La double vie de Didier Wampas

Edition de Paris
0,90 €
JEUDI 9 MARS 2006
La double vie de
Didier Wampas
PARIS. Rock-star à mi-temps, le chanteur Didier Wampas travaille le reste de ses journées à la RATP,
où il est électricien,
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IA VILLE, il s'appelle Didier
Chappedelaine, 44 ans, employé à la RATP. Ala scène, il
s'est baptisé Didier Wampas et se révèle capable de tout « Je me sens à
l'aise dans les deux, explique l'intéressé. J'ai un boulot je suis marié, j'ai
deux enfants de 9 et 12 ans, je les emmène à l'école. Mais quand ils viennent me voir en concert, ils réalisent
que ce n'est pas normal d'avoir un
papa qui aies cheveux bleus et saute
partout » Voilà à quoi ressemble en
effet le chanteur des Wampas (NDLR:
nom tiré de la BD « Rahan »), groupe
qui sort cette semaine son 9e album
en plus de vingt ans, « Rock'n'roll
part 9 ».
Un disque avec de vraies mélodies,
un chanteur qui chante vraiment et
même quelques tubes branchés sur
100 000 volts, tel le décapant
« Chirac en prison », qui a déjà beaucoup fait parier (voir interview cicontre). « Je me dis que ce n'est pas
moi qui chante, tellement la voix est
en place, reconnaît humblement l'artiste. Je trouve même le disque un
peu trop propre. S'il n'y avait que moi,
le son serait beaucoup plus acrado" et
je n'écrirais pas de textes, je chanterais en yaourt »
A
« Le rock, ce n'est pas
un métier »
Ce serait dommage, car on serait
alors privés de ces histoires hilarantes
que l'auteur sait jeter sur le papier en
quelques minutes, comme le refrain
de « Manu Chao », un des tubes de
l'année 2003 : « Si j'avais le portefeuille de Manu Chao, /partirais en
vacances au moins jusqu'au Congo. »
Un hymne qui a permis à Didier
Wampas de « gagner un peu d'argent », et même de signer ses premiers autographes. « Cest un peu
con de le faire mais c'est encore plus
con de lerefuser», explique-t-il, prenant à contre-pied tous les préjugés.
On l'imagine indécrottable punk, inconditionnel des Ramones qu'il a découverts à 15 ans, en 1977. En fait il
vénère autant Charles Trenet et...
MikeBrant
« J'ai commencé, gamin, par la variété : Claude François, 11 Etait Une
Fois... Je préfère toujours Mike Brant
à Brassens. Quand j'entends "Qui
saura", j'ai les poils qui se dressent »
Lorsque certains de ses confrères
snobent la télé, lui est prêt à l'infiltrer.
« Je nerefuseraijamais déjouer dans
une grande émission à 20 h 50,
même "Star Academy". Cela
m'énerve toujours quand j'entends
des gens parier des beaufs qui regardent ce genre de truc. Moi, j'ai grandi
devant les émissions de Guy Lux qui
m'ont donné l'amour de la musique. »
Avec Didier Wampas, onresteles
pieds sur terre. « J'ai grandi à Villeneuve-la-Garenne, dans une famille
communiste. Mon père était ouvrier.
Mes parents m'ont appris un certain
nombre de valeurs mais pas celle de
laréussiteà tout prix. Cest sans doute
pour cela que je fais toujours des
disques en m'en foutant un peu. »
L'avantage aussi de ne pas être un
musicien professionnel. Quand il ne
fait pas le malin sur scène, Didier est
électricien à la RATP. « Sur la dernière
tournée, on a fait 150 concerts. J'avais
posé tous mes congés, plus deux fois
deux mois sans solde. Là, j'ai posé six
mois sans solde. Je le regrette
presque, car j'aime bien retourner
bosser. Cela permet de redevenir
comme tout le monde. » La musique
à plein temps, pas question. « Le rock,
ce n'est pas un métier. Quand des
groupes punkme disent que leur rêve
c'est d'être intermittents du spectacle,
ça me désespère. »
E.M.
Les Wampas en concert le 11 mai
au Zénith de Paris et en tournée à
partir du 24 mars.
«Avec "Chirac
en prison",
on a réussi
notre coup »
DÉFAUT de l'entendre, on
A
a beaucoup parlé de
« Chirac en prison ». Le nouveau
single des Wampas n'ayant pas
fait rire tout le monde, le groupe
est interdit de télé et privé de radio. Retour sur la polémique.
Sortir « Chirac en prison »
en single, c'est du
marketing ?
• Didier Wampas. Au départ,
non. J'ai vraiment écrit ce morceau pourvoir si on pouvait dire
« Chirac en prison » dans une
chanson. J'ai eu l'idée en sortant
d'un spectacle avec mes enfants
où il était question de la liberté
d'expression. La maison de
disques aimait la chanson, mais
ne voulait pas la sortir en single.
J'ai insisté. Si le morceau existait, autant ne pas le cacher.
Vous vous doutiez
des conséquences...
Je savais que ça allait faire parler, parce qu'on est un peu
connus. On est face à plus sournois qu'une censure d'Etat : l'autocensure de la télé. Il y a
quelques jours, on a enregistré
l'émission « Top of the Pops » :
on nous a obligés à jouer autre
chose que « Chirac en prison ».
Louise Attaque nous a invités à
son « Concert sauvage », sur
France 4, et la chaîne ne voulait
pas. Le groupe a insisté : « Cest
avec les Wampas ou rien du
tout »
Y a-t-il eu des réactions
politiques ?
LE DISQUE
« Rock'n'roll part 9 » : ultra-efficace * * *
I
2-ooe
L A BEAU prétendre
jouer de la guitare
avec deux doigts, Didier
Wampas sait écrire des
chansons. Comme cet
« Hélicoptère » en forme
d'amourette lumineuse.
Cerockera aussi du cœur. Il rend
un hommage appuyé au cycliste.
Marco Pantani, en se lamentant
sur safinpathétique à « Rimini »,à
côté de laquelle «La Grande
Motte ressemble à Venise». Il
n'hésite pas non plus à déclarer sa
flamme à « Christine » sur des guitares survoltées : « Tu n'es qu'une
punk à chien. Mais Christine, je n'y
peux rien, je faime bien. » Un tube
toutes les trois minutes, ou
presque. Avec, au passage,
le grinçant « Saint Rémi »,
sur le RM, avec son refrain à reprendre en
chœur : « Cest Noël tous
les mois, c'est mieux
qu'd'sortir avec Kate Moss. C'est
vraiment la belle vie d'être un cas
soce». Un vrai disque de rock,
simple et ultra-efficace.
E.M.
Les Wampas « Rock'n'roll part 9»,
disques Atmosphériques, 16,50 €.
NOTRE COTE : • * • • chef-d'œuvre,
* * * excellent, * * bon, * moyen,
• sans intérêt
Les impôts se sont rendu
compte que je leur devais de
l'argent et m'ont envoyé un
courrier récemment... La mairie de Vannes, ville d'un ministre
(NDLR : François Goulard, ministre délégué à l'Enseignement
supérieur), a essayé de faire interdire un festival où l'on doit
jouer. Elle n'a pas pu, car le
contrat était déjà signé, mais elle
a fait xetirer les affiches.
Vous êtes satisfait de
l'impact de la chanson ?
Je suis content de mes conneries, de tout ce qui se passe autour du morceau. On a réussi
notre coup.
PROPOS RECUEILLIS
PAR EMMANUEL MAROLLE