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Salon de l’immigration et de l’intégration au Québec (SIIQ)
ENTREVUE AVEC …
ERIC M’BOUA
Après avoir vécu en Côte-d’Ivoire, en
Russie, en Tunisie et en France, Eric
M’Boua a posé ses valises à Montréal.
Animateur et Directeur artistique, Eric
met – entre autres – ses talents au
service de nombreux événements dont
le « Dîner en blanc » de Montréal.
Propos recueillis par Delphine Folliet, Immigrant Québec
Merci à l’Hôtel Gault
Photographies Josias Gob
Vous avez vécu dans plusieurs pays, sur plusieurs continents.
Comment réussissez-vous à composer avec vos différentes
expériences?
Mes parents étaient diplomates alors nous nous déplacions tous les 4
ans en moyenne. Le mouvement est inscrit dans mon ADN. Je suis né
à Ottawa, mais j’avais 2 ans lorsque nous sommes repartis en Côted’Ivoire. Je n’ai donc pas connu le Canada jusqu’à ce que j’y revienne
une vingtaine d’année plus tard. Nous nous sommes établis à Abidjan,
là où vit ma famille. Ensuite, nous sommes allés en Tunisie, puis en
Russie et en France.
Paradoxalement, mon premier choc culturel a été à Abidjan en rencontrant
mon immense et belle famille. J’arrivais avec mes parents et mes trois
frères et là, j’ai rencontré LA famille, avec mes dizaines d’oncles et tantes
et mes 300 cousins ! J’ai adoré ces moments. En plongeant dans ce
monde familial en ébullition, j’ai découvert en un instant mon héritage.
Lorsque nous rentrions au pays, la famille disait : « voilà les Canadiens »,
ou « voilà les Tunisiens », ou encore « voilà les Russes, les Français »!
Ce sont eux qui nous donnaient ces identités multiples. Plus grand, j’ai
poursuivi mes études en France, à Lille, Paris puis Toulouse.
Pourquoi avez-vous choisi le Québec alors que vous n’y
aviez jamais vécu ?
Je n’arrivais plus à libérer mes inspirations en France. J’avais fini ma
maîtrise de droit. J’évoluais parallèlement dans l’univers artistique et
scénique. J’avais même été engagé dans un orchestre professionnel,
et j’aimais vraiment ça. Mais je perdais mon identité. J’aspirais à plus
alors que l’ascenseur social en France était bloqué. En tant qu’artiste,
mon puits d’inspiration devenait aride. En tant que gestionnaire, les
opportunités d’emploi affichaient un certain pessimiste de carrière.
J’avais en tête le rêve nord-américain... en français.
En arrivant au Québec, tout m’a semblé plus ouvert, plus encourageant.
J’ai senti s’ouvrir devant moi l’univers des possibles. Au Québec, il ne
faut pas seulement trouver sa place, il faut d’abord la créer.
Avez-vous vécu des moments plus difficiles que d’autres?
Dans la tempête, quelle a été votre boussole?
Bien sûr qu’il existe des moments difficiles. Mais je ne l’ai pas interprété
comme ça, pour ma part! Je me rends compte justement que l’idée de
tempête me stimule! Les tempêtes sont nécessaires pour installer un
espace de sérénité.
Ma boussole, c’est mon héritage culturel. Il ne faut jamais oublier d’où
l’on vient, ce que l’on est, à quelle famille nous appartenons. On peut
nous appeler « immigrant » ou « nouvel arrivant », mais derrière ces mots,
ce sont des histoires d’hommes et de femmes. Le regard des autres ne
doit pas nous enfermer ou nous réduire à un genre. Ma boussole aurait
pour points cardinaux les trois mots : culture, foi et dignité.
Les personnes immigrantes vivent souvent une expérience paradoxale :
au Québec, ils ne sont pas grand chose, mais dans leur pays d’origine,
leur entourage leur voue une grande admiration pour avoir franchit le
cap.
Je pense avoir terminé mon cycle d’intégration. Je ne veux pas être
folklorique, ni folklorable.
Ma mission est désormais d’être reconnu comme une personne à part
entière. Ce sont mes activités de production artistiques qui prennent le
devant. Lorsque j’obtiens la reconnaissance de mes pairs ou lorsque
l’on vient me chercher pour ce que je crée, je sens que je m’accomplis
pleinement.
En voulant dépasser mon statut
d’immigrant, je me suis offert de
nouvelles perspectives.