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L’Objectif du 25 OCTOBRE au 7 NOVEMBRE 2013
enquête
Deux fois plus d’échanges de
Echanger sa maison contre un
appartement ailleurs dans le
monde pendant les vacances:
une pratique qui séduit quelque
100 Fribourgeois en 2013. C’est
deux fois plus que la moyenne
suisse. Si ce marché existe depuis les années 50, il connaît un
renouveau avec internet. Quels
sont les risques en cas de pépin? Combien gagnent les sites
d’échange? Enquête.
Gilles Mauron
[email protected]
«J
e recherche un petit coin
de paradis où qu’il soit,
et en échange je vous
propose une charmante
maison familiale, avec
grande terrasse près de la ville de Fribourg. Notre habitation est proche
de toutes commodités: grands magasins à 5 min, places de sport et de
loisirs, restaurants... et située également à 5 minutes de l’autoroute.
Vous pourrez visiter la Suisse en un
clin d’oeil (Zürich 1 h 30; Lausanne,
ville olympique, 45 min; Zermatt
2 h 15 etc...). En plus, les voisins sont
super sympas et pourront vous aider.
Possibilité d’échange de voiture. Ouvert à toutes offres du 6 juillet 2014
au 24 août 2014, idéalement l’Australie ou la Californie.» Voici une
offre standard d’échange de maison
comme on en trouve plus de 90 000
sur internet, avec photo du logis et
parfois de ses occupants en sus.
qui viendrait à Matran?
Mais peut-on vraiment échanger sa maison de Matran ou son
4 pièces de Villars-Vert contre un
appartement au centre de Paris ou
une maison en bord de mer? «Oui,
les gens cherchent souvent ce
qu’ils n’ont pas chez eux. De plus,
Fribourg est une place centrale en
Suisse et même en Europe. Pour
les Américains, Chamonix, Zermatt
ou Florence sont à un saut de puce
Echanger sa maison avec un internaute durant les vacances séduit une centaine de Fribourgeois en 2013. Quatre principaux sites internet se disputent ce
marché. Le leader, une société américaine, réalise un chiffre d’affaires d’environ 5 millions de francs. Elle emploie 50 personnes tout autour de la planète.
de Fribourg!», explique Marie-Paule
Loye, représentante suisse du site
Homelink, un des trois leaders de
l’échange de maison dans le monde,
avec TrocMaison et Intervac.
cherche, et se rendre au moins une
fois par semaine sur son ordinateur pendant une ou deux heures.»
Chacun précise sur son annonce les
dates et le lieu souhaités, mais cela
peut rester plus ou moins vague:
des heures sur internet
«C’est plus facile si on est ouvert à
l’aventure, et cela permet de partir
Selon cette dernière, 90% des
dans des lieux où l’on n’aurait jagens trouvent une maison à échanger. Mais cela ne se fait pas tout
mais imaginé se rendre. Cela peut
seul: «C’est moins confortable que
prendre plus de temps si l’on veut
d’aller dans une agence de voyages,
partir à une date et dans un endroit
il faut s’investir», commente-t-elle.
précis.» Un bon échange peut se
Première étape: s’inscrire sur le
trouver en quelques semaines.
site de son choix et diffuMais ça peut être beauser son annonce. Cette
coup plus long – 3 à 4
«Pour
inscription, d’environ
mois - selon l’objet
les Américains,
140 francs par année,
recherché. Certains
Chamonix, Zermatt ou
donne le droit de présites proposent des
Florence sont à un saut
offres de dernière
parer une annonce
de puce de Fribourg!»
minute pour celles
et de la diffuser sur
et ceux qui veulent
le site. «Il faut donner
Marie-Paule Loye,
représentante de
partir le lendemain.
envie aux gens de venir
HomeLink en Suisse
A tout moment,
en mettant en valeur sa
l’annonce peut être morégion, la nature qui l’entoure, les lieux à visiter à proxidifiée par l’utilisateur: cermité et sa maison, évidemment rantains organisent ainsi jusqu’à 3 ou
4 échanges par année. Si tous les
gée, en présentant les différentes
internautes peuvent consulter les
pièces, le jardin etc...», explique
annonces sur les différents sites,
Mme Loye.
seules les personnes inscrites ont
Deuxième étape: la prospecaccès au contact de l’annonceur.
tion. Le site internet ne met pas
les gens en contact: chacun doit se
ni caution, ni loyer
mettre en relation avec de potentiels échangeurs. «Il faut être proacTroisième
étape:
organiser
l’échange. Une fois que l’on a troutif si on veut trouver ce que l’on
Payer la taxe de séjour,
même pour son cousin
Lors d’un échange de maison:
doit-on payer une taxe de séjour
pour nos invités? L’économie réalisée sur la location de sa maison de vacances: doit-on la déclarer aux impôts?
«Oui, il faut payer une taxe», répond
Christian Monnet, sous-directeur
de l’Union fribourgeoise du tourisme. «Tout comme il faudrait la
payer lorsqu’un oncle, une cousine
ou un ami vient dormir à la maison.
C’est la loi. Mais nous restons pragmatiques: on ne va pas ennuyer
les privés avec cela. D’autant plus
qu’il serait très dur de prouver
qu’une personne a logé chez une
autre. Il faudrait un policier derrière chaque porte! Nous n’allons
pas dans ce sens et concentrons nos
efforts sur les personnes qui font
du commerce autour de la location
de chambres: hôtels, chambres
d’hôtes etc. Nous surveillons aussi
les résidences secondaires, parfois
nous faisons des enquêtes: nous en
avons la possibilité.»
La taxe de séjour coûte entre 0,8
ct et 2 fr 30 par personne et par nuit,
selon les régions du canton. En 2012,
elle a rapporté quelque 2,8 millions
de francs, redistribués «en faveur des
hôtes», pour les chemins pédestres par
exemple, l’impression de prospectus
touristiques ou encore pour le fonctionnement des offices du tourisme.
du côté des impôts
Relativement à l’impôt, la réponse est non: pas besoin de déclarer. «Une personne qui prête sa maison ne le fait pas sans contrepartie:
elle demande une maison pendant
la même période. On peut donc parler de location, même s’il n’y a pas
échange d’argent. Mais comme les
personnes, locataires ou propriétaires, se privent, durant l’échange,
de leur bien, fiscalement, l’échange
est neutre. Il n’y a donc pas lieu de
déclarer cette contre-prestation, sauf
cas exceptionnel», explique Roland
Devaud, chef adjoint du service cantonal des contributions du canton de
Fribourg.
vé un partenaire avec qui échanger
son logis, il convient d’aborder avec
lui une foule de détails importants:
où laisse-t-on la clé? Se prête-t-on
les voitures? Qui paie l’électricité?
Peut-on utiliser l’ordinateur? Se
laisse-t-on à manger dans le frigo
pour ne pas avoir à trouver un
magasin lors de son arrivée? Pour
ne rien oublier, les différents sites
proposent des aide-mémoire ainsi
que quelques règles de courtoisie.
Comme de laisser un petit cadeau
de bienvenue à son invité, ou préparer un guide de sa maison: où amener les poubelles, comment fonctionne le lave-linge, qui appeler
en cas de soucis... Les conseils sont
aussi bienvenus: visites à faire dans
la région, meilleurs restaurants,
heures à laquelle visiter un musée
pour éviter la file d’attente par
exemple. Les hôtes se transforment
ainsi bien souvent en ambassadeurs
de leur région.
Et peut-on demander de l’argent
ou une caution? Les trois sites interrogés ne le permettent pas: «Cela va
contre la philosophie de l’échange: la
location ce n’est pas chez nous», nous
répond-on. Les abuseurs sont traqués
et peuvent être expulsés du site.
poutser la maison
Dernière étape, préparer la
maison pour accueillir ses invités:
“ “
Il faut ranger la maison,
faire un bon ménage,
sortir des linges, faire de
la place dans les armoires
et la salle de bain... Peut-être qu’en
Suisse avons-nous trop le souci d’avoir
une maison bien rangée et que nous en faisons plus que
nécessaire?...»
Marie-Paule Loye,
représentante de HomeLink en Suisse
«Il faut ranger la maison, faire un
bon ménage, sortir des linges, des
draps, faire de la place dans les
armoires pour leurs affaires...»,
explique Marie-Paule Loye, «Peutêtre qu’en Suisse avons-nous trop
le souci d’avoir une maison bien
rangée et en faisons-nous plus que
nécessaire côté propreté?...» On
peut donc débarquer dans une maison sale? «Les critères de propreté
ne sont pas partout les mêmes effectivement. Il ne faut pas attendre
de nos hôtes qu’ils fassent exactement la même chose que nous. Si
vous voulez la propreté à tout prix,
l’échange n’est pas pour vous! Mais
les plaintes restent tout de même
très rares.», complète-t-elle. «Ceux
qui ne supportent pas de retrouver
le tire-bouchon dans un autre tiroir
ne sont peut-être pas faits pour les
échanges», confirme Alexandra Origet du Cluzeau, directrice de communication chez TrocMaison. «Le
premier échange demande un peu
de travail de préparation, poursuitelle, mais ensuite cela va plus vite.
Je conseille de faire un premier
échange avec une personne expérimentée qui va faire office de mentor et prendre les choses en main.»
Certains sites proposent des
abonnements «privilège», plus chers
,qui donnent accès à différents
services: recherche d’échanges
Il y a une dizaine d’annulations en dernière minute sur 30 000 échanges
durant l’été. Nous avons
un service d’urgence qui réagit rapidement et essaye de trouver une solution
dans la même région.»
Alexandra Origet du Cluzeau,
directrice de communication chez TrocMaison
Une solution pour les «volets clos»?
L’économie du prix de la location d’une maison de
vacances n’est pas la seule motivation des échangeurs.
D’autres avantages sont mis en avant: ne pas laisser sa
propre maison vide, avoir quelqu’un pour nourrir ses
poissons rouges ou simplement le désir de faire profiter
de sa région en son absence. Peut-on imaginer ce système comme solution aux «volets clos» des résidences
secondaires? «Une étude a été menée en Valais pour
étudier cela. Mais ce phénomène est trop marginal pour
être intéressant. Et ça va rester ainsi, car beaucoup de
gens sont incapables de prêter leur lit!», précise MariePaule Loye, représentante en Suisse de HomeLink.
rie» d’habitants, familles, retraités, homosexuels, personnes à mobilité réduite, par centre d’intérêt, fans de
BD, de films, de musique, par profession ou même par
lieu de formation ou employeur (Université de Fribourg
ou Nespresso par exemple): «Cela permet d’augmenter
la confiance entre échangeurs, et les gens peuvent
aussi trouver plus facilement les installations dont ils
ont besoin, comme une rampe d’accès pour chaise
roulante, ou des objets qu’ils estiment nécessaires:
une collection de BD ou des jouets pour enfants par
exemple», explique Laure Heiss, chargée de communication chez Guest to Guest.
personnes à mobilité réduite
échanger un séjour linguistique
Autre avantage: trouver chez les autres ce qui nous correspond. Sur certains sites, en plus de la recherche par
lieu, il est possible de trouver un échange par «catégo-
Certaines personnes échangent encore des séjours
linguistiques pour leurs enfants. Le site Homelink s’en
est même fait une spécialité.
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L’Objectif du 25 OCTOBRE au 7 NOVEMBRE 2013
enquête
maison à Fribourg
pas d’assurance
Comment cela se passe-t-il si
quelque chose tourne mal lors d’un
échange? Aucune garantie: tout est
basé sur la confiance. «C’est le principe du qui casse paye. Généralement, les gens qui échangent sont
assurés en conséquence», répond
Marie-Paule Loye. Aucune des plateformes interrogées ne dispose d’assurances particulières: «un cassetête pour en trouver une qui couvre
144 pays différents.» Mais toutes ont
un service d’aide à la clientèle: chez
TrocMaison, le service francophone
joignable par téléphone ou courriel est «composé de personnes qui
elles-mêmes échangent leur maison». Intervac et HomeLink disposent
quant à eux chacun d’une personne
de contact installée en Suisse.
Selon nos informations, peu de
problèmes graves sont survenus:
«Ce qui arrive le plus souvent, ce
sont des annulations en dernière
minute, explique Mme Origet du
Cluzeau. Nous en avons une dizaine
sur 30 000 échanges durant l’été.»
Dans de tels cas, les trois structures
déclarent soutenir leurs membres
en essayant, par leurs contacts installés dans le pays ou leur base de
données, de trouver une solution de
substitution dans la même région.
«Nous avons toujours trouvé une
solution, y compris de gens qui
ont remboursé les billets d’avion»,
explique-t-on.
pour gayS et enseignantS
Avec internet, ce marché a vu
apparaître de nouveaux concurrents et manières de faire. Certains sites se spécialisent dans
les échanges de maison au sein
de même communautés: entre
retraités, gay ou même entre enseignants! D’autres, comme Guest
to Guest, sont plus innovants: les
personnes s’inscrivent gratuitement et mettent à disposition
des chambres ou studio dans leur
propre logement disponible en
tout temps, même s’ils sont présents. Il n’y a donc plus d’échange
mutuel. Chaque fois que l’on
accueille quelqu’un chez soi, on
reçoit des «points» de son invité,
sorte de monnaie virtuelle qui
sert à «payer» ensuite sa nuit chez
n’importe quel autre membre. On
reçoit ses premiers points en s’inscrivant sur le site, puis en complétant son annonce avec différents
détails et photographies, et finalement en accueillant des gens chez
soi. Il est aussi possible d’acheter
1 euro le point. «Le but est d’offrir
plus de flexibilité que dans les
échanges traditionnels», explique
leur chargé de communication
Laure Heiss. Autre particularité, ce
site propose un système de caution
dont le montant est fixé par les
échangeurs. Guest to Guest, qui ne
communique pas son CA, prélève
les 3,5% de chaque caution déposée. La société, active depuis 2 ans
dans la région parisienne, compte
aujourd’hui 14 000 membres, dont
162 Suisses et 17 Fribourgeois. Elle
emploie 9 personnes à plein-temps
à Paris, et songe à engager du personnel à l’étranger.
«Nous sommes contents de
voir la concurrence se développer,
commente Mme Origet du Cluzeau
de chez TrocMaison. C’est la preuve
que l’échange de maison entre
dans les mœurs, que c’est sérieux
et fondé.» Autre son de cloche
chez HomeLink: «Echanger sa maison n’est pas anodin: il faut une
structure compétente qui assure
à l’arrière. De plus, une foule de
services annexes et payants sont
proposés par ces nouvelles startup qui ont flairé le bon filon: organisation du vol, remise de clé etc.
Cela n’a plus rien à voir avec de
l’échange de maisons entre particuliers, qui doit rester quelque
Deux fois plus à Fribourg
Avec plus de 1600 offres trouvées sur les principaux sites, la Suisse est un
des pays où s’échangent, proportionnellement parlant, aussi le plus de
maisons. Fribourg n’est pas en reste avec 100 maisons «échangeables»
répertoriées, soit proportionnellement parlant près de deux fois plus que
la moyenne en Suisse. Doit-on considérer ce système comme une menace
pour l’hôtellerie? «Je ne pense pas. Ce ne sont pas des parts de marché
prises aux hôtels. Une famille avec trois enfants n’ira jamais deux semaines
en hôtel à Paris. Avec l’échange, c’est possible. Il faut voir cela comme
une contribution à l’économie locale, car une fois sur place, les gens vont
consommer», commente Alexandra Origet du Cluzeau de chez TrocMaison.
L’Asie ne s’ouvre pas
Si certains sites proposent des maisons et des appartements dans 140
pays, ce sont principalement entre les Etats Unis, le Canada et l’Europe
que la majorité des échanges se font. De plus en plus d’habitations en
Amérique latine, particulièrement en Argentine, et en Turquie seraient
aujourd’hui disponibles. En Grèce ou en Asie, ce système a de la peine à
trouver des adeptes.
100
Le nombre de maisons à échanger
dans le canton de Fribourg en 2013.
Il y a 5 ans, ce nombre était de 40.
chose de simple», commente Marie
Paule Loye.
millions de bénéfices
Avec 46 000 personnes inscrites,
dont 600 en Suisse, la société américaine HomeExchange, TrocMaison en
version française, est le leader de ce
marché d’échange. Grâce aux inscriptions, elle réalise un chiffre d’affaires
d’environ 5 millions de francs par année. Active depuis 1992, elle emploie
quelque 50 personnes réparties tout
autour de la planète, dont 10 pour
son site internet: «Nous avons dû
faire d’importants investissements
l’année passée pour le rendre plus
attractif et facile d’accès». TrocMaison
n’a pas de bureaux: les employés travaillent depuis chez eux et communiquent via Skype. Une réunion a lieu
dans le cours de l’année, chaque fois
dans un lieu différent.
Principal concurrent: Intervac qui
compte 30 000 membres, dont 500
en Suisse. Cette société est pionnière
dans les échanges de maison: elle
est fondée en 1952, par deux professeurs, un Hollandais et un Suisse,
qui avaient échangé leurs maisons
lors d’un meeting. Avec un chiffre
d’affaires d’environ 4 millions, Intervac emploie 20 personnes dans le
monde, dont une à 30% en Suisse. Il
n’y a pas non plus de bureaux.
Autre acteur important, HomeLink avec 16 000 membres, dont
380 en Suisse. Vétéran du marché
également, cette société a été fondée en 1953 par des employés de la
Pan American Airways qui s’échangeaient leurs logements entre eux.
Avec environ 2 millions de chiffres
d’affaires aujourd’hui, HomeLink réunit 22 représentants indépendants
dans le monde. Sa représentante en
Suisse, Marie-Paule Loye, investit
30% de son temps dans cette activité
rémunérée, et travaille depuis chez
elle: «Pour avoir un 100%, il faudrait que nous ayons au moins 1000
membres en Suisse. Actuellement il
y en a 380.»
Manger du requin à minuit
James Bangerter de Matran échange
sa maison depuis 2007. Il est allé
dans différentes régions d’Espagne
et en Suède. Son prochain échange
l’emmènera avec sa femme et ses
trois filles en Australie. «La première
fois, c’est l’expérience qui m’a tenté.
Les gens me disaient «tu es fou: tu
ne les connais pas!» Mais les autres
non plus ne me connaissent pas, et
ils ont les mêmes craintes que moi!»
Le côté économique vous a-t-il
attiré? «C’est vrai que l’on économise un peu, mais du coup on va
plus au restaurant, on achète plus de
souvenirs, etc. Cela permet aussi de
rester en vacances plus longtemps!»
Est-ce facile à organiser? «Pour
partir l’été, je commence en automne
déjà. Je fais une dizaine de demandes.
Une fois que l’on a trouvé la personne,
il y a beaucoup d’organisation, de
consultation par email, de planification. Il faut aussi préparer la maison
pour la rendre agréable et propre,
sortir des linges, des draps, prévoir
quelque chose à manger dans le
frigo... Au final, c’est beaucoup de
préparation et plus compliqué que
normal.»
Qu’est-ce que cela vous apporte?
«Des vacances différentes dans des
lieux où nous n’irions pas. En Suède
nous étions dans un endroit comme
Matran, près de Göteborg. C’était
génial: on a visité toute la Suède
et nous avons vécu comme eux! Et
puis ils nous donnent des conseils.
Un autre aspect intéressant, ce sont
les rencontres avec des locaux aussi.
Quand nous étions en Espagne,
nous habitions à côté de la sœur
de nos hôtes. Un jour elle nous
annonce que son mari a pêché un
requin et qu’ils viendront ensemble
le même soir pour nous le préparer
en friture. Nous nous sommes bien
dit que nous mangerions tard, mais
à 22 h, ne voyant personne venir,
nous avons fait à souper. Quand à
23 h 30, ils ont finalement débarqué,
nous avons remis le couvert en nous
gardant bien de leur dire que nous
avions déjà mangé. C’était reparti
pour l’apéro!»
«Chez nous, ce sont nos voisins qui
ont accueilli notre invité espagnolcomme si c’était notre propre ami:
ils sont allés ensemble au 1er août
par exemple. En repartant, il les a
tous invités à aller lui rendre visite
chez lui en Espagne! Finalement, ils
connaissent tous un type qui a dormi
chez moi et que je ne connais pas!»
Des mauvaises expériences? «Non.
On a remarqué une fois qu’une lampe
a été cassée. Ils l’ont remplacée par une
lampe similaire. Cela peut arriver et ce
n’est pas grave. On a toujours laissé un
cadeau en partant, les autres aussi.
Comment se sent-on quand on
rentre chez soi? «La première
fois mon épouse a eu peur: elle se
demandait dans quel état serait la
maison. Au final, il lui a semblé que
c’était plus propre qu’en partant.»
Conseils? «Il faut avoir une bonne
préparation et avoir confiance en
l’autre car il vous le rendra en retour.
Je me dis toujours: je ne connais pas
cette personne, mais si elle fait des
échanges, c’est qu’elle est ouverte.
99% des gens sont de bonnes personnes.
«Au final, c’est beaucoup de
préparation et plus compliqué
que par une agence», James Bangerter, 5 échanges, Matran.
Vue sur la tour Eiffel, mais canapé un peu dur
Isabelle Roulin d’Estavayer-le-Gibloux échange sa maison depuis 2004. Elle et sa famille sont toujours allés en
France, à Rouen, en Normandie ou en Alsace , ou encore
dans un 5,5 pièces parisien, «avec vue sur la tour Eiffel,
mais le canapé était un peu dur! »
Quels sont les avantages de ces échanges? «Il y en
a plusieurs qui se valent: financièrement, c’est gratuit;
ensuite quelqu’un nourrit nos deux chats pendant les
vacances. En échange, on s’occupe aussi de leurs animaux,
notamment en Normandie où nous avons nourri une oie et
des poules. Au niveau sécurité: il n’y a pas pendant 15 jours
les stores en bas. On se retrouve aussi toujours dans des
endroits où nous ne tomberions jamais si on s’organisait
avec une agence. Et puis on fait des rencontres. Une fois, les
gens nous ont dit: «Il y a des courgettes au jardin. Si vous en
avez trop, il faut appeler nos amis à ce numéro pour les leur
donner. Nous les avons contactés et finalement ils nous ont
invités pour un apéro et un souper.»
Sans ce système, partiriez-vous en vacances ? On ne
pourrait faire qu’une semaine au lieu de deux. En plus,
nous pouvons aller tous les jours au restaurant!»
Trouvez-vous facilement? «Non, car la Suisse est peu
prisée en raison de la cherté du franc. L’année passée,
nous avons fait près de 300 demandes, et une année nous
n’avons rien trouvé parce que l’on s’y est pris trop tard. Si
l’on veut partir en juillet, il est judicieux de partir en janvier.»
L’organisation vous demande-t-elle beaucoup
d’investissement? «Je profite de faire les grands nettoyages avant de partir et j’astreins mes enfants à m’aider.
Ils me font remarquer que là où nous allons, les gens ne
font pas toujours la réciproque...»
Quels sont les risques? «Il y a toujours un risque, mais
nos expériences ont toujours été très bonnes. Les choses
précieuses, on les met chez les grands-parents. Nous ne
fermons aucune pièce: ils ont nos factures à disposition
des fois qu’ils voudraient les payer!»
Comment se sent-on lors du retour? «Nous n’avons pas
d’appréhension au retour car on part du principe que
tout est en ordre. Une seule fois, la maison avait subi un
nettoyage furtif. Mais généralement c’est très bien. Après
il faut accepter que l’huile soit à la place du vinaigre. On
nous dit: comment fais-tu, quelqu’un va dormir dans ton
lit. Et alors! Nous dormons dans les leurs et si nous allons à
l’hôtel, les lits ne sont pas neufs à chaque fois!»
Et lorsque l’on arrive chez les autres? On se sent très vite
chez soi: après un jour et demi, on a déjà pris ses repères.
Conseils? C’est important de mettre des listes de restaurants, des idées de visites. Je téléphone aux offices de
tourisme de la région pour avoir des prospectus. Généralement il y a aussi cela là où on arrive.
Nous ne
fermons
aucune pièce:
ils ont nos
factures à disposition des
fois qu’ils voudraient les
Isabelle Roulin, 8 échanges,
payer!»
Alain Wicht
possibles, organisation du voyage
ou même réservation d’un restaurant.
Estavayer-le-Gibloux

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