Notre pain quotidien

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Notre pain quotidien
Extrait d’un article paru dans le bulletin n° 7 – 1995-1996
NOTRE PAIN QUOTIDIEN
Par Maurice SARDA
Par délibération du 3 octobre 1724, la Communauté « suivant l’ordonnance de Mgr
l’Intendant doit fournir aux mendiants 3 livres de pain chaque jour, homme ou femme et 1
livre ½ pour les enfants de 8 à 14 ans » (cf. Bulletin SEHT n° 3 1989 p.29).
Sur la base de ces estimations, la population de TREBES (900 à 950 âmes environ au milieu
du 18ème siècle) consomme donc quotidiennement 800 kgs de pain.
Selon sa situation, ses ressources, chaque famille utilise les services du « fornier » ou se
ravitaille chez le « bolanger »
La famille B. VIGUIER, au Plo entame l’avant-dernier pain : il faut pétrir !
Ce soir, après le souper, on se prépare : Bernard apporte la maie et l’essuie ; Catherine la fille,
va chez la voisine chercher une boule de levain ; ce morceau de pâte aigre, fermentée,
provient du dernier pétrissage ; on se prête à tour de rôle, dans un petit groupe de familles,
cette « mère » qui donne naissance indéfiniment au pain.
Avant l’aube, Marie, manches retroussées, dépose le levain dans la maie et l’ensevelit sous un
monceau de farine qu’elle puise à pleines poignées dans un sachet contenant 20 livres. Elle
ajoute de l’eau tiède pour délayer, obtenant une pâte souple qu’elle pétrit énergiquement.
Tantôt elle remet de la farine, tantôt verse un peu d’eau, éparpille aussi le sel nécessaire et
mesure ; elle brasse sans relâche la pâte qui gonfle sous ses doigts, qu’elle étire pour apprécier
la consistance.
Essoufflée, transpirant, Marie soulève encore la pâte en lourds écheveaux, la rejette dans le
coffre et la reprend. Pendant 2 heures, gardant sa vaillance intacte, elle continue, malaxe,
retourne, jugeant parfois de l’homogénéité de la masse.
Le visage rouge de son effort prolongé et rythmé, elle lutte contre la fatigue qui gagne ses
bras, endolorit ses reins, s’insinue dans tous ses muscles et les alourdit. Vers 7 heures, Marie,
appréciant la douceur de la pâte en la palpant, parait satisfaite de son ouvrage.
Catherine aligne les corbillons en paille tressée sur la table proche, étend sur chacun d’eux un
linge blanc qu’elle saupoudre de farine. Marie roule un gros morceau de pâte, l’aplatit,
l’affermit avec ses poings.
Elle le pose alors dans un corbillon et le recouvre avec le linge pour éviter la formation d’une
croûte. Elle récupère deux livres de pâte quelle enferme dans le coffre, futur levain. Avec sa
fille elles portent au chaud les corbillons remplis sous l’édredon du lit ; ils attendront là,
pendant deux ou trois heures, à la douce chaleur qui fera lever la pâte……
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