La co-incinération des déchets en cimenteries

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La co-incinération des déchets en cimenteries
La co-incinération des déchets en cimenteries
Analyse critique d’Inter Environnement Wallonie
Août 2007
Résumé exécutif
La coincinération des déchets en cimenterie est une filière de valorisation des déchets qui a des
avantages économiques et environnementaux mais qui pose plusieurs questions, notamment en
matière de qualité des émissions atmosphériques et de transfert de déchets.
La fédération considère que :
•
La différence entre procédé de valorisation et d’élimination sur base, entre autre, de l’objectif
premier de l’installation est capitale. Le secteur des cimentiers n’a pas pour objectif premier
d’éliminer et traiter des déchets. Il est d’ailleurs de loin préférable que l’utilisation de déchets
par un industriel se fasse uniquement à titre accessoire. Une dépendance trop grande d’un
secteur à la production de déchets ne peut qu’entraver toute politique de prévention des
déchets et risque par ailleurs d’encourager et de soutenir les transferts et les importations de
ces déchets.
•
De part la composition et la variabilité des déchets entrants (de part la nature même des
mélanges de déchets réalisés), il est important de prévenir et contrôler les paramètres relatifs
aux émissions atmosphériques des installations. Même si certains polluants se retrouvent en
faible concentration dans les combustibles entrants, le tonnage incinéré et surtout le débit des
fumées sortantes font que l’apport global de ce secteur sur les concentrations en certains
polluants au niveau local (ou plus régional) peut s’avérer problématique.
•
Les déchets / combustibles de substitution permettent des économies substantielles (reportées
sur le consommateur) en regard de l’utilisation de combustibles fossiles ; il serait préférable
que ces économies servent à des investissements en matière d’épuration des fumées. Les
priorités doivent aller aux émissions de substances acidifiantes et de particules fines.
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Inter-Environnement Wallonie asbl - Fédération des associations d’environnement
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6, boulevard du Nord 5000 Namur - Tél. 081 255 280 - Fax. 081/226 309
Table des matières
1.
Définitions ................................................................................................................................3
2.
Contexte...................................................................................................................................3
3.
Le CO2 chez les cimentiers......................................................................................................5
4.
Les émissions atmosphériques ................................................................................................6
5.
Les inquiétudes de la fédération des associations d’environnement........................................7
6.
5.1.
La notion de valorisation ...................................................................................................7
5.2.
Les combustibles de substitution.......................................................................................7
5.3.
Les normes relatives aux émissions atmosphériques........................................................8
Actions des associations ..........................................................................................................9
6.1.
Permis d’environnement garantissant protection de la santé et de l’environnement ..........9
6.2.
Comités d’accompagnement constructifs et dynamiques ................................................10
6.3.
Soutien et synergie entre associations confrontées aux même problématiques ..............10
Annexe : Projet de révision des seuils de polluants – qualité de l’air .............................................12
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1.
Définitions
En Région wallonne, les installations de co-incinération de déchets sont encadrées par différents
textes légaux et, principalement, par l’arrêté du 27 février 2003 du Gouvernement wallon portant
conditions sectorielles relatives aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets
(M.B., 14.03.2003 err. 15.06.2004). Notons également que le décret fiscal1 adopté le 22 mars 2007
établi une taxe (5€/tonne) sur la co-incinération des déchets dangereux à partir de l’exercice 2008.
Ces textes définissent la co-incinération comme une technique de traitement des déchets dans
une installation fixe ou mobile dont l'objectif essentiel est de produire de l'énergie ou des produits
matériels ; dans ce processus, les déchets sont utilisés comme combustibles habituels ou
d'appoint et/ou sont soumis au traitement thermique en vue de leur élimination. La co-incinération
est donc considérée comme une opération de valorisation des déchets (au contraire de
l’incinération qui reste une opération d’élimination de déchets).
Les conditions sectorielles précisent d’ailleurs que si la co-incinération a lieu de telle manière que
l'objectif essentiel de l'installation n'est pas de produire de l'énergie ou des produits matériels, mais
plutôt d'appliquer aux déchets un traitement thermique, l'installation doit dès lors être considérée
comme une installation d'incinération.
La fédération d’associations d’environnement est très attachée à cette différenciation valorisation /
élimination issue de la définition de l’objectif premier ou secondaire de l’installation pour les
gestionnaires de déchets et en particulier pour le secteur cimentier. Cette distinction devrait éviter
les dérives tant au niveau du contrôle des flux et transferts de déchets que du message « contrepréventif » qui pourrait être lié au processus. Dans le cas des cimentiers, cela revient à éviter de
pousser le citoyen à la sur-consommation en ciment. Pour cela, il faut rester conscient des
procédés mis en œuvre et ne pas confondre gestion des déchets et production de matériaux.
Attribuer un message écologique « le ciment : c’est bon pour l’environnement !» lié au rôle que
jouent les cimentiers en matière de gestion de déchets est un message qui fausse le
consommateur !
2.
Contexte
En Région wallonne, ce sont les cimentiers qui réalisent la co-incinération en utilisant des
« combustibles de substitution » dans leurs fours à clinkers. Ces combustibles qui remplacent en
partie les combustibles fossiles classiques (coke, pétrole, fioul lourd, charbon…) sont issus de
deux types de déchets : pneus déchiquetés, résidus de broyages automobiles, huiles usagées,
solvants, plastiques, sciures imprégnées d’hydrocarbures… ou biomasse (boues de stations
d’épuration, farines et graisses animales, sciures de bois traités.. .).
1
Décret fiscal favorisant la prévention et la valorisation des déchets en Région wallonne et portant
modification du décret du 6 mai 1999 relatif à l'établissement, au recouvrement et au contentieux en
matière de taxes régionales directes (M.B., 24.04.2007)
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La part de ces déchets (dangereux et non dangereux2) dans la production de chaleur est en
constante augmentation et les chiffres varient d’un rapport à l’autre : moyenne de 30% par rapport
à l’ensemble de combustibles utilisés3, plus de 50% dans certaines installations4 et 5. Rappelons
cependant que l’installation n’est pas conçue à cette fin : l’objectif étant bien… de produire du
ciment !
Les installations du secteur cimentier comportent des carrières, des clinkeries et des installations
pour la mouture et le conditionnement de différentes qualités de ciments. La situation
géographique de l’industrie cimentière est liée à la structure géologique du territoire, c’est pourquoi
en Belgique, il y a trois sociétés cimentières qui poursuivent leurs activités en Wallonie : CCB
(filiale du groupe Italcementi), CBR (groupe Heidelberg Cement), Holcim-Belgique (groupe
Holcim). Elles sont réparties sur sept sites : dans le Tournaisis, les régions montoise et liégeoise.
Ensemble, elles produisent aux alentours de 6,9 millions de tonnes de ciment gris par an.
Notons que l’activité de préparation des combustibles de substitution (gestion et traitement de
déchets) est également aux mains des cimentiers à travers Recyfuel (Engis) et Géocycle
(Seneffe), qui traitent des déchets dangereux en vue de préparer des charges pour alimenter les
fours à clinkers.
Les cimentiers sont de gros consommateurs d’énergie6. L’énergie sert à sécher la matière
première, la décarbonater et provoquer la clinkérisation des oxydes présents ; enfin un
refroidissement rapide est opéré avant stockage. S’en suivent des opérations de broyage et
mélanges pour produire les différents ciments.
Le secteur cimentier met en avant les avantages de la valorisation qu’ils développent. Comme le
met en évidence la revue Incidences7, ils ont développé un vocabulaire très « green » dans toutes
leurs communications : on ne dit pas incinération de déchets, mais « valorisation de combustibles
de substitution», on ne brûle pas des déchets, on « substitue de l’énergie fossile non
renouvelable », on ne dit pas « sciures imprégnées de déchets dangereux » on dit RESOFUEL ou
AFR (alternative fuel and raw materials), WDF (waste derived fuel), PDF (packaging derived
fuel)…
La valorisation énergétique de déchets a des avantages économiques qui se répercutent sur le
consommateur (le coût énergétique représente 30% du coût de revient) et environnementaux
(économies d’émissions de CO2, économies de ressources non renouvelables, procédé « zéro
déchet » : les cendres et résidus solides sont valorisés dans la production même des clinkers).
2
3
4
5
6
7
Les déchets sont caractérisés suivant l’arrêté wallon du 10 juillet 1997 (modifié le 24 janvier 2002) qui
définit un catalogue des déchets.
Source : Rapport environnemental de l’industrie cimentière belge 2006, FEBELCEM – p8.
Source : Situation environnementale des industries cimentières – 2005, ICEDD – p37.
Source : Revue Incidences n°238 du 24 novembre 2003 –p2.
Il faut entre 3000 et 4200 Mj pour fabriquer une tonne de clinker en voie sèche, environ 6000 Mj en voie
humide et 8000 Mj pour le ciment blanc.
Source : Revue Incidences n°238 du 24 novembre 2003, p4.
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La fédération des associations d’environnement, pour sa part, souhaiterait que les économies
réalisées par l’utilisation de déchets au lieu de combustibles fossiles puissent servir à des
investissements en matière d’épuration des fumées. La co-incinération doit respecter les normes
d’émissions de SO2 sans plus de dérogations possibles prévues dans l’AGW du 27 février 20038.
Etant grand consommateur de matière première (calcaire, argiles), ce secteur utilise aussi des
déchets comme source de matière ce qui permet d’économiser des ressources minérales en les
remplaçant par des cendres volantes, terres de déblais…et ce qui évite par ailleurs la mise en
décharge de ces déchets (avec tous les coûts de gestion et environnementaux que cela
engendrerait).
Au niveau environnemental cependant, l’enjeu majeur de ce secteur reste la problématique des
émissions atmosphériques : poussières et composés chimiques sont là en quantité et en qualité
très variable !
Les déchets sont de compositions très variables et parfois très problématiques alors que certains
combustibles fossiles traditionnels ont une fourchette de composition bien définie même s’ils
peuvent comporter des teneurs importantes en soufres et certains métaux lourds. Par ailleurs, les
ciments produits se retrouvent avec des micro-composants variables dont la stabilité au cours du
temps pourrait être remise en question. De nombreuses études existent sur la problématique du
comportement des bétons à la lixiviation.
3.
Le CO2 chez les cimentiers
Le dioxyde de carbone se forme suite au processus de combustion (de combustibles fossiles ou
de substitution). Ce gaz se produit également lors de la production des clinkers : la réaction
chimique de décarbonatation libère de la chaux vive des carbonates… en produisant un résidu de
procédé : le CO2.
L’industrie cimentière belge estime que sur les 5,1 millions de tonnes de CO2 émises en 2005 ;
57% sont issues du procédé, le reste provenant de la production d’énergie (37% directe dans les
fours, 6% indirecte par consommation d’électricité).
Le seul moyen de réduire les émissions de CO2 de procédé est de réduire la part de clinker dans
la fabrication du ciment : en substituant les matières minérales par des cendres volantes ou du
laitier de haut-fourneau. Toute mesure visant à réduire les consommations d’énergie a également
des effets directs en terme de réduction de CO2.
Malgré l’intérêt évident en termes d’énergie et d’émissions de CO2, la fédération des associations
de protection de l’environnement s’est étonnée dès lors de constater que les conditions
sectorielles (AGW9 du 27 février 2003, art.20) soient aussi laconiques et imprécises en ce qui
8
9
Arrêté du Gouvernement wallon portant conditions sectorielles relatives aux installations d'incinération et
de co-incinération de déchets (M.B., 14.03.2003 err. 15.06.2004)
Arrêté du Gouvernement wallon portant conditions sectorielles relatives aux installations d'incinération et
de co-incinération de déchets (M.B., 14.03.2003 err. 15.06.2004)
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concerne la cogénération : « La chaleur produite par l'incinération ou la co-incinération est
valorisée dans la mesure de ce qui est faisable ».
Un Accord de branche ciment a été signé par Febelcem (la Fédération de l’industrie cimentière) et
la Région wallonne le 7 juin 2004 : il vise à améliorer de 8,3% l’efficience énergétique et de 9,5%
les émissions de gaz à effet de serre entre 1999 et 2010.
4.
Les émissions atmosphériques
Les cimentiers émettent de très grandes quantités de rejets atmosphériques, leurs débits sont très
élevés. Les principaux polluants en terme de volume sont le CO2, les NOx, le SO2 et les
poussières. Les cimentiers sont également responsables d’émissions de métaux lourds dans l’air :
principalement zinc et plomb mais aussi mercure, chrome, nickel, cuivre… Et des polluants
organiques persistants sont également inventoriés : HAP, dioxines et furannes.
C’est l’AGW10 du 27 février 2003 qui fixe les mesures à prendre et les normes à respecter en
matière d’émissions de polluants. Cet arrêté prévoit les mesures en continu des substances
suivantes : NOx, SO2, CO, poussières totales, COT (carbone organique total), HCl, HF. Il prévoit
au moins deux mesures par an des métaux lourds, dioxines et furannes.
Une nuance ayant des conséquences extrêmement importantes est définie, dès le départ, pour la
co-incinération : les VLE (valeurs limites d’émission) sont plus sévères si le pourcentage de
dégagement de chaleur provenant de déchets dangereux dépasse les 40%. La définition des
déchets entrants (combustibles de substitution) prend donc un sens très particulier et il est donc
particulièrement important ici que la classification des déchets apporte les éléments suffisants à la
caractérisation chimique du déchet.
Cependant toute une série de dérogations est possible (pour SO2, COT, NOx). Elles sont
inacceptables au vu des enjeux environnementaux et de santé-environnementale que défend la
fédération. En effet, accorder des valeurs plus élevées dans le cas du SO2 revient à permettre à
l’entreprise de brûler des combustibles riches en soufre11, ce qui va à l’encontre des mesures
prises par ailleurs dans le cadre du protocole de Göteborg (-71,8% des émissions de SO2 en
Wallonie entre 1990 et 2010 pour les sources fixes) et de la directive IPPC. L’impact de
l’acidification sur la santé, la végétation, les écosystèmes et les constructions est cependant bien
reconnu. Il en est de même pour le COT : accorder des valeurs limites plus élevées revient à
perdre un indicateur de respect des conditions de température…
10
11
Arrêté du Gouvernement wallon portant conditions sectorielles relatives aux installations d'incinération et
de co-incinération de déchets (M.B., 14.03.2003 err. 15.06.2004)
Comme le souligne l’ICEDD (2005), les émissions de SO2 du secteur sont en augmentation : 23% de
1995 à 2002 alors que la production n’a augmenté que de 7% ; ce qui s’explique par la mutation que
connaît le secteur cimentier au niveau de ses ressources énergétiques (combustibles de substitution à
plus haute teneur en soufre).
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5.
Les inquiétudes de la fédération des associations d’environnement
5.1. La notion de valorisation
La valorisation des déchets est préférable à leur élimination : en effet, l’élimination (incinération et
mise en décharge) reste le dernier échelon de la hiérarchie de gestion des déchets. Au niveau
théorique, la fédération préfère nettement voir les déchets utilisés pour produire de l’énergie à la
place de l’utilisation de combustibles fossiles et pour être réintégrés au cycle de vie de nouveaux
produits. Cela étant, il nous semble préférable que l’utilisation de déchets par un industriel se fasse
uniquement à titre accessoire. Une dépendance trop grande d’un secteur à la production de
déchets ne peut qu’entraver toute politique de prévention des déchets et risque par ailleurs
d’encourager et de soutenir les transferts et les importations de ces déchets.
Cependant, il reste toujours nettement préférable au niveau environnemental de ne pas produire
de déchets (prévention) ! Si le déchet a été produit, il convient à tout prix de favoriser sa
réutilisation, par une autre personne, après réparation, en lui conservant l’usage pour lequel il a
été conçu initialement, ou pour un usage « inférieur ». Le recyclage reste aussi préférable : on
récupère les matériaux qui constituent le déchet pour recréer d’autres produits. La valorisation
énergétique (à ne pas confondre avec la production d’énergies vertes !) d’un déchet ne doit donc
être encouragée que par défaut et lorsque le bilan environnemental (effets sur la santé inclus) de
l’ensemble de la filière le détermine (collecte, transport, pré-traitement(s), valorisation énergétique,
gestion des résidus et contrôle des pollutions) !
5.2. Les combustibles de substitution
La filière « cimentiers » a permis, à la Région wallonne, de gérer une partie de ses déchets
dangereux et de ses déchets industriels mais aussi de laisser ouvert le marché et les transferts
interrégionaux et internationaux des déchets. La co-incinération et l’utilisation de combustibles
alternatifs issus de déchets (dangereux ou pas) offre une solution à grande échelle aux problèmes
de gestion de ces déchets. Elle permets aussi d’économiser des ressources non renouvelables
pour la production d’un bien dont les belges sont friands : le ciment !
Néanmoins, la fédération s’interroge sur les conditions de mesure et de contrôle à définir pour ces
installations. De part la composition et la variabilité des déchets entrants (de part la nature même
des mélanges de déchets réalisés), il nous semble important de pouvoir ajuster les paramètres
relatifs aux émissions atmosphériques. Même si certains polluants se retrouvent en faible
concentration dans les combustibles entrants, le tonnage incinéré et surtout le débit des fumées
sortantes font que l’apport global de ce secteur sur les concentrations en certains polluants au
niveau local (ou plus régional) peut s’avérer problématique.
Même si la législation wallonne et le Permis d’environnement rassemblent en un seul document
les obligations tant au niveau de la caractérisation et le suivi des déchets entrants que les normes
et contrôles relatifs aux émissions atmosphériques, le lien entre les deux bases de données
(caractérisation chimique des déchets et émissions atmosphériques) et leurs inter-relations ne
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nous semblent pas suffisamment clairs. Souvent, la caractérisation des déchets entrants comme
combustibles est « noyée » dans les flux d’émissions liés au procédé et aux matières premières.
Cependant, la charge environnementale due à ces combustibles de substitution reste une réalité,
même diluée !
5.3. Les normes relatives aux émissions atmosphériques
De par les combustibles qu’ils utilisent, leurs matières premières et leurs process ; les industries
cimentières émettent des poussières, du CO2, SO2, NOx , des éléments traces métalliques (Pb,
Hg, Cd, Zn, Cr, Ni, As) et certains composés organiques.
Les pollutions atmosphériques peuvent être classées en fonction de leurs conséquences : effet de
serre, acidification, destruction de l’ozone stratosphérique, micro-polluants, particules en
suspension et polluants secondaires (p.ex ozone troposphérique). L’OMS classe les polluants
atmosphériques en fonction de leurs effets cancérigènes ou pas. Rappelons qu’il n’y a pas de seuil
« en dessous duquel il n’y a aucun effet sur la santé » ; il y a des échelles d’acceptabilité du risque
que les pouvoirs publics doivent s’engager à prendre…
La qualité de l’air est un des enjeux majeur en terme de santé environnementale : plus personne
ne nie que la pollution de l’air liée aux activités humaines a des effets sur la santé. Au niveau
international de nombreux protocoles et conventions ont été mis en place pour contrôler, mitiger et
améliorer la qualité de l’air12. L’Union européenne a adopté des directives supplémentaires,
relatives aux COV, aux plafonds nationaux d’émission (NEC), aux POPs… La directive IPPC et le
registre européen des émissions (EPER) définissent également une série de polluants et de
sources fixes à surveiller de près.
Et l’urgence est là : l’air en Région wallonne reste de mauvaise qualité13. Précisons toute fois que
le secteur des cimentiers est loin d’être le seul émetteur - notons la part extrêmement importante
du secteur des transports dans les émissions de polluants atmosphériques. Comme pour tout type
d’industrie émettrice, la fédération considère qu’il est nécessaire de réduire à la source les
émissions des co-incinérateurs et d’imposer des systèmes de rétention des polluants, lavages des
fumées (et autres) avant leur dispersion dans l’atmosphère.
La fédération souhaite que soient supprimées les dérogations accordées au secteur quand à ses
émissions de SO2 (principalement) étant donné les techniques existantes pour contrôler les
valeurs d’émission ; ceci afin de répondre à la directive NEC14.
12
13
14
Convention de Genève en 1979 et ses protocoles filles, Convention de Vienne en 1985, Conventioncadre des l’ONU de Río en 1992, Convention de Stockholm en 2001…
Source : Rapport analytique sur l’état de l’environnement wallon 2006-2007.
« National emission Ceilings » direcxtive 2001/81/CE qui fixe des plafonds d’émissions pour certains
polluants atmosphériques (SO2, NOx, COV, NH3) que chaque état membre est tenu de respecter à
l’horizon 2010.
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Car malgré le programme wallon de réduction des émissions15, les prévisions actuelles de
l’évolution de ces émissions montrent déjà que les mesures décidées ne suffiront pas à atteindre
les objectifs fixés pour 2010. La mise en œuvre de la directive IPPC, à travers la révision des
permis des entreprises concernées, devrait jouer un rôle non négligeable.
La fédération souhaite, par ailleurs, qu’un maximum de transparence soit apporté au registre et au
suivi du répertoire de ces émissions (CORINAIR). Il est également indispensable d’étoffer le
réseau de mesures de surveillance de la qualité de l’air en Région wallonne.
Dans le cas d’industries aussi importantes, qui réalisent des efforts en matière de gestion
environnementale mais qui sont aussi des sources potentielles de pollution, la fédération rappelle
l’intérêt de créer, pour chaque site, un comité d’accompagnement dans lesquels riverains,
industriels et pouvoirs publics peuvent s’informer, échanger des points de vue et chercher
ensemble de pistes de solution.
6.
Actions des associations
6.1. Permis d’environnement garantissant protection de la santé et de l’environnement
Depuis de nombreuses années, les riverains et associations de protection de l’environnement
vivant à proximité des cimentiers sont inquiets : l’activité des cimentiers provoque des nuisances
principalement au niveau de la pollution de l’air, du bruit et du charroi. Ces associations locales et
la fédération s’impliquent, depuis longtemps, dans les enquêtes publiques et les processus liés
aux différents permis d’extraction, permis d’exploiter, permis d’environnement de ce secteur.
L’incinération de déchets au sein de ces installations, et surtout l’incinération de déchets
dangereux (définis comme tels ou susceptibles de l’être), a, pendant plusieurs années, été
dénoncée du fait des incohérences entre les législations à appliquer et le manque de transparence
concernant la caractérisation des déchets entrants, leur dangerosité et les impacts de cette
« dangerosité » sur les conditions d’exploitation et de contrôle des émissions. Depuis la directive
européenne (2000/76/CE) sur l’incinération des déchets et sa transposition en droit wallon par
l’Arrêté du 27 février 2003 du Gouvernement wallon portant conditions sectorielles relatives aux
installations d’incinération et de co-incinération de déchets, ces contradictions ont été levées en
grande partie. La fédération reste cependant demandeuse de rendre l’information plus
transparente et plus accessible au public. Un travail important reste à faire de la part des pouvoirs
publics en la matière.
Dans l’incertitude quant aux risques pour la santé des riverains, le principe de précaution doit être
appliqué et toutes les mesures doivent être prises pour ne pas mettre en danger la population.
15
AGW du 25 mars 2004 portant sur un programme de réduction progressive des émissions de SO2, NOx,
COV, NH3 (M.B. 20.08.2004).
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6.2. Comités d’accompagnement constructifs et dynamiques
Dans le cas d’entreprises de cette ampleur et étant donné les impacts potentiels d’une telle
activité, la mise en place d’un comité d’accompagnement peut s’avérer nécessaire et est à prévoir
dès le départ. Pour rappel, le comité d'accompagnement est composé de représentants du
demandeur, de la commune, des administrations concernées, de la population locale et d'experts
ou d'associations qu'ils invitent. Idéalement, participer au comité d’accompagnement, et y
représenter un groupe de riverains est un moyen d’information et d’action parmi les plus
constructifs. Il permet d’aborder la question des nuisances directement avec les parties
concernées, de discuter des méthodes et résultats d’analyses, d’apporter des éléments de
solution, etc.
Or, force est de constater, pour les 7 sites concernés, que même si certains comités
fonctionnement, dans certains cas, nos associations posent le constat que sans volonté et un
minimum de confiance des acteurs, la participation est impossible. Dans certains cas, la création
des comités d’accompagnement n’a servi qu’à cristalliser les rapports de force entre les uns et les
autres. Ainsi, sont monnaies courantes :
•
la non-communication des rapports de suivi promis ;
•
le refus d’inscrire les points du groupe « riverains » à l’ordre du jour, quand ce n’est pas le
refus simple et brutal de provoquer une réunion du comité ;
•
le contrôle de la représentation des riverains par le collège communal ;
•
les déséquilibres entre les différents groupes (administrations communales, Région wallonne,
exploitants, riverains), sources de discriminations (nombre de représentants, condition de
désignation et de remplacement de ceux-ci, faculté de se faire représenter ou d’être
accompagné par un expert, etc) ;
•
l’incapacité technique des agents communaux pour éclairer les citoyens : ils ne disposent pas
du savoir suffisant pour expliquer des dossiers qui présentent souvent une grande complexité
technique ;
•
et même, dans certains cas , le témoignage de nos associations relève que les agents
communaux ou les conseillers en environnement sont des personnes « sous influence ».
Ceux-ci se situent dans un rapport de subordination tel qu’ils ne sont par exemple pas en
mesure d’assurer l’accompagnement, en toute neutralité, du processus participatif, comme
l’animation des réunions, l’interface avec le Bourgmestre...
6.3. Soutien et synergie entre associations confrontées aux même problématiques
Les régions du Tournaisis de Liège et de Mons concentrent les différentes industries de ce
secteur. La fédération est en contact avec les associations riveraines de la plus part de ces sites.
La mise en réseau des associations et les échanges d’informations et d’expériences améliorent le
processus participatif et la concertation avec les entreprises et autorités communales. La mise en
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commun des informations relatives à chaque site, tant au niveau des process que des normes et
des mesures de contrôle et de suivi, permet d’une part d’avoir une vue d’ensemble et une
compréhension globale de la problématique en Région wallonne et d’autre part de porter les
préoccupations, voire les revendications des associations de protection de l’environnement
auprès des autorités publiques.
En effet, de nombreuses questions et préoccupations relatives aux process et aux réactions qui s’y
opèrent subsistent ; ce qui amène la fédération d’associations d’environnement à privilégier la
précaution lors de la définition des paramètres devant être suivis lors de la caractérisation des
émissions atmosphériques en fonction des déchets entrants.
Dans certains cas, cette vision globale peut amener la fédération à introduire des actions sur les
permis comme par exemple le recours introduit concernant le permis de la CCB en 2004 pour
mettre à niveau certaines normes d’émission et la traçabilité des déchets entrants.
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Annexe : Projet de révision des seuils de polluants – qualité de l’air
En ce qui concerne les normes de qualité de l’air (normes à l’immission), tant l’OMS que l’UE
prévoient de revoir une série de seuils à la baisse, parmi lesquels le SO2, les particules fines et les
gaz précurseurs de l’ozone troposphérique (NOx, COV). Ces projets concernent donc le secteur
des cimentiers (comme, du reste, le secteur des transports !).
Dans le cas du SO2, par exemple, La directive fille du Conseil 1999/30/EC du 22 avril 1999
relative aux valeurs limites pour le dioxyde de soufre, le dioxyde d'azote, les particules en
suspension et le plomb prévoit :
Valeurs limites pour le dioxyde de soufre
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