La peur au ventre

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La peur au ventre
Clo06
La peur au ventre
Publié sur Scribay le 17/09/2016
La peur au ventre
À propos de l'auteur
J'éprouve énormément de plaisir à écrire. Et c'est pour moi, un moyen d'évasion, une
échappatoire, un refuge...
À propos du texte
En réponse au défi "la peur".
Licence
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La peur au ventre
La peur au ventre
Le train arrive en gare de Lyon-Part-Dieu, il est minuit.
Je reviens de Paris où j’ai passé le week-end chez mon amie d’enfance. Je ne l’avais
pas revue depuis six mois, parce que j’ai quitté mon île natale avant elle. Je n’ai pas
hésité à prendre le train, malgré mes maigres finances d’étudiante fraîchement
inscrite à la faculté de Droit. D’ailleurs, pour bénéficier d’une baisse des tarifs, je
suis contrainte de faire le voyage de retour si tard.
Je reviens le cœur gonflé de joie après ces retrouvailles. Olivia m’a franchement
chouchoutée pendant ces deux jours, pensé-je, en me dirigeant vers l’arrêt de bus
pour rentrer chez moi, sur les quais de la Saône. Quelques personnes y patientent
déjà.
Soudain, un homme basané, d’une quarantaine d’années, m’interpelle dans une
langue que je ne connais pas. Je me retourne vers lui :
-
Pardon, je ne comprends pas.
Et je m’éloigne en lui tournant le dos.
C’est un homme qui croit sans doute que je viens de son pays. Etant métisse, j’ai
droit à tous les qualificatifs concernant mon origine. « Etes-vous brésilienne,
vietnamienne, tahitienne, indienne, thaïlandaise...», que sais-je encore ?
Le bus arrive enfin, j’oblitère mon ticket et je vais m’asseoir à une place, pas loin du
chauffeur. Mais l’homme de tout à l’heure vient se placer devant moi et me regarde
avec insistance. Je me lève alors et trouve une autre place vers le milieu du bus.
Un doute commence à s’insinuer en moi : « et s’il me suivait ? ». Il fait nuit noire et je
suis seule, une jeune fille pure de 19 ans, paumée dans ce nouveau pays…
Je me tourne furtivement vers lui, il est toujours en train de me fixer et son regard
est malheureusement éloquent. Maintenant, c’est la peur qui s’empare de moi. Je
réfléchis à toute allure. J’ai une idée ! Je vais faire semblant de descendre avant mon
arrêt pour le duper.
Je me lève, j’appuie sur le bouton « arrêt demandé » et me plante devant la porte.
Aussitôt, l’homme se lève. Je n’ai plus de doute sur ses intentions. Lorsque les portes
s’ouvrent, je fais mine de descendre, l’homme est sur le trottoir et je recule
brusquement. Le bus s’ébranle. Je vois que le chauffeur dans le rétroviseur a assisté
à la scène, il reste imperturbable.
Mais mon arrêt n’est pas loin et un autre soupçon me taraude : « et s’il a compris
que je descends au prochain ? ». Parce qu’il n’y a pas beaucoup de distance entre ces
deux arrêts et la route est droite le long du quai…
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La peur au ventre
Le car s’arrête déjà, je descends. En me retournant, HORREUR ! Je vois l’homme
derrière moi, à 25 mètres à peu près, de l’autre côté du trottoir, il court pour essayer
de me rattraper !
Dans un instinct de survie, je prends mes jambes à mon cou, le cœur battant. Mais la
terreur m’empêche d’aller plus vite, car le quai est désert et le voir courir derrière
moi me transperce de peur. En me retournant, je vois qu’il se rapproche
dangereusement de moi. Je suis folle d’épouvante !
COURS ! NE T’ARRETE PAS ! COURS !
Et personne alentour, pas âme qui vive, pas même une voiture ! Je suis désespérée !
Tout un flot d’images me traversent l’esprit : « il va me violer et ensuite, il va me tuer
pour ne pas laisser de traces… ».
J’ai la gorge complètement sèche, je suffoque, je cours encore, mais il est plus rapide
que moi. Il est maintenant à 4 mètres de moi, il va traverser pour me rejoindre,
quand soudain, je vois sur son trottoir, plus haut, à 10 mètres, un couple qui chemine
tranquillement. Je traverse comme une démente en faisant de grands gestes pour
attirer leur attention et tombe quasiment à leurs pieds, le souffle court. L’homme,
tête baissée, continue son chemin en nous dépassant.
Très agitée, je leur explique tout -non sans mal- parce que je suis devenue aphone, et
ils m’observent avec bienveillance. Ce sont des Italiens qui n’ont rien compris de ce
que je leur ai dit, mais qui ont senti mon désarroi et ma panique. Mon appartement
est à deux pas de là et ils m’accompagnent juste devant.
Il y a quand même un Dieu quelque part, me dis-je, complètement anéantie…
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