Mon histoire | Enfine : anorexie, boulimie, hyperphagie

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Mon histoire | Enfine : anorexie, boulimie, hyperphagie
Mon histoire | Enfine : anorexie, boulimie, hyperphagie
Écrit par Sandrine
Mardi, 29 Mars 2011 15:37 - Mis à jour Mardi, 29 Mars 2011 20:38
Bonjour à toutes et à tous,
Je pense qu'écrire me fera le plus grand bien. Écrire. Panser ses blessures. Cicatriser avec le
temps. Le temps qui passe et qui défile à une vitesse incroyable.
Je m'appelle Sandrine, j'ai 25 ans et je suis atteinte de troubles du comportement
alimentaire (anorexie-boulimie) depuis 9 ans
.
Je me rappelle avoir commencé par un régime pour perdre quelques kilos parce que je
me trouvais grassouillette. Beaucoup de r
éflexions blessantes
, de
remarques désobligeantes sur mon poids.
Ainsi que sur mon physique. Depuis l'école primaire, en passant par le collège et en continuant
au lycée
j'ai du encaisser les moqueries des autres élèves
. Je me sentais vraiment très mal dans ma peau. Pas besoin de vous dire que je n'avais
aucune confiance en moi
. A la maison, c'était un peu pareil. Un membre de ma famille m'appelait 'la petite grosse'... Je
ne me souviens plus très bien de la suite des évènements. C'est un peu flou je l'avoue.
La restriction alimentaire étant devenue mon quotidien
. Mais à la suite de ce régime, j'ai du restreindre mes portions jusqu'à bannir certains aliments.
Sauter des repas jusqu'à jeûner.
C'est à cette période que j'ai ressenti un énorme vide en moi. Mon père me manquait
terriblement.
Il est décédé
d'un cancer lorsque j'étais enfant (5 ans et demi). A l'âge de 41 ans. Je n'arrive pas à me
rappeler de ces quelques années passées avec lui. Le trou noir. Je ne me souviens de rien. Les
photographies sont là pour me rappeler comment il était. Je ne possède aucun cliché de lui
avec moi. Et je n'en ai jamais vu. J'ai longtemps éprouvé de la colère envers lui. J'avais le
sentiment d'avoir été abandonnée. Mais avec les années, j'ai compris que mon père m'avait
quitté non par choix mais parce qu'il n'avait pas le choix. Même si ma colère s'est dissipé, la
peine ne m'a pas quitté. Je suis toujours habitée par elle. Et mon deuil, n'est pas encore
terminé. J'ai énormément de difficulté à cicatriser.
J'ai grandi sans père. Ni beau-père. Ma maman ne s'est jamais remariée. Elle n'a d'ailleurs
jamais eu d'autre homme dans sa vie. Elle a élevé seule ses enfants. Ma mère était une femme
autoritaire. Et l'est toujours. Impulsive, elle s'énervait pour très peu de choses. Lorsqu'elle se
mettait en colère, j'avais l'impression qu'elle allait me gifler tellement qu'elle devenait
hystérique. Je ne me souviens pas avoir eu le droit dans mon enfance et adolescence de
rigoler, de pleurer ou de ressentir de la colère. Pour elle, rire c'était de la moquerie. Pleurer, de
la comédie. Et si j'étais en colère, j'avais tout intérêt à la ravaler. Je ne me souviens pas d'une
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quelconque affection de sa part. Pas de câlins, ni de bisous. Pas de réconfort, ni de tendresse.
Des encouragements non plus. Du soutien encore moins. Aucune communication. Nos
relations ont été très conflictuelles. Je n'ai eu aucun soutien. Aucune compréhension.
Simplement des reproches et des paroles assez blessantes concernant la maladie.
J'ai été hospitalisée durant près d'un an en HDJ (hôpital de jour). Je passais un contrat
avec ma psychiatre et une de mes infirmières référents pour une durée de 3 mois renouvelable.
Durant cette période, j'avais 2 activités par semaine, des objectifs à atteindre, un repas et une
collation obligatoires. Ce fut difficile et loin d'être une partie de plaisir. Généralement, après le
repas du midi, que je prenais à l'hôpital, je n'avais qu'une hâte : rentrer chez moi au plus vite et
me faire vomir. Tellement que ce que j'avais mangé me rendait malade. Je ne pouvais pas
garder ce trop plein de nourriture en moi tellement que ma culpabilité était grande. Alors tout au
long de l'après-midi, je mangeais et je vomissais. Parfois je ne faisais que ça dans ma journée :
manger-vomir-remanger-revomir.... J'allais me faire vomir lorsque je ne pouvais plus rien
avaler, le ventre plié en deux par la douleur.
J'ai été sous antidépresseurs et sous anxiolytiques. J'ai avalé près d'une centaine de
comprimés. J'étais complètement déphasée. Durant 2-3 semaines. Fatigue extrême. Vertiges.
Problèmes de compréhension et d'élocution. Je titubais. J'étais complètement perdue et seule.
J'avais des idées noires. J'avais envie de mourir. Je me suis longtemps auto-mutilée. Je
déversais toute cette colère, toute cette haine, ce dégoût de moi-même en me taillant le bras.
Cela me soulageait. Sur le moment. A la moindre contrariété, je me faisais mal. J'ai arrêté
l'auto-mutilation il y a quasiment 1 an. L'envie de voir mon bras saigner à nouveau est toujours
présent en moi. Mais j'essaie d'éviter d'assouvir ce désir si fort à certains moments. Une victoire
en soit.
J'ai rencontré lors de mes 20 ans (septembre 2005) un jeune homme dont je suis tombée
éperdument amoureuse
. Un coup de foudre. Je suis sortie avec lui. Notre histoire, si histoire il y a eu, n'aura duré que
quelques jours. 4 précisément. C'est dérisoire. Et pourtant, ça ne l'était pas pour moi. A cette
époque, je m'attachais énormément et très rapidement aux autres et aux hommes plus
particulièrement. Pour moi, ils comblaient mon manque affectif paternel. Je n'avais pas fait le
deuil de mon père. La douleur et le vide que j'éprouvais étaient immense. Alors, je m'accrochais
à eux. Ils étaient la drogue que je ne pouvais pas me passer.
La rupture avec ce jeune homme m'a brisé
. Parce que c'était la première fois que j'étais véritablement amoureuse de quelqu'un. A la suite
de cette rupture, j'ai continué mes crises de boulimie mais j'ai commencé à me faire vomir. Je
m'enfonçais un peu plus dans la déchéance. Je n'ai jamais cessé de penser à lui. Même 5 ans
et demi plus tard, il est toujours aussi présent dans ma tête et dans mon cœur. Je suis
malheureuse et souffre de cette situation. L'oublier m'est impossible. J'ai commencé à
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enchainer flirts et aventures à la suite de cette déception sentimentale. Je me sentais
importante aux yeux de l'autre l'espace d'un instant. Désirée peut-être aimée. Puis, je suis
passée d'un extrême à l'autre. J'ai fini par ne plus m'attacher à qui que ce soit. Me renfermant
ainsi un peu plus dans ma solitude.
Aujourd'hui, je suis seule. Une vie sociale inexistante.
Une amie qui est cher à mon cœur et que je connais depuis un peu plus de 8 ans a toujours
été présente pour moi. Elle fait toujours partie de ma vie. Mais je pense avoir pris un peu de
distance par peur qu'elle m'abandonne elle aussi un jour.
Je me sens démunie face à la maladie. Elle me contrôle. Je ne suis qu'une marionnette. Un
jouet pour elle. Elle est celle contre qui je me bats au quotidien. Une lutte acharnée. Épuisante.
Et sans relâche. Je suis fatiguée. Et lasse de cet état. J'aimerais pouvoir m'en sortir. Mais la
sensation que jamais je n'y arriverais est plus fort que tout.
Je n'arrive pas à manger. Je mange mais très peu de choses. Je mange toujours la même
chose. J'ai l'impression d'avoir mes repères comme ça. Dès qu'il y a un changement, je
panique. Et même s'il y a des choses que j'arrive à manger sans trop de difficultés, je regrette.
Je culpabilise et la seule idée qui me vient en tête c'est de me faire vomir. Voir les autres
personnes manger m'écœure. Me dégoûte. Me répugne. Cela me donne la nausée.
J'espère m'en sortir un jour. Mais même si je guéris (chose inimaginable pour le moment),
la maladie fera toujours partie de moi et ce, tout au long de ma vie. Je resterais fragile.
Je vous remercie de m'avoir lu.
Bon courage à toutes et à tous.
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