l`exemple de l`interprétation du pronom "lui"

Transcription

l`exemple de l`interprétation du pronom "lui"
L'origine des difficultés de compréhension de l'écrit à l'école
primaire : l'exemple de l'interprétation des pronoms personnels
objets "lui" au CE2.
Introduction
La lecture étant une activité complexe, les difficultés en lecture peuvent
avoir de multiples origines. On peut tout d'abord séparer celles qui
résultent
d'erreur
de
décodage
de
celles
mettant
en
jeu
la
compréhension. En effet, il existe en relatif consensus pour diviser la
lecture en deux composantes principales. L'une, spécifique à l'activité de
lecture, est appelée décodage, et l'autre, qui apparaît aussi dans le
traitement du langage oral, est appelée compréhension.
Cette distinction à conduit certains auteurs ( Gough, Hoover et Peterson,
1996) à modéliser la lecture comme le produit du décodage et de la
compréhension représenter par la formule : l = d x ci où d et c peuvent
évoluer entre 0 et 1.
D'autres, comme Pearson (2000), ont proposé d'ajouter une troisième
composante pour prendre en compte les stratégies de compréhension
utilisées par les lecteurs. Ce modèle complexe peut être résumé par la
formule l = d x c x stratcii. Pearson ne fournit pas de preuve
expérimentale directe de la supériorité de son modèle sur le modèle
simple. Il s'appuie sur les résultats de recherches sur l'enseignement de
stratégies qui montrent que le niveau de compréhension en lecture peut
être amélioré par un entraînement à l'utilisation de stratégies employées
par les bons lecteurs (Palincsar & Brown, 1984, Bauman, 1986,
O'sullivan & Pressley, 1994).
On peut constater que dans ces deux modèles, lorsque le décodage est
maîtrisé, c'est à dire, lorsque d=1, la lecture dépend essentiellement de
la compréhension (et des stratégies de compréhension si on soutient le
modèle complexe de la lecture). Après plusieurs années d'apprentissage
du code écrit, chez la majorité des apprentis lecteurs, la part de la
compréhension dans la réussite de la lecture va donc être majeure. C'est
alors dans les difficultés de compréhension qu'il faut rechercher une des
sources principales des problèmes en lecture. Plusieurs domaines de
l'activité de compréhension semblent mal maîtrisés par les lecteurs qui
présentent des difficultés de compréhension:
Tout d'abord une faible habileté à produire des inférences. Les sujets qui
ont le plus de difficultés à comprendre des textes sont aussi ceux qui
produisent le moins d'inférences (Barnes et Dennis, 1996). Il paraît
possible que, soit ces sujets ne réalisent pas qu'il est nécessaire de
produire des inférences pour extraire la signification du texte, soit ils
n'arrivent pas à accéder aux connaissances impliquées et à les intégrer
avec les informations textuelles. De même ces sujets ont des difficultés à
interpréter les anaphores (Yuill et Oakhill, 1991; Bianco, 1996) dont le
traitement implique aussi l'accès à des informations stockées en
mémoire ainsi qu'un traitement de ces informations.
Une seconde source de difficultés est une mauvaise appréhension de la
structure textuelle. Selon les résultats obtenus par Cain (1996) avec des
enfants de 8 ans, il semble que les plus faibles compreneurs aient un
déficit de connaissances sur la façon dont les textes, particulièrement les
narrations, sont organisés. De même, ils savent moins bien que les
autres lecteurs utiliser les informations présentes dans les titres. Or ces
deux types de déficits peuvent affecter la construction de la
représentation des textes en empêchant l'organisation et la mise en
relation des informations contenues dans différentes parties du texte
(Idol, 1987).
Une troisième source de difficultés potentielles est la gestion de la
compréhension. Les faibles compreneurs ont des difficultés à identifier
les incohérences et à évaluer leur propre niveau de compréhension
(Brand-Gruwel et col., 1998). Il semble que ces difficultés proviennent
d'une tendance à ne retenir qu'une interprétation unique du texte
(Ruffman, 1996). Les informations qui ne correspondent pas avec cette
interprétation ne sont pas prises en compte pour la construction de la
représentation du texte.
Il semble que l'un des points communs à ces sources de difficultés
potentielles soit la capacité de la mémoire de travail (Perfetti, Marron et
Foltz, 1996; Just et Carpenter, 1992). En effet, l'une des caractéristiques
des sujets qui éprouvent le plus de difficultés à comprendre un texte est
leur faible capacité à intégrer des informations provenant de différentes
parties du texte. Ce type de tâches implique à la fois une composante de
stockage d'informations et une composante de traitement qui sont toutes
deux gérées en mémoire de travail. Plus la capacité de la mémoire de
travail est faible, plus la concurrence entre stockage et traitement est
forte. C'est à dire que les sujets qui ont une mémoire de travail de faible
capacité, ce qui semble être une des caractéristiques des sujets qui
comprennent le moins bien les textes, ne pourront pas à la fois maintenir
un grand nombre d'informations en mémoire et effectuer simultanément
des traitements sur ces informations. Selon Oakhill et Yuill (1996, p82)
"les bons compreneurs sont meilleurs pour produire des inférences,
gérer leur compréhension, interpréter des anaphores et extraire la
structure narrative parce qu'ils ont une mémoire de travail plus efficace".
Toutefois, les différences de capacité de la mémoire de travail ne
peuvent
pas
rendre
compte
à
elles
seules
des
différences
interindividuelles de compréhension. Et d'autres aspects du traitement
du langage, comme les capacités métacognitive, sont souvent évoqués
(Cornoldi, De Beni et Pazzaglia, 1996). En fait, il semble que touts ces
facteurs
peuvent
potentiellement
induire
des
difficultés
de
compréhension, mais qu'ils ne peuvent pas forcément être tous invoqués
pour expliquer le faible niveau de compréhension d'un lecteur particulier
( voir Cornoldi, De Beni et Pazzaglia, 1996)
L'un des dispositifs textuels faisant intervenir aussi bien le stockage
d'informations que leur traitement est l'anaphore. On dit qu'il y a
anaphore lorsqu'un terme doit être interpréter en référence à un autre
terme déjà apparu dans le discours pour acquérir une signification.
Parmi les différentes classes de dispositifs anaphoriques, les pronoms
ont
particulièrement
été
étudiés.
Ils
possèdent
en
effet
des
caractéristiques intéressantes pour la recherche sur le traitement des
anaphores. Tout d'abord, ils possèdent une signification propre
minimale. Cette signification se réduit au fait qu'ils renvoient à un
référent qui possèdent généralement le même genre et le même nombre
que le pronom. Leur interprétation est donc déterminée par la relation
anaphorique. Ensuite, ce sont des mots courants, morphologiquement
simples, qui possèdent des propriétés syntaxiques bien définies et dont
le décodage est maîtrisé de façon précoce. Enfin, à l'école primaire, un
grand nombre d'élèves éprouve des difficultés pour interpréter les
pronoms pendant la lecture (Rémond, 1993, Bianco, 1996). On dispose
d'un ensemble d'informations sur la façon dont les enfants interprètent
les anaphores et sur les stratégies qu'ils emploient pour déterminer la
référence des pronoms personnels sujets aussi bien à l'oral qu'à l'écrit
(Oakhill & Yuill, 1986, Garrod & Sanford, 1994). D'une façon générale,
les enfants fondent tout d'abord leurs interprétations sur la saillance des
référents potentiels. Dans un premier temps, ils prennent seulement en
compte la saillance locale, ce qui donne lieu au choix du référent le plus
récemment cité, puis au choix du référent possédant le statut syntaxique
le plus central localement (l'agent). On observe ensuite la prise en
compte de la saillance globale des référents, avec le choix du
personnage principal comme référent des pronoms sujets. Parallèlement
à cette évolution, on assiste à l'utilisation des critères morphologiques de
genre et de nombre pour déterminer la référence des pronoms. Ce n'est
que tardivement que les enfants acquièrent la capacité d'utiliser les
informations sémantiques pour déterminer la référence des anaphores
pronominales. On dispose par contre de peu d'informations sur
l'interprétation des pronoms compléments d'objets. Les résultats
expérimentaux
montrent
toutefois
que,
pour
les
enfants,
leur
interprétation est plus difficile que celles des pronoms sujets (Rémond,
1993), et que ces difficultés pourraient perdurer jusqu'à la fin de l'école
primaire (Lima et Bianco, 1999).
Ainsi, les résultats obtenus par Lima et Bianco (1999) montrent que les
élèves de CE2 et de CM2 interprètent correctement moins de 40% des
pronoms "lui" lors de la lecture de textes courts. Le résultat majeur
observé lors de cette expérience est que le pronom "lui" est
majoritairement interprété en référence au sujet syntaxique de la phrase
dans laquelle le pronom apparaît.
Les auteurs avaient formulé deux hypothèses pour rendre compte de ce
résultat. La première repose sur une mauvaise utilisation des propriétés
syntaxiques du pronom "lui" qui entraînerait une interprétation réfléchie.
La seconde fait intervenir l'effet du traitement du pronom "il" qui
précédait le "lui", et qui entraînerait soit une diminution des ressources
cognitives disponibles, soit une augmentation de l'accessibilité du
référent du "il". Cette expérience a donc été conçue pour tenter de
déterminer,
parmi
ces
deux
hypothèses,
celle
qui
conditionne
l'interprétation réfléchie du pronom "lui" conjoint.
exemple 1
a) Pierre regardait devant lui.
b) Pierre regardait Paul. Il était assis en face de lui.
c) Pierre regardait Paul. Il lui souriait.
L'analyse des propriétés syntaxiques du pronom "lui" peut permettre de
cerner les raisons qui pourraient conduire les enfants à l'interpréter de
façon réfléchie. En effet, contrairement au "le" qui, dans sa forme
pronominale, est toujours employé comme pronom objet et n'occupe
qu'une fonction dans le système des pronoms personnels, le pronom
"lui" peut être employé de manière réfléchie (exemple 1a) ou non
réfléchie (exemple 1b et c). Il peut être conjoint, donc précéder le verbe
(exemple 1c), ou être un pronom disjoint placé après le verbe (exemple
1a et b). C'est à dire que sa position dans la phrase n'est pas constante.
Il faut noter que, lorsqu'il est conjoint, il occupe une position entre le sujet
et le verbe qui est celle de certains pronoms réfléchis comme "se".
On peut penser que ces multiples "visages" du pronom "lui" n'en
facilitent pas l'interprétation. Le fait qu'il puisse être employé de façon
réfléchie ou non réfléchie, et que, lorsqu'il est non réfléchi, il puisse
occuper la position habituelle de certains pronoms réfléchis pourrait
conduire les enfants à attribuer au pronom "lui" des propriétés
syntaxiques erronées. Ces propriétés particulières pourraient amener les
jeunes lecteurs à interpréter le pronom "lui" uniquement de façon
réfléchie. En effet, des travaux s'appuyant sur la théorie du
gouvernement et du liage (Chomsky, 1987) tendent à montrer que dans
les langues qui acceptent un usage réfléchi et non réfléchi des pronoms,
les enfants commenceraient par interpréter tous les pronoms, y compris
ceux qui sont toujours non réfléchis, de façon réfléchie (voir Jakubowicz
1995). Or, cette interprétation réfléchie de l'ensemble des pronoms
pourrait se prolonger jusqu'à 6 ou 8 ans, selon les études (Chien et
Wexler, 1990; Koster, 1995).
Expérience
Hypothèses
1- Notre première hypothèse expérimentale est que les enfants
interprètent le pronom "lui" de façon réfléchie, et donc, que ce n'est pas
la présence d'un pronom sujet "il" qui entraîne l'interprétation en faveur
du sujet que nous observons dans l'expérience précédente.
Pour tester cette hypothèse, on comparera l'incidence de la présence de
la forme nominale ou pronominale du sujet grammatical précédant le
pronom "lui". En effet, On peut supposer que si les élèves interprètent le
pronom "lui" de façon réfléchie, cette interprétation se maintiendra qu'elle
que soit la forme, nominale ou pronominale, du sujet syntaxique
précédant le pronom.
2-Notre seconde hypothèse expérimentale stipule que si le pronom "lui" ,
en tant que pronom libre, est interprété sur la base de la saillance des
référents, alors, lorsque le matériel comporte la séquence "il lui",
l'antécédent rendu saillant par l'interprétation de "il", deviendra
l'antécédent privilégié pour interpréter "lui".
Pour tester cette hypothèse, on cherchera à déterminer l'impact de la
fonction syntaxique, sujet ou objet, de l'antécédent du pronom "lui" sur
son niveau d'interprétations exactes. En effet, si les sujets emploient une
stratégie d'interprétation faisant intervenir la saillance des référents en
présence, ils doivent référer le pronom "lui" au référent qu'ils ont attribué
au pronom "il". Lima et Bianco (1999) ont montré que le pronom "il" était
mieux interprété lorsqu'il référait au sujet de la phrase précédente. Nous
devrions donc observer plus d'erreurs d'interprétation des pronoms "lui"
lorsque l'antécédent des pronoms "il" occupe la fonction de sujet, et que
l'antécédent du "lui" occupe la fonction d'objet.
3-Enfin, notre troisième hypothèse expérimentale avance que les
questions faisant intervenir une interprétation explicite du pronom sont
responsables des faibles performances observées dans l'expérience de
Lima et Bianco (1999).
En effet, La question posée dans cette expérience: "Indiquez sous le
pronom mis en gras, le mot qu'il remplace" implique une interprétation
explicite du pronom. Cela nécessite au minimum de la part du sujet la
mise en œuvre d'un processus d'interprétation du pronom. Or, les
travaux de Greene, Mc Koon et Ratcliff (1992) montre que la rencontre
avec un pronom n'implique pas toujours l'attribution d'un référent unique.
Selon les auteurs l'attribution de la référence se fonde sur l'accessibilité
des entités présentes dans le focus attentionnel et sur leur compatibilité
morphologique avec l'anaphore. L'entité morphologiquement compatible
la plus accessible sera choisie comme référent. Lorsque plusieurs
entités, ayant une accessibilité proche dans le modèle discursif, entrent
en compétition pour l'attribution de la référence du pronom, la proposition
contenant le pronom sera mise en relation, de façon automatique, avec
chaque référent potentiel. L'interprétation définitive du pronom
sera
alors soit différée jusqu'à ce que le contexte fournisse des éléments
permettant de fixer l'interprétation, soit déterminée à l'aide d'un
processus stratégique. Lorsque que la détermination précise de la
référence d'un pronom n'est pas essentielle à la compréhension du
discours, elle pourrait ne pas être effectuée (Webber, 1983). On peut
supposer que les questions explicites sur la référence des pronoms
peuvent contraindre les sujets à produire une interprétation précise en
s'engageant
dans
un
processus
stratégique.
Alors
que
cette
interprétation pourrait ne pas être effectuée lors de la simple lecture du
texte.
On a cherché à éprouver cette hypothèse en posant des questions
nécessitant une interprétation explicite des pronoms "lui", et des
questions ne nécessitant qu'une interprétation implicite de ces pronoms
qui peut alors se fonder uniquement sur le contexte sémantique. Si notre
hypothèse est exacte, c'est à dire, si les enfants ne s'engagent pas
spontanément dans un processus d'interprétation des pronoms "lui" mais
qu'ils se fondent sur le contexte sémantique pour comprendre les
phrases incluant un "lui", alors, les questions implicites induiront plus de
réponses exactes que les questions explicites.
Matériel expérimental
Exemple 2 : antécédent sujet
a) Alain demande à François de l’aider à effacer le tableau. Il lui
refuse ce service.
A qui refuse-t-on un service ?
b) Alain demande à François de l’aider à effacer le tableau.
François lui refuse ce service.
Quel mot a été remplacé par lui ?
Exemple 3 : antécédent objet
a) Pendant la leçon d’histoire, Marc questionne André sur la vie au
moyen âge. Marc lui demande le nom d’un roi.
A qui demande-t-on le nom d’un roi ?
Le matériel est composé de deux tests comprenant chacun 12
paragraphes de deux phrases. La première phrase introduit deux
personnages sous forme nominale, l'un a la fonction de sujet
grammatical, l'autre celle d'objet. Cette phrase contient un verbe de
valence neutreiii. Dans la phrase suivante, un des personnages est repris
avec la fonction d'objet indirect sous la forme pronominale "lui". Ce
pronom a soit le sujet syntaxique (Exemple 2 a et b), soit l'objet
syntaxique de la phrase précédente comme antécédent (Exemple 3 a).
Selon le test, l'autre personnage occupe la fonction de sujet soit sous la
forme pronominale "il" (Exemple 2 a) soit par reprise de la forme
nominale (Exemple 2 b et 3a). La question posée est soit une question
explicite (Exemple 2 b) soit une question implicite (Exemple 2 a et 3 a).
Procédure
Les passations ont eu lieu collectivement en classe. Pendant la première
séance les élèves ont complété l'un des deux protocoles. Afin de
s'assurer que les élèves comprenaient bien la tâche demandée, trois
exemples ont été présentés collectivement avant la passation des tests.
Dans six énoncés, il fallait produire une interprétation explicite du
pronom "lui", dans les six autres, c'était une interprétation implicite qui
était demandée. Lors d'une seconde séance, les élèves ont répondu à
un test de compréhension en lecture (le test de lecture silencieuse de
l’INETOP).
Plan d'expérience
Trois variables indépendantes ont été manipulées au cours de cette
expérienceiv.
-la forme de Reprise de l'antécédent non pertinent qui occupe la fonction
de sujet syntaxique dans la phrase contenant le pronom "lui". Le sujet
pouvait être soit un pronom "il" (R1), soit une répétition du nom ou du
prénom (R2).
-la fonction syntaxique de l'antécédent pertinent qui pouvait occuper la
fonction sujet (A1) ou la fonction objet (A2).
-la formulation de la question qui pouvait soit entraîner un traitement
implicite du pronom "lui" (Q1), soit impliquer un traitement explicite du
pronom "lui" (Q2).
La variable dépendante est le nombre d'interprétations correctes (entre 0
et 12).
Sujets
66 élèves de CE2 scolarisés dans des écoles situées en zone rurale ont
participé à l'expérience. 36 élèves (âge moyen 9 ans) ont reçu des
protocoles avec sujet pronominal et 30 élèves (âge moyen 8 ; 8 ans) ont
reçu des protocoles avec sujet nominal. Les sujets des deux groupes
obtiennent des scores au test de compréhension en lecture qui ne sont
pas significativement différents.
Résultats
Le dépouillement à porté sur le nombre d'interprétations correctes. Les
analyses statistiques ont été réalisées à l'aide d'une procédure d'analyse
de la variance (ANOVA). Les différences observées sont considérées
comme statistiquement significatives lorsque la probabilité de faire une
erreur en affirmant cette différence est inférieure à 5%. On admettra une
tendance à la significativité des différences observées lorsque la
probabilité est comprise entre 5% et 10%.
Antécédent
Antécédent
sujet
objet
Sujet nominal
67%
72%
69%
Sujet pronominal
41%
42%
42%
Total
54%
57%
56%
Total
Tableau I : pourcentage de réponses correctes en fonction de la forme
du sujet et de la fonction de l'antécédent
L'analyse des résultats permet d'affirmer que les pronoms "lui" sont
globalement mal interprétés puisqu'on obtient 56% d'interprétations
correctes pour l'ensemble des questions (voir Tableau I).
Les résultats ne confirment pas notre première hypothèse puisqu'on
observe une différence significative du niveau d'interprétations correctes
selon la forme nominale ou pronominale du sujet. Le pronom "lui" n'est
donc pas interprété comme un pronom réfléchi. Cette différence permet
d'affirmer que la présence d'un pronom sujet "il" entrave l'interprétation
du pronom objet "lui".
La fonction syntaxique de l'antécédent du "lui" n'a pas d'influence sur
son interprétation. Puisqu'en moyenne 54% des pronoms à antécédent
sujet et 57% des pronoms à antécédent objet sont correctement
interprétés. Ce résultat se maintient lorsque le sujet est sous forme
pronominal puisqu'on obtient 45% de réponses correctes lorsque
l'antécédent a la fonction de sujet et 45% avec les antécédents objets .
Cela démontre que ni la fonction de l'antécédent du pronom "il" qui
influence le niveau d'interprétations correctes de ce pronom, ni celle de
l'antécédent du "lui", n'entraîne de variation de l'interprétation du "lui". On
peut en conclure que l'attribution de la référence du "lui" ne se fonde pas
sur la saillance des référents.
On peut alors supposer que c'est l'association des deux pronoms "il" et
"lui" qui entraîne une chute des performances lorsque le sujet est sous
forme pronominal. Cette diminution du niveau d'interprétations exactes
pourrait être due à une diminution des ressources cognitives provoquée
par le traitement successif des deux pronoms.
On observe que la majorité des sujets testés présente des difficultés
spécifiques pour interpréter explicitement les pronoms "lui". En effet, ces
sujets obtiennent un meilleur score aux questions implicites qu'aux
questions explicites (Q1>Q2). Ils produisent 69% de réponses correctes
aux questions implicites alors qu'ils n'en donnent que 42% pour les
questions
explicites.
On
peut
donc
supposer
que
nos
sujets
expérimentaux ne produisent une interprétation des pronoms "lui" que
lorsqu'on le leur demande explicitement. Dans ce cas, ils réfèrent le
pronom "lui" au sujet qui le précède dans plus de 50% des cas. Nous
avons vu que cette interprétation ne découle pas d'une utilisation
réfléchie du pronom, ni de la saillance des référents potentiels. Elle
pourrait alors se fonder sur le choix du référent le plus récent.
100,0%
80,0%
60,0%
il lui
40,0%
nom lui
20,0%
0,0%
implicite
explicite
Figure 1: pourcentage de réponses correctes en fonction du type de
questions et de la forme du sujet
Il existe une interaction entre la forme de reprise du sujet et le type de
question, cette interaction ne s'exprime qu'en tendance. L'écart entre le
niveau d'interprétations correctes aux questions explicites et implicites
est d'autant plus important que le nombre de pronoms à traiter dans la
phrase est élevé (voir Figure 1). La présence du pronom "il" peut
concourir de deux façons à cette dégradation du niveau d'interprétations
correctes. Tout d'abord, le traitement de la forme pronominale du sujet
peut augmenter de façon suffisante l'accessibilité de son référent pour
qu'il soit préférentiellement choisi par un processus d'attribution
automatique de la référence à l'entité la plus accessible. Ensuite, la
diminution des ressources cognitives disponibles, due au traitement
quasi-simultané de deux pronoms, peut empêcher l'utilisation d'un
processus stratégique d'interprétation.
Après cette première analyse, on peut affirmer qu'en majorité les élèves
de CE2 étudiés n'interprètent pas le pronom "lui" comme un pronom
réfléchi. Leurs interprétations ne semblent pas fondées sur la saillance
des référents potentiels. Avec notre matériel textuel, il semble que,
lorsqu'on ne les incite pas à enclencher un processus d'interprétation,
les sujets ne fixent pas la référence des pronoms "lui". Quand plusieurs
entités d'accessibilité équivalente sont présentes dans le focus
attentionnel, le processus d'attribution automatique de la référence ne
permettrait pas de dégager un référent unique. Dans le modèle discursif,
Le rôle des différentes entités serait fixer par le contexte sémantique
global. Lorsqu'une entité devient plus accessible que les autres,
l'attribution automatique de la référence conduit à un résultat unique. Le
"lui" serait interprété en référence à cette entité.
Toutefois, l'analyse que nous venons de présenter repose sur des
résultats moyens. Comme les résultats présentés ci-après vont
permettre de l'illustrer, les élèves de CE2 étudiés n'interprètent pas le
pronom "lui" de façon homogène.
Sujet grammatical sous forme nominale
Lorsqu'on se centre sur l'analyse des résultats des élèves qui devaient
interpréter des pronoms "lui" précédés d'un nom, on note que les
lecteurs testés présentent des variations de performances importantes,
puisqu'ils fournissent entre 0% et 100% de réponses exactes avec une
moyenne de 68.3% (e. t.= 31.1%). Une classification en trois groupes,
par la technique d'agrégation de Wardv, permet d'analyser les résultats
obtenus par les sujets qui traitent le pronom "lui" de façon homogène.
Ces résultats sont présentés dans le Tableau II.
Questions
implicites
Questions
explicites
Groupe 1
Groupe 2
Groupe 3
N=8 (26%)
N=11 (37%)
N=11 (37%)
sujet
objet
sujet
objet
sujet
objet
67%
79%
51%
67%
100%
100%
58%
87%
09%
06%
100%
100%
Tableau II : pourcentage de réponses correctesvi en fonction du type de
questions et de la fonction grammaticale de l'antécédent pour les trois
groupes obtenus par la technique d'agrégation de Ward.
Une analyse des résultats montre que les sujets qui appartiennent à ces
trois groupes obtiennent des scores significativement différents et que
cette différence de performance varie selon le type de questions,
puisqu'il existe une interaction entre le facteur groupe et le facteur
question. Toutefois, les sujets des trois groupes ne se différencient pas
significativement par leurs scores au test de lecture silencieuse (voir
Tableau III).
Score
Groupe 1
Groupe 2
Groupe 3
N=8 (26%)
N=11 (37%)
N=11 (37%)
20.6
19.3
23.9
Tableau III : Scores moyens au test de lecture silencieuse de l'INETOP
des groupes déterminés par la technique d'agrégation de Ward
groupe A
100%
80%
60%
sujet
40%
objet
20%
0%
implicite
explicite
Figure 2: scores en fonction du type de questions et de la fonction
grammaticale de l'antécédent pour le groupe 1
Les sujets du groupe 1 ont des performances qui varient selon le type
d'antécédents. Ils identifient correctement 62 % des antécédents sujets,
contre 83% des antécédents objets quel que soit le type de questions. Il
semble donc que ces sujets interprètent systématiquement le pronom
"lui" et que cette interprétation ne sélectionne pas le référent le plus
récent ni celui qui occupe la fonction syntaxique la plus saillante (le sujet
grammatical). On peut penser que ces sujets privilégient le dernier
référent apparu dans la proposition précédente pour deux raisons. Tout
d'abord parce qu'ils excluraient les référents appartenant à la proposition
contenant le pronom, conformément aux propriétés syntaxiques des
pronoms libres. Ensuite, parce qu'ils sélectionneraient le référent le plus
récent dans la proposition précédente probablement à cause des limites
de leur mémoire de travail.
groupe B
100%
80%
60%
sujet
40%
objet
20%
0%
implicite
explicite
Figure 3 : scores en fonction du type de questions et de la fonction
grammaticale de l'antécédent pour le groupe 2
D'une façon générale, les sujets du groupe 2 obtiennent des scores
assez faibles avec seulement 33% d'interprétations exactes. Cependant,
leurs
scores
varient
selon
le
type
de
questions.
Avec
59%
d'interprétations correctes, les questions implicites sont mieux réussies
que les questions explicites (7% d'interprétations correctes). Il faut
remarquer que le résultat obtenu pour les questions implicites est proche
d'une réponse au hasard puisque avec deux référents possibles on
obtient 59% de réponses correctes contre 50% pour le hasard. Cela
pourrait provenir du fait que les sujets n'interprètent pas réellement le
pronom "lui" mais lui attribuent arbitrairement la référence d'un des deux
personnages présents dans le texte. Ce résultat peut être éclairé par la
proposition de Greene, Mc Koon et Ratcliff (1992) selon laquelle une
référence peut rester non résolue. Les faibles performances obtenues
avec les questions explicites indiqueraient que les sujets du groupe 2
interprètent réellement les pronoms lorsqu'on le demande explicitement.
Cette interprétation se fonde sur des procédures d'attribution de la
référence du "lui" qui ne conduisent pas à l'interprétation correcte. La
stratégie de récence de mention pourrait conduire à l'interprétation
observée en faveur du sujet précédant le pronom.
Les sujets du groupe 3 qui représentent près de 40% de la population,
réussissent à répondre correctement dans 100% des cas, quel que soit
le type de questions. On peut donc affirmer que leurs résultats ne
confirment aucune de nos hypothèses. Ces sujets sont capables
d'utiliser de façon adéquate les informations disponibles pour déterminer
la référence du "lui".
Ces résultats nous apprennent que les difficultés constatées dans
l'expérience de Lima et Bianco (1999) pour l'interprétation du pronom
"lui" continuent à apparaître dans une moindre mesure lorsque le "lui"
n'est pas précédé d'un pronom "il". Il semble que, pour une partie de la
population, c'était bien la présence d'un pronom sujet "il" qui gênait
l'interprétation du "lui", mais que ce n'est pas le seul facteur qui explique
la faiblesse des scores observés pour l'ensemble de la population. En
effet, 60% des sujets ont des difficultés plus ou moins importantes pour
attribuer correctement la référence des pronoms "lui" même lorsqu'ils
sont précédés d'un nom. Chez 40% des sujets, ces difficultés sont plus
importantes lorsqu'ils doivent explicitement interpréter les pronoms que
quand ils peuvent répondre en se fondant sur le contexte sémantique.
L'attribution de la référence du "lui" au sujet grammatical qui le précède
montre que ces sujets produisent leurs interprétations en se fondant sur
des procédures, comme le choix du référent le plus récent, qui
n'aboutissent pas à l'interprétation correcte. Cette attribution de la
référence en fonction de la récence de mention pourrait être la
manifestation d'une procédure d'attribution automatique de la référence
fondée sur un appariement avec l'entité la plus accessible. Chez les 20%
restants, il semble que l'on observe une interprétation systématique du
pronom et que cette interprétation privilégie le référent qui occupe la
fonction d'objet grammatical dans la phrase amorce. Cette interprétation
pourrait être le fruit de la prise en compte des propriétés syntaxiques du
"lui" et d'une attribution de la référence fondée sur la récence de mention
découlant de contraintes mnémoniques.
Sujet grammatical sous forme pronominale
Lorsque les sujets doivent interpréter un pronom "lui" précédé d'un sujet
pronominal, on constate de nouveau que les sujets ayant reçu ce
questionnaire ne forment pas un groupe homogène, les scores obtenus
variant de 0% à 83% de réponses exactesvii avec une moyenne de 51%
(e.t.=19%). Une classification à partir des scores obtenus au test
d'interprétation de pronoms "lui" par la technique d'agrégation de Ward
répartie les élèves dans trois groupes dont les scores moyens aux
différents tests sont présentés dans le Tableau IV.
Questions
implicites
Questions
explicites
Groupe 1
Groupe 2
Groupe 3
N=13 (36%)
N=8 (22%)
N=15 (42%)
sujet
Objet :
sujet
Objet :
sujet
Objet :
85%
87%
46%
83%
49%
33%
18%
15%
50%
71%
27%
11%
Tableau IV : Pourcentage de réponses correctes selon le type de
questions et la fonction grammaticale de l'antécédent pour les trois
groupes obtenus par la technique d'agrégation de Ward
On constate que les sujets des groupes identifiés ont des niveaux de
compréhension en lecture significativement différents. Avec une
moyenne de 15.7 seulement, les sujets du groupe 3 obtiennent des
scores nettement inférieurs à ceux des sujets des groupes 1 et 2 au test
de lecture silencieuse (voir Tableau V).
Score (max=33)
Groupe 1
Groupe 2
Groupe 3
N=13 (36%)
N=8 (22%)
N=15 (42%)
19.9
22.1
15.7
Tableau V : Scores moyens au test de lecture silencieuse de l'INETOP
pour les trois groupes obtenus par la technique d'agrégation de Ward
groupe A
100%
80%
60%
sujet
40%
objet
20%
0%
implicite
explicite
Figure 4 : scores en fonction du type de questions et de la fonction
grammaticale de l'antécédent pour le groupe 1
Les sujets du groupe 1 ont des scores qui varient selon le type de
questions. Ils répondent de manière correcte à plus de 85% des
questions implicites, alors qu'ils ne traitent correctement qu'environ 20%
des questions explicites. Leurs performances ne diffèrent pas selon la
fonction de l'antécédent du pronom. Ces résultats laissent penser que
ces sujets n'interprètent pas le pronom "lui" lorsqu'ils n'y sont pas
contraints. Ils ne seraient donc pas affectés par la diminution des
ressources cognitives provoquée par l'interprétation du "il" lorsqu'ils
répondent à des questions implicites. Quand on leur demande une
interprétation
explicite,
ils
pourraient
enclencher
un
processus
d'appariement automatique avec le référent le plus accessible. Compte
tenu des faibles ressources disponibles, seul le dernier référent apparu
dans le texte serait présent dans le focus attentionnel et donc
accessible.
groupe B
100%
80%
60%
sujet
40%
objet
20%
0%
implicite
explicite
Figure 5 : scores en fonction du type de questions et de la fonction
grammaticale de l'antécédent pour le groupe 2
Les sujets du groupe 2 ont des performances proches quel que soit le
type de questions. Par contre, les résultats varient avec la fonction
grammaticale de l'antécédent (voir Figure 5). On observe 77%
d'attributions correctes de la référence lorsque l'antécédent est le
complément d'objet grammatical alors que le pourcentage se réduit à
48% avec les antécédents sujets. Ce résultat est l'inverse de celui
impliqué par notre seconde hypothèse. Il semble que ces sujets
produisent systématiquement une interprétation du pronom "lui", et que
cette attribution de la référence ne se fonde pas le choix du référent le
plus saillant, mais sur celui du référent le plus récent de la proposition
précédente.
groupe C
100%
80%
60%
sujet
40%
objet
20%
0%
implicite
explicite
scores en fonction du type de questions et de la fonction
grammaticale de l'antécédent pour le groupe 3
Les scores obtenus par les sujets du groupe 3 varient selon le type de
questions et selon la fonction de l'antécédent, sans qu'il y ait d'interaction
entre ces deux facteurs. Comme on peut le voir dans la Figure 6, les
questions explicites entraînent plus de mauvaises interprétations que les
questions implicites. De même, les pronoms "lui" à antécédent objet sont
moins bien interprétés que ceux à antécédent sujet. Il semble que les
lecteurs appartenant à ce groupe ne produisent pas d'interprétation du
pronom "lui" lorsqu'ils n'y sont pas contraints, et que, lorsqu'ils en
produisent une, ils la fondent sur le niveau de saillance des référents
potentiels. Les sujets produiraient une interprétation du "lui" sur la base
d'un appariement automatique avec le référent le plus accessible dans
leur focus attentionnel.
Discussion
Cette expérience montre de façon claire que le pronom "lui" n'est pas
interprété de façon réfléchie. On peut donc considérer que ce ne sont
pas les propriétés syntaxiques attribuées au pronom "lui" qui gênent son
interprétation.
L'analyse des résultats indique que la présence d'un pronom sujet "il" a
une incidence négative sur l'interprétation du pronom "lui", mais que
cette influence ne découle pas toujours du niveau de saillance acquis
par le référent du "il". On peut penser que l'interprétation du pronom "il"
consomme une partie des ressources cognitives nécessaires aux
traitements interprétatifs du "lui", ce qui provoque en partie les erreurs
d'interprétation observées. Toutefois, l'influence de cette diminution des
ressources disponibles ne peut être perçue que si les sujets s'engagent
bien dans un processus de traitement interprétatif du pronom "lui".
Lorsque les sujets n'interprètent pas le pronom "lui", mais utilisent le
contexte pour distribuer les rôles aux différents référents, les réponses
exactes se maintiennent à un niveau élevé malgré la présence d'un
pronom sujet. C'est ce qui se passe chez une partie des sujets lorsqu'on
leur pose des questions implicites.
Toutefois, une part importante de la population expérimentale (64% avec
sujet nominale et 22% avec sujet pronominal) obtient un score identique
quel que soit le type de questions. On peut supposer que ces sujets
interprètent systématiquement les pronoms "lui" quand ils les rencontrent
dans un texte. Lorsqu'ils interprètent le pronom objet. La référence est
souvent attribuée au sujet grammatical qui précède le pronom. Cette
interprétation, en faveur du sujet précédant, pourrait être la conséquence
de l'application d'une procédure automatique d'appariement fondée sur
l'accessibilité des référents. Plus les ressources cognitives sont faibles,
plus le nombre de référents pouvant être maintenu dans le focus
explicite est réduit. Cela conduirait à l'attribution de la référence du "lui"
au seul référent présent dans le focus explicite, le plus récemment cité.
Toutefois, une partie des sujets privilégie l'antécédent qui occupe la
fonction d'objet dans la phrase précédente. On peut supposer que ces
lecteurs sélectionnent le référent le plus récent compatible avec les
propriétés syntaxiques des pronoms libres, qui excluent l'établissement
d'une relation anaphorique dans une même proposition.
Cette expérience a permis de montrer que parmi les lecteurs, des sujets
qui ont un niveau semblable de compréhension en lecture, tel qu'il est
couramment évalué, traitent différemment le pronom "lui". Certains
semblent produire systématiquement une interprétation du pronom, alors
que d'autres n'interprètent ce pronom que lorsque la tâche le nécessite.
De même, certains semblent tenir compte des propriétés syntaxiques du
pronom lors du processus d'interprétation, alors que ces propriétés
n'interviennent pas chez d'autres. Ces disparités pourraient être
attribuées à des capacités différentes de la mémoire de travail, à une
gestion différente des ressources cognitives, à des degrés différents
d'automatisation des procédures d'interprétation ou à des niveaux de
connaissances syntaxiques divers. Les erreurs d'interprétations des
pronoms objets qui peuvent affecter la compréhension peuvent donc
avoir des origines variées.
Cette analyse permet de penser que les tests qui sont couramment
utilisés pour évaluer la compréhension en lecture ne sont pas
suffisamment fins pour permettre de discriminer des sujets qui atteignent
des niveaux de compréhension similaires en utilisant des procédures
différentes. Cela montre l'intérêt d'outils qui peuvent permettre d'évaluer
non seulement le résultat final du processus de compréhension mais
aussi d'identifier les procédures cognitives intervenant au cours de ce
processus.
Nos résultats permettent de penser que c'est principalement l'utilisation
d'une procédure d'interprétation automatique du pronom "lui" qui conduit
une partie de la population expérimentale à mal interpréter ce pronom.
Cette procédure automatique consommerait
peu de
ressources
cognitives. C'est pour cette raison qu'elle serait employée. Elle conduit à
fonder
l'interprétation
sur
le
choix
du
(ou
des)
référent(s),
morphologiquement compatible(s), le(s) plus accessible(s). Les référents
accessibles seraient contenus dans une partie de la mémoire de travail
appelée focus explicite. Selon les ressources cognitives disponibles, le
focus explicite pourrait contenir un nombre plus ou moins important de
référents. Il semble que chez certains sujets, lorsque des traitements
accaparent une part des ressources cognitives, le focus explicite puisse
se réduire à un seul référent. Dans ce cas, c'est le dernier référent
apparu dans le discours qui est maintenu accessible. La procédure
d'attribution automatique de la référence du pronom aboutie au choix de
ce référent. On constate que même lorsqu'elle est en contradiction avec
le contexte sémantique, cette interprétation n'est pas modifiée. Cela
signifie que les sujets n'utilisent pas de stratégie d'interprétation après la
procédure d'attribution automatique de la référence, et qu'ils ne détectent
pas les fausses interprétations.
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