In memoriam Régine van den Broek d`Obrenan (1909
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In memoriam Régine van den Broek d`Obrenan (1909
Le Journal de la Société des Océanistes 138-139 | 2014 Les mises en récit de la mine dans le Pacifique In memoriam Régine van den Broek d’Obrenan (1909-2014) Christian Coiffier Éditeur Société des océanistes Édition électronique URL : http://jso.revues.org/7161 ISSN : 1760-7256 Édition imprimée Date de publication : 15 décembre 2014 Pagination : 275-276 ISBN : 978-2-85430-118-2 ISSN : 0300-953x Référence électronique Christian Coiffier, « In memoriam Régine van den Broek d’Obrenan (1909-2014) », Le Journal de la Société des Océanistes [En ligne], 138-139 | 2014, mis en ligne le 28 novembre 2014, consulté le 30 septembre 2016. URL : http://jso.revues.org/7161 Ce document est un fac-similé de l'édition imprimée. © Tous droits réservés ACTES DE LA SOCIÉTÉ In memoriam Régine van den Broek d’Obrenan (1909-2014) par Christian COIFFIER * Régine van den Broek d’Obre nan s’est éteinte le 13 septembre dernier dans sa cent sixième année et repose dans la sépulture Visconti au cimetière du Père-Lachaise. Issue par sa mère, Zélie Schneider, d’une célèbre famille d’industriels de la métallurgie, et par son père, Gérard de Ga n ay, de la grande aristocratie française, elle épousa Charles van den Broek d’Obrenan en 1931 et leur voyage de noces les conduisit à Tahiti. Elle fit ensuite partie du groupe des cinq jeunes gens, Étienne et Monique de Ganay, Charles et Régine van den Broek d’Obrenan, Jean Ratisbonne, qui s’embarqua le 28 Photo 1. – Régine van den Broek d’Obrenan dans sa maison de mars 1934 à Marseille sur le yacht La Rivaulde en juillet 2012 (© Jean-Christophe Domenech) Korrigane pour une aventure devant leur faire visiter les principaux archipels du Pacifique. Les lettres de recommandation remises avant le À la suite du comte hongrois Festetics de Tolna départ par Paul Rivet, alors directeur du musée qui réalisa dans les dernières années du xixe siècle un d’ethnographie du Trocadéro, et par Georgeslarge périple dans le Pacifique, divers fils de familles Henri Rivière facilitèrent l’acquisition de plus de d’industriels américains partirent également, durant 2 500 objets ethnographiques rapportés à Paris. l’entre-deux-guerres, sur des yachts à la découverte L’inauguration du musée de l’Homme, en juin du grand Océan et de ses habitants avec un « réel 1938, fut célébrée par la présentation au public d’un désir d’apporter leur contribution à la connaissance millier d’entre eux au sein d’une exposition intitulée scientifique » (Newton, 2001 : 12-13). Les plus « Le voyage de La Korrigane en Océanie ». Cette représentatifs furent William Vanderbilt en 1922, exposition participa grandement à une meilleure Cornelius Crane de Chicago qui navigua sur L’Illyria connaissance de l’art océanien en France. Plus de en 1928-1929, les naturalistes Austin Loomer Rand deux mille pièces furent ensuite mises en dépôt et Richard Archbold en 1930, Julius Fleischmann dans les réserves du nouveau musée de l’Homme de Cincinnati sur Camargo en 1931, et l’expédition jusqu’à leur dispersion en décembre 1961 au française de La Korrigane suivit leurs traces. cours d’une vente aux enchères devenue mythique * [email protected] Journal de la Société des Océanistes, 138-139, année 2014 276 (Coiffier, 2001). Des milliers de photographies furent également réalisées durant ce voyage et la publication de nombreuses d’entre elles contribua à une nouvelle vision des îles océaniennes. C’est vraisemblablement sur les judicieux conseils de la sœur de Régine, Solange de Ganay, qui commençait sa carrière d’ethnologue africaniste auprès de Marcel Griaule, que ces amateurs éclairés réalisèrent des fiches de terrain qui demeurent, malgré les erreurs et les lacunes, une source d’informations précieuse pour la connaissance des cultures océaniennes. Durant le voyage, Régine van den Broek fut l’artiste du groupe et réalisa une œuvre iconographique qui en illustre les différentes escales. Cette œuvre a d’autant plus d’intérêt que ce voyage représente l’une des dernières grandes aventures maritimes françaises en Océanie sur un bateau à voiles, avant que les progrès de l’aéronautique ne viennent révolutionner les transports intercontinentaux et modifier profondément les coutumes des popu lations insulaires du Pacifique. Dans la tradition des peintres illustrateurs des grands explorateurs du xixe siècle, Régine van den Broek a réalisé des centaines de croquis et dessins illustrant sa vision des étapes les plus marquantes de son voyage. Son ouvrage Les Korrigan autour du monde (1937) demeure à ce titre avant-gardiste dans la mesure où il présentait aux lecteurs les différentes étapes de cette aventure autour du monde dans un style proche de celui de la bande dessinée humoristique qui n’avait pas encore acquis, à cette époque, la popularité qu’elle a aujourd’hui. Si Régine van den Broek était plus une illustratrice qu’une créatrice, elle avait un sens des couleurs très développé. Ses trois voyages dans le Pacifique lui ont permis d’exprimer son talent sous diverses formes ; bandes dessinées, dessins à la mine de plomb, peintures à l’huile, aquarelles, pastels. Peu de temps avant la Deuxième Guerre mondiale, elle participa activement, au côté de son mari Charles, à la création du Centre d’études océaniennes qui allait devenir en 1945 la nouvelle Société des Océanistes. Régine van den Broek d’Obrenan en fut durant plusieurs années adhérente et le jso publia, en 1947, un article intitulé « Notes sur l’île Rennel et ses tatouages », illustré de divers dessins adaptés de son carnet de voyage. J’ai fait la connaissance de Régine van den Broek en 1997, alors que je venais de reprendre le projet d’une seconde exposition sur le voyage de La Korrigane en Océanie initié par Michel Panoff en 1994 à l’occasion du soixantième anniversaire du départ du yacht de Marseille, le 28 mars 1934. Régine van den Broek fut immédiatement enthousiasmée par ce projet et commença ainsi à me raconter ses souvenirs océaniens qui représentaient les épisodes les plus marquants de sa vie. Depuis son retour de Nouvelle-Zélande en 1943, elle était demeurée passionnée par tout ce qui touchait à l’Océanie. À la fin de l’année 2001, elle eut le plaisir de retrouver JOURNAL DE LA SOCIÉTÉ DES OCÉANISTES plus de deux cents objets qu’elle avait rapportés ou donnés, présentés dans le cadre de l’exposition « Le voyage de La Korrigane dans les mers du Sud » au musée de l’Homme. Quelques années après, lors de l’inauguration du musée du quai Branly, en juin 2006, Régine van den Broek put admirer, en compagnie de ses fils, une cinquantaine d’objets de la collection de La Korrigane exposées dans les vitrines conçues par Jean Nouvel. Quelques-uns de ses dessins et de ses peintures, et particulièrement divers croquis de son ouvrage Les Korrigan autour du monde (1937) furent utilisés pour le montage du film Les voyageurs de La Korrigane sur la piste des arts premiers réalisé en 2005 par Jean-Paul Fargier. Régine se prêta avec plaisir aux prises de vue nécessaires pour le tournage de ce documentaire dans son appartement et c’est avec un rien de malice qu’elle raconta à ses interlocuteurs quelques anecdotes sur son voyage. Ces dernières années, Régine van den Broek d’Obrenan, femme discrète et effacée, m’a transmis quelques souvenirs d’enfance complétant sa biographie pour la publication de son œuvre iconographique et de son carnet de voyage que son fils Alain m’avait demandé de présenter. C’est ainsi que jusqu’au mois de juin dernier nous avons pu nous rencontrer régulièrement, dans son appartement parisien ou dans sa maison de Rivaulde en Sologne pour mettre au point ces publications. Malgré son grand âge, Régine van den Broek était toujours avenante et attentive à mes questions. Elle eut la joie de relire les manuscrits de ces futures publications et d’en visionner les images, mais elle n’en connaîtra pas son achèvement. La récente exposition du musée du quai Branly : « L’éclat des ombres » présente de très nombreux objets rapportés par l’expédition de La Korrigane et particulièrement le fameux « Dieu requin » qu’elle avait offert au musée de l’Homme en 1969. BIBLIOGRAPHIE Coiffier Christian (éd.), 2001. Le voyage de La Korrigane dans les mers du Sud, Paris, Hazan/ mnhn. Newton Douglas, 2001. Les voyages dans le Pacifique entre les deux guerres, in C. Coiffier (éd.), Le voyage de La Korrigane dans les mers du Sud, pp. 12-13. Van den Broek d’Obrenan Régine, 1937. Les Korrigan autour du monde, Paris, Librairie François 1er. —, 1947. Notes sur l’île Rennel et ses tatouages, Journal de la Société des Océanistes III, pp. 23-33.