DRIVE Année : 2011 Nationalité : Etats

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DRIVE Année : 2011 Nationalité : Etats
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DRIVE
Titre original : DRIVE
Année : 2011
Nationalité : Etats-Unis
Acteurs : Ryan Gosling, Carey Mulligan, Bryan Cranston, Ron Perlman, Oscar Isaac, Albert Brooks & Tina
Huang
Réalisateur : Nicolas Winding Refn
Scénario : Hossein Amini & James Sallis
Musique : Cliff Martinez
Cascadeur pour le cinéma le jour, le «Driver» (Ryan
Gosling) fait le chauffeur la nuit pour la pègre de Los Angeles.
Se prenant d´affection pour sa jolie voisine, il accepte de
participer à un hold-up avec le mari de cette dernière.
Un an après que le projet ait été annoncé dans les marchés
du film, DRIVE était très étonnamment cette année en
compétition à Cannes. Une preuve de l´attention grandissante
portée à son metteur en scène, le danois Nicolas Winding Refn.
Autodidacte, l´homme est révélé par le polar sec et ultra
réaliste PUSHER qui secoue le box office local en 1996. Il
enchaîne avec BLEEDER et INSIDE JOB (alias FEAR X), une
co-production canadienne avec John Turturro. L´échec
commercial de ces deux films (ils n´ont d´ailleurs jamais été
distribués en France), accule Winding Refn a une situation
financière catastrophique. Ruiné, totalement déclassé aux yeux
de l´industrie son pays, le cinéaste s´oblige à écrire et réaliser
deux séquelles à son PUSHER. L´élaboration de ces projets de
la dernière chance est d´ailleurs capturée par l´excellent
documentaire GAMBLER. Malgré leurs origines purement
commerciales, PUSHER 2 et PUSHER 3 sont d´excellents
films où le style nerveux de la mise en scène de Winding Refn
éblouit à chaque instant. Revenu sur le devant de la scène au
Danemark, il enchaîne avec BRONSON et LE GUERRIER
SILENCIEUX, deux films radicaux qui l´imposeront comme
un auteur moderne aux yeux de l´international.
Avec DRIVE, le cinéaste signe son premier film américain.
Adapté d´un court roman de James Sallis, le film est d´abord
pensé comme un véhicule pour le comédien Ryan Gosling,
nominé aux Oscars en 2007 pour sa performance dans HALF
NELSON de Ryan Fleck. En souffrance d´un réalisateur, c´est
Gosling qui suggère aux producteurs le nom de Nicolas
Winding Refn à la mise en scène. Un choix qui va
immédiatement placer le film à un niveau artistique bien
supérieur à ce qu´il aurait dû être. En effet, DRIVE est sur le
papier terriblement classique. Le «Driver» est un as du volant
qui va tomber amoureux de sa voisine (la jeune Carey
Mulligan) et se retrouver avec un contrat sur sa tête à l´issue
d´un casse foireux. Bien entendu, le contrat est diligenté par
ses anciens employeurs, des mafieux hauts en couleurs campés
par Albert Brooks et Ron Perlman. La deuxième moitié du film
est donc un espèce de film de vengeance où le «Driver» va
méthodiquement éliminer les chefs mafieux tout en essayant de
rester en vie durant les attaques menées par des hommes de
main.
Dire que l´on a déjà vu cette trame scénaristique mille fois
serait un euphémisme. La force de DRIVE ne vient que de sa
mise en scène, le film n´étant qu´une sorte de gigantesque
concept de re-digestion de série B américaine vu par les yeux
de Nicolas Winding Refn. On avait fantasmé à l´annonce du
projet que DRIVE serait un film de «poursuites en voitures»
réinventé par le statisme élégant et immersif de Winding Refn.
Ce sera le cas, mais uniquement sur la séquence d´ouverture.
Cette scène, qui voit le «Driver» se faufiler au volant entre les
mailles de la police après un braquage, est un mini chef
d´œuvre de mise en scène. Totalement pensée à contrario des
standards préexistants (le «Driver» passe plus de temps à
attendre dans l´ombre qu´à appuyer sur le champignon), cette
séquence de «poursuite» nous fait complètement redécouvrir
les enjeux d´une scène d´action automobile. Passé ce coup de
maître placé en tout début de film, Winding Refn semble nous
dire que ce fantasme de film de «poursuites de voitures», il sait
déjà le faire. La suite du film sera consacrée à la vision, parfois
ironique, de Winding Refn vis-à-vis du cinéma américain. Un
cinéma volontairement putassier, totalement balisé, gentiment
crétin mais doté d´une efficacité et d´une force de transgression
sans commune mesure.
Après Mads Mikkelsen qui interprétait dans LE GUERRIER
SILENCIEUX un héros mutique inspiré du Snake Plisken de
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NEW YORK 1997 et des personnages de Clint Eastwood dans
les westerns de Sergio Leone, Winding Refn poursuit son idée
du «héros ultime» avec ici Ryan Gosling. Toujours mutique,
parfois même falot, ne possédant même pas de nom, le
«Driver» n´est caractérisé que par la mise en scène qui le suriconise en permanence. Sur la route d´un scénario déjà tout
tracé, le personnage ne s´exprime que par l´ultra violence.
DRIVE est un film tellement outrancier dans ses débordements
sanglants que l´on pourrait le qualifier de film gore. Le
«Driver» éventre ses ennemis sur des tubes en acier ou éclate
des têtes à coup de pied jusqu´à ce que la cervelle explose sur
le sol et les murs. Des scènes sanglantes absolument grotesques
participant au concept de «raclure de vidéo-club» que Winding
Refn veut donner à son film.
DRIVE est donc un étrange film. Une commande jouissive
et souvent époustouflante, signée par un metteur en scène nous
rappelant à chaque instant que le cinéma américain, outre son
décorum et sa liberté graphique, est un cinéma idiot. DRIVE
souffle sans arrêt le chaud et le froid, le sérieux et le décalé, le
premier et le second degré. Une dualité y compris présente sur
le générique de début du film, où des synthés roses très «Vice
City» apparaissent au son vintage et délicieusement désuet de
«Nightcall» du groupe électro Kavinsky. Il faut apprécier
DRIVE pour ce qu´il est, une sorte d´épisode d´«Hollywood
Night» revu et corrigé par l´un des plus talentueux réalisateurs
de sa génération et accessoirement grand théoricien de la série
B. DRIVE offrira à son réalisateur un très mérité prix de la
mise en scène au festival de Cannes 2011.
Eric Dinkian
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