Le CiFAD, un barrage sur les rout
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Le CiFAD, un barrage sur les rout
|REGARDS OUTRE-MER| Le CiFAD, un barrage sur les rout Créé en 1992, le centre interministériel de formation anti-drogue (CiFAD) contribue à la lutte contre le trafic de drogue dans les Antilles et en Guyane. L’action de ce groupement d’intérêt public, opérateur de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), comprend la formation des agents travaillant dans ce domaine et la coopération internationale avec les pays de l’espace Caraïbe et d’Amérique latine. Le CiFAD est dirigé depuis août 2013 par Patrick Massonnié, inspecteur régional de 2e classe des douanes. Le commissaire divisionnaire Christophe Gabillard est actuellement son adjoint et prendra sa fonction de directeur le 1er août 2015. Tous deux sont nommés par le conseil d’administration pour une durée de deux ans. Sous leur responsabilité, onze permanents officient au sein du centre : trois personnes sont chargées du secrétariat et de la comptabilité. Quant aux formateurs, ils sont au nombre de huit : trois policiers (le commandant Georges Corde, le capitaine Jean-Charles Olvera et le major David Gradel), trois douaniers (l’inspecteur Marc Corral, les contrôleurs François Blin et Robin Bernard) et deux gendarmes (les majors Christian Bordenave et Fabien Grussenmeyer). Le substitut général de la Cour d’appel de Fortde-France, Alexandre Aubert, assure la fonction de conseiller justice, et l’agence régionale de la santé (ARS) celle de conseillère santé. L Formation surveillance et filature en Colombie « Il est au cœur des voies empruntées par les trafiquants de cocaïne. » national, aux personnels des services de l'État chargés de lutter contre les trafics de stupéfiants –Police nationale, Gendarmerie nationale, douane, armée et justice– ainsi qu’aux personnels des collectivités territoriales et des hôpitaux. Il propose également ses services à des associations, aux collèges et lycées ou à des acteurs privés confrontés à cette problématique. Au niveau international, le CiFAD coopère, via les ambassades de France, les attachés de sécurité intérieure et les attachés douaniers, avec les administrations des pays de la Caraïbe et d’Amérique latine chargées de la lutte contre la drogue. Formations proposées - Moyens d’investigation : analyse criminelle et notamment analyse des flux téléphoniques ; investigations liées aux nouvelles technologies ; police technique et scientifique. - Enquêtes criminelles : blanchiment et saisie des avoirs criminels ; techniques discrètes de surveillance, de filature et d’interpellation ; techniques d’interrogatoire et de perquisitions ; - Vecteurs de transport de la drogue : ciblage et contrôle aérien, passagers et fret ; ciblage et contrôle des conteneurs maritimes ; sélection et fouille des navires de commerce et des navires de plaisance ; sélection et contrôle des moyens de transports terrestres. - Lutte contre les trafics : lutte en haute mer ; produits précurseurs et leur utilisation. - Prévention : présentation des drogues et géostratégie, prévention des conduites addictives ; sensibilisation des usagers de la mer au narcotrafic. | 44 | octobre-novembre-décembre 2014 | Civique 224 © CiFAD Les forces vives du CiFAD e CiFAD est basé à Fort-deFrance en Martinique, à proximité des plus importantes zones de production de cocaïne, au Pérou, en Bolivie et en Colombie, et sur les routes à destination des deux plus gros marchés de consommation de la planète, ceux d’Amérique du Nord et d’Europe. Il est également au cœur des voies empruntées par les trafiquants de cocaïne desservant notamment les départements français d’Amérique –la Martinique, la Guadeloupe, St-Martin et la Guyane– et celles à destination de la France. Le CiFAD mène principalement trois types d’actions. Il dispense des formations aux techniques policières, douanières et judiciaires de lutte contre les trafics de stupéfiants, ainsi que des actions de prévention des conduites addictives et de sensibilisation sur l’usage des stupéfiants. Il organise également des séminaires sur le sujet. Ces actions s’adressent, au niveau tes de la drogue POINTS DE VUE standardisée de recueil, de croisement et d’expérimentation des données. Elles sont unanimement appréciées par les administrations des pays dans lesquels elles ont été dispensées. » David Gradel, policier formateur au CiFAD « Le CiFAD propose un module de techniques d’enquêtes liées à la police technique et scientifique (PTS). Une seconde formation plus généraliste et axée sur la gestion des premières interventions sur les lieux du crime a été développée en début d’année. Mon objectif était de créer un module adapté au contexte d’un narcotrafic local et international de plus en plus violent, en Amérique latine et dans les Caraïbes, où les crimes de proximité liés aux trafics de stupéfiants progressent fortement. Cette intervention s’adresse aux techniciens de PTS, aux enquêteurs de sécurité publique et de police judiciaire ainsi qu’aux agents du ministère public. Durant une semaine, les stagiaires mettent en œuvre un protocole particulier d’intervention in situ : protection de la scène, pénétration adéquate sur les lieux, assistance aux victimes, constatations techniques, recherches par ordre de priorité sur victime, auteur, véhicule, domicile, et direction de fuite ». Formation à Ste-Lucie avec des experts du GIPN Georges Corde, policier formateur « blanchiment et saisie des avoirs criminels » au CiFAD « Le CiFAD propose une formation sur le blanchiment des capitaux et la saisie des avoirs criminels. Conscients des possibilités et des enjeux qu’offre l’enquête financière dans la lutte contre le narcotrafic, les pays partenaires, par l’intermédiaire des attachés de sécurité intérieure, sollicitent l’organisation de stages sur ce thème. Trois interventions ont été réalisées lors du premier semestre 2014 en République Dominicaine, au Salvador et au Venezuela, pour des enquêteurs et des magistrats. L’intervention systématique d’experts du pays d’accueil provoque interactivité, échanges et débats » « Le narcotrafic est étroitement dépendant des produits chimiques précurseurs de drogues qui peuvent cependant également avoir un usage courant licite. C’est le cas dans la production des produits semisynthétiques (cocaïne, héroïne…) et dans celle des produits entièrement synthétiques (MDMA, méthamphétamines…). La lutte contre le narcotrafic passe immanquablement par le contrôle des flux et du commerce de ces produits. Aussi le CIFAD présente aux personnels des administrations étrangères travaillant contre le narcotrafic, un module qui intègre la présentation et la classification de ces produits chimiques, la législation internationale générale, la législation commerciale et les obligations des sociétés. Il se poursuit par la description des méthodes d’investigations. Les méthodes de fabrication et celles de démantèlement des laboratoires sont également détaillées. La formation s’achève par la présentation des drogues de synthèse.» Christian Bordenave, gendarme formateur « analyse opérationnelle » et « GSM-IP » « Les administrations étrangères en charge de la lutte contre le trafic de stupéfiants ont pour défi permanent de s’adapter aux nouveaux moyens de communication et à leur utilisation par les organisations criminelles. La téléphonie est un vecteur incontournable dans le cadre des investigations judiciaires. C’est dans cet esprit que le CiFAD a développé et dispense deux modules complémentaires de formation : « analyse opérationnelle des flux téléphoniques» et « GSM IP ». Ces formations comprennent un important volet pratique qui permet aux participants d’acquérir une méthodologie concrète et Civique 224 | octobre-novembre-décembre 2014 | 45 | © CIFAD Jean-Charles Olvera, policier formateur « PTS » au CiFAD Fabien Grussenmeyer, gendarme formateur « précurseurs chimiques » et « prévention des conduites addictives » © CiFAD « Ma qualité de policer formateur antidrogue (PFAD) au sein du CiFAD, est mise à profit dans le cadre d’animations de séances de prévention des conduites addictives dont l’objectif in fine est de travailler sur les comportements : cibler et retarder la première consommation, et remettre en cause les choix des comportements des adolescents. Ancien enquêteur à la brigade des stupéfiants de Paris, mes compétences acquises en matière de police judiciaire sont déclinées dans le cadre de thématiques professionnelles, destinées à travailler sur la méthode en matière de techniques d’interrogatoire et de techniques discrètes de surveillance et de filature. L’objectif est de mettre en place une stratégie pédagogique, d’amener des compétences, de renforcer les capacités opérationnelles, et surtout de créer une relation de confiance avec nos partenaires étrangers. Un vrai métier ». |REGARDS OUTRE-MER| © CiFAD Civique : Depuis sa création en 1992, les objectifs et l’offre de formation du CiFAD ont-ils beaucoup évolué ? En effet depuis 2012, le CiFAD projette systématiquement ses actions à l’étranger en soutien direct de nos représentations françaises (ambassades, services de sécurité intérieure, attachés douaniers et magistrate de liaison). Ce choix permet une meilleure lisibilité de la fonction et des objectifs du Centre dans la zone. Ainsi le nombre de formations à l’étranger a pu être doublé. Le professionnalisme reconnu des formateurs et les liens établis par la direction avec les administrations partenaires, à l’occasion de ses déplacements, créent une réelle dynamique. Le CiFAD a réussi à multiplier ses partenariats financiers : CICAD, ONUDC, OMD*, police et parquet d’États mexicains, Haïti-FEI, Haïti-CIVIPOL, Agence régionale de la santé... Enfin la sélection des formateurs du CiFAD et leur engagement sans faille permet de répondre aux besoins des administrations françaises et étrangères. Ainsi l’offre de formation a été étendue par la création de nouveaux modules –PTS, contrôle terrestre, surveillance et filatures, précurseurs...–, très évolutifs et Formation PTS au Mexique © CiFAD Entretien avec Patrick Massonnié, directeur du CiFAD Formation PTS au Mexique adaptés à la demande. Il faut souligner également les excellents rapports du Centre avec la délégation aux relations internationales de la Douane et le réseau de la direction de la coopération internationale du ministère de l’Intérieur. De nombreuses actions présentant un intérêt partagé ont été réalisées en parfaite coopération : Haïti, Guyana, République Dominicaine, Argentine, Sainte Lucie… Civique : Pour quels types d’actions êtes-vous le plus sollicitées ? En France ? À l’étranger ? Et par quelle(s) administration(s) ? L’ensemble des thèmes de formation est sollicité de manière équilibrée. Les actions sont destinées, dans un cadre interministériel, à toutes les administrations de sécurité concernées par la thématique. Le CiFAD oriente ses actions en priorité vers les pays « cibles » définis comme prioritaires en conseil d’administration, soit les trois pays producteurs de cocaïne –Pérou, Colombie et | 46 | octobre-novembre-décembre 2014 | Civique 224 Le CiFAD a réussi à multiplier ses partenariats financiers Bolivie–, les États de la zone Caraïbe, ainsi que le Venezuela, le Suriname, le Brésil, l’Uruguay et l’Argentine. En 2013, 50 actions de formation, au profit de 1 411 stagiaires se sont déroulées dans les États cibles. Par ailleurs, le Centre a développé ses actions destinées aux États de la Caraïbe ainsi qu’au Suriname et au Guyana, dans un but affiché de contribuer au renforcement des capacités de lutte anti-drogue de ces États et au développement de la coopération régionale avec les États voisins de la zone. Le nombre d’actions conduites dans les départements français d’Amérique est également en très nette augmentation, soit 39 actions nationales – contre 26 en 2012– au profit de 1 040 participants. Civique : Avez-vous la possibilité de mesurer l’efficacité de vos actions ? Les stages sont systématiquement évalués par les participants et les retours sont élogieux. La méthode « française » regards| est appréciée de nos partenaires dans la zone : formation très pratique, mise en œuvre simplifiée, format interministériel, offre de formation élargie et adaptée, délocalisation des actions hors capitales... Il nous arrive également d’avoir des retours directs de notre action. En juillet dernier, en République Dominicaine, les services de la Douane et de la direction nationale du contrôle des drogues (DNCD) ont découvert 73 kilogrammes de marijuana dissimulés dans le châssis d’un camion, lors d’un contrôle de routine effectué au poste de contrôle de Mal Paso à Jimani. Les agents avaient agi d’initiative, sur la seule application des techniques enseignées par les deux formateurs du CiFAD, lors du stage « contrôle terrestre » réalisé en février 2014 sur le site de Jimaji. Civique : Comment sont recrutés les formateurs du CiFAD ? Quels profils recherchez-vous ? La variété des thèmes de formation du Centre dans le domaine de la lutte antidrogue impose un recrutement adapté au fur et à mesure des mouvements de personnel. Nous avons besoin de vrais spécialistes pour chaque formation. Le CiFAD a donc établi des fiches de postes spécifiques pour chaque spécialité proposée. © CIFAD | Fabien Grussenmeyer assure une action de prévention en milieu scolaire Transmises aux administrations, elles permettent, grâce à une sélection réfléchie des formateurs, de maintenir notre offre de formation. Ce point est particulièrement sensible pour l’activité du CiFAD et son affichage auprès des administrations étrangères partenaires. Le CiFAD est soutenu dans le recrutement des formateurs par les administrations locales et centrales de la douane, de la police et de la gendarmerie. Civique : Vous arrive-t-il de faire appel à des intervenants extérieurs – experts ou formateurs d’autres services – dans le cadre des formations que vous dispensez ? Dans une volonté de renforcer l’expertise du Centre et un retour en coopération au bénéfice de nos administrations, en 2013, 25 experts en poste dans les départements français d’Amérique ou en métropole ont participé à des missions du CiFAD à l’étranger. Les compétences des experts de la police et de la gendarmerie sont particulièrement sollicitées dans cinq thèmes de for- mation : police technique et scientifique, techniques de surveillance et de filature, principes tactiques en intervention, blanchiment et prévention des conduites addictives. * -CICAD: Comision interamericana para el control del abuso de drogas -ONUDC : Office des Nations Unies contre la drogue et le crime -OMD:organisation mondiales des Douanes Propos recueillis par Frank Canton L’activité du centre en 2014 Le conseil d’administration qui s’est réuni en novembre 2013 a assigné deux objectifs principaux au CiFAD pour 2014 : le renforcement de la coopération interministérielle et l’intensification de la coopération internationale. Au cours des neuf premiers mois de l’année, 63 actions de formation ont été menées. 23 l’ont été à destination des administrations dans les départements français d’Amérique. 40 formations ont été dispensées à l’étranger, dans les États des Caraïbes mais également au Pérou, en Colombie, au Venezuela, au Suriname, au Guyana, au Brésil, en Uruguay, au Paraguay, au Chili, en Équateur, au Mexique, au Panama et au Salvador. Enfin un séminaire sur le crack a été organisé le 27 mai en partenariat avec l’ARS et le GIP Addictologie et Comorbidités de la Martinique. Patrick Massonnié Civique 224 | octobre-novembre-décembre 2014 | 47 |