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dossier fouilles récentes n°7 PDF.qxp
DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE
MUSÉE ARCHÉOLOGIQUE
2, PLACE DU CHÂTEAU - STRASBOURG
10 000 ANS D’HISTOIRE !
Dix ans de fouilles archéologiques en Alsace
Série « Fouilles récentes » n°7
du 6 novembre 2009 au 31 août 2010
Erstein « Grasweg » : ouverture de la fosse d’installation du puits à eau daté de la fin
du IIIe millénaire avant J.-C. - Photo : Ch. Croutsch, PAIR
Service éducatif des Musées de la Ville de Strasbourg
2, place du Château - 67076 Strasbourg cedex
réservations le matin au 03 88 88 50 50 - renseignements l’après-midi au 03 88 52 50 04
DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE
10 000 ANS D’HISTOIRE !
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Sommaire
I. 10 000 ANS D’HISTOIRE
p. 3
1. LE PROJET ET SES ACTEURS
p. 3
2. LES PRINCIPAUX APPORTS NOUVEAUX DE LA RECHERCHE
p. 4
3. UN CHAMP CHRONOLOGIQUE ÉLARGI
p. 11
II. INFORMATIONS PRATIQUES
p. 14
1. DÉCOUVRIR L’EXPOSITION
p. 14
2. AUTOUR DE L’EXPOSITION
p. 15
ANNEXES
carte des sites
p. 16
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10 000 ANS D’HISTOIRE !
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I. 10 000 ANS D’HISTOIRE
1. LE PROJET ET SES ACTEURS
Le développement d’une véritable archéologie professionnelle, en réponse à
l’accélération des destructions du patrimoine archéologique par les grands travaux
et une exploitation agricole de plus en plus intensive, a durablement changé le cadre
dans lequel œuvrait l’archéologie nationale dans les années 1970-1980. À une
archéologie de sauvetage souvent précaire et aléatoire s’est substituée une politique
d’archéologie préventive contractualisée entre aménageurs et archéologues en
amont du début des travaux.
Dans ce dispositif national, l’Alsace occupe une place de choix, en raison du dynamisme de son activité et du nombre important de chantiers menés chaque année
sous l’autorité scientifique et administrative du Service Régional de l’Archéologie. Ce
service déconcentré du Ministère de la Culture encadre et gère l’activité archéologique au sein de la Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Alsace.
L’apparition, à côté de l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives
(I.N.R.A.P.), de deux nouveaux opérateurs, l’un public avec le Pôle Archéologique
Interdépartemental Rhénan créé sous l’égide des deux Conseils généraux, l’autre
privé avec la Société Antéa Archéologie, permet de répondre de façon diversifiée à
la multiplication des découvertes liées aux grands travaux d’aménagement du territoire, à la construction de lotissements ou à la rénovation des centres urbains
anciens.
L’exposition présentée ici par le Musée Archéologique de Strasbourg constitue le
septième volet de la série « Fouilles récentes ». Inaugurées en 1992, ces expositions
sont consacrées à l’actualité des découvertes alsaciennes et aux grands thèmes qui
structurent la recherche archéologique régionale. Ces découvertes, souvent inédites,
sont ainsi portées à la connaissance du grand public et témoignent du dynamisme
et de la diversité de l’archéologie régionale. L’objectif est aussi de permettre aux
habitants des communes concernées de s’approprier un peu de leur passé et de
mieux comprendre l’intérêt des fouilles qui se sont déroulées près de chez eux en
leur restituant le bilan des études scientifiques réalisées. L’exposition est donc aussi
un outil de sensibilisation au patrimoine archéologique enfoui et à sa fragilité.
DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE
10 000 ANS D’HISTOIRE !
L’exposition « 10 000 ans d’histoire » ne concerne pas, comme pour les expositions
précédentes (Wolfisheim, Mutzig, Strasbourg, Niedernai, Erstein…) une monographie de site, mais porte ici sur un bilan régional plus large, étendu à l’ensemble de
l’Alsace. Elle présente les résultats majeurs des fouilles de la dernière décennie, à
travers une quarantaine de sites, et aborde les acquis nouveaux de la recherche et
les changements apportés grâce à eux à notre connaissance sur le passé de la
région.
2. LES PRINCIPAUX APPORTS NOUVEAUX DE LA RECHERCHE
a) Un « Néolithique initial » précèdant la néolithisation
L’introduction de l’agriculture en Alsace est attribuée depuis de longues années aux
colons danubiens porteurs de la culture dite « rubanée », arrivés vers 5300 avant
notre ère dans la Plaine du Rhin supérieur. Cette thèse a commencé à vaciller il y a
une quinzaine d’années, avec la découverte, dans un certain nombre de tourbières
localisées entre le Tyrol autrichien et l’Est de la France, de pollens de céréales et
d’indices d’ouverture du paysage interprétables comme des défrichements. Leur
datation, entre 6500 et 5500 avant J.-C., précède parfois de plus d’un millénaire la
diffusion du Rubané. Un « Néolithique initial » est ainsi venu compléter la chronologie
de cette période charnière de l’histoire de l’humanité.
À Lutter, dans le Sundgau, la fouille d’un abri-sous-roche a livré, grâce à un tamisage
très fin des sédiments, un petit lot de céréales dans une couche antérieure au
Rubané. Il pourrait s’agir là des premiers indices d’agriculture dans la région.
Cette phase précoce se caractérise aussi par l’apparition des premières céramiques
parmi les populations autochtones et non pas seulement par « importation », avec
l’identification de deux styles céramiques dits « du Limbourg » et de la « Hoguette »,
dont les décors et les formes sont très différents de ceux des céramiques néolithiques rubanées dont elles sont contemporaines. L’Alsace placée dans une zone de
contacts entre l’aire de diffusion de ces céramiques et l’aire rubanée offre ainsi un
terrain d’études privilégié pour observer l’évolution et les interactions entre les
populations autochtones de « chasseurs-cueilleurs » et les nouveaux arrivants venus
des régions danubiennes à l’aube du Néolithique.
b) De nouveaux indices pour le Néolithique final
Deux phases chronologiques principales se partagent cette séquence chronologique :
- la civilisation de Horgen (3400-2800 avant J.-C.), qui a été largement étudiée sur
le plateau suisse dont elle est originaire
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10 000 ANS D’HISTOIRE !
- les civilisations cordée et campaniforme (2800-2200 avant J.-C.).
Les découvertes sont rares pour ces périodes finales du Néolithique en Alsace et
cette phase de transition entre le Néolithique et le début de l’Âge du Bronze reste
encore peu connue. Les nouveaux jalons, mis au jour à Éguisheim et à Hégenheim
dans le Haut-Rhin, renouvèlent ainsi la recherche pour cette période.
Le site d’habitat fouillé à Éguisheim, au lieu-dit Strassenaecker, se rattache à la civilisation cordée et vient compléter fort à propos un premier ensemble mis au jour en
1983 à Burnhaupt-le-Bas. L’occupation est datée entre 2700 et 2350 avant J.-C.,
mais il est difficile de déterminer si elle correspond à l’arrivée brutale d’une nouvelle
population qui impose ses spécificités culturelles ou d’un groupe qui s’est fondu
dans la population locale en apportant sa propre culture. Dans tous les cas, il s’agit
d’une population en provenance du sud de l’Allemagne ou du plateau suisse.
La sépulture campaniforme découverte à Hégenheim en 2005 n’a livré qu’un seul
vase décoré, placé près de la tête, en guise de mobilier funéraire.
La découverte insolite d’un bûcher funéraire (avec les restes calcinés de onze individus), mis au jour à Mundolsheim-Reichstett et daté du Néolithique final, révèle
une pratique funéraire inconnue jusque là dans le Néolithique régional.
c) Les sites protohistoriques étudiés dans leur environnement
Le site d’habitat d’Erstein Grasweg présente la particularité remarquable d’avoir
livré trois puits avec des bois gorgés d’eau conservés et datés par dendrochronologie de la transition Néolithique final/Bronze ancien.
Le site de Meistratzheim Foegel a révélé la présence d’un habitat exceptionnellement dense. C’est la période du Bronze moyen/début du Bronze final I (1400 à
1300 avant J.-C.) qui a permis les avancées les plus significatives : la fosse 265, par
l’abondance du mobilier recueilli (près de 33 kg de céramiques), est destinée à
devenir une référence pour le Bronze moyen en Alsace. L’étude de la faune issue de
ce site a mis aussi en valeur la place de choix qu’occupe le cheval parmi les animaux
domestiques, devant la triade classique : ovicapridés, bovins, porcins. La chasse
n’est quasiment pas représentée et l’agriculture est dominée par la culture de
l’orge.
L’occupation du début du Bronze final (vers 1350-1100 avant J.-C.) d’Entzheim In
der Klamm, constituée d’une cinquantaine de fosses, de silos et de structures de
combustion à galets chauffés, est implantée à proximité d’un ancien chenal de la
Bruche. Au nord de l’occupation, une grande fosse aux contours irréguliers (fosse
1162) a livré un dépôt constitué de dix récipients en céramique : une jarre, trois
urnes complètes, une incomplète et cinq écuelles. Il a été mis en relation avec des
cérémonies et des rassemblements nécessitant une importante quantité de nourriture, en raison de la présence de ce véritable service placé ensuite dans la fosse.
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10 000 ANS D’HISTOIRE !
Si de nombreuses nécropoles de l’Âge du Bronze sont connues en Alsace, presqu’aucune n’a pu faire l’objet d’une fouille complète. C’est la période finale de l’Âge
du Bronze, au cours de laquelle se généralise la pratique de la crémation des corps,
qui est la mieux connue. L’organisation interne des nécropoles et le lien avec leur
environnement ont également été précisés. À côté des fosses recevant les urnes, de
nouveaux types de structures ont été repérés : enclos circulaires ou rectangulaires
proches ou au contact des sépultures sont probablement à mettre en relation avec
l’une des phases du rituel funéraire.
d) Les établissements ruraux de l’Age du Fer dans la plaine d’Alsace
Les structures d’habitat protohistorique sont difficiles à identifier, en raison de la
faiblesse de leurs fondations et de l’érosion des sols qui a souvent effacé la trace
des trous de poteaux en bois composant l’ossature des maisons.
Les plans de ces maisons, identifiés récemment sur les sites de l’Âge du Fer de
Wolfgantzen, Illfurth, Sierentz, Colmar, Didenheim, Schaeffersheim, Matzenheim,
Entzheim, sont donc fort précieux pour développer nos connaissances sur ce sujet
et sur l’occupation de la plaine alsacienne à l’époque celtique. Ces plans présentent
le plus souvent un bâtiment à une seule nef, parfois à pans coupés, fondée sur deux
fois quatre à six poteaux, associé à des greniers reposant sur quatre poteaux
d’angle. De nombreuses fosses, foyers, puits, greniers sur poteaux, fours, ainsi que
des silos à grains témoignent des activités domestiques et artisanales et de la vie
quotidienne des populations. Les objets retrouvés dans les fosses, reconverties en
dépotoirs, permettent de dater les diverses phases de l’occupation du site. Lorsque
des graines sont préservées, les études de graines peuvent fournir de précieuses
informations sur les cultures, mais aussi sur les habitudes alimentaires de ces populations.
Les « fermes indigènes » isolées, généralement entourées d’une grande palissade
en bois ou ouvertes sur leur environnement, semblent avoir une durée de vie assez
courte n’excédant pas quelques dizaines d’année. Elles traduisent une dense organisation du territoire, fondée sur des ensembles agricoles dispersés, exploités par
des groupes familiaux de petite taille.
La réflexion a porté aussi sur l’organisation du territoire au début de la période
celtique, au Premier Âge du Fer (Hallstatt). Elle se fonde en large partie sur la
connaissance de sites fortifiés de hauteur, les « oppida », qui étendent leur autorité
sur un territoire plus ou moins vaste. Les « princes » locaux qui y résident se font
inhumer sous de hauts tertres funéraires avec un riche mobilier. Le défunt est généralement déposé dans une vaste chambre funéraire en bois avec char, vaisselle en
bronze importée du monde méditerranéen, parure en or et en ambre, pièces d’armement de prestige…
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La hiérarchisation et la relation des sites hallstattiens au sein d’un territoire - du site
de hauteur aux habitats ruraux de la plaine - a mis en lumière leur contemporanéité
et leur complémentarité. Tel est le cas à Illfurth où pour la première fois, un lien a
été établi entre le site de hauteur du Britzgyberg et l’habitat aménagé une plateforme en contrebas, où se concentrent zones de travail et de stockage.
La région de Saverne a livré, elle aussi, un vaste oppidum au « Fossé des
Pandours », dont la création remonte à la fin du IIe siècle avant J.-C. (période de La
Tène ou second Âge du Fer). Le site était protégé par un grand rempart en pierre et
en terre, à armature interne en poutres assemblées, de type « murus gallicus ».
Capitale des Médiomatriques, centre politique et économique de la région durant
près de deux siècles, l’oppidum est placé au cœur d’un réseau de relations non
seulement régional, mais aussi interrégional entre le monde celtique et germanique
et le monde méditerranéen.
e) Villes et campagnes à l’époque gallo-romaine
Le chef-lieu de la cité des Triboques, Brocomagus/Brumath, est devenue après la
conquête de l’Alsace par les Romains et l’établissement d’un camp légionnaire à
Argentorate/Strasbourg, la capitale civile de la Basse-Alsace. Si les grandes lignes
de sa topographie (thermes, quartiers artisanaux, caves, voirie antique) ont été
progressivement mises en évidence par les fouilles de la fin du XXe siècle, de
nombreux points restent encore dans l’ombre.
Les fouilles récentes de l’INRAP, place de l’Aigle, place V. Fischer et rue du Château,
ont ainsi permis d’affiner les connaissances sur la voirie romaine et sur l’organisation de l’habitat antique au cœur de la cité. Elles ont cerné aussi plus précisément
les phases chronologiques de l’occupation de la ville antique, dont la création
semble remonter à l’époque de l’empereur Auguste au début du 1er siècle de notre
ère.
Organisée à partir de deux axes orthonormés, cardo et decumanus, et d’une trame
régulière d’axes secondaires, l’agglomération se développe en plusieurs extensions
successives ou densification des secteurs déjà occupés, entre la fin du Ier et le IVe
siècle après J.-C. L’architecture de terre et de bois domine, avec une grande variété
de modes de construction. Plusieurs caves maçonnées ont également été explorées.
En l’absence d’informations historiques et archéologiques, Brumath était traditionnellement considérée au Bas-Empire comme une ville ouverte, contrairement à
Strasbourg et Saverne, où la présence d’une enceinte antique est avérée. Les opérations archéologiques réalisées place Victor Fischer en 2001 et rue du Château en
2005 permettent dorénavant d’invalider cette hypothèse, avec la présence certaine
d’un mur d’enceinte flanqué de demi-tours rondes externes, dont il ne subsiste que
les tranchées de récupération des maçonneries.
Avec la romanisation, se développe et s’intensifie dans toute l’Alsace un vaste
réseau d’agglomérations dans des secteurs où préexistaient dans de nombreux cas
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des bourgades celtiques. Leurs fonctions économiques et commerciales sont
souvent doublées d’une fonction religieuse.
Le vicus de Horbourg-Wihr se développe sur une terrasse à l’est de la localité, près
d’un passage fluvial, entre la fin du Ier et le début du IIIe siècle après J.-C.
À Rosheim « Baruch » et « Laser », un complexe d’habitation avec caves et installations liées à des activités artisanales et domestiques (forge, séchoir à grains,
puits…) a été fouillé en 2002.
À Eckbolsheim, sur le site du nouveau Zénith, une cave à livré des vestiges d’enduit
peint décoré, témoignant d’une occupation romaine importante dans le secteur
situé à l’ouest du camp légionnaire et du vicus artisanal de Koenigshoffen, non loin
de la voie reliant Argentorate à Saverne.
La découverte récente de deux sanctuaires ruraux dans le Haut-Rhin, à Habsheim et
à Sierentz, contribue à une meilleure connaissance de ces petits lieux de culte. La
relation de celui de Habsheim avec une villa romaine, dans la pars rustica de
laquelle il a été édifié au Ier siècle après J.-C., représente une information inédite à
ce jour pour la région. L’intérêt du sanctuaire de Sierentz réside dans l’originalité
des structures mises au jour : fosses à poteau datées du Ier et du IVe siècle après J.C. et fosse à offrandes comblée au milieu du Ier siècle après J.-C. Des dépôts monétaires accompagnent l’aménagement de ces structures, dont la destination reste
difficile à cerner. La fosse à offrandes est, quant à elle, la première du genre dans
la région : elle contenait de nombreuses plantes et fruits carbonisés comme des
pignons de pin, des dattes, des figues, types de plantes que l’on retrouve plus particulièrement dans des contextes cultuels.
f) Exploitations rurales mérovingiennes
Le développement de fouilles préventives sur de grandes superficies a permis de
bénéficier d’apports nouveaux sur l’habitat des débuts du Moyen Âge, ainsi à
Marlenheim et à Sermersheim Hintere Buehn.
À l’idée jusqu’alors admise de sites vivant en complète autarcie et produisant tout
ce qui leur est nécessaire a peu à peu succédé la théorie d’une possible hiérarchisation des habitats, avec une certaine spécialisation (au niveau de l’élevage, par
exemple) et donc une complémentarité économique des divers établissements
entre eux. Les activités principales reposent sur l’agriculture et l’élevage, mais le
rôle de l’artisanat commence à être mieux cerné. Les analyses archéo-botaniques
menées sur le site de Sermersheim ont livré un aperçu très complet sur la transformation du paysage par les activités agricoles (culture de céréales, légumineuses,
plantes condimentaires, fruits et plantes oléagineuses) et sur l’alimentation des
populations mérovingiennes.
Les divers sites fouillés ces dernières années à Marlenheim – où les textes mentionnent l’existence d’un palais mérovingien – ont révélé une occupation importante
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pour les périodes mérovingienne et carolingienne, sans équivalent parmi les établissements ruraux contemporains connus à ce jour. Des vestiges d’habitat datant du
VIe au XIIe siècle après J.-C. ont été retrouvés sur trois des secteurs étudiés. Au lieudit Hoffstatt, se trouvait une grande construction massive de plan rectangulaire,
dotée d’un vestibule mais dont la fonction exacte – publique ou privée – n’a pas pu
être déterminée. Des fosses-silos, destinées à la conservation des céréales, étaient
réparties sur la plupart des secteurs. Certaines, de très grande contenance, ne
pouvaient être que d’un usage collectif ou correspondre aux réserves d’une maison
seigneuriale.
Si les vestiges récemment dégagés par les fouilles ne correspondent probablement
pas aux restes mêmes de la résidence des rois mérovingiens et carolingiens, la
superficie de l’habitat, les traces d’une architecture plus soignée, l’importance des
réserves céréalières, mais aussi le niveau de vie élevé d’une partie de la population
et, surtout, la présence d’un quartier d’artisans, avec présence d’un orfèvre, sont
autant d’indices qui témoignent de l’existence sur le site de Marlenheim d’un lieu
central en lien avec un grand domaine.
g) Une histoire du peuplement à partir de l’étude des pratiques funéraires de
l’époque mérovingienne
Dans la zone frontalière qu’est l’Alsace jusqu’à l’époque carolingienne, l’observation
des mouvements de populations présente aussi de nombreux enseignements
historiques : arrivée des Alamans au IVe siècle se mettant au service de l’autorité
romaine, implantation germanique croissante de colons dans la région au siècle
suivant, intégration au royaume franc entre 496 et 506. Des influences multiples
attribuables non seulement aux Alamans, aux Francs, mais parfois aussi aux
Burgondes, aux Saxons et aux Thuringiens sont perceptibles à travers l’étude du
mobilier archéologique.
Des ensembles importants (208 tombes à Illfurth Buergelen) ont été étudiés ces
dernières années, même si aucune nécropole n’a fait pour le moment l’objet d’une
fouille exhaustive en Alsace. La présence d’archéo-anthropologues a permis aussi
de mieux cerner le mode d’inhumation et le rituel funéraire complexe de ces populations. Les coutumes funéraires observées à Illfurth traduisent une indéniable
influence germanique : nombreux dépôts d’armes, présence de cercles et de tertres
funéraires, offrandes animales importantes et diversifiées, qui confirment les
études déjà effectuées précédemment à Erstein et Illkirch.
Le problème de la christianisation des populations alsaciennes du haut Moyen Âge
n’a, par contre, que peu avancé ; la propagation du christianisme semble se faire à
partir des centres urbains où se construisent les premières églises. Le site d’Illfurth
a toutefois fait apparaître la contemporanéité de la nécropole « germanique » à
tombes sous tertres et d’une seconde nécropole regroupée autour de l’église de la
Burnkirch selon la tradition chrétienne.
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DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE
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h) Économie, architecture et société au Moyen Âge en Alsace
Une maison de chevalier, de plan rectangulaire, construite en pierres dans la
seconde moitié du XIIIe siècle, a été mise en évidence par les fouilles effectuées
depuis 2003 dans le jardin du presbytère à Châtenois. L’édifice était adossé au mur
nord de l’enceinte probablement fortifiée par l’évêque de Strasbourg au cours du
XIIIe siècle.
Au cours du XVe siècle, la maison a été dotée d’un sous-sol, directement creusé dans
le substrat, avec d’importantes reprises en sous-œuvre effectuées sur le bâtiment.
L’abondante quantité d’objets métalliques découverts dans le niveau d’incendie qui
a détruit l’édifice à la fin du XVIe siècle a livré des éléments d’huisserie (serrurerie,
gonds, pentures…), des ustensiles de cuisine (chaudron, crémaillères, poêles…), des
pièces d’armement (éléments d’armures, projectiles, lances de guerre…) et des
objets en relation avec les chevaux (harnachements, outillage de maréchal-ferrant)
ou les travaux agricoles.
Il s’agit là de la demeure d’un chevalier aisé, gestionnaire d’un domaine agricole où
le travail de la vigne occupe une place de choix. La céramique recueillie, notamment
la céramique de poêle, conforte le caractère aristocratique de l’habitat. Selon les
sources écrites, l’immeuble aurait été occupé, à partir de 1465, par la famille Zum
Trubel.
Des fouilles archéologiques ont été réalisées de 1991 à 2002 au château de
Wangenbourg dans le cadre d’un programme de travaux de consolidation des
vestiges et de mise en valeur générale du site par la Conservation régionale des
Monuments historiques. Elles ont permis de mettre en évidence la présence des
vestiges d’un château antérieur au château actuel, en particulier les fondations
d’une tour-habitat carrée au pied du donjon actuel. Ce premier château, a été
profondément modifié dans la première moitié du XIIIe siècle par le creusement d’un
fossé intermédiaire qui a donné naissance aux deux entités composant le château
actuel : à l’ouest le château et son grand logis gothique (avec vestiges d’une étuve
et d’une cuisine) entourés d’une enceinte en blocs à bossage et à l’est la basse-cour
entourée d’une enceinte en blocs lisses, vestige de l’enceinte primitive. À proximité
du logis a été mise au jour une citerne à filtration dont le puisard central est
conservé sur une hauteur de 6,40 m.
La confrontation des résultats des fouilles aux textes d’archives a permis de voir
sous un jour nouveau l’histoire architecturale du château. À côté des constructions
encore visibles en élévation avant le début des fouilles ont été découverts les
vestiges de constructions arasées, plus anciennes, dont on ignorait jusqu’à présent
l’existence. Le mobilier archéologique recueilli couvre une période allant du XIIIe au
XVIIIe siècle et témoigne des différents aspects de la vie quotidienne dans un
château fort de montagne alsacien.
Le château de Kagenfels est propriété de la Ville d’Obernai depuis 1563. Les
travaux réalisés depuis 2000 par un groupe de bénévoles ont permis de compléter
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DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE
10 000 ANS D’HISTOIRE !
le plan du château, jusqu’alors mal connu et très lacunaire, et de préciser ses
phases de développement. Devant l’intérêt de la ruine, un programme de travaux
pluriannuel a été élaboré selon les objectifs suivants : conservation de l’ensemble
des vestiges bâtis, restitution du cheminement interne et externe permettant
d’accéder au logis sommital, sécurisation du site très escarpé et soumis à des
chutes de pierres fréquentes et mise en valeur paysagère de la ruine. Ce programme
de consolidation sur le long terme est accompagné par la mise en place d’une fouille
programmée pluriannuelle, dont l’objectif est l’étude exhaustive du cône d’effondrement du château, la fouille étant un préalable nécessaire aux consolidations.
L’intervention archéologique réalisée à partir de juin 2003 rue Neuve à Saverne a
révélé la présence d’un atelier de potier de la fin du Moyen Âge, avec présence des
restes d’un four et de fosses circulaires provenant de l’extraction d’argile. Ces fosses
ont été réutilisées par la suite comme fosses à déchets pour les rebuts de cuisson
(avec des défauts tels que fêlures, surcuisson, déformations, problèmes de
glaçure...). La présence de fragments de moules ayant servi à la fabrication de
carreaux de poêle est particulièrement intéressante. De nombreux carreaux présentent des motifs identiques à ceux de carreaux découverts récemment dans les
châteaux forts de la région de Saverne. Ces motifs se retrouvent également sur des
sites beaucoup plus éloignés, localisés principalement dans les régions du Rhin
supérieur. Ils témoignent de la circulation des modèles destinés à la réalisation des
moules sur une large aire géographique.
La quantité de céramiques recueillie (plusieurs centaines de milliers de tessons) et
la variété des types indiquent que nous sommes en présence d’un important centre
de production. Ce mobilier permet de dater l’époque de fonctionnement de l’atelier
de la seconde moitié du XVe siècle. Il se compose de poterie culinaire, de céramique
de poêle, de lampes à huile, de jouets et d’instruments de musique en terre cuite,
ainsi que d’épis de faîtage.
3. UN CHAMP CHRONOLOGIQUE ÉLARGI
Le champ chronologique très large de l’exposition s’étend du Néolithique ( 5800
avant J.-C.) à l’archéologie des grands conflits mondiaux qui ont marqué le XXe siècle,
en passant par l’archéologie protohistoire, gallo-romaine, mérovingienne et médiévale.
Cet élargissement du champ de la recherche à l’archéologie industrielle et à celle
des grands conflits mondiaux ouvre de nouvelles directions de recherche pour les
scientifiques.
Le projet du futur musée Lalique à Wingen-sur-Moder a permis ainsi d’ouvrir un
nouveau domaine de recherche dans la région pour l’archéologie industrielle.
L’insertion du musée dans les anciens bâtiments de la verrerie du Hochberg, fondée
en 1715 et fermée en 1868, tisse un lien direct entre la fonction initiale du lieu et le
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projet contemporain. Dans ce cadre, la fouille archéologique a été concentrée sur les
vestiges de la halle principale de production localisée sous le futur parking. Les
fouilles ont révélé le plan d’un édifice rectangulaire (28,00 x 14,40 m) à pan de bois
édifié sur des solins maçonnés. Divisé en trois parties internes, l’édifice est organisé
autour du four central, tandis que les matières premières, c’est-à-dire le bois pour
l’énergie et la pâte de verre pour la production, étaient respectivement entreposées
au nord et au sud. La structure devait donc être entretenue régulièrement, au moins
pour certaines parties, ce que confirme la stratigraphie caractérisée par des
recharges successives de sable ou d’argile. La circulation dans le bâtiment était facilitée par la pose de dalles de grès au sol.
Pendant de longues années la verrerie du Hochberg a fabriqué à la fois des
bouteilles, des verres de montre – jusqu’à 1500 pièces par jour – et du verre à vitre.
Progressivement, c’est dans ce dernier type de production qu’elle s’est spécialisée,
développant une gamme de couleurs variées. Au milieu du XIXe siècle, elle produisait
annuellement 200 tonnes de verre à vitre ainsi que des tuiles plates et creuses. Les
quelques éléments de gobeleterie découverts ne permettent pas de déterminer s’il
s’agit véritablement d’une production locale, mais il est probable qu’il s’agit plutôt
de pièces produites par les verriers pour leur usage personnel.
Comme dans d’autres régions françaises du nord et de l’est de la France, l’archéologie alsacienne est confrontée aux vestiges de la Première Guerre mondiale.
L’enjeu patrimonial est important, car ils sont en voie de disparition à cause des
atteintes du temps, des destructions liées à l’aménagement du territoire et de
l’intérêt croissant des collectionneurs à l’origine d’un pillage de plus en plus organisé des champs de batailles.
Entre la fin de 1914 et 1918, la stabilisation des combats lors de la guerre de position fixe une ligne de front qui traverse l’ouest du Haut-Rhin dans le massif vosgien
et le Sundgau. Les réseaux complexes de tranchées, d’abris et de galeries construits
par les troupes des deux camps ont fortement marqué le sous-sol. À Geispolsheim
Schwobenfeld (Bas-Rhin), la fouille d’un système de retranchement réalisé par les
troupes allemandes permet d’appréhender l’organisation et l’évolution d’une position fortifiée liée à la défense de Strasbourg entre 1914 et 1916. À AspachCarspach Lerchenberg et Lerchenholz (Haut-Rhin), la fouille de dépotoirs de
première ligne apporte des informations inédites qui alimentent de nouvelles problématiques historiques. Elles portent sur le mobilier lié à l’alimentation (contenants
alimentaires en faïence, verre ou métal et restes osseux), l’écriture (encriers,
bouteilles d’encre et brosse de machine à écrire), la santé (bouteilles de médicaments en verre), l’hygiène (flacons de parfum et pots de crèmes), le jeu (domino) et
les pratiques religieuses (statuette de Vierge).
Le premier conflit mondial est aussi à l’origine de bouleversements majeurs dans
l’alimentation. La tranchée, en imposant ses règles et ses modes d’organisation, va
entraîner une adaptation de la nourriture. Les objets liés à l’alimentation, de même
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DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE
10 000 ANS D’HISTOIRE !
que l’étude des restes osseux, méritent ainsi une attention particulière, car ils
contiennent une quantité d’informations encore inexploitées. Ces derniers témoignent, par exemple, d’une certaine qualité de la viande (rareté des animaux très
âgés, bonne représentation des parties les plus charnues du squelette) et d’une
normalisation de la découpe des carcasses animales.
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10 000 ANS D’HISTOIRE !
II. INFORMATIONS PRATIQUES
10 000 ans d’histoire / Dix ans de fouilles archéologiques en Alsace, série
« Fouilles récentes » n°7
Exposition du 6 novembre 2009 au 31 août 2010
Fermé le 1er janvier, Vendredi Saint, 1er Mai, 1er et 11 novembre et le 25 décembre
L’exposition est présentée au Musée Archéologique dans la salle d’expositions
temporaires et se prolonge dans le grand couloir central du musée.
1. DÉCOUVRIR L’EXPOSITION
Consulter également le site des Musées de la Ville de Strasbourg :
http://www.musees.strasbourg.org/ visites, ateliers/ actions éducatives.
Pour préparer ou prolonger la visite au musée
Documentation en prêt au Service éducatif
En prêt pour une durée de 15 jours :
- catalogue de l’exposition
- nombreux ouvrages sur l’archéologie.
Pour aller plus loin, en amont ou en aval de la visite au Musée Archéologique :
- mieux connaître l’histoire d’une localité en consultant les trois volumes de la Carte
Archéologique de l’Alsace (Bas-Rhin, Haut-Rhin et Strasbourg) où les localités sont
répertoriées par ordre alphabétique
- découvrir un chantier archéologique en cours ( s’adresser au Pôle Archéologique
Interdépartemental Rhénan ) et sensibiliser les jeunes aux métiers de l’archéologie
grâce aux différentes activités proposées par le PAIR
- visiter le Musée Archéologique de manière interactive grâce aux nombreuses
visites accueillies proposées. Les thématiques en sont variées, mais toutes ont
comme objectif premier d’initier le jeune visiteur à la démarche archéologique.
L’animation intitulée « C’est quoi l’archéologie » est spécialement conçue pour
permettre la découverte des principales étapes de la démarche archéologique à
travers la fouille d’une maquette rappelant un chantier de fouille suivie de l’analyse
d’objets archéologiques.
La visite au musée
- Visite découverte – accueillie par un médiateur – pour les jeunes de 15 à 20 ans
et plus
- Visite en autonomie.
Pour toute visite de groupe, la réservation est indispensable
En ligne : visites, ateliers/visites de groupes/demande de réservation pour un
groupe accueilli (ou autonome)
Par téléphone : 03 88 88 50 50 du lundi au vendredi, de 8h30 à 12h30.
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DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE
10 000 ANS D’HISTOIRE !
2. AUTOUR DE L’EXPOSITION
Consulter également le site des Musées de la Ville de Strasbourg :
http://www.musees.strasbourg.org/visites, ateliers/activités
Les informations ci-dessous sont valables jusqu’à la fin du mois d’août 2010. Des
modifications pouvant néanmoins survenir, il est recommandé de vérifier les
données qui suivent en consultant les programmes trimestriels ou le programme
d’été de l’année 2010, ainsi que le site des Musées.
Les billets peuvent être achetés à l’avance à la caisse des musées concernés, dans
la limite des places disponibles (billets non remboursables).
À l’exception de « Voir les musées autrement », conditions précisées ci-dessous).
Visites commentées
Les 1er et 3e samedis du mois à 15h (à l’exception du 1er mai)
Durée moyenne : 1h30
Visite du 19 juin 2010 interprétée en LSF.
Le temps d’une rencontre
23 janvier 2010 à 14h30 : « Les métiers de l’archéologie » par Élodie Thouvenin,
archéologue.
Voir les musées autrement
24 avril 2010 à 10h
Visite commentée pour les publics voyant, mal et non-voyant
Inscription indispensable au Service éducatif, du lundi au vendredi :
- le matin de 8h30 à 12h30 au 03 88 88 50 50
- l’après-midi de 14h à 17h au 03 88 52 50 04
Les ateliers des vacances
Du lundi 15 au jeudi 18 février 2010, de 14h à 17h
« Plus tard je veux être archéologue ! »
Découvrir le métier d’archéologue, de la fouille à l’exposition
Un cycle de 4 ateliers. Pour les 8/14 ans.
Catalogue
« 10 000 ANS D’HISTOIRE ! Dix ans de fouilles archéologiques en Alsace », Série
« Fouilles récentes » n°7
Éditions des Musées de la Ville de Strasbourg
204 pages, 100 illustrations
Collectif, sous la direction de Bernadette Schnitzler.
http://www.musees.strasbourg.org
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Carte des sites archéologiques présentés dans l’exposition « 10 000 ans d’histoire ! » Document PAIR

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