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Vins d’ailleurs
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Utiel-Requena
Le vignoble et les vieilles vignes de bobal, le cépage local.
distinction en 2009, le San Isidro de la meilleure bodega de l’année remis par la Cátedra Universitaria de
la Viña y del Vino de Valence. On l’aura compris: Murviedro est l’un des sites de vinification les plus avantgardistes d’Espagne, et Pablo Ossorio, l’un des œnologues les plus en vogue du pays.
© Mathilde Hulot
Une appellation qui redore son blason
Renouveau du
Sud espagnol
Cette région du Levante, au nord de Valence, cherche
à sortir de l’ombre. Elle cache, dans un océan de vrac,
des caves de haute technologie et des vins surprenants.
«Utiel-Requena
tient à se faire
connaître, à
l’export comme
à l’intérieur du
pays: place aux
vins de haute
facture et de
bon rapport
qualité/prix.»
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Par
Mathilde
Hulot
Le 29 avril 2009, une conférence de
presse a eu lieu au magasin Lavinia de
Madrid pour le lancement du DVD de
la série américaine Falcon Crest. Son
héros, Lorenzo Lamas, adulé des Espagnols, y était
très attendu. S’en est suivi une dégustation à l’intention des VIP. Au milieu de quelques grands vins
du monde, champagne et tokaj, un sauvignon blanc
et un pinot noir de Hispano-Suizas étaient présentés
par leur géniteur, Pablo Ossorio. Élu winemaker de
l’année par l’Asociación Valenciana de Enólogos, il
est responsable technique de deux caves, HispanoSuizas et Murviedro. Murviedro a, elle aussi, reçu une
Rvi Revue vinicole internationale _ septembre 2009
Le sauvignon blanc est un vin frais, moderne, acidulé,
tout en finesse. Incroyable quand on pense à la
région où il a été élaboré ! La cave est située au cœur
de l’appellation Utiel-Requena, dans la région du
Levante, dans le sud-est de l’Espagne. Utiel-Requena…
une région longtemps baptisée «zona maldita» (zone
maudite). Elle a produit pendant des années des
moûts sulfités et des vins en vrac, souvent synonymes
de vins noirs de coupage chargés d’alcool.
Les producteurs ont commencé à mettre en bouteille
il y a seulement vingt ans. Elle n’en fait guère plus de
10 % aujourd’hui, soit moins de 30 millions de bouteilles. Mais Utiel-Requena tient à se faire connaître,
à l’export comme à l’intérieur du pays. Depuis une
dizaine d’années, cette partie de l’Espagne, qui
compte six dénominations d’origine (Utiel-Requena,
Alicante, Valencia, Jumilla, Yecla et Almansa) suit le
mouvement enclenché par le Languedoc-Roussillon,
ou les Pouilles en Italie: fi du gros rouge qui tache,
place aux vins surprenants, de haute facture et de
bon rapport qualité/prix. Mais encore méconnus.
La DO d’Utiel-Requena s’étend de part et d’autre de
l’autoroute de Madrid, à 80 km plein est de Valence.
On a beau être au sud, le climat est assez frais, car le
vignoble domine entre 750 et 950 mètres au-dessus
du niveau de la mer. C’est un climat continental à
l’influence méditerranéenne, très sec. Nul besoin de
traitement drastique. Mais la sécheresse hante. La
pluviométrie est de 430 mm par an. La terre est rouge,
argileuse, peu productive, l’eau glisse à la surface et
ne pénètre pas. «Pour irriguer, il faut creuser des puits profonds et très coûteux», explique Pablo Ossorio. Par ailleurs, on compte jusqu’à 60 % de vieilles vignes. 40 %
du vignoble a été restructuré. Ici et là, des panneaux
solaires ont chassé les vignes.
Le cépage dominant est le bobal, ou valenciana tinta,
une variété tardive et résistante à la rigueur des hivers. C’est le troisième cépage planté en Espagne avec
90 000 ha (soit 8 % du vignoble), derrière l’airén
(305000 ha, 27 %) et le tempranillo (190000 ha, 17 %).
www.larvi.fr
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R E P È R E S
Goût et marketing en fers de lance
Élève de la plus vieille école de viticulture et d’œnologie du pays, sise à Requena, Pablo Ossorio, œnologue hors pair de 37 ans, manie aussi bien ses inventions technologiques que les présentations à la
presse de ses produits, tous aussi innovants les uns
que les autres. Alba de Murviedro, par exemple, un
vin de Valencia, est un vin créé pour les femmes:
«Nous avons demandé à 120 femmes de Valencia de nous
donner leurs préférences de profils aromatiques. 75 % de sauvignon blanc, pour le côté tropical, et 25 % de muscat pour la
note florale, vinifié en macération carbonique. Un vin facile
à boire avec 5 grammes de sucre résiduel».
En vente au Corte Inglès à 7,50 € et dans les clubs et
boîtes de nuit, Alba surfe sur l’image des jeunes beaux
et dans le vent, présenté par des top-modèles lors de
la Semaine de la mode à Valence. 80000 bouteilles
ont été produites la première année, puis 250000
en 2008. «Notre cave sait faire ce genre de volume et de
qualité.» Pour le Rosa de Murviedro, un utiel-requena,
le cabernet-sauvignon (75 %) et le sauvignon blanc
(25 %) fermentent ensemble: «On cherchait à faire un
www.larvi.fr
26 mai 1933
rosé différent». C’est aussi la première cave à se lancer
dans un bobal 100 %, le Corolilla.
Le positionnement est clair: élaborer des vins milieu
de gamme différents, excellents et à des prix abordables, dans quatre appellations, Valencia, Utiel-Requena, Alicante et Cava. 95 % des vins s’envolent à
l’export, au Royaume-Uni, en Belgique, Hollande,
Norvège, Finlande, Estonie, en tout dans 35 pays différents. Les ventes démarrent aussi aux Baléares, au
Pays basque et à Madrid.
Pablo Ossorio prolonge l’aventure avec Hispano-Suizas, une cave qu’il a montée avec Marc Grin, le Suisse
de l’équipe originaire du canton de Vaud, et Rafael
Navarro, un grand de la viticulture et chantre du pinot noir. Le projet est né en 1999 et la cave a été créée
en 2006. Le vignoble couvre 55 ha, le tempranillo («ce
n’est pas son climat») a été remplacé par du cabernet
franc, de la syrah, du merlot, du chardonnay, du sauvignon blanc, du pinot noir et du verdejo. Les plantations sont de 4000 à 5000 pieds par hectare, au lieu
des 1500 à 2000 habituels. Les vins s’appellent Impromptu (sauvignon blanc), Bassus (pinot noir), Tantum Ergo (un cava brut nature) ou encore Quod Superius (un rouge d’assemblage). 150000 bouteilles
au maximum seront élaborées.
Le défi est important: «Les gens connaissent Rioja, Ribera,
Priorato et Rueda. Le reste est difficile à introduire», confie
Queenie Xia, de Global Fine Wines à Shangai, une
importatrice chinoise venue avec une trentaine d’autres visiter le vignoble.
Vince Scanio, basé à Chicago, pense qu’il y a de la
place pour ces vins: «Les Américains cherchent autre chose
que la sempiternelle sangria. Le bobal est unique, mais il faut
évidemment le faire connaître…»
C’est la première fois
qu’est évoquée la
dénomination d’origine
Utiel-Requena, dans la
Gaceta de Madrid. Avec
l’introduction de la loi
sur la vigne et le vin, en
1970, l’appellation est
reconnue et régulée.
65,5 % des vins
d’Utiel-Requena sont
exportés, mais les
exportations sont en
chute: de 228071 hl
en 2004, la région
exportait en 2007
seulement 152884 hl
(source MAPA/ICEX).
Valencia exporte aussi
la majorité de ses vins
(60,5 %) tandis
qu’Alicante en expédie
seulement 24,5 %.
Destinations
La Hollande,
l’Allemagne et le
Royaume-Uni sont
les trois principaux
marchés export
d’Utiel-Requena avec
respectivement
19261 hl, 16444 hl
et 9339 hl expédiés
en 2008. Suivent
le Canada (7562 hl),
la Norvège (7179 hl),
la Suisse (6907 hl)
et la France (6237 hl).
.
41000 hectares
C’est la superficie de
la DO Utiel-Requena,
la région la plus unie
et homogène de la
communauté de
Valence. Elle compte
7000 viticulteurs
et 115 caves
enregistrées.
Sur le 1,5 Mhl produit
annuellement,
seulement 25 à 30 %
sont déclarés en DO.
© Mathilde Hulot
C’est au cœur de cette région qu’a choisi Schenk de
s’implanter en 1927, après avoir fondé les Bodegas
Schenk à Vilafranca del Penedès, en Calatogne. Le
groupe suisse se fixe comme objectif d’être au summum des techniques de vinification avec, pour base,
des cépages issus de vignobles traditionnels. Avec le
bobal, Arnold Schenk ne s’était pas trompé: ce cépage autochtone date du XVIe siècle. Le groupe mise
ensuite sur la recherche et les hommes pour faire des
vins modernes.
Murviedro, située à Requena, produit 17 millions de
bouteilles par an, moitié blancs, moitié rouges, pour
un chiffre d’affaires de 18 M€. Née il y a 80 ans, elle
vinifie 10 millions de kilos dans une cave expérimentale impressionnante menée par Pablo Ossorio.
Les chais actuels ont été construits en 1997. En 1999,
une deuxième ligne d’embouteillage a été installée,
d’une cadence de 14000 bouteilles/heure. En 2002,
un bâtiment climatisé pour accueillir les barriques
et entreposer les bouteilles a été ajouté, puis la winery a été agrandie pour atteindre une capacité de
18000 hl. Depuis, une ligne pour Bag-in-Box® et une
cave à mousseux ont été inaugurées. La production
de la cave est complétée par plusieurs coopératives
associées avec qui des contrats ont été établis.
Pablo Ossorio et Richard del Rincon, de Bodegas Murviedro.
septembre 2009 _ Revue vinicole internationale Rvi
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