TRAVAILLER AUTREMENT DANS LA DRÔME
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TRAVAILLER AUTREMENT DANS LA DRÔME
DOSSIER TRAVAILLER AUTREMENT DANS LA DRÔME La montée du chômage, la crise économique, la recherche d’une autre organisation entre le professionnel et le personnel, et bien sûr le développement du numérique... autant de paramètres qui bouleversent en profondeur la manière de travailler, côté employeur et côté employé. 6 ESPACES DE COWORKING DANS LA DRÔME Valence, Die, l’atelier, l’atelier.in Die, Saint-Nazaire le Désert, " # $ # Crest, Entreautre, entreautre.com Crest, %$ $ A ujourd’hui, près de 17% des travailleurs télétravaillent, c’est-à-dire qu’ils travaillent ailleurs que dans leur lieu habituel de travail, contre 12% en 2012 (source ANACT). Ils sont salariés, commerciaux itinérants, consultants… Ils travaillent dans les trains, les avions, les salles d’attente, les cafés, les hôtels mais aussi dans des espaces de télétravail ou des tiers-lieux, comme les espaces de coworking (voir encadré), dont le nombre est passé de 1 à 120 en France en moins de 6 ans. Des données statistiques qui ne révèlent pas le “télétravail gris”, informel, juridiquement inorganisé, et que nous constatons autour de nous au quotidien. Mais ils travaillent aussi à temps partagé, deux jours par semaine dans cette PME agro-alimentaire et deux jours pour cette start-up spécialisée dans la stratégie web. Dans la Drôme, le Pôle Numérique est en première ligne pour constater et promouvoir de nouvelles formes de travail. Pour Jean-Philippe Falavel, son chargé de développement économique, « le futur de l’économie et celui de l’emploi se situent dans la petite entreprise N°182 NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2014 21 DOSSIER TÉMOIGNAGE et à la croisée des filières d’activité. Notre métier est de les accompagner pour qu’elles se développent et qu’elles trouvent un écosystème favorable. Ici, dans la Drôme, il y a beaucoup d’atouts pour travailler autrement : une qualité de vie qui attire des entrepreneurs d’autres régions, un territoire très bien maillé par l’internet haut-débit et un tissu économique dynamique… et favorable à la créativité ». DE VRAIES OPPORTUNITÉS… L’entreprise comme lieu de travail unique n’a pas disparu, mais les nouvelles formes de travail, plus souples, offrent des alternatives de plus en plus adaptées aux besoins des entreprises et aux souhaits des employés. « Le numérique facilite les nouveaux modes de travail de manière un peu paradoxale : d’une part, il permet une plus grande autonomie au travailleur, qui quelquefois utilise son ordinateur portable personnel ou son smartphone pour travailler, et d’autre part, il est beaucoup plus facile aujourd’hui qu’hier de collaborer sur un projet et de mettre œuvre une démarche collaborative. » Avec la mise en place de six espaces propices aux nouveaux modes de travail sur la vallée de la Drôme, les acteurs publics et privés de la Drôme se positionnent aussi en pilote volontariste sur cette question. … ET DES MENTALITÉS À FAIRE ÉVOLUER Pour autant séduisante qu’elle soit, la transition n’est pourtant pas gagnée. Côté employé, la crainte de la perte du cadre (de lieu, de statut, ou de frontière entre le “pro” et le “perso”) peut freiner la prise d’initiative. Côté employeur, Jean-Philippe Falavel pointe « un manque de maîtrise des nouveaux outils et des nouvelles modalités de travail », et donc une difficulté à les favoriser. « Il y a un vrai travail de vulgarisation et de pédagogie à faire, sans tenir aux employeurs des grands discours sur l’évolution du monde, mais bien en apportant des solutions concrètes et efficaces à des problèmes identifiés. » La mutation est en marche, au rythme de son appropriation par ses usagers… 22 N°182 NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2014 & ' La Forge collective Le coworking, comme une évidence pour les nomades T hierry Pigeard, graphiste freelance et formateur, a créé le premier espace de coworking de Valence, la Forge Collective, en mars 2014. « En tant qu’indépendant, je travaillais soit chez mes clients, soit chez moi. Avec les bons côtés du travail à domicile, mais aussi sa médaille plus sombre, celle de l’isolement au travail. » À la suite de plusieurs visites d’espaces de coworking à Lyon, Paris et Grenoble et après avoir validé son projet d’entreprise, il décide de se lancer et transforme les anciens locaux de l’Académie de l’entreprise en un vaste espace de travail partagé, sur 170 m2, au cœur du centre-ville de Valence. « Le coworking est en plein essor dans les métropoles, mais aussi de plus en plus dans les villes moyennes. Ici, les indépendants, les télétravailleurs, les consultants, les développeurs viennent chercher un espace de travail tout équipé, beaucoup plus économique qu’un bureau à loyer fixe, mais aussi des rencontres, des échanges et de la convivialité. » En s’appuyant sur les réussites des espaces de coworking lyonnais et parisiens, la Forge propose à ses usagers (les forgerons) de nombreuses animations, qui mettent en valeur le partage d’expériences, la transmission de connaissances et la coopération. « Un espace de coworking est fondamentalement un lieu où l’on travaille autrement. Cette forme de travail sera plus importante demain qu’aujourd’hui et j’avoue que c’est assez plaisant, même si ce n’est pas facile tous les jours, de faire partie des pionniers. » [ En savoir + : www.laforgecollective.fr ] LE LEXIQUE DU TRAVAIL 2.0 % ()* espaces de travail équipés et collaboratifs Tiers-lieux : lieux de travail hors de l’entreprise et hors du domicile *lieu ouvert au public, avec mise à disposition d’outils de conception et de réalisation d’objets + # #' *les employeurs mutualisent le temps de travail d’un employé, qui travaille pour eux à temps partagé & #*temps du travailleur réparti entre différents employeurs DOSSIER TÉMOIGNAGES Marie-Françoise Pascal, SIRAC - MODEL Avec le détachement de salariés, la mobilité devient un atout P rêter sa main d’œuvre en période de sousactivité, ou recruter pour un temps donné le personnel d’une entreprise voisine quand le carnet de commandes est plein, est une solution utilisée quelques fois par les entreprises. Prolongement de l’expérience engagée en 2010 sur le bassin d’Annecy avec le soutien de l’État et la Région RhôneAlpes, le dispositif Model propose une approche méthodique et structurée du “prêt de salariés”. Pour Marie-Françoise Pascal, chargée de projets au sein de l’entreprise Sirac* initiatrice de Model, « l’idée est d’inventer des solutions nouvelles d’emploi dans un contexte d’adaptation constante pour les employeurs comme pour les employés et de le faire avec eux ». Model gère ainsi l’animation d’un réseau d’entreprises adhérentes sur un territoire, la recherche et la mise en relation des salariés candidats sur les postes à pouvoir, la rédaction du cadrage juridique, le suivi des salariés jusqu’à leur retour dans leur poste… « Le prêt de main-d’œuvre est à but non-lucratif, comme le rappelle la loi qui le régit et n’est possible que sur la base du volontariat du salarié. Un volontariat qui permet aussi à un salarié de voir autre chose, de découvrir un nouvel environnement et d’améliorer son employabilité, en élargissant son champ d’expérience et de compétences. » [ En savoir + : www.emploi-model.fr ] * SIRAC est avant tout une entreprise de travail à temps partagé (ETTP) Loi de 2005 - qui organise la mise à disposition à temps plein ou à temps partiel auprès d’entreprises utilisatrices, de salarié(e)s qualifié(e)s dans les domaines de la bureautique, comptabilité, assistanat RH ou commercial, ... mais également du domaine emploi/formation/ insertion. Céline Magnen, Faraglo Une solution souple qui permet aux petites entreprises de bénéficier de nouvelles compétences * Direccte, Région, Département, Valence Romans Sud Rhône-Alpes, Maison de l’Emploi et de la Formation (MEF), et Initiactive 2607 C éline Magnen a créé au printemps 2014 Faraglo, un groupement d’employeurs et de compétences sur le bassin valentinois. Le principe du groupement d’employeurs est limpide : permettre à des entreprises de disposer de compétences particulières, intégrées à l’entreprise, à juste coût et à juste temps. « Cette entreprise a besoin d’un comptable 1 jour par semaine, de manière récurrente », raconte Céline Magnen. « Cette autre a aussi besoin d’un comptable, mais 2 jours par semaine. Ainsi se crée un groupement d’employeurs, pour mutualiser un besoin de compétences et mettre en face une personne adaptée à ce besoin. » Du point de vue de l’employé, cette solution est une alternative crédible pour quelqu’un qui cherche à développer ses compétences et qui va travailler pour des entreprises différentes, situées sur une zone de 50 km. « Il faut un profil particulier pour un salarié qui va travailler en temps partagé. Souple, adaptable, mais aussi très organisé et sûr de ses propres compétences, pour constituer une véritable valeur ajoutée pour l’entreprise. » A noter que le salarié est contractuellement lié à Faraglo, le groupement prenant à sa charge le risque de l’embauche et de ses conséquences. Créé par 7 chefs d’entreprises dont 3 sont les premiers utilisateurs du service de mise à disposition (Elipce, 2C Com et Cidees), Faraglo a reçu le soutien différents partenaires institutionnels*, qui voient dans cette nouvelle façon d’organiser l’offre et la demande de compétences une manière de développer des emplois en local. Avec un objectif de 5 emplois créés d’ici la fin 2014, Faraglo, qui se spécialise plutôt dans les métiers du tertiaire entend prouver la pertinence de son offre et pérenniser ainsi son activité. [ En savoir + : www.faraglo.fr ] N°182 NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2014 23