Tissus et textiles - Fédération AFRIC`IMPACT

Fiche Thématique
Discutons avec Madou ...
Tissus et textiles ...
(Paggness traditionnelss africainss - n°1)
Beaucoup de touristes de France et d’ailleurs
se rendent au Grand Marché de Bamako,
notre foisonnante capitale malienne.
Ils s’y procurent, très souvent, des vêtements
confectionnés, avec habileté, par des artisans
du Mali et de pays ouest-africains riverains.
Mais, connaissent-ils pourtant les méthodes
et tous les matériaux de fabrication des tissus
dans lesquels ces habits sont taillés ? Pas sûr !
Je vais ainsi tenter d’en “révéler” certains ...
“Les usines à pagnes” en Afrique
Aminata, ma mère, sort de la concession une calebasse juchée
sur un bout de tissu noué au sommet de sa tête. Ce récipient
est empli de nombreuses tomates, salades et concombres, que
maman a ramassés la veille au soir dans son petit jardin maraîcher. C’est joliment vêtue d’une robe taillée
dans deux beaux pagnes de la
SO.MA.TEX., qu’elle va vendre
ces légumes au marché hebdomadaire de notre vivante ville de Kita.
Beaucoup de nations du continent africain
possèdent leur(s) usine(s) de confection de
pagnes. Au Mali, c’est donc la SO.MA.TEX.,
la SOciété MAlienne des TEXtiles. En effet,
cette entreprise produit des tissus industriels
colorés ou non, et surtout fabriqués à partir
du coton cultivé et récolté sur le sol malien.
Ces textiles industriels empruntent souvent
leurs motifs et leurs décorations aux pagnes
réalisés de façon artisanale par des maîtres
teinturiers / tisserands et leurs apprentis.
Au fait, t’ai-je dit ce qu’était un PAGNE ?
C’est une étoffe en coton, tissée traditionnellement ou imprimée industriellement,
large de 0,914 m. et longue de 1,838 m.
(quand elle vient de l’usine) et qui sert à
se vêtir : directement lorsqu’on se drape
dedans comme le font chaque jour
mes soeurs et ma mère ; indirectement lorsqu’on l’utilise pour
confectionner des habits. Pour
cela, des pagnes sont découpés
par les couturiers / tailleurs en divers
morceaux suivant des “patrons”, puis cousus les uns aux autres
pour devenir chemises, gilets, pantalons, robes ou ... boubous !
“91,4 cm., 183,8 cm., Quelles étranges mesures !?!” pourrais-tu me dire.
La raison est simple : Au tout début, les dimensions des pagnes ont été
définies dans des pays africains anglophones (le Nigeria, le Ghana, ...)
où les mesures s’effectuent en yards ou en miles et non en mètres ou
en kilomètres. Par la suite, les autres pays d’Afrique ont conservé ces
dimensions. Un pagne, c’est un yard de large par deux yards de long ;
un yard, c’est 0,914 mètre et deux yards, c’est 1,838 mètre ... CQFD !
Programme Clubs Afrique
Le tissage traditionnel des pagnes en Afrique
Le tissage, dans la famille, c’est une “affaire de femmes” comme
on dit chez nous ! Jeune, ma mère a été apprentie-tisseuse. Elle
fut formée, avec d’autres, par ... Mme FOFANA, une femme très
douée en tissage et en teinture. Maintenant, c’est à ma soeur
aînée, Safy, que cette dame enseigne. Ma grande soeur a de la
chance : elle peut pratiquer le tissage juste dans la cour de notre
concession, grâce à un métier à tisser que l’un de mes cousins,
tailleur à Bamako (c’est lui sur le dessin !), a installé. Elle reçoit
l’aide de ma mère mais encore de ma grand-mère, Fatoumata,
elle aussi tisseuse ! Voici ce que toutes les trois m’ont expliqué :
Tout d’abord, elles ramassent le coton dans les champs ou bien
l’achètent non travaillé au marché. Ensuite, vient le temps de le
filer. A l'aide de son fuseau, grand-mère “Fatoumata la fileuse”,
assise au sol, tord et étire le coton entre ses doigts. Par un mouvement répétitif de la main, elle fait tourner le fuseau tout en lui
donnant une impulsion, afin d'enrouler le fil autour d’un bâtonnet
en bois et de, finalement, créer plusieurs pelotes de fil de coton.
Puis, le fil, teint ou non, est disposé sur le métier à tisser fait de
de bois et de barres de fer par les forgerons de Kita. Lentement,
Safy actionne, avec ses pieds, et tour à tour chacune des deux
pédales et entrecroise de façon incessante les fils de la chaîne
et de la trame à l’aide de sa navette. Par ce mécanisme d’étroites
bandes de coton apparaissent une à une et sont, le plus souvent,
enroulées autour d'un bâton situé au niveau de la poitrine de ma
soeur. Ces bandes, ainsi tissées, sont par la suite cousues ensemble à la main, avec fil et aiguille, par maman pour devenir un
véritable pagne artisanal ... qui sera, plus tard, vendu au marché
ou que l’une d’elles portera sous la forme d’une superbe robe !
Le port des pagnes en Afrique
Même si les habitudes vestimentaires se modifient
et les Africains ont, de plus en plus, recours
aux habits “occasions” offerts à bas prix
sur les marchés en provenance d’Asie
ou d’Europe, le pagne conserve une
place très importante dans toutes les
sociétés ... tant rurales que urbaines.
Le pagne permet, notamment, de désigner
la position sociale de celui qui le porte. Plus
le pagne est grand et son drapé est savant,
plus le rang de la personne se trouve élevé.
En outre, ses teintes et ses décorations,
qui évoluent au gré des demandes et des
modes et varient d’une région à l’autre,
veulent dire beaucoup de choses ...
Les nouvelles accouchées portent des pagnes blancs ; les prêtres arborent la teinte
représentant la divinité qu’ils servent ; des
griots revêtent des pagnes dont les motifs
symbolisent des épisodes passés, des personnages historiques, des statuts sociaux.
Tel pagne indique aussi que sa propriétaire
est triste. Sur un autre est imprimé le candidat politique préféré de son porteur. Pour en citer
un dernier, sur le thème de l’émancipation de la femme, il y
a celui qui se nomme “Si tu sors, je sors” ... Il a fait grand bruit !
Sources (et / ou pour aller plus loin ... idem pour les Fiches suivantes) :
“Tissus d’Afrique” - C. FAUQUE & O. WOLLENWEBER - Syros - 1991
“Textiles africains” - Michèle COQUET - Editions Adam BIRO - 1998
“Les textiles (africains)” - M. EDOUMBA-BOKANZO - Ed. Sépia - 1997
“Les pagnes qui parlent ...” (exposition + doc.) - Afrique Verte - 1999
“Kwela, kwela, jamela” - Niki DALY - Ed. Gautier Languereau - 1999
99.369