le_monde/pages 28/09/11 - Neo
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&vous 0123 Mercredi 28 septembre 2011 27 La collection nacrée du maestro italien Giorgio Armani Elles portent des trotteurs avec des robes du soir et des escarpins avec leurs tailleurspantalons. Ce n’est pas la moindre de leurs fantaisies. L’été prochain, les mannequins de Giorgio Armani, qui ont défilé lundi 26 septembre à Milan, avant-dernier jour de la Fashion Week italienne, ne quitteront presque jamais leur pantalon-étui gris, qu’elles glissent sous une robe bustier, une jupe coupée en biais ou une tunique japonisante en soie imprimée pastel. L’allure est chic, les lignes épurées, les teintes sont celles des perles – blanc, gris souris, anthracite – adoucies de reflets nacrés. Cette citadine aux vêtements d’aspect quasi liquide, fluides comme l’eau, a oublié d’aller à la plage. p Véronique Lorelle (PHOTOS : GIUSEPPE CACASE/AFP ; LUCA BRUNO/AP) Le «coworking» attire les sans-bureau-fixe Un donneur La location à la journée de lieux de travail partagés séduit de plus en plus les jeunes entrepreneurs et dix couffins Reportage A ntonyEnkirche, jeune directeur artistique Web, freelance, « en a marre » de travailler seul chez lui. « Au début, c’est pratique, mais à la longue, on n’est plus en phase avec les autres », explique-t-il. Plusieurs fois par semaine, il vient à La Cantine, un « espace de coworking », ou « travail collaboratif », situé au cœur de Paris. Avec son ordinateur et sa tablette graphique, il s’installe à l’une des grandes tables de travail de l’open space, pour « créer le design des pages Web » de ses clients. Comme ses voisins, il parle doucement, afin de ne gêner personne. « Je peux me concentrer sans problème », constate le jeune homme. Il verse 10 euros par jour pour cette pension. Et se demande s’il ne serait pas « plus intéressant de tweeter une colocation de bureaux ». « L’avantage ici, c’est qu’il y a beaucoup de séminaires intéressants », sur l’univers du Web, et que « le lieu brasse du monde », ajoute-t-il. De nombreuses compétences se croisent, en effet, comme en témoigne le tableau, à l’entrée, sur lequel sont punaisées les cartes de visite de développeurs d’applications, de graphistes, de juristes ou de journalistes Web. « Vous cherchez un génie du code informatique ou du business plan ? On vous le trouve en dix minutes ! », résume Jean-Baptiste Roger, l’enthousiaste conseiller numérique du prési- dent de la région Ile-de-France. « La Cantine, c’est du Facebook grandeur nature, c’est fait pour mettre les gens en réseau », explique-t-il. La Cantine a une double vocation : fournir un toit à « de jeunes entrepreneurs de start-up numériques, qui n’ont que 20 000 euros de budget et qui ne peuvent pas avancer six mois de trésorerie pour des locaux », selon M. Roger. Mais aussi mutualiser les compétences, favoriser l’échange. La région soutient financièrement l’établissement, créé en 2008, ce qui explique la modicité de ses tarifs. A la demande de JeanPaul Planchou, vice-président socialiste en charge de l’innovation, la collectivité locale a prévu un million d’euros dans le budget 2012 pour favoriser l’émergence d’autres locaux de ce type. « Il n’y en a qu’un ou deux à Paris, mais dans un an, nous en attendons une quinzaine », assure M. Roger. « Ce modèle du “tiers-lieu”, ni bureau, ni domicile, explose dans le monde », assure le conseiller, qui revient des Pays-Bas, « où il y en a déjà 300 ». Le système, créé à San Francisco il y a cinq ans, s’est développé en Amérique du Nord et en Europe, notamment en Allemagne ou au Royaume-Uni. Un deuxième espace collaboratif, Soleilles Cowork, vient de s’ouvrir à Paris, à l’initiative de cinq femmes cadres ayant quitté l’univers des grands groupes pour fonder leurs propres entreprises. « Au début, on travaillait chez nous: c’est pratique, on ouvre l’ordinateur en pyjama, on lance une machine de linge, et on envoie un mail… Mais après, on a besoin de mettre une limite entre le pro et le perso », explique Sandrine Benattar, ancienne chargée de marketing, l’une des fondatrices du lieu. Le système, créé à San Francisco il y a cinq ans, s’est développé en Amérique du Nord et en Europe La Cantine, dans le 2e arrondissement de Paris, rassemble des jeunes entrepreneurs du Web. R. FOURNIER/FEDEPHOTO UnsiteInternetpourlestravailleursnomades VOILÀ déjà trois heures que Jeremi Joslin est attablé au café Starbucks du boulevard Poissonnière, à Paris. « Attablé » est d’ailleurs un terme impropre, car il n’a consommé qu’un petit déjeuner à son arrivée, et, depuis, il a le nez dans son ordinateur. « Je suis de passage à Paris, et je me suis installé ici pour travailler tranquillement en attendant mon rendez-vous», raconte ce jeune informaticien free-lance. «Je pense rester encore une partie de l’après-midi», précise-t-il. Le personnel ne proteste pas, et le service de presse de l’enseigne n’a pas sou- haité nous dire s’il s’agit là d’une tolérance exceptionnelle. Ses cafés, en tout cas, font partie des 800 « espaces de travail flexibles » de l’Hexagone que le site Neonomade.com et son application téléphonique recensent, «à l’attention des étudiants, des indépendants ou des salariés en déplacement qui ont besoin de bureaux », comme l’explique Baptiste Broughton, l’un des fondateurs. Le site distingue les espaces gratuits et les espaces payants, les lieux privés (cafés ou salons d’affaire des hôtels) et les lieux publics (bibliothèques municipales). Il signale les nouveaux espaces de coworking. Rares sont ceux qui acceptent les travailleurs nomades, à la journée, comme La Cantine, Soleilles Cowork, ou bientôt La Mutinerie (Mutinerie.org) à Paris. Les grands groupes toutefois s’y mettent, à l’instar de Multiburo (Multiburo.com). La plupart proposent des locations au mois, comme Lawomatic (Lawomatic.fr), ou pour une période plus longue, et sous conditions, comme Community Space. p R. Rs Où s’installer, aussi, quand on doit rencontrer des clients ? « On en avait assez des cafés bruyants ou des hôtels sans confidentialité, assez aussi de travailler l’ordinateur sur les genoux, avec des bornes Wi-Fi qui ne fonctionnent pas », ajoute-t-elle. Les tarifs, plus élevés que ceux de La Cantine puisque l’espace ne bénéficie pas de subventions, semblent destiner Soleilles à un public plus aisé de quadragénaires. Ils intéressent aussi nombre d’entreprises, situées loin de Paris, et cherchant des locaux pour héberger leurs salariés ou leurs commerciaux entre deux rendez-vous. « Nous sommes ouverts à toutes les professions », précise Mme Benattar. Ici aussi, on « réseaute » autour de la machine à café. Ce matin, Valérie Tribes et Albane Thurm, deux anciennes journalistes de la presse écrite, expliquent qu’elles recherchent des blogs féminins pouvantservir de supportspublicitaires à des marques anglosaxonnes. Elles viennent de faire la connaissance de Noël Cambassedes, fondateur d’une agence qui coorganise les Golden Blog Awards, censés récompenser les meilleurs de ces cybercarnets. « On a sûrement des choses à faire ensemble ! », s’exclament-ils, en échangeant leurs cartes. Comme à La Cantine, on espère ici que de belles histoires professionnelles vont s’écrire. p Rafaële Rivais Lacantine.org ; Soleillescowork.com En France, les gamètes d’un même individu ne peuvent servir qu’une dizaine de fois Biomédecine L ’information a de quoi donner le vertige. Américains, Cynthia Daily et son mari, quiont eu recoursà un don de sperme pour concevoir un bébé il y a sept ans, ont recherché sur Internet la trace des éventuels demi-frères ou sœurs de leur enfant, nés du même donneur. Ils ont créé un groupe, qui a atteint aujourd’hui… 150 membres, relate le New York Times. Selon le quotidien américain, de plus en plus d’enfants issus d’un même donneur se retrouvent sur la Toile grâce aux réseaux sociaux, et constituent des groupes qui peuvent atteindre plusieurs dizaines de membres. Si cette recherche est possible aux Etats-Unis, où le donneur peut être identifié, « c’est impossible en France », affirme le docteur JeanMarie Kunstmann, responsable du Cecos (Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme)de l’hôpital Cochin à Paris, précisant que « le don est anonyme et gratuit ». De plus, la loi est claire : « Le recours aux gamètes d’un même donneur ne peut délibérément conduire à la naissance de plus de dix enfants », prévoit le code de la santé. En moyenne, c’est plutôt quatre à cinq enfants par donneur. Cela dépend de la qualité et de laquantité des gamètes recueillis. Le don de sperme est destiné à l’insémination artificielle, la plus ancienne technique d’assistance médicale à la procréation (AMP). « Acte réfléchi et altruiste » Quelque 1 100 enfants sont nés, en 2010 en France, grâce à une insémination artificielle avec donneur de sperme, selon l’Agence de biomédecine, ce qui représente 5,1 % des naissances suite à une AMP (la fécondation in vitro étant la plus répandue), qui s’élèvent à 21 759 enfants, sur un total de 824 641 enfants nés en 2010. Différence majeure, « si aux Etats-Unis, la motivation du don repose sur l’argent, en France, le principe de gratuité, qui s’applique à tout don d’organes, donne lieu à une philosophie différente, c’est souvent un acte réfléchi et altruiste », explique Emmanuelle PradaBordenave, directrice générale de l’Agence de la biomédecine. Laquestion du risquedeconsanguinité avait toutefois été posée lors du lancement des Cecos en 1973 (il existe une vingtaine de centres en France). Certains hommes avaient donné leur sperme à plusieurs endroits. «Ce n’est plus possible aujourd’hui : un donneur ne peut donner dans plusieurs Cecos », précise le docteur Kunstmann. « Je ne peux pas dire que le risque de consanguinité est nul, mais il avait été calculé que même si un don pouvait donner naissance à vingt enfants, le risque de consanguinité était celui de la population générale », poursuit-il. Autre grand principe, l’anonymat, édicté par la loi de bioéthique de 2004, maintenu en 2011, après de multiples débats. Il s’applique au don de tout élément du corps humain. Le don de sperme répond aussi à des règles précises, le donneur devant faire état de sa santé, de ses antécédents personnels et familiaux. Au final, 30 % à 40 % des donneurs sont éliminés, la plupart du temps pour des raisons médicales. Une fois ces risques écartés, les critères d’appariement sont basés sur les caractéristiques du couple receveur au sens du morphotype : pays d’origine des parents, couleur de la peau, des yeux, des cheveux, taille, poids… « L’idée n’est pas de trouver un sosie, mais de choisir un donneur qui n’introduise pas des caractéristiques étrangères à celles du couple. On fait en sorte qu’un enfant ne soit pas repéré comme ne pouvant être issu d’un autre père que le sien », résume le docteur Kunstmann. Le danois Cryos, la plus grande banque de sperme d’Europe, est allé plus loin en refusant récemment le don de sperme à des hommes aux cheveux roux. Motif : trop d’offres par rapport à la demande ! Dans tous les cas, l’objectif est que l’enfant puisse se réapproprier de façon positive la particularité de sa conception. Une question débattue dans le dernier numéro de la revue trimestrielle Enfances & Psy (éditions Erès) qui proposeun dossier intitulé, « Quelles filiations aujourd’hui ? ». Pour certains enfants nés par insémination avec donneur et leurs parents, cette conception peut être une souffrance. Une aide psychologique est conseillée. p Pascale Santi Dondespermatozoides.fr ; Tél. : 0 800 541 541. Un don très contrôlé et réservé aux 18-45 ans Le don de sperme est destiné à des couples en âge de procréer qui ne peuvent pas avoir d’enfants. Le donneur doit être majeur, âgé de moins de 45 ans, être déjà père, avoir l’accord du conjoint s’il est en couple, être en bonne santé. Il lui est demandé son groupe sanguin, des tests sérologiques (hépatites, VIH…), une consultation génétique, un caryotype, et tout autre examen jugé nécessaire par le médecin à la suite du questionnaire médical. Ensuite, après chaque recueil, le sperme est contrôlé afin de vérifier les caractéristiques des spermatozoïdes et l’absence d’infection, et recontrôlé six mois après.