Aider l`autre, c`est bien ! Non ?

Aider l’autre, c’est bien!
Non?
MarinaBlanchart
Morgane me consulte. Sa maman a
prisrendez-vouscarMorganeaparlé
desuicide.
Ellea16ansetportehautsesvaleurs
de gentillesse, de solidarité, de
respect de l’autre! Elle les défend et
estprêteàalleraucombatpourelles.
Ellesouffredevoirlesautresnepaslarespecterjustement.Ellealesentimentqu’elle
doit aider l’autre quand il souffre, soutenir son papa dans ses chagrins d’amour, son
meilleur ami qui devient gay, sa copine face à l’injustice d’un professeur. Elle veut les
aider,ellepensequ’elleledoit,quec’estleminimumqu’ellepuissefaire:sortirl’autre
humaindelasouffranceoudel’inconfortetMorganesedonnetouteetpuis,voilàque
quandellesetrouvedansunehistoired’amourcompliquée,personnenelacomprend,
personne n’est là… «Je dois parler suicide pour qu’on se soucie de moi. Ce n’est pas
normal!C’estquoicettevie?»
Je regarde avec elle toutes les situations où elle a voulu aider l’autre, où elle s’est
mobilisée,oùelleaétélà,jouretnuit,pourconsoler,proposerdessolutions,soutenir…
Onconstateensemblequeparfoisçamarcheetellesesentbienaprèsetparfois,toute
cetteénergiedépenséen’estpasreconnueetonl’accusemêmedesemêlerdesaffaires
desautres.Parexemple,quandelleadéfenduSophiesurungroupeFacebookalorsque
les autres le cassaient. Une des leaders de sa classe lui a ordonné de la mettre en
veilleuse…maisàlalimite,ça,elles’enfichemaismêmeSophieluiadit:«jem’enfous,
çanemetouchepas!Laissetomber!»
Pasfacile,laviedesuperhéroïne!!!
Ensemble,nousréfléchissonsàcequiafaitladifférenceafindevoirsiellenepourrait
pasfaireunesélectionettrouverdescritèresquiluipermettraitdesavoirsiçavautle
coup de s’impliquer ou si, au contraire, mieux vaut se préserver des déceptions, de la
non reconnaissance ou de l’inefficacité. Ensemble, nous constatons que la différence
résidedanslademande:quiveutl’interventiondeMorgane?L’autreouelle-même?
Danscertainscas,l’autreexprimeunedemande,unbesoind’aideetquandellel’aide,il
la remercie, suit ses conseils et s’en sort plutôt bien. Morgane a un sens aigu de la
stratégie,decommentgérerdesparentsoumêmedesprofesseurs…
Dans d’autres cas, on ne lui a rien demandé et là, elle se prend des retours agressifs,
indifférentsetcertainementaucunereconnaissance.
Pouraffinersacapacitéàfaireladifférence,jeluidemandedevérifierqu’ilyaunevraie
demanded’aide,desoutienoudeconseilexpriméeexplicitement,denepastomberdans
le piège de la plainte ou de la jérémiade. Je lui demande de réserver ses talents pour
ceuxquileméritentetquisontprêtsàbouger.
©VIRAGESwww.virages-formations.com
Ellerevientdeuxsemainesplustard,fièred’elle,carelleapuaideràdeuxreprisesdes
personnes en difficulté et qui l’en ont remerciée. Elle a bien repéré les plaintes et les
problèmesdesautresparl’écoute,sansseprécipiteretygaspillersajolieénergie!
Morgane est comme tous les intervenants, psychologues, coachs, assistants sociaux,
psychothérapeutes,praticiensdelarelationd’aidequi,ayantunoutil,dutalentetunesi
belle envie d’aider ont tendance à se précipiter vers ceux qui semblent souffrir et qui,
d’ailleurs,pourbeaucoupsouffrentvraimentmaisnesontpasprêtàbouger.
Attachons nous quel que soit notre statut dans les relations humaines, amis, parents,
professionnelsàrespecteravanttoutlademandedel’autreetàveilleràrépondreàses
appelsplutôtqu’àlesdevancer.Vérifionsl’enviesuffisantechezluidechangeravantde
vouloirlefairebouger,ymettredel’énergieetdes’ybriserlenez…
Ilestparfoistellementtentantd’aidersonenfantdanssestravauxscolaires,tellement
aisé de conseiller son conjoint ou un collaborateur sur la meilleure manière de
s’organiseroudesemêlerdelavieamoureused’uneamie.
Del’extérieur,laviedesautresestsouventsifacileàgérer…Maisenintervenantsans
leur demande et malgré notre bienveillance, nous leur envoyons un message sur leur
incapacitéàs’ensortireux-mêmesetnousleur«volonsleurresponsabilité»commele
ditGérardJugnotdanslefilm«Oui,mais…»
Etpourtant,sicertainsseplaignentdeleursort,iln’estpassiévidentqu’ilssouhaitent
vraimentensortir,siquandvousproposerunconseil,
vousavezuneréponsequidébutejustementen«oui,
mais…», méfiance! Il y a peut-être des avantages à
resterdanslestatutde«plaignant»,plutôtquedese
mobilisercequin’estpassanscoût…
Peut-être la souffrance est-elle là, mais peut-être pas
encoresuffisamment?
Le seuil de l’intolérable n’est pas encore atteint ou
peut-être, simplement, la personne devant vous
souhaite s’en sortir seule, ce qui sera d’autant mieux
pourellecommelachenille,danssachrysalide,devenuepapillon.Savezvousquesivous
l’aidergentimentàsortirvousl’empêcherezdevoleràjamais?Celapourraitpourtant
êtretentantaumomentoùellesembleendifficulté…
Lejouroùlejeunepapilloncoincévousappelleausecours,allez-y!Aidez-le!
Permettreàl’autred’utilisersespropresressourcesetattendrequ’ilnousexprimeson
besoin et ce qu’il attend de nous pour mobiliser notre potentiel, c’est peut-être le
respectervraiment,plutôtquedel’aidermalgrélui…
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