13.3. Le schéma de l`organisation de la justice en France

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13.3. Le schéma de l`organisation de la justice en France
DEES • Manuel de formation
respect des règles, mise en danger, délaissement (abandon d’une personne vulnérable
ou d’un mineur)69, non-assistance à personne en péril, agressions sexuelles et atteintes
aux mœurs70, usage et trafic de stupéfiants, atteintes à la personnalité dont la violation
de domicile par abus d’autorité, la violation du secret professionnel, l’atteinte au
secret de la correspondance, les atteintes aux mineurs et à leurs familles(abandon de
famille et soustraction d’enfants).
• Les crimes. Cette catégorie comprend les actes les plus graves : viol, enlèvement et
séquestration, actes de barbarie et torture, homicide volontaire, vol à main armée, actes
de terrorisme, génocide, certaines atteintes contre les biens… Les crimes sont jugés
par la Cour d’Assises, sauf dans le cas des crimes contre l’humanité qui sont jugés par
le Tribunal Pénal International. Les peines encourues sont l’incarcération qui va d’une
durée variable de 15 ans à la réclusion à perpétuité, assorties éventuellement d’une
période de sureté. Des peines complémentaires peuvent accompagner la réclusion :
amendes, peines privatives de droits (droits civiques par exemple), confiscation de biens…
La sanction pénale a pour objectifs de punir le coupable, et de dissuader les autres individus
ou le condamné lui-même de reproduire ses actes. Le droit pénal a pour objet de protéger
la société en interdisant les actes qui sont considérés comme nuisibles à la collectivité,
et qui constituent une menace pour sa cohésion.
13.3. Le schéma de l’organisation de la justice en France
La justice est divisée en deux grandes parties : les juridictions de l’ordre administratif et les
juridictions de l’ordre judiciaire.
Les juridictions de l’ordre administratif prennent en charge les litiges nés de l’action ou
de l’activité de l’administration (= ensemble des services publics). Le tribunal administratif
s’occupe donc du préjudice causé par l’action ou la faute de l’administration.
Si l’on souhaite introduire un recours contre ses décisions, l’affaire passe aux mains du Conseil
d’État qui siège à Paris. Le tribunal Administratif est compétent quand l’une au moins des
parties concernées par une affaire est un service public. Tableau : organisation judiciaire
en France71.
Les juridictions de l’ordre judiciaire, à présent, se divisent elles-mêmes en deux parties
importantes.
• La justice civile, qui s’occupe des litiges d’intérêt privé. Son rôle est de faire appliquer le
droit privé qui régit les rapports des particuliers entre eux. Elle s’appuie sur le code civil.
• La justice pénale, qui est chargée de faire appliquer les lois et les textes répressifs
édictés, et de réprimer les infractions et infliger les peines. Elle s’appuie sur le code pénal.
Les affaires dont le montant n’excède pas un plafond déterminé, pour les affaires civiles, ou
les affaires pénales relatives aux contraventions relevant du tribunal de police, sont jugées
dans les locaux du Tribunal d’Instance. Dans ces jugements, le recours à un avocat n’est pas
obligatoire. C’est le tribunal de proximité. Les affaires judiciaires relevant du premier degré
de juridiction et les affaires administratives relevant du premier degré de juridiction, sont
jugées au Tribunal de Grande Instance.
69 Par exemple abandon d’un enfant laissé en garde à un tiers qui a consenti à le prendre en charge momentanément.
70 Le viol est un crime. Il apparait dans le groupe des agressions sexuelles et atteintes aux mœurs en droit pénal
spécial, mais appartient à la troisième catégorie.
71 Source : http://nico1-toutlefrancais.wikispaces.com/la+justice+en+France.
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Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES
Schéma d’organisation du système judiciaire
Administratif
Pénal
Judiciaire
Civil
Premier degré
Tribunaux
Affaires jugées
Tribunal de
grande instance
(164 au 1er
janvier 2011)
Affaires civiles qui ne sont
pas jugées par les tribunaux
spécialisés (divorces,
adoption).
Tribunal
d’instance
Tutelle, loyer… et affaires
civiles jusqu’à 10 000 €.
Tribunal de
commerce
Affaires entre commerçants
ou relatives aux actes de
commerce.
Conseil de
prud’hommes
Affaires nées à l’occasion
des contrats de travail ou
d’apprentissage.
Tribunal
paritaire des
baux ruraux
Affaires nées de l’application
du bail rural.
Tribunal des
affaires de
Sécurité sociale
Litiges avec les organismes
de Sécurité sociale
(maladies, retraites…).
Tribunal de
police
Contraventions, infractions
les moins passibles
d’amende.
Tribunal
correctionnel
Délits, infractions que la loi
punit de peines d’amende,
d’emprisonnement (10 ans
au plus) et d’autres peines.
Cours d’assises
Crimes, infractions les plus
graves.
Tribunal
administratif
Litiges concernant la
puissance publique
(administrations, entreprises
publiques…)
Autres
juridictions
administratives
Pensions civiles et militaires,
aide sociale…
Deuxième
degré
Cours
d’appel
(36)
Réexamine
une affaire
déjà jugée
par un
tribunal.
Cour
administrative
d’appel
(8)
Réexamine
une affaire
déjà jugée
par un
tribunal
administratif.
Cours de
cassation
(1)
Ne juge pas
d’affaire ellemême, mais
vérifie si les
lois ont été
appliquées
correctement
par les tribunaux
d’appel.
Conseil d’État
(1)
Réexamine une
affaire jugée
par les autres
juridictions
administratives
et statue
directement
sur la légalité
des actes
administratifs les
plus importants.
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DEES • Manuel de formation
13.4. Le secret professionnel
Il existe 3 façons d’être soumis au secret professionnel : par état, par profession et par missions.
Les travailleurs sociaux, à l’exception des assistants des services sociaux, peuvent être soumis
au secret professionnel par mission.
C’est notamment le cas lorsqu’ils exercent dans le champ de la protection de l’enfance. En
effet, l’article L. 221-6 alinéa 1er du code de l’action sociale et des familles stipulent « toute
personne participant aux missions de l’aide sociale à l’enfance est tenue au secret professionnel
sous les peines et dans les conditions prévues par les articles 226-13 et 226-14 Code pénal ».
• « Constitue un secret : le fait révélé, confié par celui que la fait concerne, qu’il ait ou
non spécifié le caractère secret de la révélation…
• Le fait découvert par le détenteur du secret »72, ou appris d’une autre source, compris
ou deviné par le détenteur. C’est le cas même si la personne concernée par le secret
n’a pas conscience des informations qu’elle a données, de sa maladie.
Un fait connu dans un cercle restreint d’amis ou de professionnels reste un secret. La notion
de secret reste applicable entre parents et enfants, entre conjoints, et même en cas de
décès de la personne. Un fait négatif, par exemple un certificat attestant qu’une personne
n’est atteinte d’aucune maladie, constitue un secret. Enfin la révélation d’un secret, même
quand elle a pour but de favoriser la personne (obtenir un droit ou un avantage, faire mieux
comprendre le sens de certains de ses actes) est punissable.
Les peines encourues, lorsque cette obligation n’est pas respectée, sont énoncées dans
l’article 226-13 du code pénal :
« La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire
soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire,
est punie d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende ».
Cependant, dans certains cas, ce secret peut être levé. Ces cas sont énoncés dans l’article
226-14 du code pénal :
« L’article 226-13 n’est pas applicable dans les cas où la loi impose ou
autorise la révélation du secret. En outre, il n’est pas applicable :
1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives
de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou
mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées
à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger
en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
2° Au médecin qui, avec l’accord de la victime, porte à la connaissance
du procureur de la République les sévices ou privations qu’il a constatés,
sur le plan physique ou psychique, dans l’exercice de sa profession et
qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles
ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime
est un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger
en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son
accord n’est pas nécessaire ;
3° Aux professionnels de la santé ou de l’action sociale qui informent
le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour
elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont
72 Patrice Gattegno. Droit pénal spécial. Dalloz. 1997. p. 141.
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Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES
ils savent qu’elles détiennent une arme ou qu’elles ont manifesté leur
intention d’en acquérir une.
Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions
prévues au présent article ne peut faire l’objet d’aucune sanction
disciplinaire ».
Le professionnel est donc autorisé à parler dans certains cas, mais pas à n’importe qui,
seulement aux autorités administratives et judiciaires. De plus le secret professionnel
n’est pas opposable au président du Conseil général par un agent du service social ou
de l’ASE, ou par un organisme mandaté par le juge pour enfants pour mettre en œuvre
des mesures éducatives. De manière générale, le secret professionnel n’est pas opposable
au prescripteur institutionnel73.
La réforme de la protection de l’enfance du 5 mars 2007 a introduit la notion de secret
professionnel partagé. Bien évidemment, dans ce cadre, l’échange d’informations n’est
possible qu’entre personnes dépositaires du secret professionnel.
Cette notion est reprise dans l’article L. 226-2-2 du code de l’action sociale et des familles :
« Par exception à l’article 226-13 du code pénal, les personnes soumises
au secret professionnel qui mettent en œuvre la politique de protection
de l’enfance définie à l’article L. 112-3 ou qui lui apportent leur concours
sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret
afin d’évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre
en œuvre les actions de protection et d’aide dont les mineurs et leur
famille peuvent bénéficier. Le partage des informations relatives à une
situation individuelle est strictement limité à ce qui est nécessaire à
l’accomplissement de la mission de protection de l’enfance. Le père,
la mère, toute autre personne exerçant l’autorité parentale, le tuteur,
l’enfant en fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement
informés, selon des modalités adaptées, sauf si cette information est
contraire à l’intérêt de l’enfant ».
Cette notion est donc strictement encadrée et il est important d’avoir à l’esprit, en tant que
travailleur social, que le secret est la règle et le partage l’exception.
13.5. L’obligation de révéler, l’obligation d’agir
Tout citoyen a l’obligation de révéler les mauvais traitements ou les privations infligées à un
mineur de 15 ans ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son
âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience psychique ou physique ou d’un état de
grossesse. La personne qui en a eu connaissance et qui n’informe pas les autorités judiciaires
ou administratives encourt une peine de 3 ans de prison et de 45 000 euros d’amende (art.
434-3 du NCP).Mais le deuxième alinéa de ce même article 434.4 du CP excepte de cette
obligation les personnes soumises au secret professionnel. Ce qui signifie que les travailleurs
sociaux soumis au secret ne pourraient plus être poursuivis pour non-dénonciation de
mauvais traitement. La révélation est laissée au choix du professionnel soumis au secret.
Les sanctions prévues par l’article 226-13 du Nouveau Code Pénal contre toute personne
qui révèle une information à caractère secret ne sont pas appliquées « à celui qui informe
les autorités judiciaires, médicales ou administratives de sévices ou privations dont il a eu
73 Cf Affaire Montjoie. Pierre Verdier, Jean-Pierre Rozenczveig. La responsabilité en travail social. Dunod, 1998, page 310.
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DEES • Manuel de formation
connaissance et qui ont été infligées à un mineur de 15 ans ou à une personne qui n’est
pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique ».
En matière de mauvais traitements, sévices et privations, le professionnel a donc la possibilité :
-- soit de révéler les faits et il ne pourra être poursuivi pour violation du secret
professionnel ;
-- soit de ne pas les révéler, donc de les garder secrets et il ne pourra pas être sanctionné
pour non-dénonciation de mauvais traitements.
Cette possibilité ne le dispense pas de mettre en œuvre tous les moyens pour faire cesser
la situation de maltraitance, ou dans des cas plus graves, de tenter de faire obstacle à tout
projet d’atteinte contre des personnes, et quand il a eu connaissance de délits ou de crimes
après qu’ils aient été commis, de tenter de faire obstacle à leur récidive. L’action destinée
à empêcher un délit ou un crime n’implique pas l’obligation de dénonciation.
Les travailleurs sociaux sont donc parfois soumis à des obligations contradictoires et face
auxquelles ils sont confrontés à un choix moral. La loi laisse une possibilité d’appréciation de
la conduite à suivre, sauf dans les cas particuliers des fonctionnaires et organismes mandatés
en matière d’information. La conduite à éviter absolument est l’abstention délictueuse en
cas de danger pour des personnes, quand une action peut empêcher la réalisation du risque
sans que le professionnel se mettre lui-même en danger ou compromettre gravement ses
actions à venir.
14. Le droit au logement
« 10. La nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires
à leur développement.
« 11. Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux
vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le
repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son
état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans
l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens
convenables d’existence. »74
Le droit au logement est un des droits fondamentaux qui répondent aux principes inscrits
dans les articles 10 et 11 du préambule de la constitution de 1946, qui a dans la constitution
d’aujourd’hui valeur constitutionnelle.
Les mouvements migratoires qui se sont opérés depuis plusieurs décennies des campagnes
vers les villes ont abouti à un déficit de l’offre de logement par rapport à la demande.
Les programmes de construction de logements n’ont pas suivi la progression de la demande, et
la construction de logements a subi les effets de la spéculation immobilière. Dans l’économie
de marché, l’insuffisance de l’offre entraîne une augmentation des prix des produits proposés,
et le logement a subi comme c’était prévisible les tensions du marché. Bien que le parc locatif
social (les HLM) réponde en partie au besoin de loger des personnes et des familles avec
des ressources modestes, le secteur n’a pas été épargné par la spéculation sur le prix des
terrains, ce qui a eu pour effet d’augmenter le coût des constructions (investissements plus
lourds), et par voie de conséquence le montant des loyers. Le montant élevé des loyers dans
le parc privé met le logement privé hors de portée d’un grand nombre et empêche que des
logements sociaux se libèrent pour de nouveaux accédants.
74 Articles 10 et 11 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946.
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Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES
L’affirmation du droit au logement a été inscrite pour la première fois dans la loi Quilliot de
1982.
Les initiatives publiques ont été nombreuses pour favoriser l’accès au logement, et la loi
Besson75 n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement cherche
à garantir ce droit par la création des Plans Départementaux d’Action pour le Logement des
Personnes Défavorisées (PDALPD) et par un dispositif d’incitation à l’investissement locatif,
destiné à favoriser l’accès au logement des plus défavorisés. La loi Besson dans son article 1
affirme que «Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble
de la nation. Toute personne éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment
de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la
collectivité, dans les conditions fixées par la présente loi, pour accéder à un logement décent
et indépendant et s’y maintenir.»
La loi comporte également des dispositions concernant les gens du voyage, obligeant les
communes de plus de 5000 habitants à installer des terrains aménagés pour les accueillir.
Les départements se voient imposer l’obligation des schémas départementaux prévoyant
les conditions d’accueil spécifiques des gens du voyage ». Les dispositions de la loi de 1990
seront renforcées par la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du
voyage76, plus contraignante que la loi précédente, et fixant des délais pour l’élaboration du
schéma départemental d’une part, et pour la réalisation des aires d’accueil après l’adoption
du schéma départemental. L’objectif était de créer 30 000 places de stationnement en
cinq ans. La loi prévoit des subventions pour aider les communes à créer ou réhabiliter des
aires de stationnement, et des sanctions pour celles qui ne rempliraient pas leur obligation,
en donnant au préfet le pouvoir de faire réaliser les aires d’accueil aux frais des communes
concernées. La loi permet aux communes qui installent des aires d’accueil d’interdire le
stationnement sur le reste de leur territoire.
« Même en l’absence de schéma départemental approuvé, les communes de plus de 5 000
habitants ont, en application de l’article 28 de la première loi Besson, exceptionnellement
prorogé dans ce cas, l’obligation de réserver aux gens du voyage des terrains aménagés.
Cependant, la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour
la ville et la rénovation urbaine a prévu la possibilité pour les communes de moins de
20 000 habitants dont la moitié de la population habite dans une zone urbaine « sensible »
de demander à être déchargées de leur obligation à l’égard de gens du voyage. »77.
Les mesures destinées à faciliter l’investissement locatif prévues à l’origine par la loi Besson,
ont été suivies par le dispositif De Robien, puis par l’amendement Scellier, et récemment par
la loi Duflot. Cette dernière comporte comme les précédentes des incitations fiscales pour
stimuler la construction de logements, une obligation renforcée pour les communes pour la
construction d’un parc locatif social. Un décret de juillet 2012 avait permis de réglementer
les hausses de loyer dans le parc privé, en les indexant sur l’indice du coût de la construction,
empêchant les bailleurs privés de procéder à des hausses non maîtrisées en cas de relocation
d’un logement après le départ de l’ancien occupant.
75 Du nom de Louis Besson, ministre détaché au logement.
76 Loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage.
77 Sénat. Note de synthèse. http://www.senat.fr/lc/lc145/lc1450.html
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DEES • Manuel de formation
14.1. Le logement précaire et l’hébergement
L’insuffisance de logements et/ou le manque de ressources des candidats au logement
amène un grand nombre de personnes à être hébergées dans la famille, chez des amis, ou
chez des personnes qu’elles ne connaissent pas a priori, mais pour lesquelles l’hébergement
d’un individu ou d’une famille constitue selon les cas un acte de solidarité complétement
désintéressé, ou une aide financière permettant de mieux assumer les charges du logement.
Cette situation n’est pas sans poser de problèmes, si on fait abstraction de la générosité
qu’elle peut représenter. Pour les jeunes qui atteignent l’âge adulte et qui seraient en
capacité de vivre hors de chez les parents, l’accès au logement est très difficile et entraîne
un maintien non choisi dans le milieu familial, néfaste pour leur indépendance et à l’origine
de nombreux conflits avec leurs aînés. Dans les autres cas, la(les) personne(s) hébergées
sont sous la dépendance de celle qui les accueille et n’ont aucun droit de se maintenir dans
le logement si les relations se dégradent. Il en est de même dans le cas des sous-locations,
le seul titulaire de droits étant le signataire du bail. Dans le cas des baux glissants, quand
le loyer est garanti par un organisme social78 qui sous-loue à quelqu’un qui ne remplirait pas
les conditions « normales » d’accès au logement, le sous-locataire n’a aucun droit. Plusieurs
exemples de sous-location en bail glissant ont démontré que le si l’organisme qui gère les
appartements glissants arrête son activité, souvent en raison de la baisse de ses financements,
ou parce que les occupants des logements n’acquittent plus leur loyer pour des raisons
multiples, l’occupant du logement n’est pas repris par le bailleur et se voit expulsé, même
dans des cas où il payait régulièrement son loyer.
À la difficulté d’obtenir un logement s’ajoute donc la question du maintien dans le logement.
14.2. Le Fonds de Solidarité Logement (FSL)
Le Fonds de Solidarité Logement (FSL) a été créé par la loi du 31 mai 1990. Il a pour but
de faciliter l’accès au logement ou le maintien dans le logement pour les personnes ou les
familles qui ont des difficultés financières. On peut recourir au FSL au moment de l’entrée
dans le logement :possibilité de prendre en charge ou d’accorder un prêt à taux zéro pour
la caution, le paiement du premier loyer, les frais de déménagement. Pour l’occupant d’un
logement, le FSL peut aider au paiement du loyer (si deux loyers au moins sont non réglés et
que le paiement ait bien été repris ensuite), le paiement de la fourniture d’eau, d’électricité,
le téléphone. Une demande au FSL, après que l’intéressé a été informé de l’interruption du
service, a un effet suspensif : pendant l’étude du dossier par le FSL, la fourniture d’énergie ou
de téléphone ne peut pas être interrompue. Le fournisseur doit impérativement mentionner
la possibilité de recours au FSL dans le courrier qu’il adresse à celui qui est en retard de
paiement.
78 Souvent une association à but non lucratif. Le principe est que l’association loue plusieurs appartements auprès
d’un bailleur HLM, et les met à disposition de personnes peu solvables (bénéficiaires du RSA par exemple) qui ne
pourraient pas se loger autrement, moyennant un loyer minoré qui évolue en fonction des ressources des occupants.
Quand les ressources sont devenues stables, l’occupant reprend le logement à son nom et devient locataire en titre. Les
associations qui gèrent des appartements en bail glissant perçoivent des subventions qui leur permettent de moduler
la participation des occupants en fonction de leurs ressources. Les associations garantissent le paiement du loyer au
bailleur HLM, et font un accompagnement du sous-locataire dans ses démarches, afin qu’il reprenne le logement à son
nom dans les meilleurs délais. Dans la pratique, les baux « glissent » difficilement et du fait de la crise et du marché
de l’emploi très défavorable, beaucoup d’associations gérant des appartements glissants se trouvent en difficulté,
leur équilibre budgétaire dépendant à la fois de financements publics, tendant à diminuer, et de la solvabilité des
sous-locataires, elle-même très aléatoire.
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Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES
Le 29 juillet 1992, dans la loi relative au Revenu Minimum d’Insertion, il est prévu une aide
pour le paiement des factures d’eau et d’énergie. Les modalités pour l’aide à la fourniture
d’eau ont été précisées dans la charte solidarité eau en 1996, puis
« En 2000, les professionnels de l’eau, regroupés au sein du SPDE (Syndicat professionnel des
entreprises de services d’eau et d’assainissement), ont signé avec les pouvoirs publics et les
représentants des collectivités territoriales une convention nationale intitulée Solidarité Eau.
Leur principal souci : la lutte contre l’exclusion.
• Solidarité Eau permet de maintenir le service de l’eau aux personnes et aux familles en
situation de pauvreté et de précarité, visées par la loi du 29 juillet 199879.
• Dans chaque département, des conventions sont passées entre l’État, les entreprises
locales de distribution et les collectivités territoriales, les centres locaux d’action sociale,
les organismes de protection sociale et les associations de solidarité. »80.
La Convention Nationale Solidarité Eau intègre les dispositions de la loi de 1998.
La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales prévoit l’intégration de
la prise en charge des impayés d’eau dans le cadre du FSL : chaque département est tenu de
venir en aide aux personnes qui se trouvent dans l’impossibilité d’assumer le paiement des
factures d’eau, d’énergie et de services téléphoniques. Le traitement des impayés relevant
du FSL peut prendre la forme de prêts, avances remboursables, garanties…
• Les critères d’intervention sont précisés par le règlement intérieur de chaque FSL, adopté
par chaque Conseil Général (CG) après avis du Comité responsable du Plan Départemental
d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées(PDALPD), coprésidé par le Préfet
et par le Président du Conseil Général.
• Dans chaque département un PDALPD définit les mesures destinées à permettre aux
personnes ou aux familles en difficulté d’accéder à un logement, ou de s’y maintenir et
de disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques.
• Le FSL est placé sous la responsabilité des Conseils Généraux mais il existe la possibilité
pour les autres collectivités territoriales et les EPCI de participer à son financement81.
La procédure de surendettement constitue un des recours possibles contre l’expulsion.
La recevabilité du dossier de surendettement a un effet suspensif sur la procédure d’expulsion,
et interdit au bailleur de procéder à la récupération des sommes dues avant la décision de
la commission de surendettement :
« Suspension des mesures d’expulsion (code de la consommation : L. 331-3-2, R. 331-12)
Saisine du juge du tribunal d’instance
Si la commission déclare le dossier du débiteur recevable, elle peut saisir le juge du tribunal
d’instance aux fins de suspension des mesures d’expulsion du logement du débiteur.
En cas d’urgence et après dépôt du dossier devant la commission, la saisine du juge peut
intervenir à l’initiative du président de la commission, de son délégué, du représentant local
de la Banque de France ou du débiteur.
Cette mesure ne sera autorisée par le juge que si la situation du débiteur l’exige, ce qui lui
laisse des pouvoirs d’appréciation importants.
79 La loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions prévoit que le maintien de la fourniture d’eau sera
assuré en cas de non-paiement des factures, jusqu’à l’intervention du dispositif d’aide. Les distributeurs d’eau sont
associés au dispositif. En revanche, le financement du dispositif n’est pas assuré pleinement avec cette loi.
80 La rédaction. «La charte Solidarité Eau». Revue Quart Monde, N°180 - L’eau : un bien commun ? Année 2001Revue
Quart Monde.
81 Sources : www.senat.fr (rapport N°242,Proposition de loi relative à la solidarité des communes dans le domaine
de l’alimentation en eau et de l’assainissement des particuliers).
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DEES • Manuel de formation
Durée de la suspension
La suspension des mesures d’expulsion ne peut excéder un an. Mais elle peut cesser avant
l’expiration de ce délai en cas :
------
d’irrecevabilité de la demande ;
de clôture du dossier ;
de déchéance du débiteur ;
d’approbation du plan conventionnel ;
de décision imposant les mesures de traitement du surendettement exécutoire sans
homologation par le juge ;
-- d’homologation par le juge des mesures recommandées par la commission ;
-- de jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation
judiciaire.
Mesures d’expulsion concernées (circulaire du 19.12.10 : BOMJL du 30.12.10)
Les mesures d’expulsion concernées sont toutes celles établies par la commission au moyen
des documents dont elle dispose. La demande de suspension doit être justifiée par la copie
du commandement de quitter les lieux. A défaut, la copie de la décision ordonnant l’expulsion
peut être jointe (code de la consommation : R. 331-12 al. 1er). »82.
Le locataire ne sera pas déchargé de sa dette, mais aucun recours par le bailleur ne sera
possible pendant la durée de la suspension.
14.3. La loi DALO (Droit Au Logement Opposable) du 5 mars 2007
Adoptée à la suite du mouvement des « Enfants de Don Quichotte » né des campements
de sans-abri pendant l’hiver 2006, la loi DALO fait de l’État le garant du droit au logement,
pour les personnes qui ne peuvent accéder à un logement décent par leurs propres moyens.
La loi DALO a créé deux recours, lorsque les démarches pour accéder à un logement n’ont
pas abouti :
-- recours amiable devant la commission de médiation ;
-- recours contentieux auprès du tribunal administratif.
Pour bénéficier du droit à un logement décent et indépendant en application de la loi DALO,
il faut remplir les conditions suivantes :
-- être de nationalité française ou résider sur le territoire français de manière régulière ;
-- ne pas être en mesure d’accéder par ses propres moyens à un logement décent et
autonome, ou de s’y maintenir ;
-- satisfaire aux conditions règlementaires d’accès au logement social83.
82 Site de l’Agence Nationale d’Information sur le Logement. Articulation entre la procédure de surendettement,
l’expulsion et les aides au logement.
http://www.anil.org/analyses-et-commentaires/analyses-juridiques/analyses-juridiques-2012/surendettement-expulsionet-aides-au-logement/page-2/#c69177
83 « Les logements HLM sont soumis :– à une réglementation particulière aux logements HLM (CCH : Livre IV- Titre IV,
L. 441 à L. 445-8 et R. 441-1 à R. 443-34 / des rapports entre les organismes et les bénéficiaires) ;– aux dispositions
relatives aux logements conventionnés (CCH : L. 353-14 et suivants et R. 353-1 et suivants) ;– et partiellement à la
loi du 1er septembre 1948. » .
Source ADIL 94 :
http://www.adil94.org/index.php?option=com_content&view=article&id=24&Itemid=69
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Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES
Sont concernées par la procédure DALO les personnes qui se trouvent dans l’une des situations
suivantes :
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être sans logement, sans domicile stable ou hébergé ;
être menacé d’expulsion, sans solution de relogement ;
être logé dans des locaux insalubres ou dangereux ou impropres à l’habitation ;
être logé dans un logement sur-occupé et être en situation de handicap, ou avoir à
sa charge au moins un enfant mineur ou une personne handicapée ;
-- être hébergé dans un établissement ;
-- avoir déposé une demande de logement et disposer d’un numéro d’enregistrement
en préfecture, et n’avoir reçu aucune proposition durant un délai « anormalement
long »84.
Si on remplit ces conditions, on peut s’adresser à la commission départementale de médiation,
avec l’assistance éventuelle d’une association agréée, dont la liste est disponible dans chaque
préfecture. La loi est applicable depuis le 1er janvier 2008. Le formulaire de recours est
téléchargeable sur internet.
La commission doit prendre une décision sur le recours déposé dans un délai de 3 à 6 mois
selon les départements. Si la commission estime que le demandeur est prioritaire et qu’un
logement doit lui être attribué d’urgence, elle transmettra sa décision au préfet en mentionnant
les caractéristiques que doit avoir le logement. Si un accueil dans une structure autre qu’un
logement classique, par exemple en foyer d’hébergement, en résidence sociale, ou toute
autre forme de logement, elle indiquera au préfet l’accueil qui doit être prévu.
La commission devra répondre par écrit, que la réponse soit positive (la demande est
considérée comme prioritaire) ou non. Si un logement n’a pas été attribué dans un délai de 3
à 6 mois, en fonction du département, il est possible de faire un recours contentieux auprès
du tribunal administratif.
Le tribunal devra statuer en urgence, dans un délai de 2 mois après qu’il ait été saisi. Les
associations qui sont agréées pour saisir la commission de médiation peuvent assister les
demandeurs pour former le recours contentieux.
Le tribunal administratif pourra ordonner à l’état de loger ou reloger le demandeur dont la
demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation. Il pourra également
ordonner, même si la demande porte sur un logement, l’accueil dans un lieu d’hébergement,
un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer une résidence sociale,
si cette réponse parait plus adaptée.
Le recours ne donne pas droit à une indemnité financière.
14.4. Le Droit à l’Hébergement Opposable (DAHO)
La loi du 5 mars 2007 prévoit des recours semblables à ceux dont disposent les demandeurs
de logement. La commission de médiation doit examiner la demande d’accueil en structure
d’hébergement dans un délai de 6 semaines. Après la réponse de la commission de médiation,
si la personne est reconnue comme prioritaire, le préfet aura l’obligation de proposer un
hébergement dans un délai de 6 semaines également. A défaut de solution concrète dans ce
délai, il sera possible de saisit le tribunal administratif qui aura un délai de 2 mois pour statuer.
84 La notion de délai anormalement long est variable selon le département. Il est fixé par arrêté préfectoral.
241
DEES • Manuel de formation
Il pourra ordonner l’accueil dans une structure adaptée, de type structure d’hébergement,
résidence sociale, logement de transition, maison-relais…
Toute personne accueillie avec ou sans recours administratif dans une structure hébergement
d’urgence, en accueil de jour, en hôtel avec financement des nuitées par l’état… pourra
s’y maintenir jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée vers une structure stable
d’hébergement, un logement ou une structure de soins.
14.5. Autres dispositions
Le montant du dépôt de garantie pour l’accession à un logement a été ramené à un mois
(au lieu de 2 mois auparavant) sauf pour les logements vides du secteur privé conventionné
(éligible à l’APL) et les logements relevant de la loi de 1948, ou si le est payable d’avance pour
une période supérieure à deux mois. Le dépôt de garantie peut être versé par le locataire,
ou sous forme de prêt sans intérêt par Loca-Pass, sous certaines conditions, ou par le FSL,
sur demande du futur locataire.
Des prestations financières peuvent être versées par la CAF sous conditions : L’allocation
Personnalisée au Logement (APL), l’Allocation de Logement à caractère Familial(ALF), et
l’Allocation de Logement Social(ALS).
Une prime de déménagement peut être versée aux familles nombreuses, sous certaines
conditions, de même qu’un prêt à l’amélioration de l’habitat.
Pour plus d’informations, se reporter à la brochure de la CAF présentant les prestations,
régulièrement mise à jour et téléchargeable sur le site internet de la CAF85.
15. Le récapitulatif des principales lois adoptées depuis
l’année 1998 dans le secteur social et médico-social
▶▶ Loi N°98-657 du 29 juillet 1998 « d’orientation relative à la lutte contre
l’exclusion »
Elle repose sur trois principes : l’accès effectif de tous aux droits fondamentaux (emploi,
santé, logement, revenu minimum, loisirs et culture), une politique multidimensionnelle
et intégrée, et le partenariat entre les acteurs et la possibilité de représentation des
personnes en difficulté. Principales dispositions : Parcours individualisé d’insertion pour
les jeunes sortis du système scolaire, avec formation et stages, recentrage des CES sur les
publics les plus en difficulté, accès direct aux emplois consolidés sans passer par les CES,
Contrats de qualification ouverts sous certaines conditions aux plus de 26 ans, associations
de Demandeurs d’Emploi, Taxe sur les logements vacants, amélioration de la protection des
personnes menacées d’expulsion, amélioration de l’accès aux soins et création de la CMU,
création d’un revenu minimum insaisissable par les banques, équivalent au montant du RMI,
indexation de certains minima sociaux(ASS, API,AI) sur l’inflation, actions de lutte contre
l’illettrisme, bourses des collèges rétablies, développement de l’accès à la culture et aux
loisirs pour les plus défavorisés, les SDF peuvent se faire inscrire sur les listes électorales,
le permis de conduire et la carte nationale d’identité deviennent gratuits. La loi a été élaborée
par Martine Aubry, alors ministre de l’emploi et des affaires sociales.
85 http://www.caf.fr/guide-prestations-2012-0
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