N° 40 - ANAS
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N° 40 - ANAS
Journal d’information des personnels du ministère de l’Intérieur et de la Police nationale l’ Écho du N° 40 4e trimestre 2015 L’Écho du policier Le combat dans la raison ! Vie de l’ANAS Vie de l’ANAS Une équipe dans l’action ! Éditorial Les points sur les i p.02 p.03 Les vœux du Président p.04 Société Policiers dans la tourmente p.05 Société Suicides : des mots derrière les maux p.07 Vie de l’ANAS Le nouveau bureau reçu par l’Administration, la subvention versée Une équipe dans l’action Notre association attendait vainement une audience au ministère de l’Intérieur. La toute nouvelle équipe l’a enfin obtenue. D epuis que l’ANAS a vu le jour, créée par une poignée de bonnes volontés auxquelles elle doit son histoire, l’investissement de chacun de ses membres à assurer sa pérennité et sa force. Les combats, les épreuves traversées au fil du temps, ont permis que soit élargie la capacité de l’association à aider et à protéger ceux auxquels elle s’adresse: l’ensemble des personnels du ministère de l’Intérieur. L’ANAS appartient à tous ceux qui la font et, contre vents et marées, malgré les difficultés passagères Dernier Conseil d’administration 2 qu’elle a de tout temps rencontrées, elle continue et continuera à servir ceux qui font appel à elle! Le bureau national auquel a succédé l’actuel était celui de la crise qui secouait l’ANAS. La nouvelle équipe sera celle de l’action! Le premier devoir de celle-ci et du conseil d’administration, lui aussi remanié, est de réaffirmer l’indépendance et la solidarité qui fondent l’action lancée un beau jour de 1948. Cette indépendance, nous avons bien l’intention de la réaffirmer face à l’Administration. Nous avons d’ailleurs commencé à le faire, lors de la réunion (la première depuis trop longtemps) à laquelle nous a convié le 18 novembre dernier le secrétaire général du ministère de l’Intérieur, M. Denis Robin, suivie d’une autre le 8 décembre 2015 où nous avons présenté un budget prévisionnel pour 2016, excédentaire, une première depuis longtemps. Cette indépendance, c’est elle qui nous permet de continuer à défendre nos collègues toujours plus plongés dans une dégradation notable de leurs conditions de vie. Rien ne saurait dès lors en réduire la portée, ni les enquêtes judiciaires en cours, ni les contrôles administratifs. Cela n’empêchera pas le conseil d’administration de l’ANAS et le nouveau bureau national de répondre à la légitime attente des autorités, celle d’une gouvernance saine. Mais, sans jamais nous détourner du droit, en offrant aux différentes inspections qui pourraient encore subvenir les moyens de se dérouler correctement, nous n’en oublions pas pour autant la présomption d’innocence. Que personne n’en doute! Partant, ceux de nos camarades désignés par la justice, ont à faire preuve d’exemplarité dans leur rapport avec notre association. Ceuxlà ont remis leurs mandats. D’autres seront peutêtre conduits à le faire. Cette prise de distance permettra à l’ANAS de continuer à œuvrer pour nos collègues, à l’abri des doutes, de la part de nos adhérents, du personnel politique et de l’opinion en général. Les diverses situations que la nouvelle équipe à trouver en reprenant les rênes de l’association (lire l’édito du Président page ci-contre), renforcent à l’évidence cette indispensable prise de distance. Car, comme Pierre Cavret l’écrivait en novembre dans un billet paru sur le site de l’association, “dans une tourmente comme celle que nous traversons, rien n’est jamais ni blanc ni noir. Il y a les versions officielles… et les autres. Ceux qui ont émis des reproches hier pourraient éventuellement en entendre autant demain… ou même avant”. Face aux défis qui s’offrent à nous, l’ANAS doit faire preuve d’une mobilisation sans faille. Ceux qui sont investis d’un mandat doivent pouvoir l’exercer librement. Ceux qui en sont empêchés ou, tout simplement, qui n’en ont plus, doivent en tirer les conséquences. C’est la seule façon pour le nouveau bureau de renouer avec l’action d’utilité sociale et publique. Ceux qui en font partie ont d’ailleurs commencé à le faire, debout face à l’épreuve, en hommes d’honneur et libres. Et soyons certains qu’il en est de même pour tous ceux qui continuent–partout–à faire vivre nos valeurs de solidarité et de fraternité ! Ce nouveau bureau est bien décidé à faire preuve d’un esprit de combat, en privilégiant la raison ! ANAS – ministère de l’Intérieur – Place Beauvau – 75800 Paris Reconnue d’utilité publique par décret du 13 octobre 1977 – J.O. du 21 octobre 1977 Siège administratif – 18, quai de Polangis – BP 81 – 94344 Joinville-le-Pont cedex – Tél : 01 48 86 37 81 – Fax : 01 48 86 10 89 – [email protected] – http://www.anas.asso.fr Éditorial Les points sur les i… C her(e) s camarades anasiennes et anasiens, il est des époques dans la vie d’une association comme la nôtre, où les choses doivent être dites. Ni pour dénigrer, ni pour dénoncer, ni pour entrer dans je ne sais quelle sorte de “guéguerre” interne, ou pour entamer tel ou tel règlement de compte avec je ne sais qui. Non! Il s’agit simplement que les élus, les délégués, les employés, les bénévoles, bref tous ceux qui font la vie de l’ANAS, bénéficient des informations auxquelles ils ont démocratiquement droit. Afin que, pour une meilleure compréhension de ce qui se passe à la tête de leur organisation, ils aient toutes les clés en main. Je l’ai déjà écrit dans un bref édito publié sur le site de l’ANAS, lorsque l’on est venu me chercher dans ma douce et quiète retraite bretonne, j’étais loin d’imaginer qu’il allait me revenir la lourde responsabilité de présider à l’avenir de notre association. Je n’avais rien demandé et je n’étais candidat à rien. Sinon, j’aurai postulé depuis longtemps. Mais, du jour où un nouveau bureau a été mis en place, après que j’ai accepté de devenir président de l’ANAS, voilà que nous sont revenus d’un peu partout des commentaires peu amènes. Pour faire court, et en substance, la nouvelle équipe était constituée de putschistes irresponsables qui n’avaient vu que les postes à prendre. Si tel était le cas, outre que ce serait regrettable, cela aurait le mérite d’être simple. Les faits sont autres et, c’est bien connu, ils sont têtus! En fait, lorsque le Conseil d’administration qui a précédé la mise en place du nouveau bureau s’est tenu, il a été obligé de dresser un constat de carences. Ainsi, des faits antérieurs (ils sont examinés par la justice) provoquaient une rupture de la relation entre l’ANAS et l’Administration. Des rendez-vous avaient (paraîtil) été demandés, mais, comme sœur Anne, on ne voyait rien venir. L’heure n’est pas à l’autosatisfaction, mais vous devez savoir que depuis, vos nouveaux représentants ont obtenu récemment que cette entrevue ait lieu. Et elle s’est bien tenue! Dans un climat plus que favorable, sans pour autant que l’ANAS y perde son âme. Mieux, la subvention à laquelle avait droit l’ANAS, mais que la situation ante semblait bloquer, a non seulement été dégagée mais elle a été versée! Et l’Administration a intercédé pour l’ANAS auprès de Bercy afin que des pénalités qui nous avaient été infligées soient annulées! Le dossier est en cours. Mais ce n’est pas le seul problème auquel le CA a été confronté, avant de prendre la décision de proposer un changement d’équipe. Ainsi a-t-il constaté qu’en dix mois d’existence de la structure à laquelle nous avons succédé, des dizaines de milliers d’euros d’agios ont été payés à la banque de l’ANAS, sans qu’ils n’aient jamais été négociés par personne ! 100 000 euros d’agios! Époustouflant et incompréhensible! C’est en nous ouvrant de ce problème à notre banquier que nous avons aussi appris sa proposition, en 2014, d’améliorer les placements financiers de l’ANAS “sans que personne ne lui ait jamais répondu” nous a-t-il écrit! Depuis, nous avons obtenu que ces agios soient réduits de moitié (!) à échéance décembre 2015. Ensuite, nous n’en paierons plus! Se penchant sur cet état des lieux, la commission du contrôle financier de l’association a noté qu’elle n’avait jamais pu réellement mener sa mission à bien car, à chacune de ses interrogations, ses interlocuteurs ne faisaient rien pour apporter des réponses satisfaisantes. Pire! Lors d’un contact avec de la Cour des Comptes, celle-ci, pour ce qui concerne la gestion de l’ANAS, et notamment les faits évoqués plus haut, notait qu’il ne s’agit plus de négligence mais d’incompétence. La question aujourd’hui étant de savoir depuis combien de temps cela durait… Enfin, mais il y aurait encore bien d’autres dossiers à ouvrir, et nous le ferons, un autre point posait problème au CA de l’ANAS. Et il l’a lourdement fait pencher pour une refonte totale de l’équipe dirigeante: comment l’un de ceux qui étaient en charge avant nous pouvait-il cumuler des fonctions importantes à l’ANAS avec d’autres, toutes aussi conséquentes, dans une autre structure, amie et partenaire de la nôtre, mais tout de même concurrente? Et considérée comme telle, au fil du temps, par certains représentants de l’Administration qui en jouaient… Vous comprendrez qu’avec un tel constat de carences, et des questions aussi graves, installer un nouveau bureau était loin du “putsch” dénoncé par certains. D’ailleurs, à la lueur des informations qui sont désormais en votre possession, la transparence étant une de nos exigences, vous avez compris que ceux-ci ne sont plus crédibles! Ni plus, ni moins! Pierre CAVRET Président national l’ Écho du N° 40 – 4e trimestre 2015 Tirage 21000 exemplaires ————————— Directeur de publication Pierre CAVRET Rédacteur en chef Stéphane VAILLANT Rédaction: 18, quai de Polangis-BP 81-94344 Joinville-le-Pont Cedex Tél: 0148863781-Fax: 0148861089 ————————— IMPRIM’33 ZA du Haut Vigneau - Rue de la Source 33174 Gradignan ————————— © Photos ANAS—DR 3 Vie de l’ANAS 4 À la veille de la nouvelle année Une soirée en toute simplicité Voilure réduite pour nos vœux de 2016, pour cause de drame national toujours présent et d’une nécessaire reprise en main de notre gestion L e 16 décembre a eu lieu, au siège de l’ANAS, une soirée empreinte de simplicité et de dignité précédant un repas entre camarades. Il s’agissait, pour le Président de l’association, de présenter ses vœux à ses proches collaborateurs et aux adhérents par l’intermédiaire de cet Écho du policier. Dans son discours, Pierre Cavret faisait d’abord remarquer l’émotion qu’il avait de s’adresser à son auditoire. “Émotion car si nous sommes réunis avec moins de fastes c’est Le Président de l’ANAS revenait ensuite sur la surprise et la colère qui avaient étreint le Conseil d’administration, puis la nouvelle équipe que celui-ci mettait en place, en découvrant comment l’association avait été gérée durant les dix mois précédant la mise en place du nouveau bureau (lire l’éditorial). Et pour clore sur cette “colère”, Pierre Cavret, citant la Cour des comptes qui relevait récemment plus d’incompétence que de négligence dans cette gestion, ajoutait : “Une question peut changer pas mal de choses au fond des instructions en cours: depuis combien de temps durait cette incompétence ?” Pour le Président de l’ANAS, la surprise passée, “il n’était pas possible de rester les deux pieds dans le même sabot, en se contentant de vagues promesses à l’Administration dont la mise en place, mal préparée, aurait fragilisé encore plus l’ANAS, sans pour autant imaginer une gouvernance qui la fasse aller de l’avant”. Dans son intervention, Pierre Cavret revenait aussi sur les 500 000 € d’économies prévues au budget 2016 de l’ANAS présenté le 8 décembre à l’Administration et sur les mises à disposition (MAD). “Leur suppression étant programmée le 30 juin 2016, l’Administration voulait les convoquer dès le début de l’année en proposant trois choix. Nous avons réclamé un report au second trimestre. Nous allons établir des fiches de poste et un expert de la Fonction publique va préparer, avec un groupe de réflexion placé auprès du bureau national, un dossier destiné à négocier l’avenir de ces MAD”. Et de conclure: “Nous n’avons rien obtenu en obérant la liberté de l’ANAS! Ceux qui font allégeance, s’ils sont écoutés ne le sont qu’à court terme. Les interlocuteurs de ces gens-là savent que ceux qui ont l’échine trop souple ne sont pas des partenaires crédibles”. Voilà pourquoi le nouveau bureau sera celui du combat dans la raison, l’honneur et la liberté, debout face aux épreuves! Bonne année 2016 à tous et à l’ANAS dont nous sommes tous les garants ! aussi parce que beaucoup d’associations, d’administrations, d’entreprises ont décidé de restreindre voire de supprimer leurs festivités de fin d’année pour cause de deuil national. Émotion parce que si l’on m’avait dit voici quelques semaines que je prononcerais ces mots au nom de l’ANAS, j’aurai peut-être très vite écarté cette idée pour retourner à ma tranquille retraite bretonne. Émotion enfin parce que, depuis mon arrivée parmi vous, je me suis totalement fait aux responsabilités qui sont aujourd’hui les miennes. Si j’ai accepté de prendre en main les destinées de l’ANAS c’est parce que mon beau-père fait partie de ses fondateurs et moi un très ancien adhérent. Comme je suis encore un fervent syndicaliste policer des CRS Remise d’un chèque pour la famille des victimes, à Juan Escalera, président de l’ANAS 93 (Lire encadré page 6). dans l’âme”. Policiers dans la tourmente Plus de cent morts, des centaines de blessés. Des scènes de guerre dans la capitale et pour la première fois des terroristes kamikazes. Paroles de policiers, entre héroïsme et effroi… Société 13 novembre 2015, Paris frappée par le terrorisme A voir vécu ces terribles heures lui vaudrat-il d’enfin obtenir son retour dans son île de naissance, la Réunion ? “Jamais je n’aurai pu imaginer une telle horreur, les corps empilés les uns sur les autres, déchiquetés par les balles de kalachnikov, le sol maculé et l’odeur du sang-mêlé à celle de la poudre”. André* a 37 ans. Voici quinze ans qu’il essaie de rentrer chez lui en réclamant une improbable mutation. Mais depuis cette terrible nuit du 13 novembre, s’il rejoint l’océan Indien, rien ne sera plus jamais comme avant. “Arrivé au service, direction le Bataclan. Une fois sur place, sur le chemin, tous les blessés nous appelaient à l’aide, mais nous devions avancer. À un moment donné, j’étais près d’un groupe de personnes qui secouraient un monsieur au mollet arraché. Avec mon équipier, nous avons alors fait le tour pour pénétrer dans la salle par l’entrée principale. Il y avait des corps partout. Je revois le vigile mort sur son poste de travail, dans l’entrée. Plus on avançait, pire c’était. C’est indescriptible. L’horreur est indescriptible. Nous marchions dans le sang dès a ces corps dans la rue, des victimes, des bruits. Il y a aussi les visages, les regards des victimes atteintes par les balles de kalachnikov. Et ce qui m’a aussi marqué, ce sont les blessés heureux de voir arriver les pompiers qui se penchent sur eux et qui les abandonnent. Ils savent qu’ils ne pourront pas les sauver, donc ils les lâchent. Ces derniers moments de vie sur ces visages désespérés. Ils savent qu’ils vont y passer. Ça aussi ça me restera longtemps”. Marc a quinze ans de BAC mais ce jour-là, il s’en souviendra le reste de sa vie. “La première vision, c’est tous l’entrée. Nous étions obligés de nous frayer un chemin entre les morts pour sortir les vivants. Les gens que j’évacuais fermaient les yeux et me tenaient par l’épaule pour que je les guide jusqu’à la sortie. Je ne me souviens plus à quelle heure j’ai quitté les lieux. Je me rappelle juste avoir eu très froid. Après un drame pareil, je veux juste rentrer chez moi. J’ai déjà perdu deux collègues en 2013, lors d’une course-poursuite sur le périphérique parisien. Là, ça suffit, j’ai donné”. L’HORREUR EST INDESCRIPTIBLE Marc* et son équipage se sont retrouvés dans la tourmente sans même y avoir été envoyés. “À la base ce n’est pas notre quartier, ici. On vient en renfort de nos collègues qui sont rue de Bichat, on arrive là par hasard. Nous sommes un peu perdus. On est les premiers intervenants. Il n’y a pas de pompiers, pas d’autres force de police prévenue. On stresse un maximum. On se dit : si le gars ressort avec la kalachnikov, on ne peut rien faire, on va tous y passer! Puis il y ÉRIC*, POLICIER ET SURVIVANT DU BATACLAN “Ça devait être un super moment et ça a viré au cauchemar.” Éric est en poste dans la Manche et il était au concert de rock avec sa femme. “On voit le chanteur qui s’arrête, ma femme croit que ce sont des pétards, moi je comprends très vite que ce n’en sont pas. On dit aux gens de se coucher et de rester à raz du sol. Ils ont du mal à s’exécuter. C’est quand les premiers tombent que tout le monde se jette à terre. Et là c’est la panique. À 15 mètres, il y avait une sortie de secours. On a rampé tandis que ça tirait. Des gens s’écroulaient, d’autres demandaient de l’aide. C’est horrible, mais on essaie de se sauver soi, son épouse. Ça a duré longtemps. Dehors, des gens couraient dans tous les sens. Des survivants se réfugiaient dans les bars, mais j’ai pensé que s’ils rafalaient dans un bar, c’était pire. On se disait que ça n’allait jamais se terminer. Il y avait toujours des coups de feu. On est très conscient d’avoir échapper à un truc et d’un autre côté on se dit qu’on n’a rien pu faire pour aider les gens. Souvent dans notre boulot, on essaie d’éloigner les gens. J’avais envie de me relever pour crier: baisser vous! Mais j’étais au sol et je me disais, il faut rester au sol avec mon épouse. Quand on est policier, dans ce genre de moment, on a le sentiment qu’on agit davantage. Là, c’est vraiment l’impuissance totale”. 5 Société LA sans gilets pare-balles lourds, sans casques lourds, juste un casque de maintien de l’ordre et leur gilet pare-balles individuel”. Jean-Claude* appartient lui à une BAC de banlieue venue en renfort. “Quand on arrive boulevard Voltaire, il y a des gens qui courent dans tous les sens, qui sont apeurés, paniqués. On entend des coups de feu, on entend la première déflagration. On commence à sentir que la situation est hyper tendue. À ce moment-là, la porte de secours du Bataclan, impasse Amelot, s’ouvre pour des spectateurs qui ont réussi à s’échapper. Mon premier réflexe est de faire sortir les personnes ces corps empilés. Un massacre. Des gens de la zone dangereuse. J’ai arrêté tous les rampent en vous attrapant les chaussures. D’autres véhicules qui circulaient à proximité, des particuliers, nous insultent en criant: Bougez-vous! Je vois des taxis, pour leur confier des personnes. J’ai un corps qui embrasse quelque chose. Je le tire dit aux conducteurs de quitter l’endroit le plus par le bras et je vois un enfant derrière, encore vite possible, de ne pas s’arrêter, et s’il y a des conscient. J’imagine tout de suite que cela aurait blessés, de les amener directement à l’hôpital.” pu être mon fils. On a des effectifs qui ont été amenés à accomplir cette mission non-protégés, * Les prénoms ont été changés FAMILLE DE L’UN DES NÔTRES DUREMENT TOUCHÉE, UN AUTRE BLESSÉ Le vendredi 13 novembre au soir, ils étaient allés dans Paris fêter un anniversaire en amoureux. Ils devaient se pacser la semaine suivante. Thierry Hardouin 42 ans, sous brigadier affecté depuis quinze ans au dépôt du tribunal de grande instance de Bobigny (93) et son épouse Marie avaient choisi un restaurant du XIe arrondissement de Paris, la Belle Équipe. C’est là qu’ils sont morts tous les deux, fauchés par les tirs des terroristes au milieu de dix-huit autres victimes. Thierry était un bon vivant, cordon-bleu, amateur de cigares. Ses collègues se souviennent d’un homme aux yeux clairs, au sourire ouvert, d’un garçon joyeux, serviable et très professionnel. D’autres ajoutent son hobby, la photographie, son côté geek et le PSG dont il était fervent supporter. Thierry était papa de deux enfants, Léa 13 ans et Quentin 12 ans. Marie était la maman d’un garçon de 13 ans. L’ANAS a tenu à les aider dans leur peine, même si rien ne remplacera leurs parents. Lors des vœux de l’association, le 16 décembre, des chèques ont été remis pour eux à Juan Escalera (photo P.4), le Président de l’ANAS 93 qui a tenu à rappeler que Thierry développait particulièrement les valeurs de l’ANAS. Nous pensons aussi au commissaire de Louviers Val-de-Reuil (Eure), Arnaud Beldon, 38 ans, grièvement blessé au Bataclan. L’ANAS est à sa disposition et à celle de sa famille dans la souffrance. Suicides de policiers et de gendarmes Des mots sur les maux… Au dernier recensement, et sans confirmation officielle, on comptait 42 suicides de policiers et 23 de gendarmes au 13 décembre 2015… En amont, il y a le burn-out et parfois les addictions… L 6 e centre de santé et de soins ANAS du Courbat est depuis longtemps le lieu où l’on soigne, entre autres maux, l’addiction sous toutes ses formes, de toutes natures. Car les policiers touchés par la dépression puis, plus tard, le burn-out, plongent vite dans l’addiction. Souvent c’est l’alcool. Mais il peut aussi s’agir de drogues diverses, voire de médicaments auxquels ils deviennent “accrocs”. Outre les soins purement médicaux et pharmaceutiques, l’ANAS a depuis longtemps tenté d’agir autrement, parfois même en amont. Pour cela, elle s’est appuyée sur une méthode éprouvée, celle des groupes de paroles. D’abord organisés sur le terrain, puis au siège de l’association, ils ont été depuis intégrés aux différents programmes du centre du Courbat. Un des pionniers de l’organisation de ces groupes a été Gilbert Eveno, un pilier de l’Association nationale d’action sociale des personnels de la Police nationale et du ministère de l’Intérieur (Voir son livre page 8). Désormais, de nombreux policiers se confient à ces groupes, que ce soit à l’extérieur comme au château du Courbat quand ils y sont admis, pour des séjours plus ou moins importants. Ce n’est plus un secret que les tensions au travail de toutes natures, sont génératrices de nombreux troubles mais aussi de consommation de psychotropes, d’alcool, de stupéfiants. Sans oublier les risques inhérents à ces addictions: l’isolement social et les risques de rupture familiale. De plus, ces addictions, plus particulièrement celle liée à l’alcool, ont longtemps été niées (et c’est encore parfois le cas) par l’entourage professionnel des personnels touchés, collègues et hiérarchie. Parfois, les policiers qui en sont victimes considèrent que la consommation de ces produits n’est pas plus qu’une sorte de “dopage” pouvant pallier des faiblesses personnelles ou de l’anxiété au travail. En minimisant ainsi le phénomène, ceux qui devraient consulter ou fréquenter Le Courbat sont moins nombreux qu’il le faudrait. De plus, ils sont souvent l’objet des mauvaises plaisanteries, voire du rejet de leurs collègues et de leur encadrement. Dans le manifeste pour la santé et la sécurité au travail publié par l’ANAS en avril 2013, ses auteurs notaient à ce sujet: “Certains policiers vont jusqu’à nous confier qu’ils ont le sentiment d’être atteints d’une maladie contagieuse dès lors qu’ils ont décidé de se soigner”. PLAN ANTI-SUICIDES Les policiers atteints par une addiction sont doublement stigmatiséspar la maladie et par l’éventuelle mise en danger de la vie d’autrui ou du groupe dont on pourrait les soupçonner. Malheureusement, le burn-out ne se règle pas QUE par l’addiction à tel ou tel produit. Parfois, des policiers décident d’aller plus loin et veulent en finir. Pour 2015, s’il semble que nous puissions atteindre la fin de l’année avec une baisse de ces drames individuels par rapport à 2014, l’heure ne doit pas être au triomphalisme. Quand, au 10 août dernier, on en comptait déjà 28, Frédérique Yonnet, directrice de l’établissement de santé du Courbat, estimait que “c’était une catastrophe”. Certes, tous les policiers, qu’ils soient femmes ou hommes, ne mettent pas fin à leurs jours pour des raisons professionnelles. Mais on sait N’est-on pas pour le moment sur une action “post suicides et risques psychosociaux plutôt que dans l’action d’anticipation de ces phénomènes?” À l’issue de ce séminaire du 11 novembre 2015, Bernard Cazeneuve fit preuve de volontarisme, d’humanité et d’objectivité face à ce problème. L’Administration s’est engagée à tout mettre en œuvre pour endiguer cette terrible crise. Mais avant tout, ne faut-il pas mieux gérer les ressources humaines de la Police nationale, y compris en rénovant la DRH et en lui donnant plus d’indépendance vis-à-vis de la hiérarchie de la police? Mieux et plus prendre en compte les problèmes sociaux, familiaux ou financiers des policiers pour d’abord les régler, n’est-ce pas la meilleure méthode pour répondre à leurs souffrances? Société tout de même que c’est souvent le cas. Un livre récent, rempli de témoignages de policiers très émouvants, propose les clés pour comprendre les raisons de ce fléau (voir page 8). D’ailleurs, ces toutes dernières années, les tribunaux administratifs ont plusieurs fois fait reconnaître le côté professionnel des raisons d’un suicide. En revanche, il serait mal venu de passer par pertes et profits l’effort du ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve dans ce dossier. Avec Manuel Valls, passé par la place Beauvau avant lui, c’est le second ministre de l’Intérieur à s’intéresser à ces drames depuis très longtemps. C’est ainsi que M. Cazeneuve a lancé en janvier 2015 un plan “anti-suicides” d’importance. Mais celui-ci ne saurait exister sans la participation de tous les policiers, gendarmes et personnels du ministère de l’Intérieur. Et de tous ceux qui les représentent. Au séminaire du 11 novembre 2015, seuls les syndicats étaient invités. Cependant, peut-être un de leurs représentants présents à cette journée de travail a-t-il posé LA question qui s’impose : n’est-ce pas surtout en amont du problème qu’il faut agir? 7 Lu pour vous Un livre bouleversant, témoignage de 30 ans vécus aux côtés des dépendants aux addictions et de leurs familles. “Il n’est pas toujours facile de s’exprimer sur des faits sensibles de la société. Beaucoup de parents se taisent dans le combat qu’ils mènent dans la lutte contre les addictions qui pourrissent leur vie, celle de leur enfant. Ils ont peur, honte, ils se culpabilisent, ils ne veulent pas être jugés, alors ils vivent dans l’anonymat, ils souffrent”. Editions Abatos-Prix: 15,00 €. L’ENSEMBLE DES DROITS D’AUTEUR SONT REVERSÉS A L’ANAS 8 “Un ouvrage percutant aux témoignages parfois glaçants” J.Q Orlandi Nice Matin – Corse Matin “Un livre que nous conseillons à nos auditeurs” Agnès Bonfillon RTL Grand Soir “Alain Hamon tire le signal d’alarme dans un livre choc” Jean Marc Morandini Europe 1 “Merci de m’avoir écouté” Une rescapée “Grâce à vous, il restera une trace de l’histoire de mon frère” la sœur d’une victime “Un livre remarquable et édifiant” Un cadre du centre de soins du Courbat “Il y a, chez Alain Hamon, une vraie tendresse pour les flics de terrain, les flics du service général, ceux qui ne se prennent pas pour des supers-flics” France Inter “Pour Alain Hamon, la pression hiérarchique et de mauvaises relations humaines peuvent être une cause de passage à l’acte” Émilie Cabot Paris Match “Alain Hamon décrit une vraie souffrance au travail” Jean Cohadon La Dépêche du Midi “Un sujet qui dérange, une question encore taboue, Alain Hamon a voulu savoir…” Jacques Pradel RTL