône
Rapport de stage – ECCIDIO Camille
J’ai effectué mon stage à Bangalore (Inde du sud) dans une start-up appelée Milaap. Milaap est une
plateforme internet de crowd-funding spécialisée dans la microfinance. Ainsi, par le biais de leur site,
ils mettent en contact des prêteurs partout dans le monde avec des personnes indiennes en
recherche de micro prêts afin d’améliorer leurs conditions de vie.
Vie pratique :
Logement :
Il existe 2 types de logement : les « Paying Guests » et la location d’appartement traditionnelle. Les
Paying Guests ou PG sont à la base des particuliers qui acceptent de louer une chambre de leur
maison à des étudiants ou jeunes professionnels. Cela peut également prendre la forme d’une
véritable petite résidence universitaire. C’est une solution plus avantageuse financièrement et qui ne
nécessite en général pas de « brokers » (équivalent des agents immobiliers mais souvent chers donc
en général évités). Cependant, la qualité n’est pas toujours au rendez-vous et le manque d’intimité
peut poser problème (on partage très souvent de petites chambres avec des inconnus).
J’ai pour ma part opté pour la solution de la location d’appartement puisqu’aucun logement n’était
mis à disposition par mon entreprise. Notamment, je me suis concentrée sur les résidences
sécurisées. Elles sont un peu plus chères que la moyenne, même si toujours abordables, modernes,
et propres. J’ai partagé un appartement 2 chambres avec une colocataire elle-même indienne et
nous devions payer Rs18000/ mois + charges. Elle avait emménagé avant moi dans l’appartement et
avait donc déjà réglé la caution au propriétaire. La caution est généralement hors de prix, souvent
équivalente à 10 mois de loyer et il est très dur de trouver un appartement pour seulement 6 mois,
les propriétaires préférant généralement des baux de 1an minimum. Puisque ma colocataire avait
déjà emménagé, signé un bail de 1 an et réglé tous ses détails, le problème de la durée du séjour n’a
pas été un souci et nous avons décidé de nous arranger entre nous pour la caution. Je lui ai
seulement versé 40% de la caution, soit l’équivalent de 500 euros. On peut donc dire que j’ai été
extrêmement chanceuse sur ce point particulier.
Pour trouver un logement, le plus simple si l’on souhaite éviter les brokers est de simplement passer
par des sites internet type PàP ou le bon coin. Je suis personnellement passée par un site qui
s’appelle sulekha.com. J’ai eu de la chance et ai trouvé mon logement en une semaine et demie.
Télécommunication :
Cependant pour trouver un logement, il faut bien entendu un moyen de communication. Dans le cas
d’un séjour court, le plus simple est de prendre une carte pré payée qu’il suffit de recharger lorsque
l’on en a besoin. Le seul problème est que l’on ne peut obtenir une carte sim sans adresse indienne
et sans téléphone on ne peut trouver un logement…. C’est donc un véritable cercle vicieux.
Heureusement, une connaissance indienne m’a pris une carte sim à son nom ce qui a débloqué la
situation. C’est cependant un point qu’il vaut mieux connaître avant de partir. Il peut être intéressant
de demander à son entreprise d’activer une carte sim à leur nom avant l’arrivée du stagiaire. Les prix
sont ensuite similaires d’un opérateur à l’autre dans le cadre de carte sim pré-payée et les prix des
communications étaient très bons marché : quelques roupies la minute pour un appel dans son Etat
(Attention : les communications sont majorées dès lors qu’il s’agit d’appels inter-Etats)
Pour ce qui est d’internet, mon expérience n’est pas très représentative. En effet, ma colocataire
ayant emménagé dans notre appartement près de 2 mois avant moi, elle avait déjà souscrit à
l’équivalent d’une box. Je n’ai donc rien eu à faire et ne sais rien concernant la démarche pour y
souscrire ou les délais Elle avait un compte indien et était donc prélevée tous les mois. Je crois qu’elle
payait environ Rs1000 par mois et je ne suis pas sûre que ce type de prélèvement soit possible sur un
compte français par exemple. En effet, tandis que je tentais de recharger ma carte sim par internet,
j’ai découvert que mon opérateur (Vodafone) n’acceptait pas les transactions provenant de cartes
étrangères. Je pense donc que cela est très probablement le cas avec l’autre grand concurrent :
Airtel. Je me demande donc si il n’est pas très compliqué pour un étranger d’avoir accès à internet en
Inde.
Argent :
Comme beaucoup, je n’ai pas ouvert de compte bancaire dans mon pays d’accueil. J’ai opté pour une
offre que ma banque française me proposait : une offre internationale à 3euros par mois me
permettant de payer et de retirer de l’argent sans frais partout dans le monde (sauf dans certaines
rares banques). Un simple email à mon banquier m’a suffi pour l’activer. Cela était donc
excessivement pratique et financièrement intéressant. Cependant, l’usage de la carte bleue n’est pas
complètement généralisé en Inde. Dans tout magasin ou petit restaurant de rue, il faudra payer en
liquide. Il est même conseillé d’éviter le plus possible de payer par carte bleue, sauf dans les très
grandes enseignes : les risques de fraude étant élevés. J’ai donc principalement utilisé ma carte bleue
afin de retirer de l’argent. N’ayant pas de compte indien, mon entreprise me payait chaque mois en
liquide. Cela s’est avéré pratique, puisque l’usage de la carte bleue n’était pas recommandé.
Santé :
A ma connaissance, il n’y a pas de service de couverture sociale en Inde ou en tout cas rien d’aussi
élaboré qu’en Europe. L’EM Lyon nous avait fourni une couverture internationale très complète, je
n’ai donc pas eu besoin de faire plus de démarches. Il est fortement recommandé de visiter son
médecin traitant quelques jours avant le départ afin d’obtenir des antibiotiques en prévision de
potentiels soucis de santé (notamment liés à la mauvaise qualité de l’eau). Il n’est pas dit que l’on
puisse trouver ces médicaments une fois en Inde. Je n’ai par exemple pas pu trouver la molécule
dont j’avais besoin lorsque je suis tombée malade, et ce même dans les meilleures pharmacies. C’est
l’occasion d’un autre conseil. Le monde de la santé en Inde est très clairement partagé entre public
et privé. Les pharmacies et hôpitaux publics sont à éviter à tout prix. Il ne s’agit pas de pharmaciens
mais de vendeurs purs et simples qui n’ont pas forcément suivi d’études de médecine. J’ai donc eu la
très mauvaise surprise en découvrant que j’avais acheté un médicament contre la cystite alors que
j’avais demandé un antiseptique intestinal dans une petite pharmacie de proximité… Il vaut mieux se
concentrer sur de grandes chaînes nationales telles que « Apollo » ou « Fortis » (conseillés par des
chirurgiens indiens) qui sont réputées internationalement et où le personnel est bien mieux formé.
Ils proposent différents types d’hôpitaux, de cliniques, de pharmacies partout en Inde. De manière
générale, le meilleur conseil à mon avis est : éviter à tout prix de tomber malade ou de se blesser en
Inde. Cela peut paraitre absurde mais si personne n’est là pour nous guider, cela peut s’avérer
réellement difficile.
Vie universitaire :
Puisque j’ai été en stage en compagnie pendant la totalité des 6 mois, je n’ai absolument pas eu de
contact avec le monde universitaire indien et n’ai donc pas de connaissance à partager sur la
question.
Stage :
J’ai effectué mon stage dans un secteur très particulier en Inde : le secteur de la microfinance. Ce
secteur est excessivement dynamique en Inde et à la recherche d’étudiants étrangers. J’ai donc
décidé de faire des candidatures ouvertes dans toutes les institutions de micro finance qui
m’intéressaient dans les villes de mon choix. J’ai trouvé sur internet le top 100 des institutions de
micro finance en Inde, ai sélectionné celles basées dans les villes que je visais puis j’ai ensuite envoyé
ma candidature aux instituts qui se rapprochaient le plus de ma vision de ce que devrait être le micro
crédit vertueux. En 2 semaines, j’étais acceptée dans 3 stages différents et ai pu choisir celui qui me
correspondait le plus. J’ai entendu parler de Milaap grâce à un ami indien et de même ai envoyé ma
candidature sans pour autant répondre à une annonce particulière.
Les fondateurs de Milaap ont une vision particulière du management de leurs employés. Ils
considèrent que pour, attirer les vrais talents qui permettront à Milaap de se développer et
d’atteindre ses objectifs, il faut pour cela offrir une paie digne de ce nom et ne pas payer au lancepierre sous prétexte qu’il s’agit du secteur social. J’ai donc eu un petit salaire qui couvrait une partie
non négligeable de mes dépenses. Cela a été une heureuse surprise car la législation sur les stages
est pour ainsi dire inexistante en Inde. Les patrons font donc comme bon leur semble et payent très
rarement leurs stagiaires.
Quant au rythme de travail, il est très différent de celui que l’on peut trouver en France. Les
employés arriveront très souvent tard dans la matinée, parfois à 11h-12h et repartiront vers 8h du
soir. J’ai personnellement préféré garder un rythme plus « européen » en arrivant tôt le matin afin
de ne pas repartir trop tard (la nuit tombe relativement tôt en Inde).
Il s’agissait d’une start-up en pleine expansion mais cependant encore à taille humaine (une
vingtaine de salariés à temps plein plus plusieurs stagiaires). Les bureaux étant assez petits, tout le
monde travaille ensemble et l’ambiance est très détendue et amicale. Ce sentiment presque de
« famille » sans réelle impression de hiérarchie était renforcé par le fait que l’équipe était
extrêmement jeune, l’employé le plus « âgé » avait 35 ans. J’ai donc eu la chance d’évoluer dans une
ambiance exceptionnelle mais je ne peux assurer que cela soit le cas partout en Inde. J’ai reçu par la
suite des témoignages unanimes d’autres étudiants en Inde sur la désorganisation et l’impossibilité
de prendre des décisions dans toute entreprise indienne. Au contraire, j’ai été impressionnée par
l’organisation et la réactivité de Milaap. Je pense donc que mon expérience dans ce stage a été
unique.
Vie quotidienne
La vie quotidienne à Bangalore pourrait être très agréable. En effet, le climat est bien plus clément à
Bangalore que dans le reste de l’Inde du fait de l’altitude (près de 1000m). Il fait donc chaud sans que
cela soit désagréable et la saison des pluies est également tout à fait supportable. Les températures
sont très stables tout au long de l’année. Les commerces sont ouverts tous les jours de la semaine,
dimanche inclus. Les supermarchés ouvrent tard le matin mais peuvent rester ouverts jusqu’à plus de
21h par la suite. On peut donc faire nos courses après le travail sans stress de trouver porte close. Il
est facile de bien manger pour un prix tout à fait modeste. Les résidences fermées similaires à la
mienne proposent gratuitement de nombreux loisirs : salle de lecture, salle de sport, cours à la
demande, salle de billard, piscine… et tous ses services sont compris dans le loyer. Le rythme de vie
est plus calme qu’en France, on commence tard et on finit à des horaires assez raisonnables. Seul
petit bémol : le couvre-feu qui a été instauré pour des raisons plus ou moins connues il y’ a quelques
années. Ainsi, tout restaurant, boite ou bar fermera à 23h30 maximum.
Il y a donc un certain confort de vie mais qui est un peu altéré par la médiocrité des transports, la
pollution, l’état lamentable des rues ou encore la pauvreté discrète mais belle et bien présente. Les
transports sont extrêmement mal organisés et des bouchons monstres se forment tous les jours. Il
m’est déjà arrivé de prendre plus de 2h 30 pour parcourir 5,5km. Les bus sont parfois bondés, en très
mauvaise état. Les lignes de bus sont totalement désorganisées. Si on a la chance de trouver un réel
abri de bus, on ne connait cependant pas la liste des bus qui passent à cet arrêt, leur direction et
encore moins les horaires. Un smartphone est donc fortement recommandé pour chaque
déplacement dans une zone inconnue. Ainsi, tout déplacement peut rapidement devenir un
cauchemar. Cela s’explique par le fait que Bangalore s’est étendue à une vitesse folle ces 20
dernières années mais n’a cependant pas été conçue pour accueillir un tel nombre de voitures, bus,
motos… Evidemment, les normes de sécurité sont très limitées et la route est donc un endroit
excessivement dangereux, où de plus règne l’anarchie la plus complète. Il m’a personnellement fallu
une semaine pour être capable de traverser une avenue seule à l’heure de pointe. Le piéton n’est pas
roi mais bien en danger permanent. C’est à lui d’être constamment vigilant car les chauffards ne
s’arrêteront pas et forceront le passage même si on est déjà engagé pour traverser la route.
Bilan et suggestions
Le bilan de ce stage a été pour ma part extrêmement positif. Je souhaitais plus que tout découvrir
l’Inde avec ses qualités et ses défauts et c’est ce que j’ai pu faire. J’ai également eu la chance de
découvrir la réalité sur le terrain de la microfinance tout en étant dans une entreprise très
professionnelle et dynamique. Mon patron m’a fait confiance et m’a confié un projet important sur
le long terme, demandant beaucoup de responsabilités et d’initiatives personnelles. Ce projet m’a
permis de beaucoup apprendre et m’a été très bénéfique. Je n’ai pas rencontré de difficultés
particulières lors de mon séjour. J’ai simplement été un peu gênée au tout début par les regards des
curieux (puisque j’habitais dans une zone très résidentielle et très peu fréquentée par les expatriés).
Il n’y avait rien de malsain ou de menaçant, il s’agissait simplement de pure curiosité. Cependant,
cela était un peu perturbant les premiers jours d’être dévisagée dans la rue. Je m’y suis néanmoins
faite et j’en ai pris l’habitude.
Mes projets professionnels ou personnels n’ont pas été influencés par ce séjour. J’ai toujours été
ouverte à toute possibilité et cela reste le cas. Ce voyage a été extrêmement enrichissant sur un plan
plus personnel. Je pense avoir découvert une autre facette de ma personnalité, plus volontaire et
assurée. Je me suis rendue compte que j’étais capable de bien plus de choses que ce que je pensais.
Je dirais donc que ce voyage a en réalité ouvert plus de portes encore pour le futur.
Ayant un ami proche indien qui effectuait également son stage à Bangalore, je savais qu’il allait
m’aider une fois sur place. Je n’ai donc pas fait spécialement de recherches avant de partir et je
pense que cela ne m’aurait de toute façon pas plus aidée que ça. Il faut vivre les situations pour
apprendre à vivre dans ce pays. Seule l’expérience compte réellement. Il m’a donc beaucoup
encadrée au début, notamment la toute première semaine et a été très présent pour moi. Le choc
culturel a donc été minime grâce à lui. L’école ne nous a pas non plus particulièrement aidés pour la
préparation, à l’exception de l’excellente assurance internationale qu’ils nous ont fournie
(mentionné plus haut). Je ne connaissais personne dans mon entreprise et n’ai donc pas pu me
préparer à l’avance quant au travail qui allait m’être demandé. Néanmoins, mon supérieur a pris un
temps important tout au long de ma première journée afin de s’assurer que je n’avais aucun doute,
aucune question. Nous avons beaucoup discuté afin que je puisse travailler sur le projet qui me
correspondait le plus et a donc été d’un très grand soutien. Ainsi, il n’y a eu aucun problème
d’adaptation une fois au bureau et j’ai énormément appris grâce à ses qualités de pédagogue.
Si je devais repartir à l’étranger, il est évident que je me préparerais bien plus avant de partir,
notamment concernant les petits détails de la vie quotidienne : transports, communications… cela
n’a pas été une erreur en soi pour l’Inde grâce à la présence de mon ami, tout s’est donc
merveilleusement bien passé. Mais je suis consciente qu’une telle chance et une telle présence ne se
reproduira pas 2 fois. Je sais donc parfaitement que je serai seule lors de mon arrivée dans un
nouveau pays étranger et devrai tout découvrir par moi-même. Je me renseignerai donc sur quelques
détails pratiques. Néanmoins, je reste convaincue qu’aucune recherche au monde ne peut nous
préparer à un autre mode de vie, à une autre culture. On ne peut comprendre tant qu’on ne le vit
pas.
Je ne vois pas réellement d’améliorations qui seraient intéressantes aux échanges internationaux. Les
petits désagréments font à mon avis partie de l’aventure et elle ne serait pas aussi enrichissante si un
elle était sans aspérité (à part peut-être les virements internationaux, très longs à arriver mais sur ce
point, je ne vois pas bien ce qu’il serait envisageable). Surtout, je pense que ce séjour a déjà été
énormément facilité par notre école en nous donnant une assurance et également la possibilité de
contacter l’administration ou les Alumnis en cas de problème professionnel et personnel (Je n’ai pas
eu la sensation d’avoir été « lâchée dans la nature ») et bien sûr par la Région Rhône-Alpes et la
bourse Explo’RA Sup qui nous a été gracieusement offerte.
C’est donc également l’occasion d’exprimer toute ma gratitude à la Région Rhône-Alpes pour ce coup
de pouce inestimable. Cette bourse a été d’une aide exceptionnelle et m’a permis, grâce à une
gestion rigoureuse, d’être financièrement autonome tout au long des 6 mois et cela sans que l’argent
ne soit un souci constant. Cette tranquillité d’esprit m’a permis de profiter pleinement de cette
exceptionnelle chance qu’est un séjour de 6 mois dans un pays étranger et de tirer pleinement parti
de cette grande aventure.
Un grand merci donc à la Région Rhône-Alpes pour sa générosité envers les étudiants.