La `configuration d`assurance ABBA` surclasse l`assurance à terme fixe

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La `configuration d`assurance ABBA` surclasse l`assurance à terme fixe
09
novembre 2014 Numéro
Année 18
Mensuel Ne paraît pas en juillet & août Bureau de dépôt Bruxelles X P309269
épargne pour jeunes
épargne pour jeunes
La ‘configuration
d’assurance ABBA’
surclasse l’assurance à
terme fixe
1
La ‘configuration d’assurance
ABBA’ surclasse l’assurance à
terme fixe
ouvriers – employés
Assurances maladie: quid
de la distinction ouvriersemployés ?
3
Pratiquement tous les banquiers et assureurs proposent l’une ou l’autre forme de
nouvelle loi relative aux
assurances
Répartition équitable du
bénéfice fixé de manière
discrétionnaire
7
Assurance à terme fixe
majorité (ou à leur 21e, 25e anniversaire, …). En ce qui concerne les assureurs, on
‘plan d’épargne pour jeunes’, qui vise essentiellement la transmission, aux enfants, petits-enfants ou filleuls, d’un patrimoine qui ne sera disponible qu’à leur
pense spontanément ici à la traditionnelle assurance à terme fixe. A la lumière
notamment de plusieurs évolutions récentes, une assurance épargne ou placement
dans une ‘configuration ABBA’ pourrait toutefois constituer une meilleure option.
L’assurance à terme fixe est une forme spécifique d’assurance-vie où un ‘sponsor’
(parent, grand-parent, parrain/marraine) intervient en tant que preneur d’assurance
et assuré et désigne son enfant, petit-enfant ou filleul comme le bénéficiaire du
capital. Ce capital est versé à l’échéance convenue (d’où le nom d’‘assurance à
terme fixe’), p.ex. à la date du 18e, 21e, 25e, … anniversaire de l’enfant, et ce que le
‘sponsor’ soit encore en vie ou qu’il soit décédé à l’échéance du contrat. En cas de
décès prématuré du ‘sponsor’, le capital n’est donc pas versé immédiatement mais
seulement à l’échéance convenue. En cas de décès prématuré de l’enfant, le capital
assuré revient, à l’échéance convenue, au bénéficiaire subsidiaire désigné dans la
police par le ‘sponsor’ ou, à défaut, au ‘sponsor’ même ou à sa succession.
Dans le cadre d’une assurance à terme fixe, la date de liquidation de la prestation
d’assurance ne dépend donc pas du fait que l’assuré soit en vie ou qu’il soit décédé. S’agit-il alors encore d’une assurance-vie ? Oui. Une assurance à terme fixe
s’accompagne structurellement d’un plan de paiement périodique de primes (p.ex.
100 euros chaque mois). L’événement assuré est le décès du ‘sponsor’ (qui, comme nous l’avons vu, est à la fois le preneur d’assurance et l’assuré) avant
l’expiration de la police. Dans ce cas, l’assureur assure alors lui-même le paiement
des primes jusqu’à l’échéance du contrat. Le capital convenu sera ainsi quand
même versé au bénéficiaire à la date convenue, bien que l’assuré soit décédé plus
tôt. Une assurance à terme fixe comprend donc une sorte de couverture ‘exonération de primes en cas de décès de l’assuré’.
LNBF .NN/Lnbfnn/KL-NN01
Configuration ABBA
Tant que le bénéfice n’a pas été accepté, le ‘sponsor’ reste maître de l’assurance à
terme fixe et est libre, jusqu’à l’échéance finale, de racheter la police ou de désigner un autre bénéficiaire.
L’assurance épargne ou placement dans une ‘configuration ABBA’ est très peu
utilisée en pratique. Peut-être à tort. Cette forme de transmission différée de patrimoine au moyen d’une assurance-placement de la branche 21 et/ou 23 fonctionne
de la manière suivante:
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 preneur d’assurance : le ‘sponsor’, à savoir le parent/grand-parent/parrain (A)
 assuré : enfant/petit-enfant/filleul (B)
 bénéficiaire en cas de vie de B à la date de son 21e anniversaire : enfant/petitenfant/filleul (B)
 bénéficiaire en cas de décès de B avant son 21e anniversaire : parent/grandparent/filleul (A)
Cette configuration d’assurance présente les caractéristiques suivantes:
 Dans une ‘assurance-placement ABBA’, il peut être question de primes périodiques et/ou d’une prime unique. Il se peut même qu’une telle police offre
la possibilité d’effectuer des versements supplémentaires libres. Sur ce point,
l’‘assurance-placement ABBA’ est donc plus souple qu’une assurance à terme fixe qui requiert le paiement de primes périodiques prédéterminées, ce qui
peut éventuellement être ressenti comme une contrainte.
 Si la police ABBA est conclue en formule de capitalisation pure (donc sans
couverture de risque de décès), une acceptation médicale ne sera pas nécessaire. Une assurance à terme fixe comprend toujours une couverture de risque de
décès et sera donc généralement soumise à des conditions d’acceptation médicale.
 Comme pour l’assurance à terme fixe, le ‘sponsor’ (parent, grand-parent, parrain/marraine) est également maître de la police dans la configuration
d’assurance-vie ABBA. Jusqu’au terme du contrat, il est libre de racheter la
police ou de désigner un autre bénéficiaire. Une certaine sympathie à un moment donné peut en effet fléchir au fil du temps...
 Si le preneur d’assurance (le ‘sponsor’) décède pendant la durée de la police,
tous ses droits s’éteignent, y compris le droit de rachat. La police est alors
pour ainsi dire bloquée jusqu’à son échéance. Ni le ou les parents (survivants), ni le tuteur de l’enfant ne peuvent disposer de l’argent. Cette disposition apporte la garantie, surtout pour les enfants mineurs, que les fonds arriveront bien ‘à bon port’. Cela vaut tant pour une assurance à terme fixe que pour
une assurance épargne ou placement dans la configuration ABBA examinée
ici.
 Si l’échéance finale est postérieure à la date de la majorité de l’enfant (p.ex.
au 21e, 25e, ... anniversaire de l’enfant), l’on peut recourir au dispositif de la
cession des droits après décès du preneur d’assurance (art. 183-184 loi relative aux assurances).
 Il peut ainsi être stipulé dans les conditions du contrat d’assurance ou dans
un avenant à la police qu’en cas de décès du ‘sponsor’ pendant la durée de
la police, le bénéficiaire (l’enfant donc) puisse racheter la police, mais
p.ex. seulement à partir de son 18e anniversaire.
 Pour éviter que dans ce cas, l’enfant ne rachète l’intégralité de l’assurancevie et ne fasse des dépenses ‘inconsidérées’, il peut être convenu qu’à partir de son 18e anniversaire, l’enfant puisse racheter la police ‘au comptegouttes’. Le preneur d’assurance peut ainsi prévoir la cession d’un droit de
rachat partiel annuel (p.ex. 24.000 euros par an, soit 2.000 euros par mois)
afin de permettre tout au plus à l’enfant de financer ses études et de subvenir à ses besoins. Ce qui restera dans la police à l’échéance finale initialement convenue (p.ex. au 21e, 25e, … anniversaire de l’enfant) lui sera alors
versé à cette échéance comme ‘capital en cas de vie’.
En cas de décès du ‘sponsor’ pendant la durée de la police ou même dans une période de trois ans après son terme, des droits de succession sont dus. Nous pouvons
néanmoins déduire d’un ruling fiscal du 18 juin 2013 qu’une ‘police ABBA’ (et
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selon nous aussi une assurance à terme fixe, mais pas p.ex. une ‘configuration
AAB’ classique) peut bénéficier du régime des droits de donation linéaires libératoires. Il est toutefois requis que du vivant du ‘sponsor’, l’enfant ait accepté le bénéfice et que la police ait été présentée au bureau d’enregistrement. Le droit fixe de
50 euros est dû au moment de l’enregistrement. Le droit de donation proprement
dit sera dû au moment de la liquidation ultérieure de la prestation d’assurance. Ce
droit ne s’élève qu’à 3% ou 7% en Région flamande et en Région bruxelloise et à
3,3%, 5,5% ou 7,7% en Région wallonne, en fonction du lien de parenté entre le
sponsor et le bénéficiaire, mais indépendamment du montant du capital. Ces droits
sont généralement beaucoup moins élevés que les droits de succession, surtout
pour les montants d’une certaine importance et/ou lorsque le ‘sponsor’ et le bénéficiaire ne sont pas proches parents.
Enfants de moins
de 5 ans
Contrairement à l’assurance à terme fixe, c’est l’enfant et non le ‘sponsor’ qui est
l’assuré dans une ‘configuration ABBA’. Jusqu’il y a peu, en raison de l’article 96
de la loi sur le contrat d’assurance terrestre, cette ‘configuration ABBA’ posait
problème lorsque l’enfant avait moins de cinq ans accomplis. Cet article interdisait
la conclusion de polices prévoyant des prestations en cas de décès d’un enfant de
moins de cinq ans accomplis. De telles polices étaient nulles et les assureurs et intermédiaires qui concluaient ou intervenaient dans la conclusion de tels contrats
risquaient même des sanctions pénales. C’est peut-être la raison principale pour
laquelle les assurances épargne et placement dans une ‘configuration ABBA’ n’ont
jusqu’à présent pas eu de succès en tant qu’alternative à une assurance à terme fixe
traditionnelle.
L’article 96 de la loi sur le contrat d’assurance terrestre a cependant été remplacé à
compter du 1er novembre 2014 par l’article 159 de la nouvelle loi du 4 avril 2014
relative aux assurances. Cette modification de loi marque un véritable tournant.
L’interdiction légale de prévoir des prestations en cas de décès d’un enfant de
moins de cinq ans disparaît. La loi habilite toutefois le Roi à imposer des conditions particulières pour de telles assurances. Le gouvernement précédent avait
néanmoins déjà laissé entendre qu’aucun A.R. n’était prévu pour interdire encore
quoi que ce soit. En l’absence d’A.R., l’interdiction susvisée a donc tout simplement cessé d’être au 1er novembre 2014. A compter de cette date, une assurance
épargne ou placement dans une ‘configuration ABBA’ peut donc aussi être
conclue sur la tête d’un enfant de moins de cinq ans.
■
Une assurance épargne ou placement dans une ‘configuration ABBA’ permet
de mettre en place une transmission différée et même modulée d’un patrimoine
à la ou aux générations suivantes.
Paul Van Eesbeeck
ouvriers – employés
Assurances maladie: quid de la
distinction ouvriers-employés ?
A compter de 2015, toute nouvelle différence de traitement en matière de pensions
complémentaires qui repose sur la distinction entre ouvriers et employés sera interdite. Mais qu’en est-il des assurances hospitalisation et incapacité de travail?
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Comparable aux
pensions
complémentaires
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Le nouvel article 14 de la LPC, tel que complété par la loi du 5 mai 2014, stipule
qu’en matière de pensions complémentaires, aucune nouvelle différence de traitement reposant sur la distinction entre ouvriers et employés ne pourra être introduite
à compter de 2015. Les différences existantes seront encore tolérées un certain
temps mais dès 2025, l’interdiction de discrimination devra produire son plein effet (voir Life & Benefits 2014, n° 4, p. 1). L’article 14 modifié de la LPC n’est pas
applicable aux assurances hospitalisation et aux assurances incapacité de travail
liées à l’activité professionnelle.
La situation au niveau des assurances incapacité de travail est pourtant très comparable à celle en matière de pensions complémentaires. Beaucoup d’entreprises prévoient uniquement une couverture revenu garanti pour leurs employés. Les ouvriers n’ont aucune couverture ou bénéficient seulement d’une intervention limitée
via un fonds sectoriel. Dans certaines entreprises, l’assurance hospitalisation ne
s’applique qu’aux seuls employés. Les ouvriers ne sont pas assurés ou le sont par
le biais d’une assurance hospitalisation sectorielle. Si les ouvriers pouvaient prétendre aux plans prévus pour les employés (et inversement), cela pourrait engendrer un coût important pour les employeurs.
Une double question se pose ici. Existe-t-il une norme à laquelle peut être confrontée la distinction entre ouvriers et employés en matière d’assurances soins de santé
et incapacité de travail ? Si oui, cette différence de traitement peut-elle résister à ce
contrôle anti-discrimination ?
Les assurances hospitalisation et incapacité de travail sont soumises aux lois antidiscrimination du 10 mai 2007, qui interdisent toute discrimination fondée sur des
‘critères protégés’ (sexe, âge, ...). Ces lois ne parlent pas des critères ‘ouvrier’,
‘employé’ ou ‘catégorie de personnel’. Ces lois anti-discrimination ne peuvent
donc servir de cadre de référence.
Article 45 de la
loi ONSS
L’article 45 de la loi ONSS (loi du 27 juin 1969 révisant l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs) stipule qu’un employeur
qui accorde volontairement des avantages complémentaires de sécurité sociale doit
les accorder sans distinction à tous les travailleurs appartenant à une même catégorie. Le caractère (non) pertinent de cet article a déjà fait couler beaucoup d’encre.
La loi du 15 mai 2014 a mis fin à cette discussion en matière de pensions complémentaires: l’article 45 de la loi ONSS stipule désormais qu’il ne s’applique pas aux
pensions complémentaires. Le législateur a ainsi voulu ‘mettre fin aux opinions
divergentes’ quant à la pertinence de l’article 45 de la loi ONSS. Il confirme également que l’article 45 de la loi ONSS n’a jamais visé les plans de pension complémentaire tels que nous les connaissons actuellement. Dans les mêmes travaux
parlementaires préparatoires, le législateur sème toutefois le trouble dans le secteur
et crée une insécurité juridique en déclarant que l’article 45 de la loi ONSS ‘est par
contre d’application aux assurances incapacité de travail et aux assurances hospitalisation’...
Selon nous, cette dernière affirmation est un exemple d’interprétation à rebours. Le
législateur ne visait nullement les assurances maladie au moment de la rédaction
de l’article 45 de la loi ONSS. L’intention était uniquement d’éviter l’octroi ou le
refus arbitraire de certains avantages sociaux occasionnels et volontaires aux travailleurs d’une même catégorie. Ce n’est que bien plus tard que le législateur a, par
la loi Colla du 6 avril 1995, instauré une interdiction générale de discrimination en
matière de pensions complémentaires. Ceci indique que cette interdiction (y compris pour d’autres avantages) n’était pas encore réglée à l’époque par la loi ONSS.
Les assurances maladie actuelles découlent par ailleurs du contrat de travail (ou
d’une C.C.T.) de sorte que leur caractère ‘volontaire’ peut être remis en question.
Un autre argument est que l’article 45 de la loi ONSS n’a jamais produit ses effets,
les arrêtés d’exécution nécessaires n’ayant jamais été pris. Enfin, aucune disposi-
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tion ne règle la relation avec les lois anti-discrimination spécifiques de 2007, ce qui
indique aussi que seules les lois de 2007 constituent le cadre de référence de nondiscrimination pour les assurances maladie liées à l’activité professionnelle. Le
passage précité des travaux parlementaires préparatoires de la loi du 15 mai 2014
n’a en outre aucune valeur réglementaire formelle. Il existe donc encore plusieurs
éléments démontrant que l’article 45 de la loi ONSS n’est pas d’application aux
assurances hospitalisation et incapacité de travail complémentaires.
Il n’est toutefois pas exclu qu’un tribunal confronte une différence reposant sur la
distinction entre ouvriers et employés en matière d’assurances maladie complémentaires à l’article 45 de la loi ONSS.

L’article 45 de la loi ONSS a déjà été appliqué à des assurances maladie
liées à l’activité professionnelle (voir notamment Cour du Travail Liège, 9
décembre 2011, RG 2011/1827).

Les travaux parlementaires préparatoires de la loi du 15 mai 2014 semblent confirmer la pertinence de l’article 45 de la loi ONSS pour ces assurances. Bien que ces dispositions n’aient pas un caractère contraignant, il
est possible qu’un tribunal se laisse guider par ces dispositions.
Examinons par conséquent les conclusions auxquelles mènerait une application,
selon nous incorrecte, de l’article 45 de la loi ONSS.
Non pertinent pour les
plans sectoriels
L’article 45 de la loi ONSS vise les employeurs et non les ‘organisateurs’. La responsabilité d’un organisateur d’une assurance hospitalisation sectorielle ne peut
donc être mise en cause sur la base de cet article. Inversement, lorsque les ouvriers
bénéficient d’une couverture hospitalisation sectorielle et que les employés ne bénéficient pas d’une telle couverture, l’employeur ne peut pas non plus être mis en
cause. Il en va de même pour les assurances ou prestations invalidité sectorielles,
plutôt rares sur le terrain, payées par un fonds sectoriel.
Prestations au niveau
de l’entreprise
Reste encore la situation où il existe une différence de traitement entre ouvriers et
employés au niveau de l’entreprise. Ces assurances sont presque toujours intégralement financées par des primes patronales. Une différence de prime patronale
nominale n’est pas pertinente dans le contexte d’une couverture frais médicaux ou
revenu garanti: ce qui compte, c’est la prestation assurée. Par conséquent, le
contrôle se limite aux situations où 1) il n’y a pas de plan pour les ouvriers ou les
employés ou où 2) la couverture diffère pour les deux catégories au niveau de
l’entreprise. La seconde situation est très rare en matière de plans hospitalisation.
Les différences dans le montant de la garantie invalidité résultent souvent aussi du
fait que la rémunération de base des ouvriers est moins élevée. En cas
d’application d’une même formule et d’un salaire de référence similaire, il n’est
bien entendu pas question d’une différence de traitement.
Pas la même catégorie
L’article 45 de la loi ONSS vise uniquement les différences de traitement au sein
d’une même catégorie de travailleurs. Or il existe de bons arguments permettant
d’affirmer que malgré quelques harmonisations récentes (p.ex. au niveau des règles en matière de préavis) et la suppression progressive des différences en matière
de pensions complémentaires, les ouvriers et les employés constituent toujours des
catégories distinctes au sens de l’article 45 de la loi ONSS.
Les ouvriers et les employés sont encore toujours reconnus par la loi comme des
catégories distinctes de travailleurs. Les règles légales en matière de salaire garanti
sont elles aussi différentes. En 2014, il subsiste encore de nombreuses différences
entre ouvriers et employés, par exemple en matière de rémunération directe,
d’organisation sectorielle, etc.
Le fait que le législateur n’ait pas élaboré de règles pour les assurances maladie
mais qu’il se soit malgré tout penché sur la problématique dans le cadre des tra-
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vaux préparatoires de la loi du 15 mai 2014 montre par ailleurs qu’une différence
en matière d’avantages complémentaires était ressentie comme problématique uniquement à la lumière de l’article 14 de la LPC (qui vise une distinction entre travailleurs) et pas dans le contexte de l’article 45 de la loi ONSS (qui vise une différence au sein d’une même catégorie). Appliquer une différence de traitement entre
ouvriers et employés ne constitue donc pas une violation de l’article 45 de la loi
ONSS ou un comportement fautif susceptible de donner lieu à une indemnisation.
Enfin, (outre les arguments susmentionnés) il existe encore d’autres éléments permettant de légitimer une différence de traitement. En cas d’invalidité, les employés
subissent généralement une chute de revenus plus importante (les indemnités AMI
sont plafonnées) que les ouvriers. D’autre part, les ouvriers ont généralement un
profil de risque plus élevé, et l’harmonisation soudaine (surtout en matière
d’assurances invalidité) entraînerait un surcoût important. Par ailleurs, le législateur fait lui-même une différence de traitement entre ouvriers et employés au niveau de la période couverte par le salaire garanti.
On pourrait objecter qu’une formule step rate est également adéquate pour tenir
compte d’une différence de chute de revenus. Le profil de risque différent entre
ouvriers et employés est en partie compensé par l’assurance légale accidents du
travail, et la prime nominale pour les ouvriers ne doit pas forcément être plus élevée que celle pour les employés. Bien que le taux de cotisation (% de la rente assurable) soit souvent plus élevé, la différence nominale de prime est généralement
limitée puisque la base de perception est également plus faible.
Malgré ces possibles arguments contraires, il nous semble que ni au moment de la
rédaction de l’article 45 de la loi ONSS, ni au moment de son adaptation en 2014,
l’objectif n’était de traiter (subitement) de la même manière les ouvriers et les employés au niveau des assurances maladie liées à l’activité professionnelle.
Analyse des risques
pour les entreprises
Surtout au vu du passage dans les travaux parlementaires préparatoires, déclarant
l’article 45 de la loi ONSS applicable aux couvertures de risques, il règne actuellement au sein du secteur une confusion quant à savoir si une différence peut encore être faite entre ouvriers et employés dans les couvertures de risques complémentaires. A la lumière de cette insécurité juridique, l’employeur a-t-il intérêt à tout
harmoniser sans tarder ou peut-il attendre encore un peu?
En matière de pensions de retraite complémentaires, un employeur pouvait voir
venir sans prendre trop de risques, soit en attendant un précédent (qui n’est pas
venu) où un juge conclurait que la distinction entre ouvriers et employés est discriminatoire, soit en attendant un cadre légal (qui a finalement été mis en place).
La pension de retraite complémentaire peut en effet être rectifiée (au besoin avec
effet rétroactif) par des versements supplémentaires (sauf en cas de décès, si la
couverture décès n’est pas égale à la réserve d’épargne). Les choses sont différentes en matière de couvertures de risque (hospitalisation ou perte de revenus). Une
fois le risque réalisé, il n’est plus possible de l’assurer par la suite par le versement
d’une prime de rattrapage. En cas de discrimination, il est possible que
l’employeur soit condamné à payer le montant qui aurait correspondu à la prestation assurée (la rente d’invalidité ou les frais d’hospitalisation). Au lieu d’un petit
risque certain (la prime), l’employeur est confronté à un gros risque incertain (le
dommage).
Cela ouvre-t-il la porte à un déferlement de réclamations? Nous n’en arriverons
pas là selon nous. Tant que le risque ne s’est pas réalisé, un ouvrier qui ne bénéficie pas de la couverture prévue pour les employés ne pourra bien entendu pas réclamer les prestations telles qu’applicables aux employés. Il pourra tout au plus
exiger son affiliation à l’assurance-maladie liée à l’activité professionnelle, prévue
pour les employés. Etant donné qu’il existe tout de même de bons arguments pour
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défendre la différence de traitement, le risque nous semble faible qu’un travailleur
s’adresse au tribunal du travail avant la survenance effective d’un dommage.
Qu’en est-il toutefois si le risque s’est réalisé et que l’ouvrier réclame une indemnisation égale à la prestation assurée dans le plan pour les employés? Vu l’état actuel de la législation, le risque semble faible que ce travailleur puisse exiger avec
succès une indemnisation. L’article 45 de la loi ONSS ne s’applique pas selon
nous. Dans la mesure où il s’appliquerait malgré tout, le contrôle antidiscrimination ne permettrait pas selon nous de conclure au caractère illicite d’une
différence de traitement dans l’état actuel de la législation.
Considération finale
Il est souhaitable que le législateur lève l’insécurité juridique concernant
l’article 45 de la loi ONSS. Il pourrait p.ex. exclure également les assurances maladie liées à l’activité professionnelle de son application. Il pourrait éventuellement
aussi élaborer des règles similaires à celles applicables en matière de pensions
complémentaires. Beaucoup de couvertures incapacité de travail qui sont étroitement liées à un engagement de pension (p.ex. en raison du financement par un
budget de prime global) seront peut-être automatiquement ‘entraînées’ dans le trajet d’harmonisation défini par le législateur pour les pensions complémentaires.
Joris Beernaert
nouvelle loi relative aux assurances
Répartition équitable du bénéfice
fixé de manière discrétionnaire
En pratique, un assureur décide de manière discrétionnaire de l’attribution d’une
participation aux bénéfices. Cela signifie qu’il n’existe pas de droits contractuels à
une participation aux bénéfices et que l’assemblée générale des actionnaires de
l’assureur décide librement dans quelle mesure le bénéfice éventuel sera attribué
aux contrats d’assurance. Malgré le pouvoir décisionnel discrétionnaire des actionnaires d’attribuer ou non un bénéfice, ils sont néanmoins liés, pour sa répartition, au principe d’équité.
Principe d’équité
L’article 51, §3 de la nouvelle loi du 4 avril 2014 relative aux assurances stipule
ceci: “La répartition, entre les contrats d'assurance distincts, du bénéfice attribué à la collectivité des contrats d'assurance doit s'effectuer dans le respect de
l'équité entre preneurs d'assurance”. Cette disposition s’applique depuis le
1er novembre 2014 pour les nouveaux contrats et à compter du 1er décembre 2015
pour les contrats existants.
L’exposé des motifs de la nouvelle loi précise à cet égard que “l’assureur peut,
lors de la répartition entre les contrats distincts, tenir compte par exemple de la
contribution individuelle des contrats concernés aux bénéfices d’investissement,
de mortalité et/ou de gestion, ainsi que de la tarification individuelle, en ce compris le taux d’intérêt garanti contractuellement ou non”.
L’inconvénient d’une telle législation basée sur un principe, qui n’est de surcroît
commenté que de manière vague dans l’exposé des motifs, est que personne ne sait
exactement comment l’appliquer en pratique. Le législateur part apparemment du
principe que, sous l’influence de la doctrine et de la jurisprudence, des règles pratiques de conduite se développeront. Mais il faudra du temps avant que de telles
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règles de conduite ne se concrétisent. Par ailleurs, la notion d’‘équité’ est une notion subjective qui n’est en outre pas immuable dans le temps: ce qui est ‘équitable’ aujourd’hui ne le sera peut-être plus demain.
Questions à propos
de la répartition
des bénéfices
Une bonne information
précontractuelle
La répartition des bénéfices peut faire l’objet de nombreuses questions dont il peut
être débattu indéfiniment. En voici quelques exemples:
 Un assureur doit-il attribuer une ‘participation aux bénéfices intérimaire’ (participation aux bénéfices au prorata) lorsqu’une personne rachète son contrat
en mars, soit quelques semaines avant que l’assemblée générale fixe la participation aux bénéfices pour l’année précédente? Un preneur d’assurance peutil dans ce cas exiger une participation aux bénéfices équitable pour l’année
civile précédente et pour l’année en cours?
 Un assureur peut-il attribuer plus ou moins de bénéfices à certains produits,
pour des raisons commerciales? Un preneur d’assurance ainsi défavorisé peutil alors exiger une répartition équitable des bénéfices en renvoyant aux actions
commerciales prévues pour les autres contrats?
 Un assureur peut-il rattacher la participation aux bénéfices à la condition
qu’au cours de l’année considérée, un montant minimal de primes ait été
payé? Un preneur d’assurance peut-il prétendre qu’il n’est pas équitable de ne
pas lui octroyer une participation aux bénéfices pour cette raison?
 Un assureur peut-il attribuer un bénéfice supplémentaire à des assurances de
groupe parce que ces produits sont soumis à la garantie de rendement LPC de
3,25%? Les clients qui ne sont pas affiliés à l’assurance de groupe peuvent-ils
exiger une participation aux bénéfices similaire?
 …
Nous ne voulons (et ne pouvons) pas nous prononcer sur ces questions relatives à
la participation aux bénéfices. Nous pensons que pour chacune d’elles, il existe des
arguments pour et des arguments contre. Il ne faut cependant pas être devin pour
prédire que, vu les rendements de placement très faibles actuellement et les attentes de participation aux bénéfices éventuellement non satisfaites qui en découlent,
les discussions avec des clients mécontents pourraient s’étendre.
Il est donc judicieux de bien informer le client dans la phase précontractuelle sur le
concept de la participation aux bénéfices (fixée de manière discrétionnaire), de
manière à ce que rien ne puisse être reproché à l’assureur sur ce plan.
■
La participation aux bénéfices est un concept fort permettant aux assureurs
prudents d’octroyer ultérieurement aux clients une part honnête du gâteau. Il
importe de bien communiquer et de faire preuve d’équité en la matière.
Luc Vereycken
Rédacteur en chef: Paul Van Eesbeeck
Comité de rédaction: Isabelle De Somviele, Paul Roels, Paul Van Eesbeeck, Luc Vereycken.
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