Faute lourde en matière de transport routier international de

Transcription

Faute lourde en matière de transport routier international de
Publié sur Dalloz Actualité (http://www.dalloz-actualite.fr)
Faute lourde en matière de transport
routier international de marchandises
Assurance transport
AFFAIRES | Contrat - Responsabilité
EUROPÉEN ET INTERNATIONAL | Transport

Com. 16 oct. 2012, F-P+B, n° 11-10.071
Il est question dans cet arrêt du 16 octobre 2012 d’un transport de produits pharmaceutiques
de France vers l’Angleterre. Au cours de la phase terrestre du transport – il s’agit d’un
transport routier –, le chauffeur, préposé du transporteur substitué, a perdu le contrôle de son
véhicule, lequel, en se renversant, a répandu la marchandise dans une rivière en contrebas.
L’assureur du destinataire, ayant indemnisé ce dernier, a ensuite assigné en remboursement le
transporteur. Pour la cour d’appel de Paris (contrairement aux premiers juges), le transporteur
était en droit de se prévaloir du plafond de responsabilité institué par l’article 23 de la
Convention de Genève du 19 mai 1956, dite CMR, en l’espèce applicable (sur le caractère
d’ordre public de cette convention, V. Com. 30 juin 2009, n° 08-15.026, Bull. civ. IV, n° 91 ;
D. 2009. AJ 1963, obs. X. Delpech ; RTD com. 2009. 802, obs. B. Bouloc ; Just. & cass.
2010. 489, rapp. A. Potocki ; RDC 2010. 715, note J.-B. Racine).
En effet, selon elle, l’accident a pour cause la vitesse estimée excessive du camion sur une
route rendue glissante par la pluie et le non-respect par le chauffeur de l’interdiction de
circulation des véhicules de transport de marchandises après 22 heures. Ces circonstances
caractérisent un défaut de maîtrise dû à une simple "négligence fautive" du chauffeur, laquelle
n’est pas suffisante pour constituer une faute lourde, sans laquelle, en application de l’article
29 de la CMR, le plafond de responsabilité ne peut être écarté.
Tel n’est pas la position de la Cour de cassation qui censure l’arrêt d’appel pour violation de
la loi. Un tel comportement semble, en effet, correspondre à la définition donnée par la
juridiction suprême de la faute lourde, qui repose, en droit interne comme en droit
international, sur une approche subjective, fondée sur une analyse concrète du comportement
du transporteur. Il s’agit, on le sait, de la « négligence d’une extrême gravité confinant au dol
et dénotant l’inaptitude du transporteur à l’accomplissement de la mission contractuelle qu’il
a acceptée » (Com. 27 févr. 2007, n° 05-17.265, D. 2007. AJ. 1013, obs. X. Delpech ; D.
2007. Pan. 1013, obs. H. Kenfack ; RTD com. 2007. 592, obs. B. Bouloc ; JCP E 2007.
1705, note A. Cathiard ; BTL 2007. 183). Puisque faute lourde il y a, le plafond de réparation
institué par la CMR est donc écarté, mais l’indemnisation à la charge du transporteur doit
cependant demeurer d’un montant raisonnable, puisque l’arrêt, rendu entre autres au visa de
l’article 1150 du code civil, exige que seul le dommage prévisible donne lieu à réparation
(pour une illustration récente d’un arrêt rendu en application de ce texte en matière de contrat
de transport, V. Civ. 1re, 26 sept. 2012, n° 11-13.177, Dalloz actualité, 8 oct. 2012, obs. N.
Kilgus ; D. 2012. Actu. 2305, obs. I. Gallmeister ).
par Xavier Delpech