Mémoire de l`Association des municipalités de banlieue (AMB)

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Mémoire de l`Association des municipalités de banlieue (AMB)
M069
ASSOCIATION DES MUNICIPALITÉS DE BANLIEUE
Mémoire préparé dans le cadre des audiences
tenues par la Commission du transport de la CMM
sur le financement du transport en commun
Mai 2012
TABLE DES MATIÈRES
Présentation
3
Introduction
4
1 - Une question d’opportunité qui reste à démontrer « projet par projet »
6
2 - Une invitation à adopter une philosophie différente quant au financement
10
3 - Une gouvernance des systèmes de transport à la recherche d’une consolidation
16
Conclusion
19
Rappel des recommandations de l’AMB
20
2
Présentation
L’Association des municipalités de banlieue de Montréal regroupe les quinze
municipalités reconstituées en 2006 et qui sont liées à la Ville de Montréal par l’effet de
la loi sur l’exercice de certaines compétences dans certaines agglomérations. Ensemble,
ces quinze municipalités représentent une population d’environ 240,000 habitants.
En matière de transport en commun, ces quinze municipalités contribuent, avec la Ville
de Montréal, au budget de la Société de transport de Montréal (STM), décidé par le
conseil d’agglomération, de même qu’elles versent à l’Agence métropolitaine de
transport (AMT) une contribution en fonction des services disponibles, ainsi que le
produit de la taxe foncière prélevée en vertu de la Loi sur l’AMT et destiné au
financement des immobilisations de l’Agence.
3
Introduction
Quelques mois après s’être donné un premier Plan métropolitain d’aménagement et de
développement (PMAD)1, la Communauté métropolitaine de Montréal se penche
maintenant sur l’importante question du transport en commun et, en particulier, de son
financement.
La CMM a de bonnes raisons de s’intéresser à cette question. En premier lieu, l’essentiel
du contenu de son tout premier PMAD repose sur une orientation urbanistique dite de
« densification » du développement, en misant notamment sur l’effet structurant des
immobilisations et services offerts en matière de transport en commun2.
En second lieu, les grands enjeux environnementaux liés aux niveaux d’émissions de gaz
à effet de serre se trouvent appuyés par une approche au développement métropolitain qui
fait une meilleure place au transport en commun3.
Le Comité exécutif de la CMM a donc confié à la Commission du transport le mandat de
tenir des audiences publiques pour évaluer de nouvelles sources de financement pour le
transport en commun à l’échelle métropolitaine.
Le document de consultation rendu public à cet effet recense les projets de transport
collectifs nécessaires pour assurer la mobilité des personnes et favoriser la consolidation
de l’urbanisation, tel qu’ils avaient été inscrits au PMAD4.
L’ensemble de ces projets nécessite, selon les estimations fournies, un investissement
global de 22,9 milliards de dollars. Cette enveloppe se subdivise entre les projets de
maintien et d’amélioration des actifs actuels (10,3 MM $) et les projets de développement
1
Le Plan métropolitain d’aménagement et de développement a été adopté par la CMM en décembre 2011.
Les développements de type « TOD » (Transit Oriented developments) y sont particulièrement mis en
évidence en tant qu’éléments structurants du futur développement métropolitain.
3
À cet égard, le PMAD propose d’augmenter la part modale de l’ensemble des réseaux de transport en
commun de 25 % à 30 % de l’ensemble des déplacements d’ici 2021.
4
Voir annexe 1 du document de consultation de la Commission du transport de la CMM.
2
4
de l’offre de transport en commun (12,6 MM $). L’ampleur du niveau d’investissements
requis, de même que l’accroissement conséquent aux coûts d’opération des réseaux, une
fois réalisés ces projets, dégage un « manque à gagner » (à partir des sources actuelles de
financement du transport en commun) d’environ 620 M $ par année5.
Ce sont là les éléments factuels proposés par la Commission du transport de la CMM
pour lancer et animer une discussion publique qui entend se concentrer sur les questions
qui suivent, formulées dans le document de consultation.
 Quelles sources de financement sont à privilégier pour pourvoir au financement
adéquat du transport collectif métropolitain ?
 Qui devrait financer les investissements dans les réseaux de transport en commun ?
 Lequel des moyens de mise à contribution des utilisateurs du réseau routier vous
semble le plus juste pour financer les projets de transport en commun (taxe sur
l’essence, droits d’immatriculation, péages sur les ponts) ?
 Quels sont les principes qui, selon vous, doivent guider les choix de sources
additionnelles de financement ?
5
Idem, p. 13. Ce montant global de « manque à gagner » est réparti à parts à peu près égales (300 M $ pour
les investissements et 320 M $ pour les opérations).
5
1 - Une question d’opportunité qui reste à démontrer « projet par projet »
À la lecture du document de consultation, le comité de travail de l’AMB a d’emblée
soulevé le problème de la pertinence de chacun des projets de transport identifiés, et en
conséquence, du montant global des investissements jugés nécessaires pour la région
métropolitaine.
Pour donner un exemple simple de ce raisonnement, le projet de développement de
l’offre le plus coûteux de cette liste est celui du prolongement du réseau de métro, tel
qu’esquissé à grands traits par un simple protocole signé à l’été 2009 entre trois villes et
portant sur trois projets distincts, non chiffrés et non priorisés : prolongement de la ligne
bleue vers Anjou, prolongement de la ligne jaune sur le territoire de la Ville de Longueuil
et bouclage de la ligne orange entre l’actuel terminus situé à Laval et la station CôteVertu.
Peu importe ses mérites, l’AMB n’est pas d’accord pour donner un blanc-seing à ce
projet global, du simple fait qu’il figure dans une telle liste, et estime qu’aucune
discussion éclairée n’a encore pu se tenir sur ce projet à cause du manque de données et
de l’imprécision des objectifs globalement visés : ces prolongements de métro devraientils remplacer d’autres projets ? La desserte de territoires de banlieue faiblement densifiés
mais déjà urbanisés mérite-t-elle des investissements aussi massifs ? N’existe-t-il pas des
solutions de rechange intéressantes et moins coûteuses pour atteindre les mêmes
objectifs, exprimés en termes d’achalandage ?
Par ailleurs, la question se pose légitimement, d’une part à savoir si cette liste est
complète en soi (d’autres projets ne viendront-ils pas se greffer à la liste au cours des
prochains mois ?), et d’autre part si elle est exhaustive, pour atteindre les objectifs du
PMAD. On n’y retrouve pas de priorisation des projets en fonction de leur rentabilité
(que cette rentabilité soit établie sur une base économique, environnementale ou sociale).
On n’y retrouve pas non plus de projets priorisés par le ministère des Transports du
6
Québec (MTQ), qui fournira tout de même l’essentiel du financement lié aux
immobilisations, il ne faut pas l’oublier.
Enfin, un dernier commentaire à cet effet, qui n’est certainement pas le moins important,
vise à rappeler que le secteur public s’est fait une habitude (sinon une spécialité) des
dépassements de coûts dans les grands projets d’immobilisations, ce qui permet à plus
d’un observateur de douter du niveau réel des immobilisations annoncées à un prix global
de 22,9 milliards de dollars dans le document de consultation de la CMM.
En définitive, ce serait donc, selon l’AMB, faire preuve de beaucoup de légèreté, et de
peu de respect des contribuables, que de décider ex cathedra d’ajouts au financement
global du transport en commun avant d’avoir fait le tri et de s’être posé une autre
question tout aussi importante : quel est le niveau d’effort que nous pouvons
raisonnablement demander à chaque catégorie de contributeurs ?
De l’avis de l’AMB, toutes ces réflexions pointent vers de très graves lacunes dans le
document de consultation. Entre l’adoption d’un PMAD et le choix de certains nouveaux
outils de financement pour le transport en commun, il serait logique de poser la question
de l’opportunité réelle de réalisation de ces projets et de l’ordonnancement de ces projets,
notamment et surtout en termes d’achalandage supplémentaire qu’ils sont susceptibles de
produire. Ainsi, pour ne reprendre que cet exemple, les projets de prolongement du métro
sont tous présents dans la liste, mais il n’y a aucune analyse de l’opportunité de leur
réalisation d’une part, ni de scénarios de desserte alternative d’autre part.
Une démarche logique consisterait, pour la Commission du transport de la CMM à
véritablement ordonnancer ces projets, après les avoir soumis à un test d’opportunité
relatif à leur rapport coût/bénéfice, et de convenir avec le MTQ des projets que celui-ci
désire voir réalisés en priorité.
De façon aussi à demeurer le plus possible cohérents d’un document à l’autre, il serait
souhaitable de revenir non seulement à l’esprit du PMAD, mais également à l’esprit de
7
l’actuel projet de loi 47 (Loi sur l’aménagement durable du territoire et l’urbanisme) qui
prévoit introduire une nouvelle mesure anti-étalement urbain par laquelle le nouveau
développement pourrait ne se réaliser que dans les endroits déjà desservis par les
infrastructures publiques, ce qui offre un lien de cohérence élevé avec les réseaux de
transport en commun.
Autrement dit, puisque les réseaux de transport en commun sont extrêmement efficaces
pour structurer le territoire urbain, il serait peut-être intéressant de retarder leur
déploiement (ou leur amélioration) sur certaines zones périphériques, de façon à assurer
une plus grande optimisation des territoires déjà construits et desservis par ces réseaux.
Par ailleurs, l’AMB est sérieusement préoccupée par l’impact qu’un trop grand nombre
de projets d’immobilisations pourrait entraîner sur l’évolution des coûts d’opération des
réseaux de transport en commun. Bien que ce sujet ait été occulté par l’explosion bien
documentée des coûts d’immobilisation de nombreux projets de construction
(prolongement de métro, lignes de trains de banlieue), on a trop eu tendance à sousestimer dans le passé la croissance des coûts d’opération induite par la réalisation de
projets qui étendent les territoires desservis par les réseaux ou qui multiplient les modes
de transport concurrents sur un même territoire.
Cela affecte d’autant plus les municipalités de la région de Montréal que, depuis vingt
ans6, elles assument presqu’exclusivement le poids des coûts d’opération, suite au retrait
gouvernemental décidé unilatéralement, et qui n’a jamais été réintroduit de façon
significative. À cet égard, la région de Montréal se distingue par rapport à toutes les
grandes agglomérations comparables, et rend plus difficile de supporter un accroissement
du coût des opérations pour l’avenir.
6
Lors de la réforme du financement municipal décidée par le gouvernement du Québec en 1991 et menée
par le ministre des Affaires municipales de l’époque, M. Claude Ryan, le financement des opérations du
transport en commun devenait la charge exclusive des municipalités et des usagers. Une surtaxe foncière
sur les immeubles non-résidentiels, modifiée par la suite en taxe sur les immeubles non-résidentiels, avait
alors été imaginée pour « combler » le retrait gouvernemental. Le gouvernement a également augmenté le
plafond des droits de mutation pour la vente des propriétés.
8
En regard des projets de transport en commun à mettre en œuvre, l’AMB recommande
donc :
Recommandation # 1
QUE le mandat de la Commission de transport de la CMM soit enrichi afin de lui
permettre de se concentrer sur l’élaboration d’une liste de projets qui auraient passé
un test d’efficacité coût/bénéfice d’une part, et qui seraient souhaitables en termes
d’aménagement métropolitain d’autre part.
Recommandation # 2
QUE la CMM établisse un partenariat productif avec le MTQ afin de retenir une
liste définitive de projets qui seront priorisés par tous les acteurs, incluant les
scénarios de financement, suite à quoi des sources alternatives de financement, si
requis, pourront être identifiées.
9
2 - Une invitation à adopter une philosophie différente quant au
financement
Le document de consultation de la Commission du transport de la CMM est fort bien
conçu en ce qu’il recense parfaitement les sources possibles de financement du transport
en commun. Une recherche documentaire supplémentaire et indépendante7 ne fait pas
ressortir d’autres catégories de « contributeurs » au financement du transport en commun
que ceux identifiés dans le document, soit nommément :

Les usagers

Les municipalités

Les gouvernements

Les bénéficiaires non-usagers
Traditionnellement, au Québec comme ailleurs au Canada, les trois premières catégories
étaient mises à contribution pour financer le transport en commun8. Ce n’est qu’à partir
des années ’90 que, graduellement, on a vu apparaître la quatrième catégorie de façon
distincte. Cela a pu correspondre, en fait, avec une logique de développement de l’offre et
de mise en œuvre d’un service effectif de transport en commun sur certains territoires
urbanisés, et du niveau effectif de concurrence qu’est à même d’exercer l’alternative au
transport en commun, la voiture individuelle.
Il ne faut pas oublier que le transport en commun offert sur un territoire densément
urbanisé (comme le centre de l’Île de Montréal, par exemple) est moins susceptible
d’engendrer des déficits de fonctionnement que l’extension de ce même service, pour
7
Le document suivant vaut notamment d’être consulté à cet égard : « The Move Ahead : funding the Big
Move », publié en mai 2010 par le Toronto Board of Trade, 41 p.
8
Les contributions faites par les gouvernements intégraient déjà, dans les faits, des contributions de la part
de toutes sortes de catégories de « non-usagers » du transport en commun (c’est le cas lorsqu’on met de
l’avant des contributions gouvernementales qui sont partiellement financées par des revenus généraux),
certaines de ces catégories de « non-usagers » se qualifiant pour être « bénéficiaires » de la présence de ce
service public (c’est le cas lorsqu’on pense aux automobilistes qui empruntent les mêmes corridors routiers
que les véhicules de transport en commun et qui bénéficient de la baisse de la congestion que permet la
présence de ce service).
10
diverses raisons de nature sociale, économique ou environnementale, à une aire urbanisée
plus large et moins densément développée.
L’AMB tient cependant à rappeler que la situation actuelle, où on accepte généralement
l’idée que les sources traditionnelles de financement du transport en commun (usagers,
champ foncier municipal, gouvernement) sont déjà trop sollicitées pour en attendre de
nouvelles ponctions significatives, n’est pas une situation d’équilibre souhaitée ou même
souhaitable. Elle découle plutôt d’un brusque changement imposé il y a maintenant vingt
ans (réforme « Ryan » en 1992) par laquelle le gouvernement du Québec se désengageait
presque totalement de sa contribution au financement des opérations des sociétés de
transport, pour ne plus se concentrer que sur le financement des immobilisations.
Comprenant mieux les raisons qui expliquent l’actuelle situation quant au financement du
transport en commun, la question du rétablissement de la contribution gouvernementale
au financement des opérations du transport en commun peut être posée indépendamment
– et préalablement – à celle qui porte sur l’identification de nouvelles sources de
financement...
Essentiellement, à partir des quatre catégories de contributeurs potentiels identifiés cihaut, on réussit à identifier divers outils de financement tirés des situations suivantes.

L’usager fournit sa part (quel qu’en soit le niveau) à partir des titres de transport
qu’il achète; il paie donc une portion significative du service qu’il utilise, mais
n’en paie pas la totalité. Presqu’aucun service municipal tarifé et destiné à une
large clientèle n’atteint par ailleurs l’autofinancement à 100 %, que ce soit les
loisirs, la culture, l’eau, etc., et ce, pour diverses raisons, le solde étant toujours
supporté par la taxation foncière.

La municipalité, à travers la contribution qu’elle fournit aux autorités
organisatrices du service de transport sur son territoire (soit une société de
transport, soit un CIT, et l’AMT), contribue de façon significative, parce qu’elle y
trouve un intérêt en termes de diversité de services et de diminution de la
11
congestion sur son réseau routier, et parce que cela lui permet de contribuer à
l’atteinte d’objectifs sociétaux particuliers (accessibilité accrue pour toutes les
couches de la population, ou diminution des émissions de gaz à effet de serre, par
exemple). À travers la municipalité, il convient de rappeler clairement que ce sont
les payeurs de taxes foncières sur qui repose essentiellement l’effort de
financement; or, une partie de ces payeurs de taxes sont également usagers ou
bénéficiaires de la présence de ce service.

Les gouvernements versent essentiellement des contributions destinées à faciliter
la réalisation de projets (immobilisations), mais contribuent parfois au
financement des opérations de certains réseaux de transport en commun (c’est le
cas, au Québec, pour les Conseils intermunicipaux de transport situés dans les
couronnes; c’est le cas également pour la portion « transport adapté » des
opérations des sociétés de transport et, de façon ponctuelle, pour les sociétés de
transport dans le cadre d’objectifs précis de croissance de clientèle).
La logique qui amène les gouvernements à privilégier les contributions aux
immobilisations est qu’un projet de transport en commun peut limiter le besoin
pour l’accroissement de capacité du réseau routier sous sa responsabilité, ou
encore contribue à répondre à des questions relatives aux politiques sociales (droit
à la mobilité), qui relèvent au premier chef des gouvernements supérieurs plutôt
que des municipalités. Comme on l’a dit plus haut, les contributions versées par
les gouvernements reposent indistinctement sur leurs différentes sources de
revenus, ce qui comprend à la fois des « non-usagers » purs et des « bénéficiaires
non-usagers », lesquels trouvent une certaine justification à ces contributions.

Les « bénéficiaires non-usagers », dernière et plus récente catégorie de
contributeurs au financement du transport en commun, peuvent quant à eux être
mis à contribution de différentes façons, et suivant deux sous-catégories
distinctes :
12
Les automobilistes :
o Soit à titre de propriétaires d’automobiles (immatriculation), soit à titre
d’utilisateurs de leur véhicule privé (taxe sur l’essence);
o Soit à titre de non-résident d’un territoire donné (péage routier; taxe sur le
stationnement privé; vignette pour circuler au centre-ville; vignette pour
circuler sur une voie réservée, etc.);
o Soit à titre de résident d’une portion de territoire définie comme
« périphérique » (prélèvement foncier supplémentaire sous forme de
redevance).
Les acteurs économiques :
o Les commerçants, qui bénéficient particulièrement de la clientèle
véhiculée par les services de transport en commun (par des prélèvements
supplémentaires effectués sur les espaces de stationnement; par une taxe
de vente régionale, etc.);
o Les développeurs immobiliers, qui constatent un accroissement significatif
de la valeur de leurs propriétés, dès lors qu’un projet ou une desserte de
transport en commun est confirmée (par des prélèvements ou redevances
liés à la croissance de valeur foncière);
o Les employeurs (commerciaux, bureaux, industriels), qui bénéficient de la
desserte en transport en commun pour véhiculer leurs clients ou employés
(contribution via un « versement » transport prélevé sur la masse
salariale).
13
C’est essentiellement autour de tels outils de financement que le document de
consultation de la Commission du transport de la CMM est axé. Cependant, s’il fournit de
brefs descriptifs de ces outils et rapporte quelques exemples d’utilisation dans d’autres
juridictions, le document de consultation ne fournit pas d’analyse de rentabilité et ne fait
pas non plus d’analyse de leur acceptabilité dans le contexte du Grand Montréal et dans
le contexte québécois en particulier. Le document ne fournit pas non plus un aperçu de la
croissance imposée à chaque contributeur au cours des vingt dernières années. En effet,
pour bien mesurer la situation, il faudrait comprendre de combien s’est accrue la
contribution relative de chacun des trois contributeurs habituels (usagers, champ foncier
municipal, gouvernement) ?
Car avant de recommander l’utilisation d’une source de financement, il conviendrait de la
positionner dans un contexte particulier et d’être en mesure d’apprécier sa désirabilité et
de connaître les effets attendus de l’application d’une telle mesure sur la compétitivité de
la région métropolitaine. À cet égard, l’AMB rappelle que l’introduction en 2011 d’une
taxe sur l’immatriculation sur le territoire de l’agglomération de Montréal comportait une
demande, toujours en suspens, d’étendre l’assiette de cette taxe à l’ensemble du territoire
métropolitain, pour éviter de surcharger une portion du territoire de la CMM et de lui
faire perdre sa compétitivité.
L’AMB aurait souhaité retrouver, préalablement à toute piste de solution identifiant une
nouvelle source de financement, des pistes de solution pour dégager, à même les budgets
de fonctionnement et d’immobilisations des organismes responsables d’organiser le
transport en commun, des économies récurrentes. De telles économies peuvent sûrement
être obtenues par voie de synergie, par voie de partage d’équipements ou de personnels,
etc.
L’AMB rappelle ici encore qu’un arrangement administratif, qui a été établi il y a
longtemps, fait en sorte que, sur l’Île de Montréal, les étudiants du niveau secondaire sont
transportés dans les autobus du réseau de la STM, sans qu’une compensation adéquate ne
soit versée en contrepartie par le gouvernement, alors qu’ailleurs sur le territoire
14
québécois, l’ensemble des dépenses de transport scolaire émarge au budget du ministère
de l’Éducation.
C’est pourquoi l’AMB ne recommande pas pour le moment d’aller puiser davantage de
fonds dans les poches des contribuables, à quelque catégorie de contributeurs du transport
en commun qu’ils puissent appartenir. Par contre, l’AMB recommande qu’un exercice
sérieux soit promptement engagé pour estimer le manque à gagner en provenance du
contributeur gouvernemental (recul depuis la réforme Ryan et non-compensation pour le
transport scolaire).
Recommandation # 3
QUE, préalablement à l’identification de sources alternatives de financement, la
Commission du transport de la CMM identifie la contribution gouvernementale
requise pour rétablir le niveau qui devrait prévaloir sans l’imposition unilatérale de
la réforme Ryan de 1992 et si le transport scolaire était justement compensé.
Recommandation # 4
QUE la Commission du transport de la CMM s’attarde également à fournir des
estimations plus développées du potentiel de chaque source de financement
identifiée dans son document de consultation.
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3 - Une gouvernance des systèmes de transport à la recherche d’une
consolidation
Le document de consultation de la Commission reste muet sur la question de la
gouvernance du transport à l’échelle métropolitaine. Pourtant, le fait même pour la
Commission de tenir ces audiences est un aveu de la part de la CMM à l’effet qu’elle
souhaite jouer un plus grand rôle dans le domaine du transport, ainsi que sa loi
constitutive le permet d’ailleurs.
Il est donc apparu à l’AMB que cette question devait également être posée en préalable à
la recherche de toute nouvelle forme de financement pour ce secteur d’activités. De prime
abord, il y a dans la question de la gouvernance un volet de transparence et de reddition
de comptes. Au nom de qui des sommes d’argent seraient-elles prélevées, comment
seraient-elles administrées et selon quels critères seraient-elles distribuées ?
Dans notre système de représentation politique, nous prenons pour acquis qu’une taxe,
quelle qu’elle soit, doit être décidée par des élus, de façon à protéger la population contre
l’arbitraire et lui donner l’ultime possibilité de changer ses dirigeants si elle ne se
considère pas bien servie.
Or, jusqu’à preuve du contraire, les membres du conseil de la CMM siègent à cette
instance par délégation de corps électoraux représentant une portion du vaste territoire
métropolitain. Il s’agit donc d’une représentation déléguée. Traditionnellement, on est
très réservé quant à la possibilité pour un corps public formé de représentants délégués de
lever une taxe ou d’en décider le taux; les quelques exceptions en ce domaine ne viennent
que confirmer la règle générale.
Une de ces exceptions vient de la possibilité pour le conseil de la CMM de décider d’un
rehaussement de la taxe sur l’essence sur son territoire uniquement9, mais c’est une
exception rendue possible de par le caractère très exceptionnel de la mesure, qui faisait
9
Le conseil de la CMM a effectivement voté cette mesure en mai 2010 (hausse de 1,5 cent/litre d’essence).
16
suite à des représentations précises auprès du gouvernement du Québec et qui visaient à
corriger une situation ponctuelle, dont le règlement a été négocié pendant deux années en
comités techniques et politiques.
L’actuel ministre des Transports du Québec, M. Pierre Moreau, a récemment ouvert la
possibilité de revoir la gouvernance du transport en commun à l’échelle métropolitaine,
en partant du rôle central que doit jouer l’Agence métropolitaine de transport (AMT) en
cette matière. Pour l’AMB, ce qui se profile derrière cette réflexion est la possibilité pour
les élus municipaux d’être appelés à jouer un plus grand rôle en matière de détermination
des priorités de transport sur le territoire métropolitain, non seulement en matière de
transport en commun, mais également de réseaux routiers.
L’argument de la multiplicité des organismes responsables, chacun, d’une petite portion
des circuits, des équipements, des ressources dédiées au transport en commun sur le vaste
territoire métropolitain, est souvent évoqué pour signaler un problème au niveau de la
gouvernance (manque de cohérence dans les pratiques, manque d’unité dans la
planification, etc.). L’occasion semble belle, pour l’AMB, de discuter de certaines
problématiques telles que la consolidation du nombre de « joueurs » (AMT à titre
d’opérateur de trains, sociétés de transport, CIT) et celle des mandats (AMT à titre de
planificateur et CMM, par exemple).
Mais il faudrait débattre de ces questions en ayant en mains l’ensemble des données
requises, car si l’on s’éloigne du statu quo actuel en matière de gouvernance, des
ajustements importants peuvent être requis au niveau du financement et de la gestion des
réseaux et des projets.
L’AMB croit que l’actuel contexte se veut propice à des réflexions fécondes visant à
clarifier les rôles de chaque acteur dans ce domaine d’activités. Il est possible que, de
cette nouvelle distribution des rôles, ressortent des besoins de rééquilibrages financiers
entre ce que doivent supporter les contribuables de chaque portion du territoire
métropolitain. Une fois un tel exercice réalisé, de concert avec le MTQ, alors pourra se
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poser de façon plus légitime la question du niveau de financement et de la possibilité
d’ajouter de nouvelles sources de financement pour le transport en commun.
Recommandation # 5
QUE la CMM accepte l’invitation du ministre des Transports de réviser l’ensemble
de la gouvernance du transport à l’échelle métropolitaine et reporte la conclusion de
l’actuelle consultation sur les outils de financement, menée par sa Commission du
transport, à la conclusion d’une éventuelle entente à ce niveau ainsi qu’à la
réalisation de travaux internes visant à consolider les organismes et leurs mandats.
18
Conclusion
Par ce mémoire qu’elle soumet respectueusement aux membres de la Commission du
transport de la CMM, l’AMB a voulu mettre de l’avant deux idées centrales.
D’une part, l’idée de la pertinence qui doit nécessairement être établie quant aux projets
de développement de l’offre de transport en commun sur le territoire métropolitain, pour
éviter de s’éparpiller inutilement. D’autre part, l’idée de la nécessité de rechercher
d’abord la possibilité de mieux maîtriser les synergies potentielles dans ce domaine
d’activités avant que de penser recourir à quelque nouvelle source de financement que ce
soit.
En corollaire à ces idées centrales, l’AMB invite la CMM à s’insérer dans le débat de la
révision de la gouvernance du transport sur le territoire métropolitain, puisqu’un tel débat
a été annoncé par le ministre des Transports, et qu’à partir de là, il devient primordial de
s’y intéresser activement et préalablement à tout arrangement portant sur une simple
« mécanique » de financement du transport en commun.
Comme toujours, l’AMB demeure ouverte à apporter sa collaboration pour les suites de
ce très important dossier.
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Rappel des recommandations de l’AMB
Recommandation # 1 - QUE le mandat de la Commission de transport de la CMM soit
enrichi afin de lui permettre de se concentrer sur l’élaboration d’une liste de projets qui
auraient passé un test d’efficacité coût/bénéfice d’une part, et qui seraient souhaitables en
termes d’aménagement métropolitain d’autre part.
Recommandation # 2 - QUE la CMM établisse un partenariat productif avec le MTQ
afin de retenir une liste définitive de projets qui seront priorisés par tous les acteurs,
incluant les scénarios de financement, suite à quoi des sources alternatives de
financement, si requis, pourront être identifiées.
Recommandation # 3 - QUE, préalablement à l’identification de sources alternatives de
financement, la Commission du transport de la CMM identifie la contribution
gouvernementale requise pour rétablir le niveau qui devrait prévaloir sans l’imposition
unilatérale de la réforme Ryan de 1992 et si le transport scolaire était justement
compensé.
Recommandation # 4 - QUE la Commission du transport de la CMM s’attarde
également à fournir des estimations plus développées du potentiel de chaque source de
financement identifiée dans son document de consultation.
Recommandation # 5 - QUE la CMM accepte l’invitation du ministre des Transports de
réviser l’ensemble de la gouvernance du transport à l’échelle métropolitaine et reporte la
conclusion de l’actuelle consultation sur les outils de financement, menée par sa
Commission du transport, à la conclusion d’une éventuelle entente à ce niveau ainsi qu’à
la réalisation de travaux internes visant à consolider les organismes et leurs mandats.
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