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24 heures | Mardi 4 novembre 2014
Suisse
Campagne
Les Jeunes offrent une cure
de jouvence au Conseil fédéral
Le Parlement
des Jeunes lance
une campagne
surprenante
en rajeunissant
les sept Sages
Lucie Monnat
Coiffure et petite moustache branchée, T-shirt décolleté, collier estampillé «Didi». Etrange, ce jeune
homme a l’air vaguement familier… Les neurones se connectent
enfin: «Didi» n’est autre que Didier Burkhalter, président de la
Confédération, à qui l’on vient
d’offrir vingt-cinq ans à coups de
retouches photo. Les autres membres du Conseil fédéral sont aussi
passés par la cure de jouvence: le
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chef de l’Economie, Johann Schneider-Ammann, redevenu blondinet, sourit de ses dents baguées,
tandis que la responsable des Finances, Eveline WidmerSchlumpf, affiche avec fierté piercings et T-shirt Hello Kitty.
Non, les sept Sages ne passent
pas simultanément par une sévère
crise existentielle. Il s’agit de la
dernière campagne de la Fédération suisse des Parlements des Jeunes (FSPJ), «Rajeunis la politique»,
qui passe le plumeau sur un Conseil dont la moyenne d’âge s’élève
à 55 ans. «Notre but est de sensibiliser les jeunes à la politique en
leur montrant qu’elle n’est pas
uniquement réservée au monde
des adultes», explique Aurélia
Buchs, responsable Parlements
des Jeunes. La vision d’Ueli Maurer en fan de hip-hop tient du comique, mais Aurélia Buchs ne se
déride pas. «Non, il ne s’agit pas de
faire rire, même si le résultat peut
être amusant, corrige la jeune
femme. Nous avons voulu représenter tous les styles de jeunes, du
«hipster» à l’alternatif, pour qu’un
maximum de jeunes s’identifient
et comprennent que la politique
est ouverte à tout le monde.»
Un brin de provocation
Allez, personne n’ira croire que
coiffer Doris Leuthard de dreadlocks ne dénote pas d’une certaine
impertinence? «Non, je ne pense
pas. Un brin de provocation peutêtre. Mais le but n’était en aucun
cas de se montrer irrespectueux.»
Que la FSPJ se rassure, leurs
aînés ne l’ont pas non plus pris sur
ce ton. Le chef du PBD, Martin
Landolt (GL), ne tient pas rigueur
aux Jeunes pour le look à la Amy
Winehouse de sa conseillère fédé-
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rale. «Pour intéresser les jeunes, il
faut leur montrer des choses extraordinaires! Là, c’est fait avec
humour, je trouve ça très sympa.»
Maria Roth-Bernasconi (PS/GE)
éclate de rire lorsqu’elle découvre
les photos. «J’adore! Je choisis
Alain Berset, c’est le plus mignon.
Quel bel homme. Et je ne dis pas
ça parce qu’il est socialiste.» La
conseillère nationale a posé ellemême il y a quelques semaines
pour promouvoir la Session fédérale des jeunes 2014. «J’ai un peu
hésité avant d’accepter, mais, au
final, j’ai eu de très bons échos. La
fille d’une amie a d’ailleurs participé à la session suite à cette campagne. Pour intéresser les jeunes,
il faut les étonner.»
Douche froide du côté de la
jeune Céline Amaudruz (UDC/GE).
«C’est sans aucun intérêt. Je suis
jeune et cela ne me touche pas,
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estime la Genevoise de 35 ans. La
politique n’est ni une question
d’âge, ni de sexe, ni de personne.
On doit s’intéresser à des idées, à
des thèmes, pas à ceux qui les portent.» Tombée dans la marmite de
la politique étant petite, la Genevoise estime que cette sensibilisation doit se faire dans le cercle
familial et à l’école. «Le désintérêt
pour la politique n’est pas un problème inhérent uniquement aux
jeunes, mais à la population en
général. Et ce n’est certainement
pas en donnant un aspect burlesque au Conseil fédéral que cela va
s’arranger.»
Qu’en pense «Didi» Burkhalter,
présent au rassemblement de la
FSPJ, vendredi à Bâle? La fédération lui a offert un cadre avec son
nouveau portrait. «Il avait l’air
amusé», assure Aurélia Buchs. Ou
nostalgique?
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Une charte
pour les
requérants
mineurs
Promiscuité avec
les adultes, encadrement
lacunaire: les jeunes
requérants dénoncent
leurs conditions de vie
Davantage encore que les adultes,
ils espéraient un avenir meilleur.
Et ils tombent de haut. Chaque année, des dizaines de requérants
d’asile mineurs arrivent en Suisse
sans être accompagnés par leurs
familles. Le plus souvent, ils sont
placés dans les centres de requérants, au milieu d’adultes inconnus. Avec l’appui du Conseil suisse
des activités de jeunesse (CSAJ) et
de l’Organisation suisse d’aide aux
réfugiés, une trentaine d’entre eux
ont élaboré une charte qui énumère leurs difficultés et leurs revendications. Le document a été
présenté hier à Berne.
L’un des points centraux de la
charte porte sur les conditions
«Certains mineurs
vivent parfois à dix
dans une chambre
et, sur ces dix, neuf
sont des adultes»
Haben, 16 ans
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(1) Ueli Maurer. (2) Doris Leuthard. (3) Didier Burkhalter. (4) Johann Schneider-Ammann. (5) Simonetta Sommaruga. (6) Eveline Widmer-Schlumpf. (7) Alain Berset.
A son tour, Genève recrute des cobayes Appui des Cantons latins
pour tester le vaccin contre Ebola
aux forfaits fiscaux
Une centaine
de volontaires sont
recherchés. Explications
Genève est sur le point de tester à
son tour un vaccin expérimental
contre Ebola. L’autorisation de
Swissmedic, l’Institut suisse des
produits thérapeutiques, n’est
qu’«une question de jours», selon
Agnès Reffet. La chargée de communication aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) indique
aussi que «Swissmedic vient
d’autoriser les HUG à recruter
des volontaires». Eclairage du
professeur Bernard Hirschel, président de la Commission cantonale d’éthique de la recherche,
qui a déjà donné son aval à ces
essais.
Sera-t-il difficile, selon vous,
de réunir ces volontaires?
Je ne pense pas. On en recherche
une centaine. L’essai du vaccin
s’adresse aux personnes destinées à aller en Afrique combattre
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Contrôle qualité
l’épidémie. Elles seront probablement intéressées.
Qui peut être volontaire?
Il faut avoir entre 18 et 65 ans, être
en très bonne santé, ne pas être
une femme enceinte ou allaitante.
La peur d’attraper la maladie
n’est-elle pas un frein?
Non, les personnes volontaires
ont généralement une attitude
plutôt positive à l’égard des vaccins. La peur d’attraper la maladie
n’est pas souvent évoquée. Rappelons que l’on ne va pas injecter
le virus mais une protéine du virus, inoffensive. Le cobaye ne risque pas de tomber malade mais
d’avoir une réaction immunitaire.
La peur d’attraper la maladie en
Afrique facilitera plutôt la participation à l’essai.
Les volontaires recevront
810 francs. Comment ce dédommagement est-il calculé?
On ne paie pas de salaire, mais on
calcule une compensation. La per-
sonne donne de son temps. On
rembourse le taxi ou le train
qu’elle a pris et les heures de travail perdues.
Que va-t-on réellement tester
dans cette première phase?
Il s’agit de s’assurer que le vaccin
n’a pas d’effets néfastes très désagréables et de savoir si le corps réagit. Si ce n’est pas le cas, il faudra
modifier le plan d’investigation,
par exemple en testant l’effet du
vaccin avec des doses plus élevées.
Un échantillon d’une centaine
de personnes suffit-il pour
tester un vaccin?
Pour savoir si le vaccin est vraiment efficace contre Ebola, il faudrait bien sûr beaucoup plus de
monde. Cela se fera lors de la
deuxième phase, sur le terrain. En
vaccinant, par exemple, un village
et en comparant l’effet de la vaccination dans ce village à ce qui se
passe dans un autre village pas
encore vacciné.
Sophie Davaris
Les ministres des Finances
soulignent qu’en cas
de oui à l’initiative,
les pertes fiscales
devront être compensées
Les Cantons latins sont montés au
créneau, hier à Berne, contre l’initiative visant à abolir les forfaits
fiscaux. Selon eux, son acceptation provoquerait le départ à
l’étranger de nombreux contribuables, avec des pertes fiscales
estimées à plus de 1 milliard de
francs.
En 2012, les 5634 bénéficiaires
de l’imposition d’après la dépense
ont apporté 695 millions de francs
de recettes fiscales directes, a rappelé le Valaisan Maurice Tornay,
président de la Conférence latine
des directeurs cantonaux des Finances. Les Cantons latins sont
particulièrement concernés: 85%
des bénéficiaires de forfaits fiscaux
résident dans les cantons de Vaud
(1396),du Valais (1300), du Tessin
(877), de Genève (710), des Grisons
(268) et de Berne (211). Si l’initiative
est approuvée, les pertes fiscales
devront être compensées par des
hausses d’impôts et des baisses des
prestations, avertissent les grands
argentiers.
Le ministre vaudois des Finances, Pascal Broulis, a souligné que
cet impôt, qui ne concerne que les
étrangers sans activité lucrative,
est fixé selon des lois et pas à la tête
du client. «Il n’est pas négocié», a
insisté le libéral-radical, mais se
base sur le loyer et sur le train de
vie des contribuables.
De plus, ses bénéficiaires versent quelque 60 millions de francs
par an à l’AVS, alors qu’ils ne toucheront pas de rente. Il n’y a
aucune pression internationale à
l’abolition des forfaits fiscaux, a
ajouté le Genevois Serge Dal
Busco. Pour le PDC, ce n’est pas
une question de morale: «Les initiants ont simplement une posture
idéologique.» Il leur reproche en
outre de ne formuler aucune proposition concrète pour compenser
les pertes fiscales attendues. ATS
d’accueil, jugées inadaptées pour
des jeunes. «Certains mineurs de
notre groupe vivent parfois à dix
dans une chambre et, sur ces dix,
neuf sont des adultes, témoigne
Haben, 16 ans. Ils n’ont pas la tranquillité pour faire leurs devoirs.»
Au problème d’encadrement
s’ajoutent encore les conditions
matérielles souvent rudes, ou encore l’accès aux soins.
Pour améliorer la situation, les
signataires de la charte lancent une
nouvelle piste: l’accueil dans des
centres pour jeunes ou dans des
familles suisses. «Cela nous aiderait à apprendre plus rapidement
la langue et à mieux connaître et
comprendre la culture», indique le
document, qui insiste également
sur l’importance d’offrir un encadrement institutionnel plus solide.
Selon les Cantons, il peut en
effet s’écouler plusieurs mois
avant que ne soit nommé un curateur, qui intervient alors comme
représentant légal. Il arrive aussi
qu’aucun curateur ne soit nommé.
Le mineur doit alors se contenter
de la personne de confiance qui lui
est attribuée à son arrivée en
Suisse. Et celle-ci ne suit pas la procédure. «Il est très difficile de vivre
sans famille. Nous avons besoin de
cet accompagnement pour bien
planifier notre futur», plaident les
signataires de la charte.
Enfin, l’accès à la formation
préoccupe les mineurs non accompagnés. «Je souhaiterais effectuer un apprentissage, mais ce
n’est pas possible avec le permis N», témoigne Khalid, 17 ans.
«Je fréquente toujours le même
cours d’allemand. C’est très ennuyant. J’aimerais tellement aller à
l’école publique afin d’apprendre
davantage», renchérit Cabdi,
16 ans.
Mais le plus difficile reste
l’après. Pour ces jeunes, le cap des
18 ans – et l’accès à la majorité – est
synonyme de peur et d’insécurité.
Ils se retrouvent catapultés dans le
monde des adultes, sans aucun accompagnement officiel. Et peut
alors tomber la décision de renvoi
de l’ODM, qui mettra fin aux rêves
helvétiques. La charte réclame une
meilleure préparation à l’entrée
dans le monde des adultes, et surtout la garantie de pouvoir terminer sa formation. J.MT