Le budget 2016 du ministère de la Culture

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Le budget 2016 du ministère de la Culture
Le budget 2016
du ministère de la Culture
PLF Culture 2016
Avec 7,3Mds€, le budget 2016 progresse de +2,7% par rapport à 2015. Le
document de présentation du ministère précise « qu’avec la neutralisation
de l’effet de périmètre lié à la budgétisation de la redevance sur l’archéologie préventive (RAP), la hausse atteint 1% par rapport à la loi de finances
pour 2015 (+72M€) » – une mesure destinée à sanctuariser des moyens qui
persistaient depuis des années à rester insuffisants. Pour autant, les marges
dégagées pour ce budget « post-Charlie », pour reprendre une expression
de la ministre elle-même, restent assez significatives pour traduire de réels
choix politiques. Les priorités du budget 2016.
A la différence du dernier exercice stric-
tement consacré à préserver l’essentiel, l’augmentation que la ministre a obtenue pour le budget
culture 2016 permet la mise en œuvre de plusieurs
priorités. Les choix signent un retour aux fondamentaux, ceux de la démocratisation culturelle
(soutien à la transmission et à la création), mais
selon une perspective particulière. Au lieu de favoriser l’accès « du plus grand nombre aux œuvres
de l’esprit » (Malraux), il s’agira pour ainsi dire
de modifier “l’assiette” des bénéficiaires de la
démocratisation ainsi que la nature des “œuvres
de l’esprit’’ à faire partager aussi largement que
possible. Dans cette optique, le ministère met l’accent sur le renforcement des acteurs et des expressions moins institutionnels.
Démocratiser l’accès à la culture “pour tous les
publics”. Plus qu’une simple inflexion de vocabu-
laire, cette précision quant à la cible de la démocratisation – tous les publics – est significative. Ce
n’est pas le nombre (le plus grand), mais la diversité d’origines, d’âges et de profils socioculturels
qui est visée, ce qui est une manière de répondre
à la critique d’élitisme persistant de la démocratisation. Ce que le texte du PLF Culture exprime
ainsi : « Offrir à tous les citoyens un accès à la
culture, quels que soient leur âge, leur milieu
social, leur niveau d’éducation et leur situation
géographique, constitue un objectif fondateur des
missions du ministère de la Culture. » Le budget
de la ligne “Transmission des savoirs et démocratisation culturelle” s’élèvera à 99,5 M€, soit une
augmentation de près de 22% par rapport à 2015.
Cette offre se concrétisera notamment par trois
“plans”. Le premier concerne l’éducation artistique et culturelle (EAC) avec une poursuite de la
montée en puissance de l’engagement de l’Etat :
+ 80% pour les crédits d’éducation artistique et
culturelle depuis 2012, dont +34% de 2015 à 2016
(avec 54,6M€).
Autre dispositif ciblé, le doublement des moyens
des “contrats territoires lecture”, « la lecture
constituant la première condition d’accès à la
culture ». Les moyens passeront de 1,27M€ en
2015 à 2,25M€ en 2016.
Enfin, le “plan conservatoires” qui permettra de tripler le montant des dotations accordées aux conservatoires conventionnés : 13,5 M€, contre 4,4M€ en
2015 (ce qui pour autant reste inférieur des 29M€
d’engagement de l’Etat avant 2012, date du début
d’un retrait progressif de son soutien aux conserva-
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PLF 2016
Le budget du ministère de la Culture
Quelques chiffres
En 2016, 7,3Mds€, dont :
• 2,9Mds€ pour les secteurs de la culture et de la
recherche
• 3,9Mds€ pour l’audiovisuel public ;
• 0,5Md€ pour la presse, la diversité
radiophonique, le livre et les industries culturelles.
• Le fonds de soutien au cinéma, à l’audiovisuel
et au multimedia géré par le Centre national du
cinéma et de l’image animée (CNC) disposera par
ailleurs de 672M€.
• Au total, les emplois du ministère et de ses
opérateurs s’élèvent à 29 6752, dont 6 271 au
ministère et 23 404 pour les opérateurs.
Sur les moyens supplémentaires en 2016 :
• 27M€ pour les ligens transmission des savoirs,
démocratisation de la culture et éducation aux
medias ;
• 12,7M€ pour la création artistique, soit 15M€
supplémentaires par rapport à la trajectoire
pluriannuelle ;
• 16M€ pour sécuriser le financement de
l’audiovisuel public.
toires). Ces établissements constituent en effet pour
le ministère « le premier réseau de proximité pour
l’accès, l’éducation et la formation des jeunes
aux pratiques artistiques ». A quoi il faut ajouter
que l’appui du ministère sera conditionné à la fois
à la promotion de l’accès aux conservatoires des
publics qui en sont le plus éloignés et à une diversification vers les expressions non académiques
(émergentes) de leur proposition de formation.
Relancer l’aide à la création “et aux jeunes artistes”. Là aussi, l’inflexion est nette. Sans renon-
cer au soutien des structures institutionnelles et
labellisées, le ministère s’engage vers un soutien plus particulièrement prononcé vers de nouveaux acteurs et de nouvelles expressions. Avec
364,8M€, le ministère se dote de « moyens ambitieux » qui « permettront d’attribuer 8M€ supplémentaires d’aides directes aux artistes et aux
équipes artistiques indépendants afin de favoriser
l’émergence de la jeune création sur l’ensemble
du territoire national. Elles seront donc principa-
lement dédiées aux équipes conventionnées et au
développement des résidences et des associations
d’artistes. » Deux plans sont ici opérants pour
promouvoir le « renouvellement des générations
et des esthétiques » :
- La mise en œuvre des conclusions des “Assises
de la jeune création” organisées à partir d’avril
2015, soit 19 mesures pour renforcer la formation et l’insertion des artistes, améliorer leurs
conditions de vie et de travail et soutenir les
créateurs dans la diversité des pratiques et des
esthétiques. Financement : 7,1M€.
- L’achèvement du plan Scènes de musiques actuelles (SMAC), débuté en 2011, avec l’objectif d’atteindre une centaine de SMAC contre actuellement 87 lieux. Financement : 11,7M€ en 2016
(+2M€).
Le partenariat avec les collectivités. Dans les
deux cas – que ce soit pour les publics visés (les
plus “éloignés”, notamment dans les territoires
ruraux et les “quartiers”) ou la teneur des œuvres
à démocratiser –, l’un des moyens sera la signature à l’échelon régional de contrats conclus avec
les collectivités territoriales, en associant un grand
nombre d’acteurs publics et privés (équipes artistiques, associations…). « A ce jour, le ministère est
engagé dans 351 conventions, dont 40% concernent le monde rural. » Le texte du ministère cite
aussi parmi ses actions phares sur ce plan, les “pactes culturels” signés avec les collectivités : « La
signature des pactes se poursuivra en 2016 avec
des moyens renforcés. Plus largement, cela permettra au ministère de poursuivre le chantier de la
réorganisation territoriale avec des moyens préservés, ce qui est gage de sérénité pour les discussions
avec les collectivités territoriales. » Il ajoute que
ces pactes « apportent une visibilité aux acteurs de
terrain sur les engagements futurs de l’Etat et des
collectivités, qui leur permet de porter une politique artistique ambitieuse pour tous les publics ».
Par ailleurs, le budget 2016 consacre l’importance
du rôle des DRAC en inscrivant une augmentation
de 2% des crédits consacrés à la culture par l’Etat
dans les territoires, « aux côtés de nos premiers partenaires – les collectivités territoriales – pour nous
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Le budget du ministère de la Culture
assurer que la culture continuera de se déployer
pour tous et partout ». Un budget dont l’emploi
s’avèrera particulièrement sensible au moment
de la mise en œuvre de la réforme territoriale
et de la reconfiguration de l’organisation
déconcentrée du ministère pour l’adapter à
la nouvelle carte des régions.
Le patrimoine ne fait pas partie des prio-
rités d’un budget très largement orienté
vers la jeunesse. Mais l’augmentation
globale des crédits du ministère permet la
continuité : « L’effort en faveur des monuments historiques sera maintenu en 2016
pour la troisième année consécutive ». Financement du patrimoine : 313,3M€ en 2016, soit
une augmentation de 2M€ (+0,6%).
Si le budget n’a pas encore pu prendre en compte
le profond changement qu’apportera la loi LCAP
aux politiques patrimoniales, la continuité qu’il
garantit montre, en revanche, que le ministère préserve ses capacités financières en la matière : « A
la faveur de la réforme territoriale, le ministère
poursuivra l’élaboration de stratégies régionales
pluriannuelles pour la conservation et la restauration des monuments historiques et l’appui aux
porteurs de projets. » 70% du budget patrimoine
seraainsi dédié aux opérations en région.
A noter qu’en débat parlementaire, lors de l’adoption d’un amendement à la loi LCAP qui précise que
l’Etat continuera d’apporter son soutien technique
et financier pour la réalisation des futures PSMV
ou PLU patrimoniaux (cf. l’article sur les “cités
historiques” dans cette même Lettre d’Echanges),
la ministre a indiqué que cette aide, d’un montant
de 6,1M€ en 2015, augmentera de 9% en 2016.
L’archéologie préventive. En revanche, le budget
disposant de services archéologiques agréés pour
la réalisation des diagnostics bénéficieront d’une
dotation stabilisée et prévisible, directement financée sur le budget de l’Etat. »
Jusqu’à présent, la RAP, acquittée par les aménageurs, n’a jamais réellement permis un financement satisfaisant. Désormais, explique le texte,
« l’Institut national de recherches archéologiques
préventives (Inrap) et les collectivités territoriales
A noter enfin que les crédits pour l’archéologie
préventive abonderont également le Fonds national d’archéologie préventive (Fnap) à hauteur
de 35M€. Ce Fonds, créé en 2003, est consacré
au financement des fouilles liées à certains types
de travaux d’intérêt général : logements sociaux
et aménagements promouvant la préservation du
patrimoine et le développement des territoires, en
particulier ruraux.
2016 innove sur l’archéologie préventive. Avec
une mesure forte : la budgétisation du produit
de la Redevance pour l’archéologie préventive
(RAP) – qui s’élèvera à 118M€.
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