État d`urgence et plan Vigipirate
Transcription
État d`urgence et plan Vigipirate
État d’urgence et plan Vigipirate Référence Internet 9409 Saisissez la Référence Internet 9409 dans le moteur de recherche du site www.weka.fr pour accéder à cette fiche C’est dans un contexte de terreur marqué par les événements du 13 novembre 2015 que le gouvernement a déclaré l’état d’urgence afin de renforcer les compétences de police administrative des autorités de l’État dans le but de combattre la menace terroriste et d’assurer la sécurité des populations. Son domaine d’application vient renforcer celui du plan Vigipirate en vigueur depuis plusieurs années en France. Ce contexte sécuritaire exceptionnel impacte naturellement le travail des polices municipales. Repères C L’état d’urgence Dans quelles circonstances peut-il être déclaré ? La loi n° 55-385 du 3 avril 1955 prévoit que « l’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ou des départements d’outre-mer (…), soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique ». Cette procédure d’exception est rarissime. L’état d’urgence a été appliqué en Algérie en 1955. Il n’a été appliqué en métropole qu’à trois reprises jusqu’à présent : • après le retour au pouvoir du général Charles de Gaulle, suite aux événements du 13 mai 1958, pour faire face à un éventuel coup de force ; • en 1961, après le « putsch des généraux » ; • et en novembre 2005, deux semaines après le début des émeutes urbaines. Enfin, le gouvernement de Laurent Fabius a décrété l’état d’urgence en NouvelleCalédonie en décembre 1984. © Éditions WEKA Comment peut-il être déclaré ? L’état d’urgence est déclaré par décret en conseil des ministres et ne peut être prolongé au-delà de 12 jours que par la loi pour une durée de 3 mois. Le décret, paru au Journal officiel samedi 14 novembre, au lendemain des attentats, est laconique : « L’état d’urgence est déclaré, à compter du 14 novembre 2015, à zéro heure, sur le territoire métropolitain et en Corse. » Quelles sont les mesures susceptibles d’être mises en œuvre ? Les textes accroissent les compétences de l’exécutif pour prendre des mesures restreignant l’exercice de certaines libertés publiques et individuelles lorsque le maintien de l’ordre le justifie. L’état d’urgence confère aux autorités civiles, dans l’aire géographique à laquelle il s’applique, des pouvoirs de police exceptionnels. La déclaration de l’état d’urgence donne pouvoir aux préfets de département : • d’interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par arrêté ; • d’instituer, par arrêté, des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé ; 1 État d’urgence et plan Vigipirate • d’interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l’action des pouvoirs publics. Le ministre de l’Intérieur, pour l’ensemble du territoire, et le préfet, dans le département, peuvent : • ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature ; • interdire à titre général ou particulier les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre. Le décret déclarant ou la loi prorogeant l’état d’urgence peuvent : • conférer aux autorités administratives le pouvoir d’ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit ; • habiliter les mêmes autorités à prendre toutes mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales ; • donner le droit à la juridiction militaire, les tribunaux militaires, à se saisir des crimes qui relèvent normalement de la Cour d’assises. C Vigipirate Qu’est-ce que Vigipirate ? Le plan Vigipirate est un plan gouvernemental qui relève du Premier ministre et associe tous les ministères. C’est un dispositif permanent de vigilance, de prévention et de protection qui associe tous les acteurs du pays : l’État, les collectivités territoriales, les opérateurs susceptibles de concourir à la protection et à la vigilance, les citoyens, etc. C’est un outil central du dispositif français de lutte contre le terrorisme, qui prend acte du maintien durable de cette menace à un niveau élevé. Il se distingue de l’état d’urgence par le caractère propre des mesures appliquées et par son activation sur des durées plus longues que l’état d’urgence. Il ne contrevient pas aux 2 libertés publiques aussi restrictivement que l’état d’urgence. Vigipirate repose sur un socle de mesures permanentes qui s’appliquent à tous les grands domaines d’activité de la société (les transports, la santé, l’alimentation, les réseaux d’énergie, la sécurité des systèmes d’information…), sans induire de contraintes excessives sur la vie économique et sociale. Il prévoit également de nombreuses mesures additionnelles activées en fonction de l’évolution de la menace et des vulnérabilités, et qui permettent d’adapter le niveau de vigilance et de protection, en mobilisant tous les acteurs concernés. Quels sont les niveaux d’alerte ? Le plan Vigipirate a été actualisé à plusieurs reprises en 2000, 2002, 2003 et 2006. C’est en 2003 qu’ont été adoptés les quatre niveaux d’alerte répertoriés par couleur (jaune, orange, rouge et écarlate). En 2014, le code d’alerte du plan Vigipirate a été simplifié et il n’existe désormais plus que deux niveaux, matérialisés par un logo visible dans l’espace public : • un niveau de vigilance qui peut être renforcé temporairement, géographiquement et sectoriellement pour faire face à une menace particulière ou à une vulnérabilité ponctuelle ; • et un niveau d’alerte attentat pour faire face à une menace imminente. Actuellement, le plan Vigipirate est au niveau alerte attentat sur l’ensemble de l’Île-de-France et au niveau vigilance sur le reste du pays. Quels sont ses objectifs ? • Protéger les rassemblements de masse (dans des lieux non circonscrits). • Protéger les installations et bâtiments (lieux circonscrits par une enceinte). • Protéger les installations dangereuses et matières dangereuses. • Assurer la cybersécurité. • Protéger le secteur aérien. • Protéger le secteur maritime. • Protéger les transports terrestres. • Protéger le secteur de la santé. © Éditions WEKA État d’urgence et plan Vigipirate • Protéger la chaîne alimentaire. • Protéger les réseaux (eau, électricité, dépôts d’hydrocarbures, réseaux de gaz, réseaux de communication, etc.). Quelles sont les mesures susceptibles d’être mises en œuvre ? • Surveillance renforcée des lieux fréquentés par le public. • Mise en alerte des services de secours à personnes et des forces de l’ordre. • Surveillance des transports. • Contribution des forces armées à la surveillance. • Renforcement du contrôle des personnes. • Interdiction de stationnement aux abords de certains sites sensibles (des établissements scolaires, par exemple), etc. C Impact de ces dispositifs sur les polices municipales Un impact opérationnel La riposte contre la menace terroriste s’inscrit dans la durée et pour cette raison la mobilisation de toutes les forces de la République, dont font naturellement partie les maires, est nécessaire. et aux salles de spectacles ; renfort de la surveillance aux abords des établissements sensibles, notamment des écoles, etc.). Concrètement, les maires doivent donc veiller à ce que les mesures de police administrative prises par les préfets de département soient correctement appliquées et respectées sur le territoire de leur commune. Ces missions reviennent naturellement aux policiers municipaux. La police et la gendarmerie nationales étant prioritairement affectées à des missions de sécurisation renforcée du fait de l’état d’urgence (et ce, à moyens constants), les polices municipales font l’objet de davantage de sollicitations pour des missions de sécurité publique classiques. Ainsi, les polices municipales pourraient bien voir leur doctrine d’emploi fortement évoluer dans le climat actuel avec la mise en œuvre de l’état d’urgence et du plan Vigipirate. A noter A noter L’état d’urgence et le plan Vigipirate n’emportent aucune modification de l’étendue des pouvoirs de police des maires. Derrière le traitement de fond que la radicalisation suppose, les maires ont tout naturellement été sensibilisés par les autorités préfectorales sur le renforcement nécessaire des mesures de protection et de surveillance. Le maire doit constituer l’interface entre la population du territoire qu’il administre et le préfet, et assurer les remontées d’informations essentielles. Il doit aussi garantir la sécurité des concitoyens dans le ressort de sa commune et renforcer la sécurité des sites sensibles, en complément des moyens déployés par l’État. Des prérogatives susceptibles d’évoluer Le contexte de menace est susceptible d’apporter une réflexion sur les prérogatives des policiers municipaux. À titre d’exemple, dans la proposition de loi sur la lutte contre l’insécurité et le terrorisme dans les transports, examinée les 16 et 17 décembre 2015, les policiers municipaux se sont vu confier de nouvelles missions dans le cadre de la lutte contre l’insécurité et le terrorisme dans les transports. Les maires doivent s’assurer du respect dans leur commune des mesures décidées par les préfets (renforcement de la surveillance des lieux culturels et cultuels, gares, ports et aéroports, lieux touristiques, centres commerciaux et autres établissements recevant du public, etc. ; contrôle renforcé des accès aux stades C’est l’une des nouvelles dispositions introduites dans la proposition de loi dite « Savary » (du nom de son rapporteur, le député socialiste Gilles Savary) relative à la prévention et à la lutte contre les atteintes graves à la sécurité publique, contre le terrorisme et contre la fraude dans les transports publics de voyageurs. Selon un © Éditions WEKA 3 État d’urgence et plan Vigipirate amendement du rapporteur, les capacités d’intervention des policiers municipaux pourraient être renforcées en leur permettant d’intervenir pour assurer « le bon ordre dans les transports publics de voyageurs ». En clair, les policiers municipaux rejoindraient la liste des agents habilités à la police des transports, prévus à l’article L. 2241-1 du Code des transports. Les policiers municipaux pourraient ainsi, entre autres, dresser des procès-verbaux contre les infractions prévues par le Code des transports. Des équipements renforcés L’équipement en armes à feu et la dotation en moyens de protection sont régulièrement réclamés par les agents. Le débat est revenu en pleine lumière après les attentats de janvier, qui avaient notamment vu la mort de Clarissa Jean-Philippe, policière municipale de 25 ans, à Montrouge. Les événements de novembre n’ont fait que confirmer une nette tendance à l’armement des policiers municipaux, encouragée sans équivoque et pour la première fois par le gouvernement. L’État propose de mettre gracieusement à disposition des collectivités qui souhaiteraient armer leur police municipale, et qui seront autorisées à le faire, des armes opérationnelles (anciens revolvers de la police nationale), dans la limite des stocks disponibles (plus de 4 000 armes). Le gouvernement a également annoncé une rallonge de 2 millions d’euros des ressources du fonds interministériel de prévention de la délinquance, représentant une aide pouvant aller jusqu’à 50 %, à l’acquisition de 8 000 gilets pare-balles. Enfin, les préfets faisaient l’objet d’injonctions du gouvernement pour un traitement rapide des demandes d’armement et des demandes de cofinancement de gilets pare-balles formulées par les collectivités. Conclusion Conclusion La situation née des attentats terroristes a nécessité la mise en œuvre de mesures exceptionnelles et constitutionnellement 4 temporaires. Il est toutefois à craindre que les dispositions se pérennisent dans le temps et nécessitent le concours actif de l’ensemble des partenaires institutionnels de la sécurité. Ce contexte nouveau, avec ces nouvelles formes de menaces, est susceptible d’impacter la doctrine d’emploi des polices municipales. Notre conseil La coopération entre les polices municipales et les forces de sécurité de l’État revêt un enjeu essentiel dans le climat actuel. La collaboration doit être renforcée pour satisfaire les objectifs opérationnels mais aussi pour la protection des personnels. Évitez les erreurs Il ne faut pas oublier d’amender la convention de coordination en cas d’armement de la police municipale. Une mention particulière doit par ailleurs être intégrée en cas de mise à disposition d’armes par les services de l’État. Exemple de mention : « En application du décret n° 2015-496 du 29 avril 2015 autorisant les agents de police municipale à utiliser à titre expérimental des révolvers chambrés pour le calibre 357 magnum uniquement avec des munitions de calibre 38 spécial, et au vu du récépissé de remise signé par le préfet de zone, le préfet délégué à la sécurité et à la défense ou son représentant et par le maire ou son représentant, la commune reçoit N révolvers de l’État, en vue de leur utilisation par les agents de la police municipale. Cette utilisation doit s’effectuer notamment en application des articles R. 511-12, R. 511-18, R. 511-19, et R. 511-30 du Code de la sécurité intérieure, sans préjudice de l’application des autres articles du Code de la sécurité intérieure régissant l’armement des intéressés (livre V, partie réglementaire). » © Éditions WEKA État d’urgence et plan Vigipirate Foire aux questions Est-ce en vertu de l’état d’urgence que les policiers municipaux ont la possibilité de procéder à la fouille des sacs ? Non, c’est la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011, dite « loi LOPPSI II », qui offre la possibilité aux policiers municipaux de réaliser une inspection des sacs et bagages à main lors de manifestations rassemblant plus de 300 personnes (contre 1 500 personnes antérieurement). Cette possibilité est ouverte à toutes manifestations dans la période actuelle. Pour aller + loin Références juridiques • Loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence • Loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 prorogeant l’application de la loi Les plus Internet • • • • n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence et renforçant l’efficacité de ses dispositions Décret n° 2015-496 du 29 avril 2015 autorisant les agents de police municipale à utiliser à titre expérimental des revolvers chambrés pour le calibre 357 magnum Décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 portant application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 Décret n° 2015-1476 du 14 novembre 2015 portant application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 Circulaire du 14 novembre 2015 relative à la mise en œuvre du décret n° 20151475 du 14 novembre 2015 portant application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 modifiée instituant un état d’urgence et du décret n° 2015-1476 du 14 novembre 2015 relatif à l’application de la même loi Saisissez la Référence Internet 9409 dans le moteur de recherche du site www.weka.fr pour accéder aux mises à jour de cette fiche ainsi que la Réf. Internet des rubriques suivantes : E Références aux textes officiels rattachés à cette fiche • • • • • • • • Code des transports Loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011, dite « loi LOPPSI II » Loi n° 55-385 du 3 avril 1955 Décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 Décret n° 2015-1476 du 14 novembre 2015 Décret n° 2015-496 du 29 avril 2015 Circulaire du 14 novembre 2015 E Le forum des acteurs publics Posez toutes vos questions et partagez votre expérience sur le forum. Nos experts et vos confrères vous répondent sur www.weka.fr/forum/. © Éditions WEKA 5