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Partie I
Qu’est-ce que
le management humaniste ?
Introduction
Ce livre se veut être un témoignage sur le management centré sur l’humain
et son volet Talents et, plus humblement, sur des actions concrètes mises
en œuvre par mon équipe de direction depuis 2012.
Notre direction est pionnière dans cette démarche et suffisamment
représentative pour démontrer que le management par les Talents peut
s’appliquer à tous les contextes organisationnels. Voici ses principales
caractéristiques :
►► 1 400 collaborateurs dont 1 200 employés, 120 managers et plus de
100 étudiants alternants majoritairement issus de la filière RH ;
►► deux statuts : fonctionnaire et salarié ;
►► une moyenne d’âge de 50 ans, mêlant les générations X, Y, Z et des babyboomers expérimentés ;
►► des collaborateurs installés sur tout le territoire métropolitain ;
►► une faible histoire de transformation culturelle et technologique ;
►► une diversité culturelle riche et fascinante.
Révéler les talents enfouis
I.1 Un livre pour les managers
J’ai l’espoir que ce livre puisse motiver le plus de dirigeants, de managers et
de managers de proximité, à se lancer dans l’aventure du management par
les Talents. Nous sommes responsables de la performance de notre entité,
quels que soient nos indicateurs d’efficience ou de satisfaction clients, autant
que de l’épanouissement et du bien-être au travail de nos collaborateurs.
Nous sommes fréquemment responsables, directement ou indirectement,
de l’absentéisme non pathologique de nos collaborateurs.
Ce livre vous interpellera d’autant plus si vous êtes un manager en quête
d’un mode de management qui vous recentre sur les richesses humaines
de vos équipes, si vous ressentez le besoin d’une nouvelle voie pour obtenir
une performance durable, économique et sociale ou si vous êtes ouvert
à un nouveau paradigme de la pensée managériale. Bref, si vous sentez
une étincelle s’allumer à l’évocation du management humaniste. Je souhaite
sincèrement vous apporter la preuve que « ça marche ».
Que vous soyez manager d’une petite équipe ou d’une grande unité,
que vous gériez des salariés et/ou des fonctionnaires, des employés,
des cadres ou des cadres supérieurs, quelle que soit la diversité de vos
collaborateurs (du point de vue de la mixité, des différentes origines culturelles
ou sociales, de l’âge, des nationalités), les principes de management par
les Talents sont universels et peuvent s’appliquer dans tous les cas car
nous nous attachons à l’être humain de façon holistique.
Ce livre est écrit dans la perspective d’apporter un socle « opérationnel »
à l’édifice « théorique » qui est en cours d’élaboration sur les Talents. Il s’agit
de mettre en œuvre des convictions afin de contribuer aux nombreuses
théories sur les Talents et afin de les confirmer.
Pour agrémenter ce livre, j’ai décidé de proposer plusieurs citations et
plusieurs schémas qui sont à votre libre disposition (en « copyleft » comme
on dit au Québec) pour vos propres illustrations ainsi qu’une bibliographie
de personnalités qui investissent depuis plusieurs années ce domaine.
N’ayant aucune prétention de proposer un état exhaustif de toutes les
recherches académiques en sciences humaines (ou autres) sur les Talents,
je considère que toutes les approches sont bonnes à lire, à s’approprier,
à critiquer. Cette communauté de promoteurs du management par les Talents
contribuera à influencer nos dirigeants, nos chercheurs et nos politiques pour
aller encore plus loin dans cette nouvelle ingénierie sociale.
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Introduction
Personnellement, je suis convaincu que cette démarche des Talents, à l’aune
des travaux menés par certains génies sur l’intelligence collective, aura
complété voire suppléé celle de la GPEC ou GSEC17 d’ici quelques années.
Sera-t-il simple de mettre en œuvre les principes de management par les
Talents dans votre entreprise ? Rien n’est moins sûr. En France, notamment.
Il vous faudra de l’audace, du courage et « prendre le pouvoir » en négociant
le maximum de marges de manœuvre.
Mais une chose est sûre pour moi. Pour manager, il faut aimer les gens !
Les respecter en tant qu’êtres humains, prendre le temps de les écouter, aimer
les faire progresser, se développer, s’assurer de leur bien-être au travail.
Et évidemment revendiquer et appliquer le « droit à l’erreur », en se remémorant le proverbe français : « L’erreur est humaine, persévérer est diabolique18. »
Si vous ne ressentez ni ne partagez cet état d’esprit, il est possible que
ce livre ne soit pas votre livre de chevet !
Pour autant, ma deuxième conviction profonde est qu’un manager doit se
remettre en permanence en question sur ses pratiques et ses relations
à l’autre. Si tel est votre cas, ce livre vous permettra peut-être de réaliser une
« introspection » qui révélera vos Talents inexploités et/ou inaudibles pour
votre ligne managériale ou qui vous convaincra qu’il vous faut vous orienter
vers un nouveau job pour lequel vos Talents seront reconnus et qui vous
permettra de vous épanouir tous les jours.
I.2 Ce que ce livre n’est pas !
Cet ouvrage est bien loin de la « gestion des Talents » qui prédomine dans
les SIRH (Systèmes d’informations des ressources humaines) et qui inclut,
pour une part plus ou moins large, les processus RH tels que la gestion
des entretiens individuels, les formations, la GPEC, la mobilité, les plans de
succession, le suivi de carrière et des performances voire la rémunération.
Ne recherchez pas non plus une vision d’exploitation de « potentiel » voire
de « haut potentiel » dans cet ouvrage. J’exprime une version « universaliste »
du management par les Talents : chacun d’entre vous dispose de plusieurs
Talents. Ils se sont créés pendant votre primo-enfance avec votre réseau
neuronal et synaptique. Mais peut-être ne se sont-ils pas développés au
cours de votre vie ? Ou bien il est possible que vous n’en soyez pas conscient !
17 Gestion stratégique des emplois et compétences.
18 Traduction de la locution latine : « Errare humanum est, persevarare diabolicum. »
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Révéler les talents enfouis
Ce livre se veut un plaidoyer pour l’optimisme, l’approche positive et l’enthousiasme.
Je ne suis pas naïf au point de croire que « tout le monde est gentil » et qu’il
n’y aura pas de difficultés à surmonter dans nos vies professionnelles.
Cependant, je n’ai pas souhaité aborder tous les freins, tous les obstacles
à éviter et toutes les bonnes raisons qui pourraient nous empêcher d’avancer
et d’être heureux au travail.
I.3 Les sept grandes tendances répertoriées
par la Fabrique Spinoza
Au-delà de mes convictions profondes, l’examen du monde qui nous entoure
nous exhorte à emprunter la voie des Talents.
D’abord, les tendances de notre société face à une crise qui semble structurelle démontrent que les conditions de travail des collaborateurs se dégradent.
Ensuite, les entreprises sont dans le même temps confrontées à l’émergence
de nouvelles générations, très exigeantes, venant questionner les modes de
management et, par là même, la relation existant entre supérieur et subordonné.
La Fabrique Spinoza, dans son rapport d’avril 2013 « Le bien-être au travail,
objectif en soi et vecteur de performance économique », a segmenté ces
tendances en sept éléments.
††La Fabrique Spinoza
La Fabrique Spinoza (www.fabriquespinoza.org) est un think tank (laboratoire d’idées) politique
et économique dont le but est d’organiser et de promouvoir une recherche et une réflexion
démocratiques sur le bien-être citoyen, puis de formuler des propositions politiques ou citoyennes
le favorisant.
Inspirée par la Commission Stiglitz et par les travaux de l’OCDE19 sur le Better Life Index20,
la Fabrique Spinoza affirme que le progrès sociétal peut être redéfini et mesuré afin de prendre
en compte le bien-être citoyen. Elle croit en effet que développement économique et bienêtre citoyen sont intimement liés et participent d’un même cercle vertueux. En conséquence,
la Fabrique Spinoza mène des travaux pour la constitution, le débat et la promotion d’indicateurs
de développement économique et de performance sociétale. Pour ses travaux, la Fabrique Spinoza
s’appuie sur le monde académique et les experts de la société civile. En complément des champs
classiques de savoir, elle s’inspire d’un corpus de connaissance en construction interdisciplinaire
sur le bien-être : économie du bonheur, sciences politiques, sociologie comparative inter-pays,
psychologie positive et neurobiologie comportementale.
19 Organisation de coopération et de développement économiques (organisation internationale
d’études économiques).
20 Indicateur du vivre-mieux.
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Introduction
Voici les sept tendances de ce rapport :
►► Tendance n° 1 : le statu quo, c’est-à-dire une crise économique et
financière bien installée ;
►► Tendance n° 2 : un marché du travail dégradé, c’est-à-dire une crise qui
détériore les conditions de travail ;
►► Tendance n° 3 : des collaborateurs en détresse, c’est-à-dire une souffrance
importante et croissante au travail ;
►► Tendance n° 4 : des modes de fonctionnement (organisation du travail
et des hommes, droit, management) anciens et inadaptés ;
►► Tendance n° 5 : des avancées laborieuses en termes de RSE et de
développement durable ;
►► Tendance n° 6 : de nouvelles exigences des salariés, c’est-à-dire une
montée en puissance de la génération Y ;
►► Tendance n° 7 : une expansion de la recherche sur le bien-être.
I.4 Un focus sur les générations Y et Z
Pour confirmer la tendance n° 6 évoquée dans le paragraphe précédent,
voyons comment les aspirations des générations Y et Z sont en train de
bousculer nos fondements et nos modes de management (voir le tableau I.1
ci-après) !
Née entre 1981 et 1995, la génération Y (« why ») pèse déjà sur les décisions
de nos entreprises.
Les caractéristiques essentielles de la génération Y sont les suivantes. Elle :
►► est issue de la société de consommation et de la culture Internet ;
►► est consciente que le monde est globalisé ;
►► aime les environnements ouverts et connectés ;
►► a intégré les exigences de mobilité professionnelle ;
►► intègre une entreprise avec un objectif à plus court terme que les
générations précédentes ;
►► assume l’exigence forte d’un équilibre entre vie privée et vie professionnelle ;
►► est innovante et impatiente ;
►► est exigence en termes d’autonomie afin de laisser s’exprimer sa créativité ;
►► a un fort besoin de reconnaissance de ses Talents.
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Révéler les talents enfouis
Née après 1995, la génération Z (« zappeurs ») va prochainement bouleverser le management « transgénérationnel » de nos entreprises. Certains
l’ont baptisée « C » ou « 3C » pour connectivité, collaboration et créativité.
Les caractéristiques essentielles de la génération Z sont les suivantes. Elle :
►► est ultra-connectée :
▼▼ « biberonnée » à l’Internet,
▼▼ élevée avec un smartphone greffé à la main ou à l’oreille ;
►► manifeste un intérêt fort envers l’instant présent, l’immédiateté et s’ennuie
très vite ;
►► fait montre de dextérité dans l’appropriation rapide des nouvelles
technologies ;
►► est lucide et réaliste à propos du monde dans lequel elle évolue ;
►► n’a plus forcément de référentiel social (plan social dans leur entourage),
ni de référentiel familial ;
►► fonctionne selon le modèle du donnant-donnant, au lieu du gagnantgagnant ;
►► a une forte exigence de transparence et de franchise ;
►► manifeste une nécessité d’adhésion par la passion (d’où l’importance
des Talents).
Le management de l’humain nous permettra probablement d’évoluer vers
les différentes avancées managériales que susciteront ces générations.
Le management par les Talents sera indispensable pour les motiver.
Il est indéniable qu’à chaque génération correspond un mode de management
qui prend en considération les caractéristiques de celle-ci et le rapport qu’elle
entretient au travail (voir Tableau I.1 ci-après).
Ainsi, juste après la Deuxième Guerre mondiale, le mode de management
des baby-boomers était directif et prenait place au sein d’une organisation
taylorienne du travail très hiérarchisée et dont le mode de communication
était exclusivement descendant. Les motivations des salariés étaient d’abord
liées à la sécurité de l’emploi et à la rémunération.
La génération suivante, la génération X, avec son exigence d’équilibre entre
vie professionnelle et vie personnelle, a nécessité de faire évoluer le management vers le lean management, plus participatif et adoptant une communication plus transversale.
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Introduction
Tableau I.1 Les modèles managériaux et les générations baby-boomers, X, Y et Z
(source : blog Fresh’Air de Loïc Leofold)
Avec l’arrivée de la génération Y et sa soif de liberté et de flexibilité, le
management a du faire sa révolution (en s’inspirant de l’Holacracy ®21), devenir
plus agile et miser sur le collaboratif.
La génération Z, qui intégrera bientôt massivement nos entreprises, va nous
inciter à sortir radicalement du cadre en matière de management. Cette
génération fonctionne à l’envie, à « l’occupassion ». Les managers devront
donc être éclairés et devenir d’habiles compositeurs qui laisseront s’exprimer
la créativité et l’innovation dans l’entreprise.
Je vous recommande également la lecture de l’ouvrage de Lionel Bellenger
et Philippe Tramont22 qui propose une belle synthèse de l’évolution des styles
21 Mode de gouvernance testé sur le terrain, entre 2001 et 2006, dans une entreprise
technologique qui a expérimenté en continu de nouvelles méthodes d’organisation et
de coopération provenant de mouvements avant-gardistes et de penseurs pionniers. Pour
en savoir plus, consulter la constitution Holacracy® 3.0 traduite et diffusée en France par IGI
Partners.
22 Bellenger Lionel et Tramont Philippe, Comment manager demain – Du commandement
au management alternatif, ESF, 2014.
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Révéler les talents enfouis
managériaux depuis les années 1930 : directif, participatif, par la performance
(sans oublier les effets toxiques d’une culture du résultat à tout prix) pour aller
vers un management alternatif « faisant le pari de nouveaux managers plus
intuitifs, à la mentalité d’entrepreneurs, privilégiant l’innovation, la confiance,
la coopération et la responsabilité des équipes dans le respect d’une éthique
partagée ».
I.5 Des expérimentations d’organisation
sur le management par les Talents
Voici quelques cas d’entreprises et de collectivité tirés de l’article « De la gestion des compétences au management des Talents » (Francis Boyer, FocusRH).
ÐÐCas d’entreprise
Facebook prend le temps d’explorer avec chaque salarié les activités qui lui procurent du plaisir
et identifie les aptitudes naturelles de ce dernier. Elle a créé un camp d’entraînement : le boot
camp. Les nouveaux recrutés intégrant l’entreprise disposent d’une période de six semaines pour
prendre le temps de trouver un poste qui correspond le mieux à leurs Talents. Contrairement
à d’autres entreprises, Facebook ne recrute pas sur le principe de conformité (c’est-à-dire sur
la base des compétences requises par un poste), mais selon le principe d’opportunité : un candidat
est sélectionné sur la base d’un état d’esprit en lien avec les valeurs de l’entreprise – curiosité,
créativité, etc. – puis, après avoir découvert l’entreprise, il est associé à la sélection des missions
sur lesquelles il se sent excellent.
Ce qu’illustre cet exemple, c’est bien la nécessité de s’affranchir partiellement de
la standardisation et du cloisonnement (descriptions de poste) de manière à
mettre « la bonne personne à la bonne place » afin de favoriser la complémentarité, de libérer les initiatives et de générer de la co-création de valeur.
ÐÐCas d’une collectivité publique
Pour lutter contre l’échec professionnel et l’exclusion de certains agents que plus aucun manager
ne voulait encadrer du fait de comportements inappropriés, et parce qu’il n’était pas envisageable
de s’en « séparer », une mairie d’Île-de-France a décidé de mettre en place un programme
de repositionnement basé sur l’exploration des sources de plaisir au travail (traduites en capacités)
des agents concernés. Cette mairie a affecté ces personnes sur des emplois où ils pouvaient être
valorisés. Résultat, 80 % des agents se sont réinvestis dans le travail alors qu’ils étaient en échec
depuis des années.
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