jerusalem post validation diplomes

Transcription

jerusalem post validation diplomes
Communauté
La course d’obstacles
des diplômés français
en Israël
Des olim confrontés à des équivalences
de diplômes. (© Reuters)
Le Collectif franco-israélien a pour dossier clé l’intégration
des diplômés français en Israël. Objectif : régler le cas
d’une centaine de Français qui ne peuvent exercer
Chloé Rosner
L
e Collectif franco-israélien, né en
2010, défend la cause des olim
diplômés (immigrants francophones). Ce regroupement français, qui se
veut apolitique, s’est donné pour mission
de “promouvoir le rayonnement de la
communauté franco-israélienne dans
toute sa diversité”. Sans avoir la prétention de fédérer les Français en Israël, il
souhaite les représenter et les accompagner. Ainsi, les nombreux membres, aux
parcours fascinants et divers, participent
activement à l’adaptation des Français
qui arrivent en Israël.
Une de leurs priorités : rendre visible et
intégrer la communauté française dans
l’éducation, l’emploi ou la culture israélienne. Et la valorisation des diplômes
français en Israël est, de fait, devenue leur
cheval de bataille.
Car, lorsqu’ils souhaitent débuter une
carrière ou poursuivre leurs études en
Israël, les diplômés français affrontent
une série de difficultés. L’Hexagone refuse
de donner une validité internationale à
ses diplômes, validité pourtant convenue
lors des accords de Bologne. Les différents
systèmes universitaires israéliens et français rendent l’équivalence complexe. Et,
selon le Collectif, l’administration française ralentit les dossiers en n’envoyant
pas les papiers ou effectuant les démarches dans des délais extrêmes.
Les obstacles rencontrés par les
diplômés français varient selon les
secteurs privés ou publics. Car l’homologation des diplômes n’est pas la même
pour les employeurs privés. Ils peuvent
agir avec plus de liberté quand il s’agit
d’intégrer un nouveau salarié. Tandis que
le secteur public et les professions réglementées dépendent de la conversion officielle des diplômes.
Les difficultés s’imposent également en
fonction des formations. Par exemple, les
classes préparatoires (2 ans d’études)
françaises n’ont aucune équivalence
valide en Israël. Les formations d’expertcomptable et de droit nécessitent un
contrôle des connaissances obligatoires.
Mais ce sont surtout les formations de
santé qui sont confrontées à un mur.
Selon l’AAEGE (Association des anciens
élèves de grandes écoles) il existe un
blocage complet au niveau des formations
de para-médecine. Les exerçants dans le
domaine de la santé sont nombreux au
sein des olim francophones.
La non-reconnaissance des diplômes et
l’impossible équivalence est néfaste au
système français qui ne peut se promouvoir à l’étranger. Objet de frustration
pour la communauté juive française,
bloquée, contrairement à d’autres
membres de diaspora. Conséquence : de
mauvaises conditions de travail et une
concurrence entre communautés.
C’est par le “rassemblement des
forces” du collectif et de diverses associations que certains mènent leurs
actions. Le collectif propose aux différentes autorités concernées - ministères
de l’Éducation français et israélien,
ministère de la Santé israélien, avec
“l’appui considérable” de l’ambassade
française à Tel-Aviv - de participer à une
vidéo-conférence binationale. Le lobby
poursuit un unique fil rouge qui se
concentre sur une série de questions et
de cas précis, visant à faire avancer le
débat.
Pour l’instant, le collectif est toujours
dans l’attente d’une date de réunion de
la part des autorités respectives. Mais le
dialogue est engagé. Au programme du
Collectif : détermination, optimisme et
pressions. Et soutien de la presse : “On
compte sur une caisse de résonance pour
faire porter notre voix”, et “diffuser la
progression du dossier.” ■
Raconte-moi la Shoah...
Et si Vichy avait dit non ?
Robert Spira
E
t si la police française n’avait pas
obéi aux ordres de Vichy ? Et si
Vichy n’avait pas “cédé” aux ordres
de l’occupant... Y aurait-il eu plus ou
moins de Juifs arrêtés et assassinés ?
A notre avis, la police française a rendu
possible l’arrestation d’un grand nombre
de Juifs. La police “allemande” en France
en 1942 n’est pas très nombreuse, son
travail principal est d’arrêter des résistants, des gaullistes, des communistes.
Pas les civils, ni les enfants...
En 1942, de nombreux Allemands sont
envoyés sur le front de l’Est. Face à un
refus de Vichy, face à l’opposition de la
police d’obéir à Vichy, les Allemands
auraient dû se charger d’arrêter “des civils
juifs” en vue de leur déportation.
Cela aurait été très différent pour deux
raisons majeures. Les Juifs se seraient davantage méfiés, davantage cachés. Mais là, les
mesures antijuives venaient de la France, un
pays qu’ils admiraient, aimaient, en qui ils
avaient confiance... Pays de liberté, d’égalité, de fraternité ; pays dont la moitié des
habitants s’étaient levés pour défendre
l’honneur d’un petit capitaine juif.
La mémoire collective a-t-elle façonné
les comportements des notables juifs qui
ont peu accusé Vichy ? Cela tient-il à la
défaite supposée de l’antisémitisme lors de
l’affaire Dreyfus ? Nous sommes en 1940,
34 ans après la réhabilitation du capitaine
juif ; et l’engagement de nombreux Juifs
dans l’armée française en 1914 est encore
dans les mémoires.
Les Français, dans leur grande majorité,
reconnaissent le patriotisme des Juifs
envers la France. Nombreux sont ceux qui
se sont engagés volontairement en 1940...
Dignes nations. Et la France ?
Les Allemands auraient choqué gravement l’opinion française s’ils avaient
envoyé des officiers en uniforme arrêter
civils, femmes et enfants pour les déporter.
Ils recherchaient précisément, dans la
collaboration avec la France, un “bon
climat”, si profitable et indispensable à
l’économie de guerre allemande.
Prenons l’exemple de la Hongrie, alliée du
troisième Reich. Les Juifs ont vécu jusqu’en
avril 1944 sous un régime d’exception plus
ou moins humiliant, établi par l’amiral
Horty. Mais aucun Juif ne sera déporté avant
avril 1944. Une attitude ferme de Vichy sur
le sort des Juifs résidant en France aurait pu
sauver près de 80 000 déportés.
Malheureusement, en Hongrie, des
centaines de milliers de Juifs ont été
déportés à Auschwitz, en quelques
29
–
semaines. Il faut dire qu’ils étaient concentrés dans la capitale et que la gendarmerie
comptait une proportion considérable de
Hongrois passionnément antijuifs. En
France, un gendarme n’avait aucune
opinion sur les Juifs et c’est à peine s’il
connaissait la signification du mot...
Une négociation entre Vichy et l’armée
d’occupation était-elle possible pour la
non-déportation des Juifs de France ? En
tout cas, elle n’a jamais été tentée. Pourtant,
de nombreux pays n’ont pas cédé aux
Allemands malgré leur occupation par les
nazis. Les Finlandais ont refusé à Himmler
de déporter les 2 000 Juifs du pays.
Idem pour le Danemark, sous l’impulsion
de son roi Christian X, qui se fait le porteparole de l’opposition à la déportation, suivi
des dirigeants des églises danoises. La déportation des Juifs danois était prévue pour la
nuit du 1er au 2 octobre. Capitaines et
pêcheurs firent passer les Juifs en Suède,
pays neutre. 7 906 personnes seront
sauvées : 5 919 Juifs, 1 301 “demi-Juifs’’ et
686 Chrétiens mariés à des Juifs.
En Bulgarie, des bulldozers menaçaient
de stationner en travers des rails pour
arrêter les trains de déportés. Le roi Boris
III intervient également. Et le cardinal
Angelo Roncolli, futur pape Jean XXIII
(de 1958 à 1963), exerce une influence
certaine sur la non-déportation des Juifs.
DU 11 AU 17 JUILLET 2012
La Bulgarie n’a pas déporté un seul de ses
50 000 Juifs.
Les ordres de remplir les trains de Juifs
pour les envoyer à l’abattoir n’ont jamais
été contestés, ni par Vichy, ni par la SNCF.
L’état d’esprit des dirigeants vichyssois ne
les incitait pas à s’élever avec conviction
contre les mesures antijuives allemandes.
Vichy a-t-il véritablement “défendu” les
Juifs de nationalité française ? Réponse
difficile quand on sait que 26 000 Juifs
“français” ont été déportés par la police
française, sans compter les 11 400 enfants
raflés sur le sol français...
On peut seulement constater que la
proportion de Juifs français de souche,
victimes de Vichy, est inférieure à celle des
Juifs étrangers et apatrides. Vichy, dans ses
concessions aux Allemands, avait juste
placé les Juifs français en dernière ligne.
Les Juifs de France garderont toujours
en mémoire que, si le régime de Vichy a
abouti à une faillite morale et s’est déshonoré en contribuant efficacement à l’arrestation d’un quart de la population
juive de France, les trois quarts restants
doivent souvent leur survie à la sympathie de nombreux Français. Leur action a
vraiment commencé à partir du 16 juillet
1942, lors de la rafle du Vel d’Hiv, quand
les Français ont compris que les familles
juives arrêtées étaient vouées à la mort. ■