5 archeologie de l`ile madame (commune de port-des

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5 archeologie de l`ile madame (commune de port-des
ARCHEOLOGIE DE L'ILE MADAME
(COMMUNE DE PORT-DES-BARQUES)
L'île Madame constitue l'extrémité nord-ouest du synclinal de Saintonge et le point extrême de la
rive gauche de la Charente. Elle est reliée au continent par un tombolo, chaussée de galets et de sable
découvrant à marée basse. Ce lieu réputé pour la pêche à pied, des huîtres et des crevettes, la géologie
et la flore, est presque inconnu pour l'archéologie. Quelques petits gisements existent pourtant.
Paléolithique
Les plus anciens vestiges rencontrés sur l'île sont datés du Moustérien moyen type la Quina. Ils
furent découverts par Roger Facon au nord-ouest du fort et sur les Palles; il s'agit de deux outils décrits
dans le bulletin de la Société de Préhistoire Française, de décembre 1967. Le premier est un racloir
simple, concave, recueilli dans les sables grisâtres, à la partie supérieure de la falaise (1). Le second,
une pièce ancienne à retouches moustériennes et patine couleur rouille, provient des Palles.
Récemment, en octobre 1988, une prospection de surface effectuée au sommet de la falaise nord,
où Roger Facon fit ses découvertes, a permis de recueillir d'autres silex. La couche de sables gris,
épaisse de 70 cm, est inclinée de 60° environ, elle est riche en éclats de silex a la patine blanc jaunâtre.
Les outils sont rares, seuls un racloir paléolithique et un couteau au tranchant ébréché, ont été
recueillis (fig. 1 et 3, pl. 1). Le gisement observé ici en coupe, se prolonge sous le champ, ou il n'est
pas rare de rencontrer, après les labours, de nombreux silex, le plus souvent à patine couleur rouille.
Aucun outil paléolithique n'a toutefois été observé à la surface du sol. Au nord-est du fort, le sable gris
a livré des silex, mais en nombre plus réduit; un seul outil a été identifié, il s'agit d'un racloir
paléolithique à la patine blanche (fig. 2, pl. 1). Le champ bordant la falaise est lui aussi riche en silex.
Sur l'estran du nord de l'île, et le long de la passe aux Bœufs, on remarque parmi les galets, des
silex paléolithiques aux arêtes usées par la mer. A l'époque moustérienne, le niveau de la mer était plus
bas qu'il ne l'est actuellement; au cours des périodes les plus froides, il est descendu d'une centaine de
mètres, l'île Madame n'existait pas, ce n'était qu'un point élevé en bordure de la vallée de la Charente
qui s'étendait vers le nord-ouest, au delà de l'actuel pertuis d'Antioche.
L'époque mésolithique est présente au nord de l'île; on trouve en effet parmi le sable gris, de petits
silex, le plus souvent des éclats de taille, mais aussi des microlithes, seul un micro perçoir (fig. 8, pl.
3) doit être attribué avec certitude à cette époque. Il se trouvait à la partie supérieure de la couche de
sable gris, sur la coupe de la falaise, à proximité du racloir et du couteau mentionné précédemment.
Une couche de graviers contenant de petits silex peut se voir à la surface du rocher; sur la falaise, à 80
m. au nord de la Vierge, il n'est toutefois pas encore possible d'affirmer qu'il s'agit de microlithes.
Néolithique
Il ne semble pas exister de gisement important de cette époque, mais les outils et les tessons de
céramique ne sont pas rares en plusieurs points de la partie nord.
Dans son article consacré au Moustérien, Roger Facon indique une petite trouvaille au sommet de
la falaise: « Dans une coupe observée plus à l'ouest, plus proche de la passe aux Filles, on observe la
même superposition des deux sortes de sables, reposant sur un banc d'huîtres fossiles. Les sables gris
m'ont fourni, en surface, un perçoir et des fragments de poterie néolithique ». MM David et Gabet ont
également signalé des tessons de céramique et quelques silex à la partie supérieure de la falaise, près
de l'ancien fort.
A la surface du sol, des vestiges peuvent être observés en trois endroits principaux:
1/ A 90 m. à l'ouest de la Vierge, on trouve des tessons de céramique, dont un fragment de fond
plat, des éclats de silex, des grattoirs, un fragment de meule en grès.
2/ Au sud-est du fort, il n'a pas été observé de céramique, les silex, par contre, sont nombreux, on
remarque, parmi les outils, un perçoir, deux grattoirs (fig. 1,2 et 4, pl. 3), et des silex à encoches.
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3/ A l'ouest du fort, sur le côté nord du chemin, entre le bois et les maisons (2), les tessons de
céramique sont nombreux, ainsi que les silex de couleur noire, on remarque principalement des éclats
et des nucléus.
Au sommet de la falaise, au nord-ouest du fort, un grattoir a été recueilli à 4 m. à l'ouest des
vestiges paléolithiques (fig. 3, pl. 3), il est en silex noir. Un silex à encoche (fig. 5, pl. 3) provient de la
micro falaise, à 25 m. à l'est de la Vierge, il était mêlé aux galets du cordon littoral. Les deux petits
grattoirs (fig. 6 et 7, pl. 3) se trouvaient au même endroit parmi le matériel du site à sel. Il n'est pas
rare, enfin, de découvrir des silex néolithiques sur l'estran de la côte nord.
Epoque gauloise
Elle n'est connue dans l'île que par un site à sel, découvert en octobre 1987. On peut le voir sur la
côte nord-est, à une trentaine de mètres à l'est de la statue de la Vierge. Il apparaît dans une micro
falaise que la mer taille dans un cordon littoral. Il est masqué en grande partie par des pierres et du
sable; seule apparaît la partie supérieure d'une couche de terre brune, contenant des petits fragments de
terre cuite (3).
L'étendue du site n'est pas déterminée vers le nord-ouest, celui-ci disparaît rapidement, masqué par
des galets, tandis qu'à l'opposé il est caché par une végétation dense de Lyciet (Lycium halimifolium),
solanacée arbustive et piquante. Dans la région de Rochefort, ce site est le seul, avec celui de
Piédemont (4) à exister sur le rivage actuel; tandis qu'à Piédemont, le site est aujourd’hui éparpillé sur
l'estran, ici il est resté en place, bien que fortement entaillé par la mer.
Un sondage pratiqué en 1988 a permis de voir la coupe du site et de recueillir un peu de matériel. Il
a consisté à dégager les pierres masquant en partie la falaise. La planche N° 2 représente la coupe du
site telle quelle se présentait après dégagement. On voit tout d'abord, en surface, deux couches
pierreuses, la supérieure formée de galets de 4 à 5 cm de long, épaisse de 19 cm, la seconde, au
dessous, épaisse de seulement 4 cm composée de petits galets calcaires de 1 à 2 cm. La couche
archéologique, épaisse de 11 cm (couche 4) est comprise en deux couches de terre brune formées de
sable et d'humus; la couche du dessus (couche 3), mesure 23 cm d'épaisseur, et la couche inférieure 37
cm. Cette dernière couche repose sur le sable et les galets d’un cordon littoral.
Le matériel recueilli montre la présence de piliers tripodes, aux pieds courts et peu évasés, et de
barres à section rectangulaire. Ces vestiges étaient en petit nombre et très fragmentés. Les récipients
servant à la cristallisation du sel sont eux aussi réduits en petits tessons, mais il a toutefois été possible
de déterminer qu'il s'agit de vases ronds, dont le diamètre est de 100 mm environ.
La céramique domestique n'est représentée que par quelques menus tessons datés de la fin de
l'indépendance gauloise. Il faut aussi signaler trois petits tessons de céramique grise gallo-romaine,
dont un décoré à la roulette de petits carreaux en creux. Ce site ressemble à celui de la Jalaiserie,
commune de Marans, lui aussi intercalé entre les couches de pierres d'un cordon littoral.
Epoque gallo-romaine
Il n'y a pas de site important connu dans l'île mais, comme pour l'époque néolithique, des vestiges
épars existent en de nombreux endroits.
Un petit site existe au nord-est du verger où il forme une petite élévation; après les labours, on peut
voir en surface, quelques tessons de céramique commune, des fragments de tuiles à rebords, un
morceau de meule en grès, des pierres calcaires et un dépotoir riche en coquillages. Un autre petit site
peut se voir à 80 m. à l'ouest de la Vierge, on y trouve des fragments de tuiles à rebords, des moellons
et quelques tessons de céramique commune.
Un troisième site existe au nord-est du fort, en bordure de la falaise; attaqué par la mer, il doit être
partiellement détruit. Au cours de la tempête du mois d'octobre 1987, un bloc d'une vingtaine de kilos,
formé d’une alternance de tuiles à rebords et de mortier, est tombé de la falaise. Au sommet de cette
dernière, l'observation est difficile à cause de la végétation et du danger d'écroulement. Des fragments
de tuiles observés dans le champ situé au sud-est indiquent une extension possible du site dans cette
direction.
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Quelques tessons de céramique et fragments de tuiles ont aussi été recueillis le long de la côte nord,
aux points 11, 12 et 13 de la carte. A la surface du sol, des tessons existent à l'est des maisons et au
sud-est du fort, aux points 14 et 15 de la carte.
Des fragments de tuiles à rebords peuvent se voir sur l'estran de la côte nord, dans le cordon
littoral, en parrticulier près du site à sel, et des membres de la Société de Géographie ont recueillis des
tessons de céramique à la pointe de Surgères (point 16 de la carte).
Un vieux chemin est visible après les labours, entre la statue de la Vierge et le fort, où il disparaît,
recouvert par le talus; il forme une traînée de pierres calcaires, large de 3 à 4 mètres, très visible sur le
sol siliceux. Il est probab1ement antérieur à la construction du fort, mais des preuves manquent pour le
dater avec plus de précision.
Ce rapide survol des vestiges de l'île montre que celle ci, à l'image du littoral charentais, est très
riche en vestiges de toutes les époques. Les prospections effectuées ces dernières années sont très
incomplètes, de nombreux témoignages du passé peuvent encore être découverts.
La création d'un Parc de Découverte Maritime est envisagée sur l'île Madame, que deviendra celleci si le projet se concrétise? Que deviendra la pêche à pied qui compte de si nombreux adeptes? Elle
sera interdite aux automobiles, il s'agit là d'une sage mesure qui aurait dû être prise depuis longtemps
pour limiter les pêches abusives, assurer la tranquillité de la faune et limiter le piétinement de la flore.
L'emploi de véhicules sur coussin d'air, beaucoup trop bruyants, ne peut que perturber la tranquillité de
cette partie du littoral; mais que ne ferait-on pas pour attirer les touristes?
Michel Favre
1/ Coordonnées: X 332,45 - Y 112,70
2/
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X 332,33 - Y 112,63
3/ En bordure de la parcelle N° 10 - coordonnées Lambert: X 332,98 - Y 112,27
4/ Situé en réalité entre Piédemont et Font-Renaud.
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