13.3. Le schéma de l`organisation de la justice en France
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13.3. Le schéma de l`organisation de la justice en France
DEES • Manuel de formation respect des règles, mise en danger, délaissement (abandon d’une personne vulnérable ou d’un mineur)69, non-assistance à personne en péril, agressions sexuelles et atteintes aux mœurs70, usage et trafic de stupéfiants, atteintes à la personnalité dont la violation de domicile par abus d’autorité, la violation du secret professionnel, l’atteinte au secret de la correspondance, les atteintes aux mineurs et à leurs familles(abandon de famille et soustraction d’enfants). • Les crimes. Cette catégorie comprend les actes les plus graves : viol, enlèvement et séquestration, actes de barbarie et torture, homicide volontaire, vol à main armée, actes de terrorisme, génocide, certaines atteintes contre les biens… Les crimes sont jugés par la Cour d’Assises, sauf dans le cas des crimes contre l’humanité qui sont jugés par le Tribunal Pénal International. Les peines encourues sont l’incarcération qui va d’une durée variable de 15 ans à la réclusion à perpétuité, assorties éventuellement d’une période de sureté. Des peines complémentaires peuvent accompagner la réclusion : amendes, peines privatives de droits (droits civiques par exemple), confiscation de biens… La sanction pénale a pour objectifs de punir le coupable, et de dissuader les autres individus ou le condamné lui-même de reproduire ses actes. Le droit pénal a pour objet de protéger la société en interdisant les actes qui sont considérés comme nuisibles à la collectivité, et qui constituent une menace pour sa cohésion. 13.3. Le schéma de l’organisation de la justice en France La justice est divisée en deux grandes parties : les juridictions de l’ordre administratif et les juridictions de l’ordre judiciaire. Les juridictions de l’ordre administratif prennent en charge les litiges nés de l’action ou de l’activité de l’administration (= ensemble des services publics). Le tribunal administratif s’occupe donc du préjudice causé par l’action ou la faute de l’administration. Si l’on souhaite introduire un recours contre ses décisions, l’affaire passe aux mains du Conseil d’État qui siège à Paris. Le tribunal Administratif est compétent quand l’une au moins des parties concernées par une affaire est un service public. Tableau : organisation judiciaire en France71. Les juridictions de l’ordre judiciaire, à présent, se divisent elles-mêmes en deux parties importantes. • La justice civile, qui s’occupe des litiges d’intérêt privé. Son rôle est de faire appliquer le droit privé qui régit les rapports des particuliers entre eux. Elle s’appuie sur le code civil. • La justice pénale, qui est chargée de faire appliquer les lois et les textes répressifs édictés, et de réprimer les infractions et infliger les peines. Elle s’appuie sur le code pénal. Les affaires dont le montant n’excède pas un plafond déterminé, pour les affaires civiles, ou les affaires pénales relatives aux contraventions relevant du tribunal de police, sont jugées dans les locaux du Tribunal d’Instance. Dans ces jugements, le recours à un avocat n’est pas obligatoire. C’est le tribunal de proximité. Les affaires judiciaires relevant du premier degré de juridiction et les affaires administratives relevant du premier degré de juridiction, sont jugées au Tribunal de Grande Instance. 69 Par exemple abandon d’un enfant laissé en garde à un tiers qui a consenti à le prendre en charge momentanément. 70 Le viol est un crime. Il apparait dans le groupe des agressions sexuelles et atteintes aux mœurs en droit pénal spécial, mais appartient à la troisième catégorie. 71 Source : http://nico1-toutlefrancais.wikispaces.com/la+justice+en+France. 232 Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES Schéma d’organisation du système judiciaire Administratif Pénal Judiciaire Civil Premier degré Tribunaux Affaires jugées Tribunal de grande instance (164 au 1er janvier 2011) Affaires civiles qui ne sont pas jugées par les tribunaux spécialisés (divorces, adoption). Tribunal d’instance Tutelle, loyer… et affaires civiles jusqu’à 10 000 €. Tribunal de commerce Affaires entre commerçants ou relatives aux actes de commerce. Conseil de prud’hommes Affaires nées à l’occasion des contrats de travail ou d’apprentissage. Tribunal paritaire des baux ruraux Affaires nées de l’application du bail rural. Tribunal des affaires de Sécurité sociale Litiges avec les organismes de Sécurité sociale (maladies, retraites…). Tribunal de police Contraventions, infractions les moins passibles d’amende. Tribunal correctionnel Délits, infractions que la loi punit de peines d’amende, d’emprisonnement (10 ans au plus) et d’autres peines. Cours d’assises Crimes, infractions les plus graves. Tribunal administratif Litiges concernant la puissance publique (administrations, entreprises publiques…) Autres juridictions administratives Pensions civiles et militaires, aide sociale… Deuxième degré Cours d’appel (36) Réexamine une affaire déjà jugée par un tribunal. Cour administrative d’appel (8) Réexamine une affaire déjà jugée par un tribunal administratif. Cours de cassation (1) Ne juge pas d’affaire ellemême, mais vérifie si les lois ont été appliquées correctement par les tribunaux d’appel. Conseil d’État (1) Réexamine une affaire jugée par les autres juridictions administratives et statue directement sur la légalité des actes administratifs les plus importants. 233 DEES • Manuel de formation 13.4. Le secret professionnel Il existe 3 façons d’être soumis au secret professionnel : par état, par profession et par missions. Les travailleurs sociaux, à l’exception des assistants des services sociaux, peuvent être soumis au secret professionnel par mission. C’est notamment le cas lorsqu’ils exercent dans le champ de la protection de l’enfance. En effet, l’article L. 221-6 alinéa 1er du code de l’action sociale et des familles stipulent « toute personne participant aux missions de l’aide sociale à l’enfance est tenue au secret professionnel sous les peines et dans les conditions prévues par les articles 226-13 et 226-14 Code pénal ». • « Constitue un secret : le fait révélé, confié par celui que la fait concerne, qu’il ait ou non spécifié le caractère secret de la révélation… • Le fait découvert par le détenteur du secret »72, ou appris d’une autre source, compris ou deviné par le détenteur. C’est le cas même si la personne concernée par le secret n’a pas conscience des informations qu’elle a données, de sa maladie. Un fait connu dans un cercle restreint d’amis ou de professionnels reste un secret. La notion de secret reste applicable entre parents et enfants, entre conjoints, et même en cas de décès de la personne. Un fait négatif, par exemple un certificat attestant qu’une personne n’est atteinte d’aucune maladie, constitue un secret. Enfin la révélation d’un secret, même quand elle a pour but de favoriser la personne (obtenir un droit ou un avantage, faire mieux comprendre le sens de certains de ses actes) est punissable. Les peines encourues, lorsque cette obligation n’est pas respectée, sont énoncées dans l’article 226-13 du code pénal : « La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende ». Cependant, dans certains cas, ce secret peut être levé. Ces cas sont énoncés dans l’article 226-14 du code pénal : « L’article 226-13 n’est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n’est pas applicable : 1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ; 2° Au médecin qui, avec l’accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République les sévices ou privations qu’il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l’exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n’est pas nécessaire ; 3° Aux professionnels de la santé ou de l’action sociale qui informent le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont 72 Patrice Gattegno. Droit pénal spécial. Dalloz. 1997. p. 141. 234 Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES ils savent qu’elles détiennent une arme ou qu’elles ont manifesté leur intention d’en acquérir une. Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut faire l’objet d’aucune sanction disciplinaire ». Le professionnel est donc autorisé à parler dans certains cas, mais pas à n’importe qui, seulement aux autorités administratives et judiciaires. De plus le secret professionnel n’est pas opposable au président du Conseil général par un agent du service social ou de l’ASE, ou par un organisme mandaté par le juge pour enfants pour mettre en œuvre des mesures éducatives. De manière générale, le secret professionnel n’est pas opposable au prescripteur institutionnel73. La réforme de la protection de l’enfance du 5 mars 2007 a introduit la notion de secret professionnel partagé. Bien évidemment, dans ce cadre, l’échange d’informations n’est possible qu’entre personnes dépositaires du secret professionnel. Cette notion est reprise dans l’article L. 226-2-2 du code de l’action sociale et des familles : « Par exception à l’article 226-13 du code pénal, les personnes soumises au secret professionnel qui mettent en œuvre la politique de protection de l’enfance définie à l’article L. 112-3 ou qui lui apportent leur concours sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret afin d’évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre en œuvre les actions de protection et d’aide dont les mineurs et leur famille peuvent bénéficier. Le partage des informations relatives à une situation individuelle est strictement limité à ce qui est nécessaire à l’accomplissement de la mission de protection de l’enfance. Le père, la mère, toute autre personne exerçant l’autorité parentale, le tuteur, l’enfant en fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement informés, selon des modalités adaptées, sauf si cette information est contraire à l’intérêt de l’enfant ». Cette notion est donc strictement encadrée et il est important d’avoir à l’esprit, en tant que travailleur social, que le secret est la règle et le partage l’exception. 13.5. L’obligation de révéler, l’obligation d’agir Tout citoyen a l’obligation de révéler les mauvais traitements ou les privations infligées à un mineur de 15 ans ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience psychique ou physique ou d’un état de grossesse. La personne qui en a eu connaissance et qui n’informe pas les autorités judiciaires ou administratives encourt une peine de 3 ans de prison et de 45 000 euros d’amende (art. 434-3 du NCP).Mais le deuxième alinéa de ce même article 434.4 du CP excepte de cette obligation les personnes soumises au secret professionnel. Ce qui signifie que les travailleurs sociaux soumis au secret ne pourraient plus être poursuivis pour non-dénonciation de mauvais traitement. La révélation est laissée au choix du professionnel soumis au secret. Les sanctions prévues par l’article 226-13 du Nouveau Code Pénal contre toute personne qui révèle une information à caractère secret ne sont pas appliquées « à celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de sévices ou privations dont il a eu 73 Cf Affaire Montjoie. Pierre Verdier, Jean-Pierre Rozenczveig. La responsabilité en travail social. Dunod, 1998, page 310. 235 DEES • Manuel de formation connaissance et qui ont été infligées à un mineur de 15 ans ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique ». En matière de mauvais traitements, sévices et privations, le professionnel a donc la possibilité : -- soit de révéler les faits et il ne pourra être poursuivi pour violation du secret professionnel ; -- soit de ne pas les révéler, donc de les garder secrets et il ne pourra pas être sanctionné pour non-dénonciation de mauvais traitements. Cette possibilité ne le dispense pas de mettre en œuvre tous les moyens pour faire cesser la situation de maltraitance, ou dans des cas plus graves, de tenter de faire obstacle à tout projet d’atteinte contre des personnes, et quand il a eu connaissance de délits ou de crimes après qu’ils aient été commis, de tenter de faire obstacle à leur récidive. L’action destinée à empêcher un délit ou un crime n’implique pas l’obligation de dénonciation. Les travailleurs sociaux sont donc parfois soumis à des obligations contradictoires et face auxquelles ils sont confrontés à un choix moral. La loi laisse une possibilité d’appréciation de la conduite à suivre, sauf dans les cas particuliers des fonctionnaires et organismes mandatés en matière d’information. La conduite à éviter absolument est l’abstention délictueuse en cas de danger pour des personnes, quand une action peut empêcher la réalisation du risque sans que le professionnel se mettre lui-même en danger ou compromettre gravement ses actions à venir. 14. Le droit au logement « 10. La nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. « 11. Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. »74 Le droit au logement est un des droits fondamentaux qui répondent aux principes inscrits dans les articles 10 et 11 du préambule de la constitution de 1946, qui a dans la constitution d’aujourd’hui valeur constitutionnelle. Les mouvements migratoires qui se sont opérés depuis plusieurs décennies des campagnes vers les villes ont abouti à un déficit de l’offre de logement par rapport à la demande. Les programmes de construction de logements n’ont pas suivi la progression de la demande, et la construction de logements a subi les effets de la spéculation immobilière. Dans l’économie de marché, l’insuffisance de l’offre entraîne une augmentation des prix des produits proposés, et le logement a subi comme c’était prévisible les tensions du marché. Bien que le parc locatif social (les HLM) réponde en partie au besoin de loger des personnes et des familles avec des ressources modestes, le secteur n’a pas été épargné par la spéculation sur le prix des terrains, ce qui a eu pour effet d’augmenter le coût des constructions (investissements plus lourds), et par voie de conséquence le montant des loyers. Le montant élevé des loyers dans le parc privé met le logement privé hors de portée d’un grand nombre et empêche que des logements sociaux se libèrent pour de nouveaux accédants. 74 Articles 10 et 11 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946. 236 Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES L’affirmation du droit au logement a été inscrite pour la première fois dans la loi Quilliot de 1982. Les initiatives publiques ont été nombreuses pour favoriser l’accès au logement, et la loi Besson75 n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement cherche à garantir ce droit par la création des Plans Départementaux d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées (PDALPD) et par un dispositif d’incitation à l’investissement locatif, destiné à favoriser l’accès au logement des plus défavorisés. La loi Besson dans son article 1 affirme que «Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation. Toute personne éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité, dans les conditions fixées par la présente loi, pour accéder à un logement décent et indépendant et s’y maintenir.» La loi comporte également des dispositions concernant les gens du voyage, obligeant les communes de plus de 5000 habitants à installer des terrains aménagés pour les accueillir. Les départements se voient imposer l’obligation des schémas départementaux prévoyant les conditions d’accueil spécifiques des gens du voyage ». Les dispositions de la loi de 1990 seront renforcées par la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage76, plus contraignante que la loi précédente, et fixant des délais pour l’élaboration du schéma départemental d’une part, et pour la réalisation des aires d’accueil après l’adoption du schéma départemental. L’objectif était de créer 30 000 places de stationnement en cinq ans. La loi prévoit des subventions pour aider les communes à créer ou réhabiliter des aires de stationnement, et des sanctions pour celles qui ne rempliraient pas leur obligation, en donnant au préfet le pouvoir de faire réaliser les aires d’accueil aux frais des communes concernées. La loi permet aux communes qui installent des aires d’accueil d’interdire le stationnement sur le reste de leur territoire. « Même en l’absence de schéma départemental approuvé, les communes de plus de 5 000 habitants ont, en application de l’article 28 de la première loi Besson, exceptionnellement prorogé dans ce cas, l’obligation de réserver aux gens du voyage des terrains aménagés. Cependant, la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine a prévu la possibilité pour les communes de moins de 20 000 habitants dont la moitié de la population habite dans une zone urbaine « sensible » de demander à être déchargées de leur obligation à l’égard de gens du voyage. »77. Les mesures destinées à faciliter l’investissement locatif prévues à l’origine par la loi Besson, ont été suivies par le dispositif De Robien, puis par l’amendement Scellier, et récemment par la loi Duflot. Cette dernière comporte comme les précédentes des incitations fiscales pour stimuler la construction de logements, une obligation renforcée pour les communes pour la construction d’un parc locatif social. Un décret de juillet 2012 avait permis de réglementer les hausses de loyer dans le parc privé, en les indexant sur l’indice du coût de la construction, empêchant les bailleurs privés de procéder à des hausses non maîtrisées en cas de relocation d’un logement après le départ de l’ancien occupant. 75 Du nom de Louis Besson, ministre détaché au logement. 76 Loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage. 77 Sénat. Note de synthèse. http://www.senat.fr/lc/lc145/lc1450.html 237 DEES • Manuel de formation 14.1. Le logement précaire et l’hébergement L’insuffisance de logements et/ou le manque de ressources des candidats au logement amène un grand nombre de personnes à être hébergées dans la famille, chez des amis, ou chez des personnes qu’elles ne connaissent pas a priori, mais pour lesquelles l’hébergement d’un individu ou d’une famille constitue selon les cas un acte de solidarité complétement désintéressé, ou une aide financière permettant de mieux assumer les charges du logement. Cette situation n’est pas sans poser de problèmes, si on fait abstraction de la générosité qu’elle peut représenter. Pour les jeunes qui atteignent l’âge adulte et qui seraient en capacité de vivre hors de chez les parents, l’accès au logement est très difficile et entraîne un maintien non choisi dans le milieu familial, néfaste pour leur indépendance et à l’origine de nombreux conflits avec leurs aînés. Dans les autres cas, la(les) personne(s) hébergées sont sous la dépendance de celle qui les accueille et n’ont aucun droit de se maintenir dans le logement si les relations se dégradent. Il en est de même dans le cas des sous-locations, le seul titulaire de droits étant le signataire du bail. Dans le cas des baux glissants, quand le loyer est garanti par un organisme social78 qui sous-loue à quelqu’un qui ne remplirait pas les conditions « normales » d’accès au logement, le sous-locataire n’a aucun droit. Plusieurs exemples de sous-location en bail glissant ont démontré que le si l’organisme qui gère les appartements glissants arrête son activité, souvent en raison de la baisse de ses financements, ou parce que les occupants des logements n’acquittent plus leur loyer pour des raisons multiples, l’occupant du logement n’est pas repris par le bailleur et se voit expulsé, même dans des cas où il payait régulièrement son loyer. À la difficulté d’obtenir un logement s’ajoute donc la question du maintien dans le logement. 14.2. Le Fonds de Solidarité Logement (FSL) Le Fonds de Solidarité Logement (FSL) a été créé par la loi du 31 mai 1990. Il a pour but de faciliter l’accès au logement ou le maintien dans le logement pour les personnes ou les familles qui ont des difficultés financières. On peut recourir au FSL au moment de l’entrée dans le logement :possibilité de prendre en charge ou d’accorder un prêt à taux zéro pour la caution, le paiement du premier loyer, les frais de déménagement. Pour l’occupant d’un logement, le FSL peut aider au paiement du loyer (si deux loyers au moins sont non réglés et que le paiement ait bien été repris ensuite), le paiement de la fourniture d’eau, d’électricité, le téléphone. Une demande au FSL, après que l’intéressé a été informé de l’interruption du service, a un effet suspensif : pendant l’étude du dossier par le FSL, la fourniture d’énergie ou de téléphone ne peut pas être interrompue. Le fournisseur doit impérativement mentionner la possibilité de recours au FSL dans le courrier qu’il adresse à celui qui est en retard de paiement. 78 Souvent une association à but non lucratif. Le principe est que l’association loue plusieurs appartements auprès d’un bailleur HLM, et les met à disposition de personnes peu solvables (bénéficiaires du RSA par exemple) qui ne pourraient pas se loger autrement, moyennant un loyer minoré qui évolue en fonction des ressources des occupants. Quand les ressources sont devenues stables, l’occupant reprend le logement à son nom et devient locataire en titre. Les associations qui gèrent des appartements en bail glissant perçoivent des subventions qui leur permettent de moduler la participation des occupants en fonction de leurs ressources. Les associations garantissent le paiement du loyer au bailleur HLM, et font un accompagnement du sous-locataire dans ses démarches, afin qu’il reprenne le logement à son nom dans les meilleurs délais. Dans la pratique, les baux « glissent » difficilement et du fait de la crise et du marché de l’emploi très défavorable, beaucoup d’associations gérant des appartements glissants se trouvent en difficulté, leur équilibre budgétaire dépendant à la fois de financements publics, tendant à diminuer, et de la solvabilité des sous-locataires, elle-même très aléatoire. 238 Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES Le 29 juillet 1992, dans la loi relative au Revenu Minimum d’Insertion, il est prévu une aide pour le paiement des factures d’eau et d’énergie. Les modalités pour l’aide à la fourniture d’eau ont été précisées dans la charte solidarité eau en 1996, puis « En 2000, les professionnels de l’eau, regroupés au sein du SPDE (Syndicat professionnel des entreprises de services d’eau et d’assainissement), ont signé avec les pouvoirs publics et les représentants des collectivités territoriales une convention nationale intitulée Solidarité Eau. Leur principal souci : la lutte contre l’exclusion. • Solidarité Eau permet de maintenir le service de l’eau aux personnes et aux familles en situation de pauvreté et de précarité, visées par la loi du 29 juillet 199879. • Dans chaque département, des conventions sont passées entre l’État, les entreprises locales de distribution et les collectivités territoriales, les centres locaux d’action sociale, les organismes de protection sociale et les associations de solidarité. »80. La Convention Nationale Solidarité Eau intègre les dispositions de la loi de 1998. La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales prévoit l’intégration de la prise en charge des impayés d’eau dans le cadre du FSL : chaque département est tenu de venir en aide aux personnes qui se trouvent dans l’impossibilité d’assumer le paiement des factures d’eau, d’énergie et de services téléphoniques. Le traitement des impayés relevant du FSL peut prendre la forme de prêts, avances remboursables, garanties… • Les critères d’intervention sont précisés par le règlement intérieur de chaque FSL, adopté par chaque Conseil Général (CG) après avis du Comité responsable du Plan Départemental d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées(PDALPD), coprésidé par le Préfet et par le Président du Conseil Général. • Dans chaque département un PDALPD définit les mesures destinées à permettre aux personnes ou aux familles en difficulté d’accéder à un logement, ou de s’y maintenir et de disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques. • Le FSL est placé sous la responsabilité des Conseils Généraux mais il existe la possibilité pour les autres collectivités territoriales et les EPCI de participer à son financement81. La procédure de surendettement constitue un des recours possibles contre l’expulsion. La recevabilité du dossier de surendettement a un effet suspensif sur la procédure d’expulsion, et interdit au bailleur de procéder à la récupération des sommes dues avant la décision de la commission de surendettement : « Suspension des mesures d’expulsion (code de la consommation : L. 331-3-2, R. 331-12) Saisine du juge du tribunal d’instance Si la commission déclare le dossier du débiteur recevable, elle peut saisir le juge du tribunal d’instance aux fins de suspension des mesures d’expulsion du logement du débiteur. En cas d’urgence et après dépôt du dossier devant la commission, la saisine du juge peut intervenir à l’initiative du président de la commission, de son délégué, du représentant local de la Banque de France ou du débiteur. Cette mesure ne sera autorisée par le juge que si la situation du débiteur l’exige, ce qui lui laisse des pouvoirs d’appréciation importants. 79 La loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions prévoit que le maintien de la fourniture d’eau sera assuré en cas de non-paiement des factures, jusqu’à l’intervention du dispositif d’aide. Les distributeurs d’eau sont associés au dispositif. En revanche, le financement du dispositif n’est pas assuré pleinement avec cette loi. 80 La rédaction. «La charte Solidarité Eau». Revue Quart Monde, N°180 - L’eau : un bien commun ? Année 2001Revue Quart Monde. 81 Sources : www.senat.fr (rapport N°242,Proposition de loi relative à la solidarité des communes dans le domaine de l’alimentation en eau et de l’assainissement des particuliers). 239 DEES • Manuel de formation Durée de la suspension La suspension des mesures d’expulsion ne peut excéder un an. Mais elle peut cesser avant l’expiration de ce délai en cas : ------ d’irrecevabilité de la demande ; de clôture du dossier ; de déchéance du débiteur ; d’approbation du plan conventionnel ; de décision imposant les mesures de traitement du surendettement exécutoire sans homologation par le juge ; -- d’homologation par le juge des mesures recommandées par la commission ; -- de jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. Mesures d’expulsion concernées (circulaire du 19.12.10 : BOMJL du 30.12.10) Les mesures d’expulsion concernées sont toutes celles établies par la commission au moyen des documents dont elle dispose. La demande de suspension doit être justifiée par la copie du commandement de quitter les lieux. A défaut, la copie de la décision ordonnant l’expulsion peut être jointe (code de la consommation : R. 331-12 al. 1er). »82. Le locataire ne sera pas déchargé de sa dette, mais aucun recours par le bailleur ne sera possible pendant la durée de la suspension. 14.3. La loi DALO (Droit Au Logement Opposable) du 5 mars 2007 Adoptée à la suite du mouvement des « Enfants de Don Quichotte » né des campements de sans-abri pendant l’hiver 2006, la loi DALO fait de l’État le garant du droit au logement, pour les personnes qui ne peuvent accéder à un logement décent par leurs propres moyens. La loi DALO a créé deux recours, lorsque les démarches pour accéder à un logement n’ont pas abouti : -- recours amiable devant la commission de médiation ; -- recours contentieux auprès du tribunal administratif. Pour bénéficier du droit à un logement décent et indépendant en application de la loi DALO, il faut remplir les conditions suivantes : -- être de nationalité française ou résider sur le territoire français de manière régulière ; -- ne pas être en mesure d’accéder par ses propres moyens à un logement décent et autonome, ou de s’y maintenir ; -- satisfaire aux conditions règlementaires d’accès au logement social83. 82 Site de l’Agence Nationale d’Information sur le Logement. Articulation entre la procédure de surendettement, l’expulsion et les aides au logement. http://www.anil.org/analyses-et-commentaires/analyses-juridiques/analyses-juridiques-2012/surendettement-expulsionet-aides-au-logement/page-2/#c69177 83 « Les logements HLM sont soumis :– à une réglementation particulière aux logements HLM (CCH : Livre IV- Titre IV, L. 441 à L. 445-8 et R. 441-1 à R. 443-34 / des rapports entre les organismes et les bénéficiaires) ;– aux dispositions relatives aux logements conventionnés (CCH : L. 353-14 et suivants et R. 353-1 et suivants) ;– et partiellement à la loi du 1er septembre 1948. » . Source ADIL 94 : http://www.adil94.org/index.php?option=com_content&view=article&id=24&Itemid=69 240 Partie 2 • Préparer sa formation et réussir les épreuves du DEES Sont concernées par la procédure DALO les personnes qui se trouvent dans l’une des situations suivantes : ----- être sans logement, sans domicile stable ou hébergé ; être menacé d’expulsion, sans solution de relogement ; être logé dans des locaux insalubres ou dangereux ou impropres à l’habitation ; être logé dans un logement sur-occupé et être en situation de handicap, ou avoir à sa charge au moins un enfant mineur ou une personne handicapée ; -- être hébergé dans un établissement ; -- avoir déposé une demande de logement et disposer d’un numéro d’enregistrement en préfecture, et n’avoir reçu aucune proposition durant un délai « anormalement long »84. Si on remplit ces conditions, on peut s’adresser à la commission départementale de médiation, avec l’assistance éventuelle d’une association agréée, dont la liste est disponible dans chaque préfecture. La loi est applicable depuis le 1er janvier 2008. Le formulaire de recours est téléchargeable sur internet. La commission doit prendre une décision sur le recours déposé dans un délai de 3 à 6 mois selon les départements. Si la commission estime que le demandeur est prioritaire et qu’un logement doit lui être attribué d’urgence, elle transmettra sa décision au préfet en mentionnant les caractéristiques que doit avoir le logement. Si un accueil dans une structure autre qu’un logement classique, par exemple en foyer d’hébergement, en résidence sociale, ou toute autre forme de logement, elle indiquera au préfet l’accueil qui doit être prévu. La commission devra répondre par écrit, que la réponse soit positive (la demande est considérée comme prioritaire) ou non. Si un logement n’a pas été attribué dans un délai de 3 à 6 mois, en fonction du département, il est possible de faire un recours contentieux auprès du tribunal administratif. Le tribunal devra statuer en urgence, dans un délai de 2 mois après qu’il ait été saisi. Les associations qui sont agréées pour saisir la commission de médiation peuvent assister les demandeurs pour former le recours contentieux. Le tribunal administratif pourra ordonner à l’état de loger ou reloger le demandeur dont la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation. Il pourra également ordonner, même si la demande porte sur un logement, l’accueil dans un lieu d’hébergement, un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer une résidence sociale, si cette réponse parait plus adaptée. Le recours ne donne pas droit à une indemnité financière. 14.4. Le Droit à l’Hébergement Opposable (DAHO) La loi du 5 mars 2007 prévoit des recours semblables à ceux dont disposent les demandeurs de logement. La commission de médiation doit examiner la demande d’accueil en structure d’hébergement dans un délai de 6 semaines. Après la réponse de la commission de médiation, si la personne est reconnue comme prioritaire, le préfet aura l’obligation de proposer un hébergement dans un délai de 6 semaines également. A défaut de solution concrète dans ce délai, il sera possible de saisit le tribunal administratif qui aura un délai de 2 mois pour statuer. 84 La notion de délai anormalement long est variable selon le département. Il est fixé par arrêté préfectoral. 241 DEES • Manuel de formation Il pourra ordonner l’accueil dans une structure adaptée, de type structure d’hébergement, résidence sociale, logement de transition, maison-relais… Toute personne accueillie avec ou sans recours administratif dans une structure hébergement d’urgence, en accueil de jour, en hôtel avec financement des nuitées par l’état… pourra s’y maintenir jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée vers une structure stable d’hébergement, un logement ou une structure de soins. 14.5. Autres dispositions Le montant du dépôt de garantie pour l’accession à un logement a été ramené à un mois (au lieu de 2 mois auparavant) sauf pour les logements vides du secteur privé conventionné (éligible à l’APL) et les logements relevant de la loi de 1948, ou si le est payable d’avance pour une période supérieure à deux mois. Le dépôt de garantie peut être versé par le locataire, ou sous forme de prêt sans intérêt par Loca-Pass, sous certaines conditions, ou par le FSL, sur demande du futur locataire. Des prestations financières peuvent être versées par la CAF sous conditions : L’allocation Personnalisée au Logement (APL), l’Allocation de Logement à caractère Familial(ALF), et l’Allocation de Logement Social(ALS). Une prime de déménagement peut être versée aux familles nombreuses, sous certaines conditions, de même qu’un prêt à l’amélioration de l’habitat. Pour plus d’informations, se reporter à la brochure de la CAF présentant les prestations, régulièrement mise à jour et téléchargeable sur le site internet de la CAF85. 15. Le récapitulatif des principales lois adoptées depuis l’année 1998 dans le secteur social et médico-social ▶▶ Loi N°98-657 du 29 juillet 1998 « d’orientation relative à la lutte contre l’exclusion » Elle repose sur trois principes : l’accès effectif de tous aux droits fondamentaux (emploi, santé, logement, revenu minimum, loisirs et culture), une politique multidimensionnelle et intégrée, et le partenariat entre les acteurs et la possibilité de représentation des personnes en difficulté. Principales dispositions : Parcours individualisé d’insertion pour les jeunes sortis du système scolaire, avec formation et stages, recentrage des CES sur les publics les plus en difficulté, accès direct aux emplois consolidés sans passer par les CES, Contrats de qualification ouverts sous certaines conditions aux plus de 26 ans, associations de Demandeurs d’Emploi, Taxe sur les logements vacants, amélioration de la protection des personnes menacées d’expulsion, amélioration de l’accès aux soins et création de la CMU, création d’un revenu minimum insaisissable par les banques, équivalent au montant du RMI, indexation de certains minima sociaux(ASS, API,AI) sur l’inflation, actions de lutte contre l’illettrisme, bourses des collèges rétablies, développement de l’accès à la culture et aux loisirs pour les plus défavorisés, les SDF peuvent se faire inscrire sur les listes électorales, le permis de conduire et la carte nationale d’identité deviennent gratuits. La loi a été élaborée par Martine Aubry, alors ministre de l’emploi et des affaires sociales. 85 http://www.caf.fr/guide-prestations-2012-0 242