Contrôle fiscal
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Contrôle fiscal
CŒUR DE MÉTIER GESTION Contrôle fiscal : pas de panique ! Que ce soit à titre personnel ou professionnel, il est probable que vous fassiez un jour l’objet d’un contrôle fiscal. Ne paniquez pas et suivez le guide ! Par Anaïs Bayle-Bernadou 44 indépendentaire 135 l Février 2016 © iStockphoto / Pogonici L ’établissement de l’impôt s’effectue sur la base des déclarations souscrites par les contribuables. Partant de ce postulat, il est primordial que l’administration fiscale puisse avoir un droit de contrôle sur ces déclarations et le pouvoir de les rectifier en cas d’erreurs ou d’omissions. En effet, la base de l’égalité devant l’impôt réside dans l’existence d’un tel contrôle. Il est facile d’imaginer ce qu’il adviendrait si les contribuables savaient que leurs déclarations ne feraient l’objet d’aucun contrôle… L’un des nombreux reproches fait à la Grèce a justement été la défaillance de son administration fiscale, conduisant certains observateurs à estimer que le paiement de l’impôt dans ce pays se faisait sur la base du volontariat. Cela est toutefois à tempérer, car en pratique, certains contribuables sont plus observés que d’autres… Ainsi, les personnes ayant des revenus importants sont qualifiées par l’administration fiscale elle-même de « Dossiers à fort enjeu » (DFE) et font l’objet d’un contrôle sur pièces systématique tous les trois ans, qui englobe l’examen des revenus et du patrimoine. Pour la période 2013-2015 : un dossier est considéré à fort enjeu si le revenu brut du foyer fiscal est supérieur à 270 000 euros, ou l’actif brut (ISF) est supérieur à trois millions d’euros. Les modalités du contrôle Nous examinerons ci-après les différents types de contrôle que peut subir un contribuable mais il convient de rappeler qu’en pratique, ces procédures ne sont pas exclusives l’une de l’autre. Ainsi une vérification de comptabilité découle souvent d’un contrôle sur pièces, et un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d’une vérification de comptabilité… • Le contrôle sur pièces La très grande majorité des contrôles fiscaux en France sont des contrôles dits sur pièces. En pratique, le dossier arrive sur le bureau d’un contrôleur qui vérifie la cohérence de la déclaration avec les autres informations en sa possession (autres déclarations, informations des différents organismes sociaux et bancaires, renseignements sur la vente ou l’achat d’immeuble, de parts sociales, etc.). Si rien n’attire son attention, il peut classer le dossier et le contribuable ne saura jamais qu’il a été contrôlé. À l’inverse, certains points sont susceptibles d’attirer l’attention d’un contrôleur : absence ou retard dans une déclaration, grosse variation de revenus, changement de situation personnelle, réalisation d’une importante plus-value, le bénéfice d’importants crédits d’impôt, etc. Il peut alors se faire communiquer des Plus de 270 000 euros de revenus brut pour votre foyer fiscal ? Vous êtes un dossier à « fort enjeu » particulièrement surveillé par l’administration fiscale ! informations complémentaires auprès de tiers : banques, compagnies d’assurances, organismes sociaux, caisses de retraites, administrations publiques, etc. Il peut également directement demander au contribuable des renseignements complémentaires ou des pièces justificatives. En théorie, le contribuable dispose d’un délai de trente jours pour répondre mais rien ne l’y oblige. Il est toutefois fortement déconseillé de laisser un courrier du fisc lettre morte ! Si les précisions apportées sont jugées satisfaisantes alors le contrôle s’arrêtera là. À l’inverse, l’administration fiscale mettra en œuvre la procédure de rectification ou une procédure de vérification approfondie. Dans de rares cas, il est possible que l’administration fiscale adresse au contribuable une demande d’éclaircissements ou de justifications. Ces procédures font l’objet d’une législation spécifique et le défaut de réponse de la part du contribuable peut entraîner une taxation d’office. Procédure moins souple que celle de la rectification, la taxation d’office contraint le contribuable à agir en justice s’il veut la contester et met la preuve à sa charge. • La vérification approfondie De manière moins fréquente, à la suite d’un contrôle sur pièces infructueux ou sur décision de l’administration fiscale, il est possible que le fisc décide de recourir à des investigations plus poussées, à savoir une vérification approfondie. En matière d’impôt sur le revenu, elle prendra la forme d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle et, lorsque les bases d’imposition sont établies à partir d’une comptabilité, il s’agira d’une vérification de comptabilité. Il s’agit là d’une procédure plus longue et assortie de diverses garanties légales en faveur du contribuable. Un avis de vérification sera alors adressé ou remis au contribuable. Ce document doit préciser les années faisant l’objet de la vérification et mentionner, sous peine de nullité, qu’il peut se faire assister par un conseil au cours de la procédure. L’intervention directe d’un avocat fiscaliste n’est pas toujours nécessaire à ce stade et pourrait être mal vue par le contrôleur des impôts qui deviendrait suspicieux. Toutefois, si vous avez quelques incertitudes sur votre situation, il peut être utile de demander l’avis d’un professionnel en la matière dès le début de la procédure. Vous définirez ainsi ensemble les erreurs à éviter et la stratégie à adopter. L’intervention de l’avocat pourra se limiter à une Les chiffres de l’administration fiscale sur le nombre de contrôles réalisés 201220132014 Contrôle des professionnels Contrôles sur pièces des professionnels Vérifications de comptabilité 197 052 188 904 177 899 48 178 48 219 47 776 Contrôle des particuliers Contrôles sur pièces de l’impôt sur le revenu Contrôles sur pièces des impôts patrimoniaux Examens de la situation fiscale personnelle 926 093 883 491 821 300 134 207 142 922 102 079 4 159 4 159 3 964 Source : « Cahier statistique 2014 » Direction générale des finances publiques simple consultation, ce qui réduira les coûts. En tout état de cause, votre expert-comptable sera là pour vous accompagner tout au long de la procédure. Et si je m’assurais ? Un contrôle fiscal implique souvent la présence de votre expert-comptable voire d’un avocat fiscaliste, qui va logiquement vous facturer leur intervention. Déjà qu’il n’est pas agréable de faire l’objet d’un contrôle, si en plus l’on doit payer des honoraires de conseil supplémentaires, ça devient vite très énervant. Une des solutions consiste à souscrire dès maintenant une assurance complémentaire afin de couvrir ces honoraires. La prime n’est pas excessive et vous permet au moins de vous tranquilliser sur ce point, l’issue du contrôle demeurant à votre charge. La vérification de comptabilité Lors de la vérification de comptabilité, l’inspecteur se rend dans les locaux de l’entreprise et un débat oral contradictoire se met en place avec le vérificateur. À savoir : La vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s’étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne les contribuables dont le montant annuel hors taxes du chiffre d’affaires ou des recettes brutes n’excède pas 236 000 €. Il demandera des pièces complémentaires, des éclaircissements sur certains points. Il est préférable d’accéder à ses demandes et d’adopter une attitude cordiale et détendue avec le vérificateur. Pensez toutefois vos mots avant de parler. À l’issue de cette période, l’administration fiscale adressera au contrôlé une proposition de rectification ou dans de très rares cas l’informera d’une absence de rectification. indépendentaire 135 I Février 2016 45 CŒUR DE MÉTIER GESTION MANAGEMENT CŒUR DE MÉTIER L’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle À l’occasion de cet examen, l’administration contrôle la cohérence entre, d’une part les revenus déclarés et, d’autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. Lorsque les dépenses du foyer sont supérieures aux revenus déclarés, la différence est considérée comme provenant de revenus dissimulés. Le contribuable doit alors s’expliquer aux travers des demandes d’éclaircissements ou de justifications qui lui sont faites. Attention le défaut de réponse entraînera une taxation d’office ! Généralement, ce contrôle à lieu dans les locaux du service des impôts. Sauf les cas de prorogation ou de découverte d’une activité occulte, l’examen ne peut s’étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l’avis de vérification. À l’issue de cet examen, l’administration fiscale adressera au contrôlé une proposition de rectification ou l’informera d’une absence de rectification. • La rectification L’issue d’un contrôle fiscal est malheureusement bien souvent une proposition de rectification. Le contribuable dispose alors d’un délai pour répondre, généralement de 30 jours. L’absence de réponse dans ce délai est considérée comme 46 indépendentaire 135 l Février 2016 © iStockphoto / BernardaSv « Conservez en toute circonstance votre sangfroid et vos bonnes manières. Il ne sert à rien de rentrer dans un rapport de force avec le fisc ! » une acceptation de la part du contribuable. S’il conteste la proposition de rectification, le contribuable doit le formuler par écrit et de manière non équivoque. L’administration fiscale lui répondra et s’ouvrira alors une phase de négociation avec cette dernière. À la fin des négociations, le fisc procèdera à la mise en recouvrement de l’impôt. Le contribuable souhaitant alors contester cette imposition devra se tourner vers le tribunal compétent. Si le montant demandé est conséquent, nous ne pouvons que vous conseiller de recourir aux conseils d’un avocat fiscaliste. Il ne s’agit plus de montrer patte blanche au vérificateur mais d’assurer votre défense et seul un technicien de la matière pourra le faire efficacement. Jusqu’à quand peuventils remonter ? Le délai de reprise est généralement de trois ans plus l’année en cours. Ainsi par exemple, le délai de reprise des revenus déclarés en 2015 (pour les revenus perçus en 2014) expirera le 31 décembre 2017. La bonne attitude à adopter - Converser vos pièces comptables et justificatifs pendant a minima 4 ans. - Ne laissez jamais un courrier de l’administration fiscale lettre morte même si vous n’êtes pas contraint d’y répondre. - Lisez attentivement tous les courriers que vous adresse le fisc, et ce y compris les petits caractères au verso, et conformez-vous aux délais y figurant. - Faites-vous assistez de votre expert-comptable. Attention toutefois à la pas le laisser seul face au contrôleur, il aura besoin de votre présence pour protéger au mieux vos intérêts. - Conservez en toute circonstance votre sang-froid et vos bonnes manières. Il ne sert à rien de rentrer dans un rapport de force avec le fisc en les menaçant de licencier vos salariés, en prenant le contrôleur de haut, etc. - Dialoguez avec le contrôleur lors d’une vérification approfondie. Le droit à un débat oral contradictoire est l’une des garanties offerte au contrôlé, utilisez le ! - Anticiper les résultats du contrôle, en vous entourant au besoin de professionnels de la matière. Il est important que vous puissiez dès le début savoir ce qui peut vous être reproché afin que vous vous défendiez efficacement… et bon courage. independentaire 31 Janvier 2013 47