Le Corbeau et le Lapin Maître Corbeau, affalé sur sa branche Ne
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Le Corbeau et le Lapin Maître Corbeau, affalé sur sa branche Ne
Le Corbeau et le Lapin Maître Corbeau, affalé sur sa branche Ne fichait rien du lundi au dimanche. Vient un lapin qui lui dit tout de go : "J’envie votre vie Monsieur du Corbeau. Comme vous, j’aimerais bien ne rien faire Garder mes pattes pliées sous mon derrière Comme vous, goûter aux joies du repos" "Essayez-donc", répondit le corbeau. Notre lapin s’assied alors par terre Moustaches au vent il baisse les paupières Bâille et s’endort en rêvant d’un bistrot Où les carottes seraient des cadeaux. Passe un renard affamé qui se jette Sur le lapin et de la pauvre bête Il fait bombance, laissant sur le carreau Les quatre pattes, les oreilles et la peau. Maître Corbeau émergeant de sa sieste Secoue ses plumes, et découvrant les restes Du pauvre lapin, il ferme illico Ses mirettes et se rendort aussitôt Moralité : Monsieur de La Fontaine Apprenez à nos lapins de garenne Que pour passer sa vie sans rien branler Il est préférable d’être haut perché. François Corbier Lettre à mon psy Cher Docteur, Dans cette lettre, vous trouverez pourquoi je viens vers vous et j’insisterai sur le dérisoire que peut être ma vie dans cette époque de crise. En effet, la nuit je ne dors pas. Je souffle ou peut-être je souffre. Les bruits sonores et parfois même soupçonnant qu’ils soient malodorants, font de mes longues et insignifiantes nuits, des glorieuses arrivées dans un couloir interminable, sombre et anéanti !! Mes journées n’en sont pas meilleures. Cependant j’arrive quand même à exercer les actions principales d’une vie de rien : Boire : ouvrir le placard, prendre le verre sans oublier de faire le mouvement de son bras vers le haut, tourner le robinet d’eau froide, avancer son verre rempli d’eau jusqu’à la partie de mon anatomie qui sert à engloutir la moindre ration d’aliment. Manger : c’est le même procédé que j’effectue mais le placard devient frigo et mes gestes se font plutôt en avant qu’en hauteur. Le plus délicat est d’effectuer la mastication. Action pour laquelle il me faut une grande capacité mentale de réflexion quant à ouvrir toujours la même partie d’anatomie d’engloutissement, et de concentration sur le serrage de mes molaires sur l’aliment déposé. Cela me vaut près de la moitié de ma journée afin de coordonner tous ces mouvements. Je vous passerai les détails de l’expulsion de ces masses macérant dans mon corps jusque dans mes toilettes. Le plus difficile de tout ça, étant ma difficulté à prononcer le moindre mot, la plus petite syllabe. Désespérance quand je vois les visages de mes interlocuteurs figés devant moi. Des airs ébahis, ironiques. Ma coordination à articuler les muscles de mon visage, l’inspiration afin de sortir un son, sont pour moi d’une incompréhension totale. Aucune réflexion ne traverse mon cerveau quand bien même j’en aurai un, qui me permettrait de réaliser cet exploit de pouvoir prononcer des mots. Oh bien sûr par pure coïncidence, un son arrive à s’échapper de moi mais pas toujours par mon incroyable orifice buccal mais je pense bien anal. Et moi, être du néant incapable de leur montrer le souffle de mon désespoir… Je crois Docteur que j’ai fini de résumer ma vie. De quoi je souffre ? Le malade imaginaire