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Droit Immobilier Droit Immobilier Jurisprudences récentes en matière de courtage par Me Patrick Blaser Courtage: courtier du vendeur ou de l’acheteur? (ATF du 31 juillet 2009, 4A_280/2009) L Que le vendeur et l’acheteur rejettent, après la conclusion d’un contrat de vente, l’obligation de payer un salaire au courtier, voire qu’ils prétendent tous deux ne rien devoir au courtier, est, selon le Tribunal fédéral, une situation assez classique en matière de courtage! e propriétaire d’un vaste domaine à Genève souhaite vendre son bien immobilier et mandate à cet effet un avocat.Un courtier offre ses services à cet avocat, qui lui spécifie que le propriétaire n’entendait pas lui conférer son mandat de courtage ni le rémunérer à cet effet. De son côté, le courtier signe avec un acheteur potentiel une convention de confidentialité comprenant une clause fixant le montant de la commission de courtage à 3% du prix d’achat à payer à la signature du contrat de vente notarié. Après une première proposition refusée, l’acheteur conclut finalement la vente pour le prix de 35,5 millions de francs. Le contrat de vente précise que toute éventuelle commission de courtage sera à la charge exclusive de l’acquéreur. L’acquéreur contestant avoir conclu un quelconque contrat de courtage avec le courtier, ce dernier saisit les Tribunaux d’une demande en paiement de sa commission, qui s’élève à 1’145’490.- francs; avec succès, puisque les Tribunaux lui donnent raison. Le Tribunal fédéral a d’abord jugé que le fait que ce soit en général le vendeur qui prend en charge la commission de courtage n’était pas pertinent lorsqu’il apparaissait, comme dans le cas d’espèce, que l’acquéreur avait précisément conclu avec le courtier une conven- 88 N U M É R O 2 2 tion prévoyant expressément l’engagement de l’acquéreur de payer une commission de courtage. Que le vendeur et l’acheteur rejettent, après la conclusion d’un contrat de vente, l’obligation de payer un salaire au courtier, voire qu’ils prétendent tous deux ne rien devoir au courtier, est, selon le Tribunal fédéral, une situation assez classique en matière de courtage (sic!). Dans ces cas, il appartient au courtier de prouver qui, du vendeur ou de l’acheteur, est le débiteur de sa commission. A cet égard, la convention conclue entre le courtier et l’acheteur a été considérée dans le cas d’espèce comme une preuve suffisante, et cela malgré le fait que le courtier se soit vraisemblablement retourné dans un premier temps auprès du vendeur pour le paiement de sa commission et que l’acquéreur ait prétendu que la convention était sans valeur juridique (acte simulé) et qu’il ne l’avait d’ailleurs pas lue. Courtage: commission fixée en fonction d’un prix de vente minimum (ATF du 7 décembre 2009, 4A_483/2009) U n propriétaire entendant vendre son immeuble, situé dans le canton de Vaud, s’est mis dans ce cadre en contact avec un courtier, employé d’une agence immobilière. Ne désirant toutefois payer aucune rémunération au courtier, le propriétaire a refusé de signer un quel- Le TF ne se fait pas d’illusion sur les conflits liés aux commissions de courtage. conque contrat de courtage. L’agence immobilière a alors enjoint son collaborateur de ne plus intervenir dans cette affaire. Sur ce, le propriétaire a directement convenu avec le courtier de lui verser, à titre de rémunération, tout montant de vente supérieur à un prix minimum convenu. Finalement, l’immeuble a été vendu pour ce dernier prix, soit CHF 2’280’000.-. L’agence immobilière s’est alors manifestée auprès du propriétaire, en réclamant une commission de courtage de CHF 84 358.-, calculée selon le tarif recommandé par la section vaudoise de l’USPI. Le propriétaire s’étant refusé de payer le montant réclamé, l’agence immobilière a saisi les Tribunaux d’une demande en paiement. Sans résultat, puisque le Tribunal fédéral a débouté l’agence immobilière de ses prétentions. Dans le cas d’espèce et faute de contrat de courtage écrit, l’agence immobilière a soutenu que le propriétaire avait conclu un tel contrat de façon tacite. Le Tribunal fédéral a contesté que cette version des faits ait été éta- blie par la procédure. De cette dernière, il ressort que le propriétaire a convenu directement avec le courtier, employé de l’agence immobilière, le paiement d’une commission dont le montant devait correspondre au dépassement du prix de vente. Si, selon le Tribunal fédéral, une telle clause est effectivement insolite (sic!), elle n’est pas contraire à une quelconque règle impérative régissant le courtage. La loi (article 417 CO) protège le vendeur d’un salaire excessif qu’il aurait promis au courtier, mais pas le courtier qui aurait stipulé un salaire trop modique. En dehors du fait que l’agence immobilière n’apparaît pas être la cocontractante du propriétaire, le Tribunal fédéral a jugé qu’aucune commission n’était due au courtier, puisque rien n’indiquait que le prix de vente de CHF 2 280 000.- ait finalement été supérieur au minimum convenu entre le propriétaire et le courtier. n Me Patrick Blaser avocat, associé de l’Etude Borel & Barbey, Genève [email protected] M A I – J U I N 2010 89