parco della musica uptown records
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GUIDE LABEL AFFAIRE UPTOWN RECORDS SPÉCIALISTE DES RARETÉS, CE LABEL PUBLIE LES CONCERTS DE DEUX FIGURES DU SAXOPHONE TÉNOR, HANK MOBLEY EN SEPTEMBRE 1953 AU PICADILLY DE NEWARK ET DEXTER GORDON EN NOVEMBRE 1977 AU RISING SUN DE MONTRÉAL. Outre les vingt-quatre années qui les séparent, ces deux concerts présentent deux manières d’aborder l’improvisation au ténor : alors que Hank Mobley dévale sur des grilles de bebop à toute berzingue, Dexter Gordon n’interprète que de langoureuses ballades. Ajoutons que la réputation des deux hommes au moment des faits est loin d’être égale. Sur “Newark 1953”, Hank Mobley a encore du chemin à parcourir avant de devenir le hard bopper fétiche du label Blue Note. Son style en pleine mutation laisse nettement transparaître l’influence de Parker et de Rollins, malgré une fluidité singulière et une sérieuse complicité avec Bennie Green (tb), véritable leader du quintette, à la sonorité chaude, épaisse et rugueuse (avec Walter Davis, Jimmy Schenck et Charlie Persip). Sur “Night Ballads, Montreal 1977”, Dexter Gordon se révèle en musicien accompli, capable, à la tête d’un groupe de rêve (George Cables, Rufus Reid, Eddie Gladden), de conjurer la monotonie du répertoire, et la longueur des morceaux, en renouvelant chacun de ses chorus avec un sens lyrique achevé. Malgré toutes leurs différences, ces deux enregistrements révèlent pourtant un point commun notable : la présence d’un public connaisseur et ô combien réceptif. À travers leurs encouragements ou leurs réactions complices, aux antipodes des applaudissements convenus auxquels on s’était habitué, ces spectateurs instaurent un lien de connivence, presque d’intimité, avec les musiciens, qui nous plonge instantanément dans l’ambiance chaleureuse d’un âge des clubs qui semble révolu. kJONATHAN GLUSMAN Uptown / Distrijazz. LABEL AFFAIRE PARCO DELLA MUSICA DE CE LABEL ROMAIN NOUS PARVIENNENT DEUX CD DISSEMBLABLES : CELUI TRÈS NARRATIF DU GROUPE SOUSAPHONIX ET CELUI TRÈS INTENSE DU SAXOPHONISTE PIERO DELLE MONACHE. Sousapohonix, du tromboniste, sousaphoniste et vocaliste Mauro Ottolini propose avec “Bix Factor” un “récit fantastique” mêlant des personnages aussi divers que Buddy Bolden, Marcel Duchamp, Woody Herman et Buster Keaton sur des thèmes des années 1920 à 1940 joués dans une optique quasi musicologique ou de façon plus contemporaine, auxquels s’ajoutent des morceaux de sa plume. L’écoute de cette suite est loin d’être désagréable et le travail accompli par la douzaine d’instrumentistes et vocalistes est de grande qualité mais, comme souvent pour les programmes conçus pour la scène, la partie visuelle et la mise en scène prévue pour cette plongée dans les bbbb débuts du jazz font ici défaut. Jeune saxophoniste ténor jouant soit en quartette, soit seul en re-recording, Piero Delle Monache n’a pas de mal – en moins de quarante minutes – à nous convaincre de l’originalité de son album “Thunupa” [****]. Un art de la lenteur qui donne tout son poids aux notes, une sonorité sombre qui inclut les scories du souffle sur des compositions méditatives faisant la part belle à la mélodie et au silence sans jamais ennuyer : voici ce que propose Delle Monache, loin des acrobates de la triple croche. Admirablement accompagné par un trio où les claviers épousent en douceur et en subtilité harmonique les volutes brumeuses du leader, Delle Monache trace une voie qu’on est curieux de le voir poursuivre, quelque part dans le sillage de Wayne Shorter, avec un personnalité déjà fortement affirmée. kTHIERRY QUÉNUM Parco della Musica / Orkhêstra. 78 JAZ Z M AG AZ I N E JAZ Z M A N k N U M É R O 6 4 4 k D É C E M B R E 2 0 1 2 REVELATION ! FANNY LASFARGUES SOLO 1 CD COAX RECORDS / COLLECTIFCOAX.COM NOUVEAUTÉ. Evidemment, si vous continuez de ne voir dans la contrebasse que cette bonne vieille “grand-mère” confortable, dévidant ses lignes pneumatiques pour asseoir le tempo, vous serez surpris du traitement que lui fait subir dans ce disque solo sans concession la jeune Fanny Lasfargues. Mais, outre le fait que l’instrument a depuis belle lurette pris la tangente pour s’aventurer loin dans l’émancipation radicale et que Lasfargues d’une certaine manière ne fait rien d’autre ici que poursuivre à sa manière ultracontemporaine le chemin tracé par Barre Phillips, Joëlle Léandre ou Bruno Chevillon (entre autres !), s’il vous est déjà arrivé d’entendre la contrebassiste dans les contextes résolument transgenres des groupes Rétroviseur et Q auxquels elle collabore par ailleurs activement, vous ne serez guère dépaysé par les climats développés dans ce solo qui sur bien des plans sonne comme un art poétique en même temps personnel et générationnel. Car, martyrisé, transfiguré par tout un éventail de traitements sonores électroniques, c’est un “instrument-monde” en mutation permanente que nous révèle ici la musicienne, débordant largement ses frontières idiomatiques “naturelles”. Passant de climats post-industriels inquiétants et glacés, faussement étales, animés d’une tension sourde, pulsés de micro-grooves minimalistes et comme striés de zébrures aveuglantes, à des plongées exploratoires au cœur de la matière sonore évoquant l’univers sarcastique et ultrasensoriel du réalisateur tchèque Jan Svankmajer par son sens de la récupération et du décalage poétique, Lasfargues invente aux confins de l’ambient expérimentale une “musique concrète” improvisée d’un genre nouveau. A la fois lyrique, d’une grande puissance d’incarnation dans le geste, mais aussi très sombre dans ses humeurs, laissant sourdre une violence pulsionnelle souvent dérangeante, cette musique n’est peut-être pas forcément “aimable” mais possède une urgence et une nécessité qui font toute la différence.k STÉPHANE OLLIVIER Fanny Lasfargues (b, électronique). Toulouse, janvier 2012. GEORGE LEWIS THE COMPLETE REMASTERED RECORDINGS ON BLACK SAINT & SOUL NOTE 5 CD CAMJAZZ / HARMONIA MUNDI RÉÉDITION. Avec les trois premiers CD de ce coffret, c’est toute une génération qui s’épanouit en marge de l’AACM dont George Lewis est membre depuis 1971. “George Lewis” de 1977, fait entendre quatre formations en partie issues du sérail : Leroy Jenkins (vln), Roscoe Mitchell (saxes, fl), Muhal Richard Abrams (p), Douglas Ewart (fl, cl, ss, basson), plus Anthony Davis (p) et Abdul Wadud (cello). Ça n’est qu’un début dont un duo avec Ewart annonce l’album “George Lewis – Douglas Ewart” (1978) dont les premières phrases de Jila (flûte et trombone) ne sont pas sans faire penser aux côtés “Messiaen” du duo James Newton – Anthony Davis qui lui est contemporain. Save ! Mon. encadre une polyinstrumentalité très “Art Ensemble”, d’un duo alto-trombone improvisé aux rigueurs plus braxtoniennes. L’Imaginary Suite fait plus de place qu’auparavant à l’électronique de Lewis, fournissant dans le premier mouvement une sorte de stimulus sonore, dans le second le bourdon d’un majestueux raga dont ne serait joué que le prélude et où le prodigieux legato de Lewis trouve toute sa mesure. Le morceau titre de “Homage to Charlie Parker” (1979) porte plus loin les variations sur cet ambient avec l’appui d’Anthony Davis (p) et Richard Teitelbaum (synth). Il est précédé d’un Blues réinventé par ce même quartette, qui constituait la face A de ce magnifique Lp après lequel “Change of Season (Music Of Herbie Nichols) et ”Dutch Masters” avec Misha Mengelberg, Steve Lacy, Arjen Groter (ou Ernst Reiseger) et Han Bennink paraissent d’un intérêt très inégal. k FRANCK BERGEROT Détails sur les réductions des pochettes LP au format CD. bbbb MAGICO CARTA DE AMOR 2 CD ECM / UNIVERSAL NOUVEAUTÉ. Jan Garbarek, Egberto Gismonti et Charlie Haden constituèrent Magico à la fin des années 1970. Un enregistrement inédit de 1981 réalisé à l’Amerikahaus de Munich vient aujourd’hui compléter la maigre discographie du trio (deux albums gravés en studio pour ECM en 1979). “Circense” que Gismonti enregistre à la même époque pour EMI Odéon Brésil fournit au groupe une partie du répertoire. Il contient le titre Magico qui ne figure pas ici, le trio préférant reprendre d’autres compositions du Brésilien. Parmi elles, Carta de Amor et Branquinho, des pièces lyriques confiées au saxophone de Garbarek qui en expose les thèmes, Gismonti se contentant d’en jouer les arpèges à la guitare, son principal instrument. Palhaço, un thème magnifique, qu’il a plusieurs fois enregistré, le fait entendre au piano. Il en joue aussi dans All That Is Beautiful, se réservant de longs chorus remplis de notes inattendues et abstraites. Haden s’offre des solos dans les deux thèmes qu’il apporte. La sonorité épaisse, volumineuse de sa contrebasse n’exclut pas un jeu mélodique qui profite à la musique. Cette dernière reste toutefois hantée par le jeu spectral de Garbarek qui l’éclaire de sa voix plaintive. Au ténor ou au soprano, sa sonorité froide, réverbérée et fortement expressive marque le groupe, lui confèrant une personnalité indéniable. Malgré quelques moments plus faibles – un Cego Aderaldo inutilement virtuose, une version un peu longue de La Pasionaria – cet opus live nous fait regretter la trop brève existence de ce trio pas comme les autres. k PIERRE DE CHOCQUEUSE Jan Garbarek (ts, ss), Egberto Gismonti (g, p), Charlie Haden (b). Amerikahaus, Munich, avril 1981.