Logistique Management

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Logistique Management
&
Logistique
Management
Perspectives logistiques
vol 18 n°1 - 2010
L’impact des technologies de l’information sur les structures de gestion des
achats : des leçons pour la gestion de la chaîne logistique
Jean NOLLET, HEC Montréal
Martin BEAULIEU, HEC Montréal
Logistique de distribution : quand la variété de l’offre et la variété des tâches
expliquent l’organisation - une proposition de grille de lecture
Marie-Laure BARON, ISEL-CERENE, programme PETREL, Université du Havre
Frank GUERIN, ISEL-CERENE, programme PETREL, Université du Havre
Logistique, Supply Chain Management et stratégie orientée développement
durable : une revue de la littérature
Christine BELIN-MUNIER, Université de Bourgogne, Laboratoire ThéMA
Comment rendre l'e-logistique plus verte ?
Bruno DURAND, Université de Nantes, LEMNA
Evaluation de la flexibilité des postes de travail dans une usine terminale
automobile
Aymeric LESERT, Gülgün ALPAN , Yannick FREIN, Laboratoire G-SCOP Grenoble INP-UJF-CNRS
Stéphane NOIRE, PSA Peugeot Citroën, Poissy
Logistique totalement intégrée lors de la conception d’équipements
pour les pays en développement
Yaovi Ouézou AZOUMA, Université de Lomé, École Supérieure d’Agronomie
Diane RIOPEL, École Polytechnique de Montréal, Département de mathématiques et de génie industriel et
CIRRELTH
Simulation et gestion des chaînes logistiques globales dans l’incertain :
application à une filière agro-alimentaire face à la crise sanitaire
Thi Le Hoa VO, IGR-IAE de Rennes
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L’impact des technologies de l’information
sur les structures de gestion des achats :
des leçons pour la gestion de la chaîne
logistique
Jean NOLLET
Professeur titulaire, titulaire de la Chaire de gestion des approvisionnements, HEC Montréal
[email protected]
Martin BEAULIEU
Professionnel de recherche, HEC Montréal
[email protected]
Le déploiement d’une chaîne logistique performante exige une adéquation
appropriée avec les structures organisationnelles. Le domaine des achats a
justement produit des études sur le sujet qui peuvent inspirer les réflexions des
gestionnaires de la chaîne logistique. Souvent, les études dans ce dernier domaine
tendent à classifier les structures comme étant centralisées ou décentralisées.
Cependant, la réalité est plus complexe. D’abord, entre ces deux options extrêmes,
il existe une variété de structures hybrides. Ensuite, d’autres dimensions doivent
être intégrées à la configuration d’une structure, notamment la formalisation et la
spécialisation. Par ailleurs, les technologies de l’information (TI) peuvent
contribuer au déploiement de structures plus complexes. Leur apport a été étudié
dans une multitude de contextes, mais très peu dans le domaine de la gestion des
achats.
Une étude de cas retraçant une expérience de mise en œuvre d’une structure de
gestion des achats dans une société internationale de services financiers permet de
dégager des observations intéressantes à ce sujet. Les résultats de cette étude
indiquent que dans ce cas : 1) la structure est nettement le fruit d’une stratégie
délibérée permettant de rehausser la contribution de la fonction achats ; 2) les TI
facilitent un découpage entre les décisions d’exécution et les décisions de contrôle,
ce qui peut favoriser simultanément la centralisation et la décentralisation de la
structure ; 3) avec l’apport des TI, la centralisation d’une activité ne signifie pas
nécessairement sa déconnection de la base opérationnelle ; 4) les TI renforcent le
formalisme de l’organisation. Nos travaux indiquent aux gestionnaires des achats et
de la logistique qu’au-delà des schémas traditionnellement analysés, ils peuvent
maintenant envisager de nouvelles structures qui leur permettront de tenir compte
des objectifs à atteindre, tout en visant une plus grande efficacité.
Introduction
La structure organisationnelle est une dimension majeure dans l’articulation d’une entre-
prise. D’ailleurs, cette dimension est d’un intérêt tel dans le milieu académique que depuis
une trentaine d’années des revues de littérature
sont réalisées périodiquement (voir entre
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autres les travaux de Dalton et al., 1980 ; Fassoula, 2006 ; James et Jones, 1976 ; Kimberly,
1976). Aussi, chacune des grandes fonctions
d’une entreprise a fait l’objet d’études spécifiques sur ce sujet, à titre d’exemple, celles de :
Tannenbaum et Dupuree-Bruno (1994) en gestion des ressources humaines ; Nonaka et Nicosia (1979) en marketing ; Johne et Snelson
(1988) pour le développement de produits ;
Chen (2007) pour les technologies de l’information; Nahm et al. (2003) en gestion de la
production. Naturellement, de telles études ont
également été menées en gestion de la chaîne
logistique (supply chain management) ; justement, Dornier et Fender (2001), Kim (2007) et
Samii (2001) indiquaient que la structure organisationnelle y joue un rôle majeur dans la performance logistique.
Cependant, dans le domaine de la logistique,
ce sont habituellement les mêmes cinq modèles de structure qui sont étudiés (Kim, 2007;
Tixier et al., 1998) : la structure décentralisée
sans orientation en logistique (non supply
chain management-oriented organization), la
structure fonctionnelle, la structure matricielle, la structure conseil et la structure
intégrée. Ces structures sont relativement
génériques, mais nous sommes d’avis que la
réalité en offre une plus grande variété. Justement, les technologies de l’information (TI)
peuvent libérer les gestionnaires des schémas
organisationnels classiques, ouvrant ainsi la
porte à d’autres configurations.
La gestion des achats nous apparaît comme un
domaine d’étude approprié pour saisir l’apport des technologies de l’information sur la
variété des structures pouvant s’offrir à la gestion de la chaîne logistique. D’abord, la gestion des achats est une composante majeure
du succès de la chaîne logistique, mais surtout
la nature des structures organisationnelles y
est une thématique importante de recherche
depuis plus de 40 ans. De plus, les gestionnaires en chaîne logistique peuvent en tirer des
enseignements intéressants. Par exemple, les
enquêtes tendent à démontrer que la majorité
des organisations adoptent une structure
hybride de gestion des achats, conciliant ainsi
simultanément les avantages d’une structure
centralisée et ceux d’une structure décentralisée. Cependant, une structure hybride n’est
pas clairement définie, puisqu’elle renvoie à
une multitude de possibilités, soit toutes les
combinaisons entre la centralisation et la
décentralisation.
À ce jour, plusieurs enquêtes intégrant les
technologies de l’information (TI) à la gestion
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des achats ou de la logistique ont cherché à
mesurer l’impact de cette variable sur la
nature des relations avec les fournisseurs (par
exemple, voir l’étude de Boulay et de Faultrier, 2005). Cependant, comme le soulignent
Cuganesan et Lee (2006), l’influence des TI
sur la gestion des achats ne se limite pas aux
échanges inter-organisationnels, mais comprend aussi ceux ayant un caractère
intra-organisationnel. En fait, à l’exception de
l’étude de Johnson et Leenders (2004) qui
évoquait les technologies de l’information,
nous n’avons pas retrouvé d’analyse ciblant
spécifiquement l’apport des TI sur les structures de gestion des achats. Bien que notre
recherche porte principalement sur la fonction de gestion des achats, nous sommes d’avis que, pour les raisons mentionnées un peu
plus haut, les observations que nous mettrons
en valeur pourront être également utiles dans
la définition d’une structure organisationnelle
de gestion de la chaîne logistique.
Notre étude démarre par une recension des
écrits qui offre un portrait des courants de
recherche dans le domaine des structures de
gestion des achats et de la logistique, ainsi que
des impacts des TI sur les structures organisationnelles en général. Par la suite, en recourant à une étude de cas portant sur la révision
des structures de gestion des achats d’une
grande société internationale du secteur des
services financiers, cet article permet d’analyser le sens de la relation entre les TI et la structure organisationnelle. En adoptant les
paramètres d’analyse de Stanley (1993), soit
la centralisation, la formalisation et la spécialisation, l’article étudie l’impact des TI sur ces
paramètres. Ces derniers permettent d’enrichir l’analyse ultérieure du cas qui verra aussi
à formuler des observations plus spécifiques à
la gestion de la chaîne logistique.
Recension des écrits
Pour beaucoup d’organisations, la gestion des
achats est la fonction autour de laquelle s’articule la gestion de la chaîne logistique (Andersen et Rask, 2003 ; Chandra et Kumar, 2000 ;
Durand et de Faultrier, 2007 ; Fung, 1999).
Pour lui permettre de bien jouer ce rôle, la
fonction achats doit dépasser sa focalisation
historique sur la réduction des prix pour
rechercher des sources d’approvisionnement
répondant mieux aux besoins de l’organisation (Fung, 1999). Dans ce contexte, l’adoption d’une perspective plus stratégique est
essentielle, tel que souligné tant récemment
(Durand et de Faultrier, 2007), que depuis
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plusieurs années (Spekman et al., 1994). Ce
passage vers une orientation plus stratégique,
qui prendrait en compte des enjeux de la
chaîne logistique, exige une adaptation des
structures du service des achats (Leenders et
al., 1994).
L’atteinte d’un niveau stratégique d’un service des achats s’inscrit d’ailleurs dans une
démarche évolutive. Par exemple, Keough
(1993) identifie cinq niveaux de maturité d’un
service des achats. Le niveau inférieur se
caractérise par une intervention très opérationnelle des acheteurs où la structure est
décentralisée (ce que Keough nomme serve
the factory). Le second niveau voit la constitution d’un service des achats (lowest unit cost)
qui effectue des analyses de coûts. Le troisième niveau est celui des achats coordonnés
où la centralisation des achats est plus
poussée. Le quatrième niveau se caractérise
par
une
structure
transfonctionnelle
(cross-functional purchasing) où il y a des travaux faits en équipes pour solutionner des
problèmes liés aux achats. Enfin, le dernier
niveau est celui d’une structure de classe
mondiale (world-class supply management).
Un tel modèle aide les organisations à se positionner, mais également à déterminer la direction à prendre pour apporter les changements
stratégiques requis (Dubois et Wynstra,
2005). Cette évolution de la stratégie impliquera inévitablement une transformation de la
structure organisationnelle.
Le concept de structure organisationnelle est
un thème de recherche majeur dans le
domaine de la gestion des achats. Dès 1968,
Fearon étudiait les structures de cette fonction
en retraçant des citations remontant au début
du 20e siècle. Depuis, il y a eu une première
vague de travaux qui ont décrit des structures
de gestion des achats par l’ampleur des responsabilités de cette fonction, le niveau hiérarchique ou le service auquel est rattaché la
fonction achats (Cavinato, 1992 ; Farmer,
1981 ; Zemansky, 1970; Zenz, 1981).
Naturellement, des enquêtes empiriques ont
émergé à la suite de ces premiers travaux.
Depuis la fin des années 1980, aux États-Unis,
le Center for Advanced Purchasing Studies
(CAPS) mène périodiquement des sondages
sur la nature des structures de gestion des
achats (Fearon, 1988 ; Johnson et al., 1998,
2006). Cependant, une attention particulière
est accordée à la dimension de centralisation/décentralisation. Cette dimension réfère
à la concentration ou à la dispersion du processus décisionnel (Dewett et Jones, 2001;
Kim, 2007). Pour Kim (2007), la centralisation impliquerait que les décisions seraient
prises par un cadre supérieur qui se trouve
près de la haute direction (Kim, 2007). Kirkwood et al. (2005) identifient trois niveaux de
décision : 1) la définition des politiques, des
orientations et des objectifs stratégiques, 2) la
configuration des processus et le choix des
moyens et 3) l’exécution au quotidien. Les
deux premiers niveaux ont un caractère stratégique par l’impact à long terme qu’ils auront
sur l’organisation, alors que le dernier niveau
renvoie à des décisions opérationnelles.
Le fait que la fonction de gestion des achats
soit à l’interface entre les besoins des requérants internes et l’offre des marchés fournisseurs externes (Fung, 1999) explique que les
chercheurs étudient fréquemment la dimension de centralisation. En effet, c’est dans ce
contexte que le concept de centralisation/décentralisation prend toute son importance : la centralisation afin d’établir un
rapport de force favorable avec les fournisseurs potentiels (Carter et Carter, 2007;
Dubois et Wynstra, 2005) et la décentralisation afin de bien saisir les besoins des requérants (Fearon, 1988). Carter et Carter (2007)
ajoutent qu’une fois les bénéfices de la centralisation obtenus, l’organisation peut souhaiter
une décentralisation pour que les achats soient
effectués au niveau des unités administratives
afin de gagner en réactivité. Justement, Krishnamurthy et Yauch (2007) indiquent que la
décentralisation serait une option à privilégier
pour une organisation qui souhaite mettre en
œuvre un système lean, la décentralisation
offrant plus de souplesse. Dubois et Wynstra
(2005) vont dans le même sens lorsqu’ils
affirment que la décentralisation est une
réponse au contexte d’affaires turbulent et
incertain. Cependant, en retenant cette formule, il y a alors un danger de perdre les bénéfices de la standardisation (Carter et Carter,
2007). La perception qu’ont les dirigeants de
l’organisation quant aux avantages et inconvénients de l’une et l’autre des deux grandes
options peut expliquer le mouvement de
balancier entre une structure centralisée et
décentralisée (Tchokogué et Nollet, 1998).
En matière de gestion des achats, tant les premières enquêtes de Fearon (1988) que les plus
récentes de Johnson et al. (2006) démontrent
qu’une majorité d’organisations tendent à
retenir une structure hybride. Naturellement,
les organisations ne sont pas statiques. Des
chercheurs ont souhaité comprendre les facteurs expliquant le passage d’une forme centralisée/décentralisée à une autre forme (voir
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par exemple Johnson et Leenders, 2004 ;
Tchokogué et Nollet, 1998). Cependant, dans
ces analyses, l’apport des technologies de
l’information (TI) est à peine évoqué. Baglieri
et al. (2007), Banerjee et Sriram (1995), ainsi
que Boulay et de Faultrier (2005) traitent de
l’impact des TI, mais principalement en fonction des rapports qui s’établissent avec les
acteurs externes de la chaîne logistique. Ces
études s’intéressent surtout aux changements
pouvant survenir dans la relation entre un
acheteur et ses fournisseurs à la suite de l’implantation des TI, mais sans observer les
transformations à l’interne. Garrido Samaniego et al. (2006) identifient pour leur part
les facteurs expliquant le déploiement de certaines technologies facilitant les processus
d’achat et, encore une fois, l’impact des structures internes n’est pas pris en compte. Ces
observations nous ramènent aux propos de
Cuganesan et Lee (2006) qui constataient le
peu d’analyses traitant des impacts des TI sur
les réseaux internes de l’organisation des
achats.
Ce constat pour le domaine des achats peut
sembler étonnant, puisque l’impact des TI sur
les structures organisationnelles a fait l’objet
de multiples travaux (Heintze et Bretschneider, 2000). D’ailleurs, Lau et al. (2001) indiquent que les structures organisationnelles se
développent pour générer et traiter de l’information. Par leur capacité de traitement, les TI
améliorent la coordination et la communication à l’intérieur de la firme (Hitt et Brynjolfsson, 1997), ouvrant la porte à de nouvelles
structures organisationnelles qui auraient été
inimaginables auparavant sans ces technologies. Il y a déjà plusieurs années, Foster et
Flynn (1984) évoquaient la même idée. Naturellement, la dimension de centralisation a fait
l’objet d’analyses nombreuses. Cependant,
ces études ne dégagent pas de véritable
consensus à savoir si les TI favorisent la
concentration ou la dispersion du processus
décisionnel (Dewett et Jones, 2001 ; Wang,
2001). Les propos de Nault (1998) offrent
cette explication : la centralisation et la décentralisation poursuivraient des objectifs distincts, la centralisation favorisant le respect et
la continuité des règles organisationnelles,
alors que la décentralisation encouragerait les
innovations, ou comme nous le disions plus
tôt une plus grande souplesse de réaction face
aux mutations de l’environnement d’affaires.
Toutefois, Bloomfield et Coombs (1992) ainsi
que Wang (2001) nuancent le fait que la centralisation viserait à contrer la possibilité de
dispersion du processus de décision. Ces
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chercheurs soulignent que les décisions (stratégiques et opérationnelles) exercées par des
gestionnaires et le contrôle de ces mêmes
décisions constituent deux considérations distinctes. Justement, Lau et al. (2001) estiment
que les TI peuvent favoriser une décentralisation des décisions, mais parallèlement mener
à une centralisation du contrôle.
Par ailleurs, Dalton et al. (1980) ajoutent deux
autres dimensions à la configuration d’une
structure organisationnelle : la spécialisation
et la formalisation. La spécialisation réfère au
nombre de différentes spécialités ou des types
d’emplois dans une organisation. La formalisation est le développement de routines afin
de répondre à des problèmes récurrents; elle
permet de formuler explicitement les rôles et
leurs relations. Elle normalise également les
tâches, les politiques et les procédures et cela,
indépendamment des individus.
Ces deux dernières dimensions peuvent, elles
aussi, être remodelées par les TI. Justement,
Dewett et Jones (2001) constatent que la spécialisation peut mener à une multiplication
des sous-unités administratives qui répondront à des problèmes très pointus, mais avec
le danger de perdre de vue la performance globale du système. Les TI peuvent atténuer cet
effet d’isolement administratif, en rendant
plus aisément accessibles aux différents spécialistes des informations qui leur permettent
de situer leurs actions dans le contexte général
de leur organisation. Les spécialistes peuvent
ainsi avoir une rétroaction plus rapide sur les
impacts de leurs décisions sur les autres composantes de l’organisation. Dewett et Jones
(2001) avaient aussi précisé que les TI favorisaient la formalisation en enregistrant des
données sur les événements se déroulant dans
les organisations, facilitant ainsi le contrôle
des comportements. À l’inverse, Lau et al.
(2001) croient que les TI réduisent la formalisation en laissant plus de liberté aux individus,
ce qui aide à briser les anciennes règles organisationnelles et à créer de nouveaux environnements de travail.
De la recension des écrits, nous dégageons
quelques constats utiles pour cette recherche.
Les études dans le domaine des structures
organisationnelles encadrant la gestion des
achats sont abondantes. Ces études accordent
une grande attention à la dimension de centralisation/décentralisation. Entre ces deux
options, la réalité s’avère souvent différente,
puisque de nombreuses organisations adoptent des structures hybrides. L’apport des
technologies de l’information pourrait expli-
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quer l’engouement pour des structures plus
complexes et plus novatrices, mais cette
avenue n’a pas fait l’objet de recherche spécifique dans le domaine de la gestion des achats.
Enfin, l’étude des structures devrait s’attarder
à d’autres dimensions (spécialisation et formalisation) (Stanley, 1993 ; Kim, 2007) afin
de mieux tenir compte de la complexité du terrain.
Dans ce contexte, cet article poursuit deux
objectifs qui prennent la forme de deux questions pour cette recherche exploratoire :
1. Quel est le sens de la relation entre la
configuration de la structure organisationnelle et les choix de technologies de
l’information ? Autrement dit, les technologies utilisées par une organisation ouvrent-elles de nouvelles possibilités quant
aux structures organisationnelles ou, à
l’inverse, les choix de structure se reflètent-ils dans les choix de TI ?
2. Comment les technologies de l’information modifient-elles les trois paramètres
(centralisation, formalisation et spécialisation) des structures en gestion des
achats ?
Méthodologie
Compte tenu de l’état des connaissances sur
ce sujet et des deux questions de recherche,
une étude de cas exploratoire est une méthodologie appropriée (McCutcheon et Meredith, 1993 ; Voss et al., 2002). Aussi, un seul
cas est alors suffisant, compte tenu du caractère de la recherche (Yin, 1994). À cet effet,
nous adoptons la même stratégie de collecte
de données que celle retenue par Krishnamurthy et Yauch (2007) qui analysent, entre
autres, la structure organisationnelle d’une
entreprise qui déploie une chaîne logistique
agile. Précisons que la sélection du site analysé relève d’une approche opportuniste,
puisqu’en étudiant une entreprise, nous avons
constaté la présence du phénomène, soit l’interaction étroite et en plusieurs vagues d’une
structure complexe de gestion des achats et de
TI, le tout révélant un potentiel de recherche
intéressant. L’étude de cas offre justement
cette flexibilité permettant de capturer des
phénomènes contemporains (Seuring, 2008).
Bien que la tendance récente soit au recours à
des études de cas multiples, nous croyons
qu’un cas approfondi présente un intérêt évident dans une situation comme celle-ci. À cet
effet, nous reprenons les propos de Dubois et
Araujo (2007, p. 173) : “We regard strong
exemplars as both necessary for the
development of a discipline as well as providing templates against which different theoretical and methodological positions may
sharpen their differences.”
La firme étudiée est une grande entreprise
internationale du secteur financier, œuvrant
dans plus d’une quinzaine de pays. Les informations présentées ici proviennent d’entrevues réalisées auprès de cadres de la gestion
des achats d’une filiale nord-américaine de
cette entreprise. Ces entrevues, totalisant plusieurs heures, ont permis d’avoir une vue
d’ensemble de la démarche de réorganisation
des activités d’achat de cette filiale. Les entrevues ont été codées et analysées selon le système de matrice suggéré par Huberman et
Miles (1991). Cette stratégie a été appliquée
avec succès dans les études de Nollet et Beaulieu (2003, 2005). Par ailleurs, les renseignements amassés lors des entretiens ont été
complétés par la consultation d’artefacts :
articles de presse, livres, documents internes,
etc. D’ailleurs, la diversité des sources et des
personnes interviewées enrichit la compréhension du phénomène et évite de réinterpréter des événements à partir d’un seul point de
vue (Voss et al., 2002).
Précisons que nous avons préservé l’anonymat de l’entreprise afin de ne pas divulguer
des informations qu’elle pourrait juger sensibles. Par conséquent, nous n’avons pas présenté les dates exactes de tous les événements
afin de limiter la capacité du lecteur à retracer
l’entreprise étudiée. Par ailleurs, les délais
entre les événements sont relativement exacts.
Nous soutenons que ce choix n’entrave ni les
objectifs poursuivis par l’étude, ni la qualité
des analyses qui en découlent.
Étude de cas de la société XYZ
La présentation de cette étude de cas s’articule
autour de trois volets. D’abord, nous présentons la gestion des achats à la fin des années
1990 dans la firme XYZ. Ensuite, nous décrivons ce que nous appelons « l’encadrement
global » de la gestion des achats, soit les interactions entre le groupe d’achat situé au siège
social et les services des achats dans les différentes filiales. Par la suite, nous dépeignons
l’encadrement local, soit les relations entre le
service des achats dans une filiale et les relations avec les services requérants.
La situation initiale
Vers l’année 2000, la haute direction de l’entreprise XYZ avait réalisé que les possibilités
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de croissance demeuraient limitées, malgré
l’expansion économique de la décennie précédente. Donc, si elle souhaitait maintenir des
rendements intéressants pour ses actionnaires, elle devait chercher à contrôler davantage
les coûts, dont naturellement les achats.
Malgré que l’entreprise soit une firme internationale avec un chiffre d’affaires de plusieurs
milliards de dollars, la gestion des achats était
beaucoup moins développée qu’on ne serait
porté à le croire sur la base de la taille. Les différentes divisions poursuivaient leurs propres
pratiques de gestion. À l’intérieur d’une
même filiale, il pouvait y avoir une diversité
de pratiques entre les différents services. Ceci
faisait en sorte qu’une même filiale pouvait
communiquer par différents moyens avec un
même fournisseur dépendamment du service
qui lançait une commande. Un fournisseur
pouvait recevoir des requêtes par télécopieur,
par courriel ou même par la poste. Souvent
aussi, ces requêtes comportaient des clauses
différentes. Dans ce contexte, il n’y avait pas
vraiment de politique de gestion des achats, le
tout étant très souvent laissé à la discrétion des
services. Les rares acheteurs que l’on retrouvait dans l’entreprise intervenaient à des
degrés divers dans le processus d’achat selon
la nature des contrats et des requérants. Dans
certains cas, le fournisseur aidait le requérant,
qui n’avait souvent pas d’expertise en matière
de gestion des achats, à préciser ses spécifications. Enfin, il n’y avait aucune consolidation
des besoins similaires entre les différentes
filiales de XYZ.
Selon les critères de la grille de Keough
(1993), la structure de gestion des achats de
XYZ était donc très embryonnaire, vu l’absence de politique d’achats et de procédures
Figure 1 : Chronologie de la mise en œuvre de la structure des achats
dans la société XYZ
normalisées, de même que la décentralisation
très prononcée qui menait à des interventions
variables des acheteurs alors en poste. Outre
les coûts de ces façons de faire (absence de
consolidation pouvant générer des économies
et mauvaise utilisation des ressources qui, de
plus, n’étaient pas des professionnels en
achats), des cadres constatèrent que l’entreprise était peu protégée en cas de litige avec
ses fournisseurs.
L’encadrement global
Suite au diagnostic sur le contrôle des coûts, la
haute direction de l’entreprise déploya différentes mesures tant au niveau du siège social
qu’à celui des filiales. La figure 1 présente les
principaux changements chronologiquement.
Comme première mesure, la haute direction
constitua un Groupe Achat dirigé par un
vice-président. Ce service fut doté d’une
équipe et il était localisé au siège social international de la société. Ce Groupe s’appuyait
aussi sur un réseau d’achat local centralisé
dans les filiales qui serait déployé dans les
mois suivant la création du Groupe Achat.
Une des premières mesures prises par le
Groupe Achat avait été de produire un document décrivant les tâches de chaque poste
associé à la gestion des achats, mais aussi les
procédures et les mesures de contrôle existantes. Ceci visait à permettre une uniformisation
des façons de faire pour chacune des filiales
de la société. Pour soutenir cet effort de normalisation, un Bureau d’orientation stratégique (BOS) avait été mis sur pied. Ce dernier
réunissait les responsables des services des
achats de chacune des filiales et voyait au
développement d’une base de données centralisée sur les contrats signés localement et au
suivi des économies réalisées. Il a également
vu à la sélection des logiciels de gestion des
achats qui seraient déployés dans les filiales :
le système Ariba Buyer pour le lancement des
commandes des requérants vers les fournisseurs pour les articles courants et le système
PeopleSoft Purchasing pour le paiement électronique aux fournisseurs.
Les discussions au niveau du BOS visaient
aussi à identifier des mandats qui pourraient
être négociés globalement par les gestionnaires du Groupe Achat du siège social. Cependant, la base de données centralisée pourrait
permettre de déterminer la filiale la plus performante dans la négociation de dossier. À
terme, cette filiale pourrait obtenir le mandat
de conclure un contrat pour toutes les unités à
travers le monde. Cette comparaison entre les
filiales serait d’autant facilitée que les proces-
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sus seraient normalisés. Ainsi, une filiale se
démarquerait parce qu’elle aurait su développer une connaissance étroite du marché fournisseur et une approche lui permettant de
générer des gains supérieurs. Pour ces raisons, le service des achats de cette filiale
deviendrait alors en quelque sorte une référence mondiale pour les autres sites de l’entreprise.
L’objectif à long terme n’était pas de répartir
tous les dossiers d’achat entre les services des
achats, car des achats locaux allaient demeurer, ne serait-ce que parce que les offres régionales étaient plus compétitives ou parce qu’il
n’existait aucun fournisseur en mesure de
répondre à tous les marchés simultanément.
Cependant, la base de données centralisée
permettrait de contrôler les résultats des négociations faites dans les filiales. Par exemple, si
l’une d’elles décidait de se soustraire à un
contrat global, elle aurait alors à démontrer le
bien-fondé de cette décision par un meilleur
résultat lors des négociations.
L’encadrement local
Pour illustrer ce second niveau d’encadrement, nous utilisons la situation d’une filiale
nord-américaine. Les achats ont été attribués
spécifiquement à une Direction. Les acheteurs, jusqu’alors dispersés dans différents
services, furent rapatriés sous cette Direction.
Au fil des ans, des acheteurs qualifiés furent
embauchés. Ces individus présentaient des
profils variés d’expérience professionnelle et
de formation académique, ce qui permettait à
la Direction de disposer de compétences
diversifiées pouvant être allouées selon la
complexité des dossiers à gérer.
Par la suite, il avait été prévu que la définition
des processus par le Groupe d’Achat amènerait le service des achats de chacune des filiales à veiller à la négociation et à la résolution
des litiges avec les fournisseurs, alors que les
services requérants se chargeraient des tâches
plus opérationnelles, soit le lancement des
commandes par l’entremise du progiciel
Ariba Buyer. Les services requérants verraient
au suivi du service avec des fournisseurs. Une
fois la négociation conclue, le contrat serait
signé par deux responsables locaux : un du
service des achats et un du service demandeur.
Cette procédure permettrait ainsi d’éviter un
isolement entre les acheteurs et les requérants.
Pour cette filiale nord-américaine, la mise en
œuvre de ce découpage n’avait pas été spontanée, ayant consisté en une démarche sur plusieurs mois quant à la réappropriation à
l’intérieur du service des achats des contrats
signés avec des fournisseurs par les différentes unités administratives.
La présence du système Ariba Buyer à l’intérieur de la filiale visait à uniformiser les
approches de transmission des commandes
aux fournisseurs. Pour la filiale nord-américaine étudiée, le transfert vers ce système
d’information ne s’effectua pas sans heurts. Il
fut nécessaire de créer des catalogues électroniques des différents articles afin que les
requérants puissent les repérer facilement
dans le système. Les articles furent regroupés
en une trentaine de familles constituant autant
de catalogues. L’objectif était d’implanter au
minimum deux douzaines de catalogues sur
une période de deux ans. Outre la constitution
des catalogues, la détermination des seuils
monétaires à partir desquels une commande
pourrait être lancée sans exiger l’autorisation
d’un supérieur hiérarchique fut nécessaire.
Cet exercice exigea des discussions sur plusieurs mois avec les différents services requérants.
Le système PeopleSoft Purchasing était vu
comme un outil de contrôle supplémentaire
afin de s’assurer que les achats traités manuellement seraient réalisés auprès de fournisseurs mis sous contrat. Pour assurer ce rôle de
contrôle, à terme, une entente administrative
serait conclue entre le service des achats et le
service des comptes à payer afin d’empêcher
le paiement de toute facture qui ne serait pas
adressée à un fournisseur sous contrat avec
cette filiale. Cette mesure découragerait les
requérants d’opter pour d’autres fournisseurs
que ceux sous contrats cadres.
Analyse du cas
Dès le départ, le cas est une illustration du
concept de maturité d’une fonction de gestion
des achats. Selon la grille de Keough (1993),
la société XYZ est passée d’une structure de
premier niveau où la gestion des achats était
très décentralisée, à une gestion des achats de
troisième niveau, car il y a maintenant une
structure centralisée. Il y a également des
comités d’achats (dans ce cas-ci le BOS), la
construction d’une base de données de gestion
des achats et le développement de politiques
corporatives.
Nous ne pouvons naturellement pas attribuer
ce déplacement uniquement à l’apport des TI,
car la volonté de la haute direction de se doter
d’un service des achats appliquant des pratiques de gestion largement reconnues avait été
un facteur déterminant. Par ailleurs, cette
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volonté a créé une impulsion, mais il était
nécessaire d’obtenir une adhésion de l’organisation au changement, par exemple, par le
biais du système à double signature. L’existence de plusieurs facteurs d’impulsion va
dans le sens des travaux de Tchokogué et Nollet (1998), ainsi que ceux de Johnson et Leenders (2004) qui avaient déjà identifié plusieurs
des facteurs expliquant l’évolution d’un service des achats.
Notre analyse vise à cerner comment les TI
ont soutenu ces efforts de reconfiguration de
la gestion des achats, mais aussi comment les
TI peuvent aider à dégager de nouvelles configurations organisationnelles sortant de l’ornière centralisation ou décentralisation. À
partir de la grille de Keough (1993), on réalise
que la progression d’un service en termes de
maturité peut prendre plusieurs années, ce qui
est normal, puisque cette évolution s’accompagne de plusieurs changements (définition
de politiques et procédures, embauche de personnel, etc.). Dans ce cas-ci, les dirigeants de
la société XYZ ont initié des changements à la
structure organisationnelle entre autres par le
développement d’un service des achats
davantage centralisé. C’est à l’intérieur de ces
nouvelles structures que les gestionnaires responsables des achats ont décidé, conjointement à l’intérieur du BOS, des technologies
qui soutiendraient leurs actions. Bien que tous
les chercheurs ne s’accordent pas sur ce point
(Boschken, 1990 ; Krishnamurthy et Yauch,
2007), en soi, ce résultat rejoint la vision classique de Chandler (1962) voulant que la structure découle de la stratégie. Dans ce
contexte-ci, les technologies d’information
deviennent donc un outil pour concrétiser la
stratégie (enabler) et, dans le cas de la société
XYZ, une façon de gérer plus efficacement les
achats.
Dans le cas de l’encadrement local, il est toutefois intéressant de noter le délai de deux ans
entre le moment où la structure de gestion des
achats fut mise sur pied et le moment où les
technologies d’information furent déployées.
Bien que notre étude ne s’attarde pas à l’analyse de la durée des différentes étapes, ce délai
fut jugé long par quelques-uns des gestionnaires en place. En fait, ces derniers avaient
sous-estimé l’impact des facteurs autres que
la technologie qui peuvent avoir une incidence sur la structuration d’un service des
achats.
Par ailleurs, notre deuxième question de
recherche vise à mesurer l’impact des TI sur
les grands paramètres d’une structure organisationnelle. Pour répondre à cette question de
recherche, nous avons déjà précisé que notre
analyse adoptait les trois dimensions d’une
structure organisationnelle, qui sont par ailleurs souvent reconnues comme les plus
importantes (Dalton et al., 1980) : centralisation, formalisation et spécialisation. Stanley
(1993) avait retenu ces mêmes dimensions
pour étudier la performance des structures de
gestion des achats. Plus récemment, Kim
(2007) avait traité lui aussi sensiblement des
mêmes variables pour analyser les configurations organisationnelles de la gestion de la
chaîne logistique. Le tableau 1 présente les
grandes conclusions de nos observations,
détaillées dans les prochaines sections.
La centralisation
Le cas fait nettement ressortir le caractère
multiforme de cette première dimension,
alors que l’on retrouve différents niveaux de
centralisation. Il tend à supporter les propos
de Foster et Flynn (1984) qui concluaient que
grâce aux TI, les gestionnaires n’avaient plus
à limiter leur choix de structure organisationnelle entre les deux options traditionnelles de
centralisation et décentralisation, de nouvel-
Tableau 1 : Impacts des TI sur trois des dimensions des structures organisationnelles
Centralisation
- Les TI permettent de scinder les décisions d’exécution et celles de contrôle.
- Les décisions d’exécution peuvent êtres mieux réparties entre les différents paliers
(opérationnels, direction locale, direction générale) et éclatées dans différentes zones
géographiques.
- Cette répartition est possible et préserve la cohérence d’action de l’organisation, car
les TI peuvent centraliser le contrôle.
Formalisation
- Les TI renforcent le formalisme, car un contrôle plus étroit assure le respect des
règles organisationnelles.
- Ce formalisme est rendu possible par la centralisation des décisions d’acquisition
des TI, ce qui assure une normalisation des systèmes d’information et permet d’éviter
la multiplication des pratiques.
Spécialisation
- Les TI renforcent quelque peu la spécialisation, car les décideurs peuvent se
concentrer sur les décisions d’exécution ou de contrôle, puisque les TI permettent de
scinder les deux volets.
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les possibilités s’ouvrant à eux. La recherche
de nouvelles options semble nécessaire
puisque dans l’environnement d’affaires turbulent des dernières années, une organisation
a intérêt à tirer profit des bénéfices de la centralisation (le contrôle des coûts) et de la
décentralisation (vitesse de réaction) (Dubois
et Wynstra, 2005).
En reprenant les propos de Kirkwood et al.
(2005), le cas dégage deux niveaux de centralisation, un premier qui est global pour l’ensemble de l’entreprise et un second, local
(figure 2). La centralisation globale s’articule
autour du Groupe Achat du siège social ou
encore, par l’entremise du BOS, qui définit les
tâches, les processus et les solutions technologiques qui seront adoptés par les unités locales. En soi, ces choix concordent avec les deux
premiers niveaux de décisions identifiés par
Kirkwood et al. (2005), la définition des politiques, des orientations et des objectifs stratégiques, ainsi que la configuration des
processus et le choix des moyens. Comme
nous le verrons, la centralisation de ces décisions renforce les deux autres dimensions
organisationnelles (formalisation et spécialisation), ce qui rejoint les observations de
Stanley (1993).
Le second niveau de centralisation est local, la
négociation des contrats étant faite par un
service unique. Parallèlement, il y a une
décentralisation des activités de lancement
des commandes et de suivi auprès des services
requérants. L’opérationnalisation quotidienne est scindée entre une unité administrative
centralisée et des services décentralisés. Toutefois, même cette dernière affirmation doit
être nuancée. En effet, le Groupe Achat ou le
BOS peuvent négocier des contrats pour l’ensemble des filiales de l’entreprise. Donc, une
part des opérations quotidiennes peut être réalisée au niveau d’une unité centrale globale.
Cette répartition des responsabilités de gestion des achats entre différents niveaux administratifs est rendue possible grâce aux TI, car
cette répartition ne doit pas conduire à des
actions désordonnées où chaque palier prendrait des décisions isolées sans se soucier des
impacts aux autres niveaux de l’organisation.
Les systèmes comme Ariba Buyer, Peoplesoft
Purchasing ou la base de données centralisée
des contrats du BOS sont des outils technologiques permettant de contrôler les décisions
prises par différents acteurs. De tels bénéfices
avaient été mis en évidence par Boulianne
(2005) lorsqu’il traitait des cartes d’approvisionnement (p-cards) comme outils de con-
Figure 2 : Les niveaux de centralisation des achats chez XYZ
trôle. En soi, ce cas illustre les propos de Lau
et al. (2001) qui précisaient que les TI permettaient une décentralisation de la prise de décisions et une centralisation du contrôle.
Précisons toutefois que dans le cas de la
société XYZ, les décisions décentralisées ont
un caractère très opérationnel.
Par ailleurs, l’expérience de la société XYZ
permet d’apporter une autre nuance à la
notion de centralisation. Cette dernière est
souvent associée à l’idée qu’un service des
achats soit localisé au siège social (Kim,
2007) et, par conséquent, éloigné physiquement des services requérants. Vu que la
décentralisation évoque le contraire, les acheteurs sont dans ce second cas mieux à même
de saisir différentes nuances associées à l’utilisation d’un article (saisonnalité, problèmes
de qualité, enjeu de formation, etc.), considérations qui pourront être intégrées lors des discussions avec les fournisseurs. Mais la
proximité peut aussi l’être avec les sources
d’approvisionnement, ce qui permet alors aux
acheteurs de mieux saisir l’évolution du marché fournisseur et ainsi d’adapter les stratégies d’achat en conséquence. À cet effet, le
cas XYZ met en évidence une centralisation
de certains mandats de négociation, parallèlement à une déconcentration où certains de ces
mandats globaux sont gérés par des services
locaux des achats. Huguet (2003) décrit ce
concept de déconcentration, soit une localisation physique des acheteurs près des requérants au lieu de les localiser dans un seul site.
Il y a donc une différence entre l’unité qui
prend une décision et sa localisation géographique. Ainsi, certains dossiers peuvent être
centralisés entre les mains d’un acheteur sans
qu’il ne soit localisé au siège social. Les TI
permettent donc de profiter simultanément
des bénéfices de la centralisation et de la
décentralisation.
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La formalisation
Comme nous l’avons évoqué précédemment,
la formalisation est une seconde dimension
fortement mise en évidence à l’intérieur du
cas; après tout, il y a eu une normalisation des
descriptions de tâches, des indicateurs de performance et des logiciels de gestion.
Dewett et Jones (2001) avaient précisé que les
TI favorisaient la formalisation en enregistrant des données sur les événements se
déroulant dans les organisations, ce qui facilitait le contrôle des comportements, rendant
ainsi plus aisé le respect des règles organisationnelles et l’identification des comportements déviants. À la société XYZ, le
déploiement des logiciels de gestion des
achats va dans le sens des observations recensées dans les écrits : il renforce la formalisation des processus d’achat au niveau local en
diminuant les occasions pour les requérants
de retenir un fournisseur qui n’est pas lié par
un contrat cadre. De plus, les logiciels imposent des procédures de travail, balisant donc
ainsi les pratiques et accentuant la formalisation.
La formalisation du choix de logiciels peut
également être associée à un effort d’intégration. Giachetti (2004) avait relevé que l’intégration des systèmes était l’un des défis les
plus significatifs des entreprises, puisque le
fractionnement de l’organisation en de multiples sous-unités possédant leur propre système d’information pouvait complexifier les
efforts de coordination. En centralisant le
choix des logiciels de gestion des achats et des
indicateurs de performance, la haute direction
de XYZ facilite les comparaisons entre les différentes filiales, ce qui permet d’identifier les
acteurs les plus performants dans certains
domaines, facilitant du même coup la spécialisation des dossiers.
La spécialisation
Bien que la réorganisation des activités d’achat de la société XYZ se déroule à des vitesses variables selon les filiales et que le rôle du
BOS se raffinera au cours des prochaines
années, il demeure que l’approche utilisée
vise une division du travail, afin que l’exécution des principales tâches de gestion des
achats soit confiée à des experts dans le
domaine, retirant donc des mains des requérants la réalisation de la grande majorité des
activités liées aux achats.
À l’intérieur des services des achats des différentes filiales, il existe aussi une certaine
forme de spécialisation, car les acheteurs sont
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en charge de dossiers spécifiques. On constate
également une spécialisation globale, car certaines filiales se verraient attribuer la gestion
de mandats pour l’ensemble du groupe et cela,
sur la base de leur performance antérieure.
Donc, les mécanismes de contrôle des TI peuvent prévenir des problèmes ou des comportements déviants. La nature préventive de ces
contrôles évite les investissements dans des
mesures correctives (Boulianne, 2005). Dans
ce contexte, les acheteurs peuvent concentrer
leurs efforts sur la gestion des achats et éviter
d’être des auditeurs internes des comportements d’achat des requérants.
Synthèse des observations et impacts
sur la chaîne logistique
Les conclusions que nous venons de formuler
sont-elles similaires pour la gestion de la
chaîne logistique ? Pour répondre à cette
question, il nous semble pertinent de relater
l’expérience de la société IBM au niveau des
structures des achats et de la logistique. En
2002, Sam Palmisano prend la direction
d’IBM et il souhaite que l’entreprise soit
davantage orientée sur la demande. Une des
solutions à cette stratégie a été de constituer
une vice-présidence exécutive en supply
chain qui regroupait entre autres les activités
de logistique, de production, de gestion des
commandes (order fulfillment) et de gestion
des achats (Radjou, 2005). Ce mouvement de
centralisation était le point culminant d’initiatives prises dans d’autres fonctions. Ainsi, au
milieu des années 1990, un effort important
de réorganisation de la fonction « achats »
avait mené à une centralisation de cette dernière et à un déploiement de différentes solutions technologiques. Quelques années plus
tard, la fonction logistique connut le même
processus de centralisation (Anonyme, 2006).
Par le fait même, nous voyons bien que
lorsque les fonctions « achats » et « logistique » sont distinctes, elles ne sont pas nécessairement centralisées ou décentralisées au
même moment. Ceci rend d’autant plus pertinents nos propos relatifs quant à la maturité
d’un service et au fait que le domaine de la
logistique puisse s’appuyer sur des leçons
vécues en achats.
À l’intérieur d’un service intégré de gestion
de la chaîne logistique, il y aura des fonctions
spécialisées (achat, production, distribution)
qui vont émerger. Le fait que les principales
fonctions de la chaîne logistique soient
regroupées sous une seule entité administrative n’offre aucune garantie d’une plus grande
efficacité, chacune des fonctions pouvant agir
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dans son meilleur intérêt au détriment d’une
finalité d’ensemble (Dewitt et Jones, 2001).
Cependant, nous sommes d’avis que la
dimension de spécialisation prend une plus
grande importance dans le cas des structures
de la chaîne logistique. Hitt et Brynjolfsson
(1997) avaient déjà précisé que les TI améliorent la coordination et la communication à
l’intérieur de la firme. Les gestionnaires
d’IBM ne se sont pas contentés de ce rôle traditionnel des TI. Ils ont reconnu les dangers
de la spécialisation. Ils croient que IBM a pu
éviter un tel piège en développant une série
d’indicateurs de performance qui étaient
communs à chacune des fonctions (Anonyme, 2006). Ces indicateurs communs
étaient liés aux paramètres stratégiques de
l’entreprise, entre autres à la satisfaction des
clients et aux économies (Radjou, 2005).
Conclusion
Selon Wang (2001), les technologies de l’information jouent un rôle considérable en
appuyant une structure organisationnelle pour
qu’elle puisse traiter efficacement une masse
de données. Le cas étudié supporte justement
ce point de vue en mettant en plus l’accent sur
le fait que les TI soutiennent la mise en œuvre
de la stratégie d’achat. En soi, cette constatation offre une réponse à notre première question de recherche. Il demeure qu’au cours des
dernières décennies, ce rôle des TI s’est
accentué entre autres grâce à l’accélération
des innovations technologiques, mais également à une utilisation plus éclairée du potentiel des TI. Notre étude portait aussi sur les
impacts des décisions associés au déploiement des systèmes d’information sur les trois
dimensions de la configuration organisationnelle des achats. En retenant une organisation
qui réorganise ses activités d’achat, nous
avons été à même d’étudier les impacts des
décisions reliées aux systèmes d’information
sur trois des dimensions les plus importantes
de la configuration organisationnelle des
achats (Stanley, 1993).
Notre propos, à l’exemple de ceux de Bloomfield et Coombs (1992), de Lau et al. (2001)
ainsi que de Wang (2001), met en évidence
que la centralisation/décentralisation implique deux grands processus : l’exécution, soit
la prise de décisions stratégiques ou opérationnelles et le contrôle, afin de prévenir ou
corriger des actions déficientes. Tyndall et al.
(1998) suggéraient de scinder les achats entre
les activités opérationnelles et celles stratégiques. Ce que notre étude tend à démontrer est
que cette réflexion devrait se faire entre les
activités d’exécution et celles de contrôle. Les
TI favorisent se type de découpage. Dans ce
contexte, la formalisation devient importante
puisqu’elle conduira à une question majeure :
quelles sont les règles organisationnelles qui
devront être respectées (et contrôlées)? Notre
cas réaffirme l’importance de ces aspects tout
en démontrant que la structure de gestion des
achats ne se limite pas à la seule dimension de
centralisation/décentralisation. À cet effet,
notre description de l’expérience d’IBM
illustre que le contrôle est une dimension d’un
intérêt majeur dans la mise en œuvre d’un service intégré de gestion la chaîne logistique qui
se composera inévitablement de plusieurs
unités administratives spécialisées.
Nos observations peuvent être reliées à celles
de Kim (2007), qui souligne qu’une formalisation et une centralisation d’un service de
gestion de la chaîne logistique peut freiner les
efforts d’intégration de la chaîne logistique
avec les fournisseurs et les clients externes.
L’auteur convient qu’une formalisation et une
centralisation plus poussées sont nécessaires
pour parvenir à une intégration interne, mais
qu’accentuer ces caractéristiques peut devenir
contreproductif avec les partenaires d’affaires
externes. Nous croyons que l’expérience de
XYZ illustre qu’il est possible d’éviter les
excès identifiés par Kim (2007). Une forme
d’autonomie pourrait être accordée aux
acteurs à l’interface avec les partenaires externes, une autonomie leur permettant de réagir
rapidement aux demandes ou aux changements de l’environnement. Les technologies
de l’information pourraient assurer un contrôle centralisé, assurant ainsi une cohérence
globale aux actions de l’entreprise.
Naturellement, l’étude est basée sur un seul
cas. Par exemple, malgré l’analyse faite pour
cette situation, cette situation s’ajoute aux
autres déjà connues et supportant la thèse que
la structure est la résultante d’une stratégie.
Aussi, des enquêtes futures pourraient reproduire la présente analyse afin de valider les
conclusions auxquelles nous en sommes arrivés. De nouvelles études pourraient également analyser plus spécifiquement les
structures de la chaîne logistique.
En terminant, nous ne voulons pas donner
l’impression de surestimer le rôle des TI dans
le déploiement d’une structure de gestion des
achats. Comme le soulignent Buttermann et
al. (2008), il demeure que les TI constituent
l’une des variables permettant au gestionnaire
de maintenir l’équilibre entre les différentes
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forces d’impulsion de l’organisation. Cependant, tant le fait d’accorder une importance
excessive que trop restreinte à l’une de ces
variables peut avoir des conséquences graves
sur la capacité d’une organisation à réaliser
une performance supérieure. Par ailleurs, ce
cas a mis en lumière la recherche d’une contribution appropriée des TI au succès du service
des achats d’une grande organisation. Une
réflexion similaire doit être réalisée quant aux
structures de gestion de la chaîne logistique de
l’entreprise, car les différentes tensions
s’exerçant (contrôle vs autonomie, besoins
locaux vs économie d’échelle) sont présentes
dans toute la chaîne et les TI pourraient permettre de réaliser un juste équilibre.
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Logistique & Management
Logistique de distribution : quand la variété
de l’offre et la variété des tâches expliquent
l’organisation, une proposition de grille
de lecture
Marie-Laure BARON
ISEL-CERENE, programme PETREL, Université du Havre
[email protected]
Frank GUÉRIN
ISEL-CERENE, programme PETREL
Cet article explore, à partir des critères que sont la variété de l’offre et ses modalités
de construction, la différenciation des modèles de logistique de distribution.
Au-delà de la convergence de la logistique de distribution dans les pays
développés, l’objectif est d’identifier des caractéristiques en termes d’organisation
du travail, de niveau d’intégration, de centralisation et de localisation des
investissements pour différencier des modèles d’organisation. Outre la proposition
du modèle d’analyse, une grille d’analyse des distributeurs est proposée. La
proposition est discutée ensuite notamment au regard des apports récents de Volle
et al (2008) et Badot et Paché (2007).
L’évolution convergente de l’organisation des
distributeurs dans les années récentes vers
une rationalisation croissante et la mise en
place d’équipements similaires a pu être
attribuée à un parallélisme de comportement
pour faire face à des problématiques sectorielles (Paché et Colin, 2001, Colin 2005). Cette
convergence, quelle qu’en soit la source, ne
doit pas cependant nous conduire à faire l’économie d’une analyse valorisant la différenciation des modèles logistiques. Une
différenciation qui pourrait s’accroître dans la
construction de stratégies logistiques plus
volontaristes aujourd’hui.
Plusieurs travaux récents le soulignent : la
logistique de distribution ne peut plus être
abordée de manière univoque, sans considération des stratégies poursuivies par les distributeurs, ni de la manière dont s’exerce la
concurrence (Badot et Paché, 2007), de la
configuration du territoire (de Carvalho et
Paché, 2002) ou du mode d’appropriation des
services logistiques (Colin 2005 envisageait
la virtualisation des relations des distributeurs
avec leur environnement, ceux-ci créant des
relations de court terme en fonction de leurs
besoins). Il faut donc considérer que les distributeurs peuvent évoluer de manière différenciée en fonction de leur positionnement ou
de leurs choix en termes de management et
que le modèle du juste à temps par exemple,
n’est pas nécessairement adapté à chacun
d’entre eux. Récemment, ce besoin de caractérisation plus fine de « modèles de distribution » s’est révélé à travers deux articles, celui
de Badot Paché (2007), dans une logique plutôt marketing et celui de Volle et al (2008),
dans une logique stratégique.
Notre intention est ici, en nous référant à ces
apports, de proposer une grille d’analyse dont
la vocation est plutôt d’expliquer les organisations logistiques adoptées par les distributeurs. L’idée qui est défendue est que
l’organisation de la logistique est liée à la fois
à la stratégie d’offre du distributeur et à l’autonomie du point de vente. Cette approche orga-
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Logistique & Management
nisationnelle, qui intègre le point de vente
comme suggéré par Aube et al (2005) et le
niveau entrepôt, rejoint finalement et complète les modèles proposés par Badot et Paché
et Volle et al.
Notre démarche est d’abord de présenter le
modèle et ses variables explicatives, puis la
grille d’analyse que nous proposons à partir
de différentes interviews réalisées sur le terrain, enfin de confronter notre apport aux
apports précédents dans une discussion.
Entre variété des produits
et variations des opérations,
une proposition de grille
de lecture des organisations
logistiques
Le lien entre variété offerte et coût logistique
est établi : il existe un nombre optimal de références réalisant l’équilibre entre la satisfaction clients et les coûts logistiques.
L’augmentation du nombre de produits vendus par le distributeur au-delà de cet optimum
entraîne un accroissement de la satisfaction
client, mais aussi une augmentation des
coûts logistiques : augmentation du nombre
de fournisseurs à gérer, augmentation des
emplacements de surface stockage nécessaires au niveau du centre de distribution et du
magasin, multiplication des coûts de passation de commande, temps consacré par les
managers et les employés à la gestion de cette
variété. La multiplication du nombre de références limite également la possibilité pour le
distributeur d’optimiser les conditions d’achat auprès de ses fournisseurs, dès lors que
pour un même volume vendu, ces ventes sont
réparties sur une plus grande variété de fournisseurs (voir le CA/référence Tableau 1
ci-après). La variété, caractérisée à la fois par
la largeur et la profondeur de l’assortiment
(l’ampleur de l’assortiment), a donc un coût.
Parmi les coûts logistiques qui augmentent
lorsque la variété augmente, il en est un qui est
peu mis avant : le coût lié au travail à réaliser.
Ce coût est une donnée lisible dans les comptes d’une entreprise ou le tableau de bord d’un
chef de rayon. Les charges de personnel représentent le deuxième poste de charges en
valeur dans le compte de résultats des magasins ou des enseignes après les achats. Si ce
coût est fonction du nombre de produits
offerts, il augmente plus rapidement que le
nombre de produits. Varilla et al (2007), par
exemple, présentent le cas d’un grossiste en
produits électroniques, un cas dans lequel la
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variété offerte est particulièrement élevée. Ils
s’intéressent aux opérations de picking et
cherchent à évaluer les inducteurs de l’augmentation du temps opératoire. En distinguant différentes catégories de produits et en
observant les sous-tâches, ils expliquent que
le temps de travail augmente notamment avec
le nombre de produits et les différentes manières employées pour les manipuler,
c’est-à-dire la variation dans les opérations.
Globalement, une partie des tâches augmente
de manière linéaire avec le nombre de produits (changements de prix, temps de mise en
rayon de produits homogènes), une autre
partie des tâches nécessite un temps opératoire qui augmente plus vite que l’augmentation du nombre de références (hétérogénéité
des tâches).
Il faut alors s’interroger sur les vecteurs de
variété opérationnelle dans la chaîne logistique. De notre point de vue, il existe deux
vecteurs de la variété essentiels que nous présentons ci-après.
Critères de différenciation proposés
des modèles d’organisation logistique
Certains formats de point de vente offrent une
variété relativement faible : il s’agit de points
de vente très spécialisés tels que Picard par
exemple, ou encore des hard discounters.
Mais, à l’intérieur d’un même segment spécialisé, des acteurs peuvent offrir des assortiments plus ou moins larges. Kiabi, qui
s’adresse aux hommes, femmes et enfants,
offre ainsi une plus grande variété que Jennyfer ou Orchestra qui ne s’adressent qu’à un
segment. D’autres points de vente offrent
encore une plus grande variété : on pense
immédiatement aux hypermarchés, connus
pour l’ampleur de leur assortiment, mais
parmi ces hypermarchés, certains offrent
davantage de variété que d’autres. L’enseigne
Auchan par exemple, en dehors de son lancement récent de l’hypermarché à prix bas
(Priba), s’est depuis longtemps positionnée
comme offrant une variété particulièrement
large.
La complexité logistique cependant, et donc
les coûts, quelle que soit la variété offerte, est
également liée à l’autonomie qui est laissée en
magasin pour les opérations de constitution
de l’assortiment, de sélection des fournisseurs
et de passation de commande. Les points de
vente qui ont une telle latitude sont généralement ceux désignés par Badot et Paché
comme offrant la meilleure expérience aux
consommateurs, le plus d’enchantement,
ceux qui s’éloignent de la performance pure-
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ment comptable, pour construire une offre
adaptée aux besoins locaux. Cette autonomie
des points de vente entraîne cependant une
multiplication des flux. L’ampleur de l’assortiment est telle d’abord, qu’il est plus difficile
de centraliser et de suivre informatiquement
la totalité de l’assortiment, ce qui entraîne une
multiplication des flux. Plus l’assortiment est
large et profond, plus il y a de variations également dans l’assortiment avec des produits qui
sont arrêtés et d’autres qui sont lancés, ce qui
nécessite un suivi spécifique et crée des perturbations. Un assortiment ample correspondra également à une plus grande variété de
fournisseurs. Les points de vente qui offrent
beaucoup de variété sont souvent ceux chez
qui l’on trouvera en premier les dernières nouveautés et l’activité promotionnelle la plus
intense, avec, là encore, des flux spécifiques
qui imposent une forte réactivité. L’autonomie du point de vente autorise enfin souvent la passation de commandes en direct,
initiées par le chef de rayon qui complète ainsi
l’assortiment de la centrale pour mieux
s’adapter localement.
L’ampleur de l’assortiment, associée à la
variété des flux liée au mode de gouvernance
des points de vente, complexifie singulièrement le travail des chefs de rayon et des
employés du point de vente qui doivent faire
face à une plus grande variété de tâches pour
une même fonction. Cette variété se traduit au
plan opérationnel par une variété de modes de
commande, une variété de dates de réception,
une variété de procédures et une variété de
localisation des stocks.
La variété a donc un impact sur la productivité
du travail : tandis que le chiffre d’affaires au
m² est 3 fois supérieur chez Auchan que chez
ED (avant passage sous enseigne Dia), le CA
par salarié est seulement 1,5 fois supérieur
chez Auchan ; tandis qu’un salarié gère 1500
références et plus en PGC chez Auchan, il en
gère 700 seulement chez ED. Les surfaces
d’entrepôt nécessaires par magasin ou par
référence sont également proportionnellement supérieures chez Auchan. La variété
offerte, associée à son mode de management,
crée donc un déséquilibre dans l’affectation
des ressources qui peut devenir coûteux dans
un contexte de concurrence forte. Au contraire, en dépit d’une organisation bien rodée,
presque routinière, ED semble faire face à un
défaut d’attractivité (voir Tableau 1).
Dans l’ampleur de l’assortiment, il convient
sans doute de distinguer ce qui tient de la profondeur de l’assortiment et ce qui tient de sa
largeur. La profondeur de l’assortiment multiplie les flux et les variations des opérations à
effectuer, ce qui nécessite une adaptation permanente. La largeur de l’assortiment agit plutôt comme une contrainte dès lors qu’elle
limite les possibilités de bénéficier de la polyvalence des équipements ou des salariés.
Ainsi, plus l’assortiment est large, plus les
catégories distribuées sont hétérogènes, plus
la division horizontale du travail est forte tant
au niveau du point de vente que des équipements centralisés. Cette division réduit la
flexibilité logistique dans la mesure où les ressources (hommes, équipements) ne peuvent
pas être affectées indifféremment en fonction
des besoins. Cette contrainte explique le mouvement de différents distributeurs vers des
modes d’organisation permettant de regrouper différentes catégories (commandes
pré-alloties, utilisation de plates-formes),
voire différentes enseignes sur un même équipement. La distinction faite par Wal-Mart ou
Carrefour entre les produits à forte rotation et
les produits à rotation lente va dans ce sens :
1 - Source : données grand
hypermarché Auchan et entrepôt
ED, nombre de lignes actives sur
une semaine donnée.
2 - Source : nbre d’employés
d’un rayon PGC/nbre de
références (Auchan) et nbre de
références/nbre moyen
d’employés par magasin (ED).
3 - Les variations dans le CA par
référence sont affichées ainsi
pour tenir compte de
l’assortiment officiel annoncé
(1800 références minimum par
exemple chez ED) par rapport à
l’assortiment possible (4500
références déclarées en
entrepôt). Même chose chez
Auchan avec 100 000 références
déclarées officiellement et
180 000 lignes de produits
identifiées dans un point de vente
à une date donnée. Pour Tesco,
80 000 est le nombre de réfs en
hyper, le CA/ référence est donc
sous évalué puisque compte tenu
de l’importance des
supermarchés, il doit être
supérieur.
Tableau 1: Eléments caractéristiques d’ED, Auchan France, Tesco tous formats
(données sites web retraitées, 2008 et données d’entretiens –nombre de références-).
Nombre de points de vente
Nombre de salariés
CA TTC
CA TTC/ salarié
CATTC/point de vente
Nombre de références à l’instant « t » (semaine)
Nombre de références par salarié
CATTC/m²
CA par référence
Surface d’entrepôt /magasin
CATTC/m² d’entrepôt
ED
Tesco tous formats
Royaume Uni
Auchan
hypermarchés
900
10600
2831000 K €
177,6K €
3145K €
4500
700
5475 €
235 à 950K €/réf
222m²
14155 €
2115
193 917
57Mds €
270K €
26914K €
80 000
Nd
20 735 €
711 K €/réf
Nd
Nd
122
51000
18000000K
267K €
147541K €
Jusqu’à 180 000 (1)
1500 (2)
15000 €
100 à 200K €/réf (3)
4687,5 m²
30000 €
1£=1,5 € pour les conversions
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celui où le distributeur s’affranchit de la
contrainte de catégorie par la mise en place
d’une organisation générique.
Les technologies actuellement disponibles
doivent permettre de gérer une grande variété
de produits sans nécessairement supporter la
totalité des surcoûts observés initialement. La
passation de commande peut-être automatisée par exemple, ou bien encore un meilleur
suivi des ventes, par le biais d’un outil informatique intégré, permet de réduire le niveau
de stock par produit, de limiter l’extension des
surfaces de stockage lorsque l’on augmente le
nombre de produits vendus. Il est possible
aussi d’affecter des produits différents à différents magasin par un système de codage et
donc de développer du micro-merchandising.
Les bénéfices de ces nouvelles technologies
sont perceptibles pour ce dernier argument
par exemple dans la réduction du nombre
d’entrepôts et de plates-formes observée
depuis plusieurs années, alors même que le
nombre de références était encore en
augmentation.
La mise en place de ces nouvelles technologies s’accompagne cependant d’une centralisation de différentes opérations et d’une
relative perte d’autonomie des points de
vente. Par ailleurs, elle peut s’accompagner
d’une restructuration de l’assortiment autour
d’un nombre plus faible de références pour
faciliter la gestion informatique et peut alors
remettre en question un modèle d’offre très
variée du type de celui d’Auchan.
Nous proposons ainsi d’analyser les modèles
logistiques de la distribution à partir de ces
deux critères clé que sont l’ampleur de l’assortiment et l’autonomie des points de vente.
Proposition de grille de lecture
L’hypothèse est que suivant la configuration
dans laquelle se trouve une enseigne, l’organisation logistique, du point de vente à l’entrepôt ou la plate-forme, variera : conditions de
travail, organisation du travail, niveau d’investissement dans les systèmes d’information, niveau d’intégration global. La vision
que nous adoptons ici est intégrée en ce sens
qu’elle couvre à la fois la logistique magasin
et la logistique d’entrepôt.
Les enseignes sont regroupées dans notre analyse en fonction des deux critères développés
précédemment, l’offre et la standardisation
de l’assortiment. L’offre peut-être variée ou
réduite, tandis que l’assortiment peut-être
normé (par la centrale d’achat) ou construit
(par le magasin) en fonction du degré d’auto-
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nomie du point de vente. A partir de ces deux
critères, notre grille de lecture distingue
quatre modèles d’organisation de la logistique.
Afin de construire cette grille d’analyse des
distributeurs en fonction des modèles identifiés, nous avons procédé à différents entretiens auprès de chefs de rayon en point de
vente, de responsables logistiques et de responsables d’entrepôt (Auchan, ED avant passage DIA, Système U). Ces entretiens nous
ont permis d’inscrire a priori les modèles
Auchan et ED dans les deux cadrans opposés
ci-dessous à partir des informations obtenues
(pour les autres enseignes, le placement est
plus intuitif). Les éléments chez Système U
étaient moins clairs et nous n’en avons pas
tenu compte.
Les entretiens ont été conduits en face à face
après prise de rendez-vous. Chacun a duré
près d’une demi-journée. Il s’agissait effectuer une première évaluation des différenciations dans les systèmes logistiques :
vérification des données des sites internet des
entreprises (assortiment effectif/assortiment
annoncé, nombre de magasins/entrepôt), évaluation du nombre de flux entrepôts et magasins, évaluation de la polyvalence, des tâches
effectuées par les employés et responsables,
mode d’évaluation des responsables (performance commerciale vs productivité), critères
de performance valorisés dans chaque structure, degré d’externalisation, support aux
points de vente, nature, et intégration des systèmes d’information utilisés. Les données
issues de ces entretiens, croisées avec des
informations secondaires (sites internet de
l’ensemble des distributeurs, connaissances
sur l’organisation de différents distributeurs,
données presse sur l’évolution des enseignes)
ont permis d’établir la grille du Tableau 2.
Le modèle de l’offre construite/variée (C/V)
Le modèle C/V est fondamentalement celui
des enseignes multi-spécialistes du type
Auchan (jusqu’à 180 000 références en magasin) ou celui d’une enseigne type Leclerc ou
Système U, c’est-à-dire de la distribution
indépendante. Il correspond au modèle BM-Y
chez Volle et al, ou au modèle contingent et
spectaculaire chez Badot et Paché, mais nous
y intégrons la dimension organisationnelle.
L’élément clef est le client. Le modèle se
caractérise à la fois par une offre très variée
incluant des produits à plus ou moins forte
rotation, par un dynamisme promotionnel
important et par un ancrage local prononcé.
Le succès économique d’un tel modèle repose
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sur la conquête de nouveaux clients toujours
plus satisfaits grâce à la compréhension fine
de leurs besoins.
Dans ce type de modèle, l’organisation du travail est empreinte de la culture commerçante.
Elle est davantage préoccupée par le merchandising et le conseil que par l’optimisation
des processus. « Dans nos points de vente, il y
a quatre fois plus d’employés au m² que chez
les hard-discounters », dit Arnaud Mulliez
dans une interview au Nouvel Economiste le
08/07/2009. « La grande force d’Auchan, est
de pouvoir s’appuyer sur son personnel en
contact avec la clientèle ». Lorsque le point de
vente est de grande taille, la division verticale
et horizontale du travail forte nuit cependant à
la bonne prise en charge du client. En effet, la
satisfaction client et donc le cœur de métier, se
trouvent fragilisés par les failles dans l’organisation du travail et du schéma logistique
lorsque la variété et l’autonomie s’accroissent. Ces failles finissent par avoir des conséquences sur la satisfaction des clients et donc
sur le cœur du modèle économique.
Au niveau des flux logistiques, ils sont variés :
livraisons directes en magasin dans le cadre
de l’adaptation locale, commandes automatisées, commandes du magasin à l’entrepôt,
promotions. Cette variété de flux à gérer est
liée à la variété distribuée et génère une complexité de gestion des approvisionnements.
L’automatisation des processus y est plus
limitée que dans le modèle d’offre
« normée/variée » en raison de la liberté d’action laissée au point de vente qui est contradictoire avec la standardisation des processus.
L’automatisation dans ce modèle ne sera que
partielle. Ainsi, chez Auchan, 12% des flux
PGC sont automatisés.
Le modèle de l’offre normée/variée (N/V)
Le modèle N/V (Tesco, 80 000 références en
hyper) fait référence à un distributeur généraliste ou spécialiste dont l’offre est structurée
par zone de chalandise ou par pays/zone dans
lequel le magasin se situe. C’est le modèle
anglo-saxon, qui s’éloigne à la fois des modèles de Volle et al. et de ceux proposés par
Badot et Paché. L’offre, plus centralisée, est
également réduite aux produits à forte rotation de telle sorte que le CA au mètre-linéaire
est très élevé (voir Tableau 1 données Tesco).
Les MDD y sont fortement représentées. La
surface du magasin est relativement faible et
exclue toute réserve importante si bien que le
succès d’un tel concept repose sur un système
d’approvisionnement et d’organisation du travail en magasin performants ; le modèle est
par ailleurs peu tolérant aux ruptures dans la
mesure où l’assortiment est construit « au plus
juste » : la recherche de l’optimisation de la
rentabilité au mètre carré conduit à la suppression des doublons et limite donc les possibilités de report d’achat pour le consommateur.
Ainsi, en hypermarché, pour des raisons historiques peut-être, le nombre de références
chez Tesco est très inférieur au nombre de
références chez Auchan.
Si l’offre observée reste élevée, le nombre des
flux est faible. Ainsi, l’organisation du travail
peut être davantage structurée autour de
tâches cohérentes. Les approvisionnements
sont aussi plus rationnels puisque les flux sont
moins nombreux et les tâches moins variées.
C’est dans ce modèle que l’opportunité d’automatisation des approvisionnements sera la
plus forte. L’offre, variée et complexe (offre
large et profonde), justifie le recours à l’automatisation pour réaliser des gains de productivité.
L’offre
étant
normée,
cette
automatisation est plus facile à mettre en
place. Enfin, cela s’accompagne nécessairement de la concentration des équipes sur des
tâches de gestion commerciale (mise en
rayon, mise en place) davantage que sur des
actions autonomes de développement commercial. Le travail en magasin est davantage
standardisé. Bien que les magasins Intermarché soient des indépendants, nous les avons
classés dans cette catégorie (figure 1) en raison de la forte rationalisation des approvisionnements menée de longue date dans cette
enseigne qui tend à normer la variété.
Le modèle de l’offre normée /réduite (N/R)
Le modèle N/R est a priori celui des hard-discounters mais il peut s’appliquer aux spécialistes à l’offre homogène (Picard). Il a la
particularité de proposer une offre normée et
réduite dans la mesure où le point de vente ne
choisit pas son assortiment, n’a pas d’autonomie de décision en l’espèce et que le
nombre de produits offerts est limité. Le
modèle économique repose d’une part sur
l’attractivité du prix du panier moyen et
d’autre part, sur le contrôle des coûts du
concept. Ce modèle est moins sensible aux
ruptures en magasin et se caractérise par une
organisation des approvisionnements rationalisée et centralisée (chargement du camion
dans l’ordre de l’implantation standard des
points de vente par exemple, un seul type de
flux- livraison d’un seul entrepôt-, camions
complets) ; un système d’information interne
réduit en raison de la difficulté à justifier des
investissements sophistiqués compte tenu de
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la simplicité de la structure, du faible nombre
de produits et de la faiblesse de l’activité promotionnelle ou du service à la clientèle ; une
organisation du travail qui repose sur la polyvalence du personnel : l’hôtesse de caisse est
aussi chargée de remplir les rayons, de faire
du « facing », de renseigner les clients.
Dans ces points de vente, la faiblesse de la
taille de l’assortiment et sa faible variation
dans le temps (faible renouvellement des
gammes, activité promotionnelle très structurée) et l’espace ne justifient pas le recours à
des moyens sophistiqués de gestion.
Le modèle de l’offre construite/réduite (C/R)
Le modèle de l’offre C/R correspond à celui
du point de vente indépendant et relativement
isolé qui sélectionne lui-même son assortiment en s’approvisionnant auprès de grossistes ou de cash and carry. L’offre est réduite en
raison de la taille du point de vente, et de la
dimension artisanale de l’activité. Si la différenciation se perçoit peu dans l’alimentaire où
la consommation est normée, elle est plus
visible dans les points de vente de vêtements
par exemple. Ici, la logistique est heurtée, segmentée, les flux sont variables et dépendent
des décisions du « patron » du point de vente
qui n’obéit qu’à sa propre logique.
L’ensemble de ces quatre propositions prend
alors la forme d’un graphe à quatre cadrans
ainsi que présenté en figure 1. Intuitivement,
quelques enseignes ont été positionnées dans
les différents cadrans afin d’illustrer un résultat possible de la démarche. Ces différents
positionnements doivent cependant encore
être validés.
Figure 1 : Positionnement de différentes enseignes en fonction
des caractéristiques de construction de l’offre
Au total, les hypothèses concernant l’offre
devraient trouver une traduction dans l’organisation du travail adoptée et les choix d’investissements.
L’intégration des fonctions concerne le degré
d’intégration de l’enseigne. Plus la variété est
grande, plus il est difficile d’intégrer l’ensemble des fonctions logistiques : entreposage, transport, magasin (réserve déportée,
franchise). Au contraire, lorsque l’assortiment se réduit, les groupes de distribution
seront davantage intégrés. Comme dans le
modèle BM-Y de Volle et al (2008), l’externalisation est plus forte lorsque la variété est plus
grande.
L’organisation du travail varie d’un modèle à
l’autre. La polyvalence présente l’intérêt de
mieux adapter les capacités à la demande et de
permettre de faire face aux aléas (absences,
surcharge de travail). Elle est d’autant plus
facile à mettre en place que le point de vente a
un assortiment réduit. Lorsque l’assortiment
est ample (large surtout ici), la division horizontale du travail entraîne l’apparition d’une
structuration telle que la polyvalence est difficile à mettre en place. La variété des flux gérés
par le personnel du point de vente est plus
grande lorsque l’assortiment augmente. Nous
appelons flux ici, ceux qui entraînent une
(des) tâche(s) distincte (s) pour les employés
et le responsable de l’assortiment. Certains
acteurs parviennent à générer de la polyvalence en dépit d’une grande variété (Tesco).
L’automatisation des processus étant plus justifiée dans le cas d’un assortiment
normé/varié, l’on devrait trouver chez les
distributeurs relevant de cette catégorie
davantage d’investissements en technologies
de l’information localisés dans la coordination magasin/entrepôt/centrale. Dans le
modèle construit/varié, les investissements
devraient être davantage localisés dans le
point de vente lui-même, source de l’attractivité commerciale. Enfin, les investissements
dans le système d’information devraient être
faibles à nouveau lorsque l’enseigne a un
assortiment réduit, quel que soit le mode de
construction.
Bayle-Tourtoulou et al. (2006), réalisant une
étude des taux de rupture à partir des données
de sorties de caisse sur plusieurs points de
vente, trouvent que plus le point de vente a un
assortiment large, moins le taux de rupture est
élevé. Ce résultat est cohérent avec l’idée que
les points de vente ayant un assortiment large
sont davantage focalisés sur la satisfaction
client. Ainsi, la recherche de la qualité,
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mesurée par le taux de rupture, devrait
conduire à trouver un taux de rupture plus
faible dans les points de vente offrant moins
de variété.
Apports de la proposition
et discussion
L’une des difficultés récurrentes dans la logistique de distribution réside dans la capacité à
expliquer les choix organisationnels effectués
par les distributeurs à travers des modèles
applicables à un grand nombre de cas. Bien
souvent, l’on recourt à la description pour
palier l’absence de modèle explicatif. Les
apports déjà longuement cités sont intéressants de ce point de vue. Le travail ici s’inscrit
dans la lignée du travail d’Estelle Morcello
(1999), mais il doit expliquer à la fois la situation actuelle et les évolutions possibles des
distributeurs, quel que soit leur domaine d’activité, en France et ailleurs.
Des perspectives derrière ces modèles
Une première hypothèse derrière ces propositions : la variété et l’autonomie du point de
vente engendrent une complexité accrue de
l’organisation et expliquent l’organisation des
entreprises. Une première attente dans notre
analyse concerne la traduction du modèle
« normé/varié » présenté ci-dessus. Selon
nous, les technologies disponibles et la maturité du secteur permettent l’apparition d’un
nouveau modèle d’organisation de la distribution qui permet de gérer une grande variété,
sans accroître les coûts logistiques, tant au
niveau du point de vente qu’au niveau des
entrepôts et plates-formes. Cette organisation
permettrait alors de concilier attractivité et
performance comptable.
Ce modèle se caractérise par sa capacité à uniformiser les processus d’une grande variété de
produits. Les plates-formes sont l’élément
caractéristique de cette nouvelle organisation
où elles fonctionnent dans un contexte idéal.
L’allotissement des commandes par magasin
chez le fournisseur ou dans un site dédié, permet de simplifier et d’accélérer les flux au
niveau de la plate-forme. Les processus sont
uniformisés quel que soit le produit concerné ;
par ailleurs, la disparition de la fonction de
stockage déléguée aux fournisseurs permet
d’uniformiser le traitement des produits et de
réduire la variété des types de flux et de manipulation. L’organisation récemment déployée
par Carrefour dans le cadre de son plan de
transformation est dans cet esprit, tout comme
la segmentation des flux chez Wal-Mart, par
Tableau 2 : Données à collecter pour construire les cadrans du modèle
Elément analysé
Critères utilisés
Résultats attendus
- Nombre de références
- Degré de liberté du point de vente dans la structure (interviews,
identification des décisions prises par les magasins/ superstructure)
- CA/m², CA/ salarié
- CA/ référence
- % des ventes en promotion
Cartographie des distributeurs selon les critères
d’autonomie et de variété.
Complexité
Nombre de flux différents gérés en magasin
Nombre d’entrepôts livrant un même magasin
Nombre de références gérées par salarié en magasin.
Les points de vente gérant le plus de flux sont ceux
dans lesquels la variété et l’autonomie sont plus
grands
Intégration de
l’enseigne
% d’externalisation de la logistique
Externalisation du transport et ou de l’entreposage.
Part du personnel logistique propre
% franchisés dans le réseau
Validation de l’externalisation comme critère de
caractérisation des modèles
Organisation du
travail
- Centralisation des processus
- Polyvalence en magasin et en entrepôt (interviews, observations,
magasin et entrepôt)
- Division du travail (interviews, observations)
- Rationalisation des fonctions logistiques, facilitation des tâches
des opérationnels (id)
- Automatisation des processus (idem)
- % de plates-formes/entrepôts
- % de livraisons alloties
Apprécier le mode de fonctionnement du modèle,
Investissements
- Investissements globaux, % du CA, type d’investissement
- Part des investissements en magasin, investissements clients/
invests productivité
- Niveau d’intégration du système d’information observé (interview)
Davantage d’investissements dans la structure dans le
modèle normé/varié, investissements de séduction
dans le modèle construit/ varié. Peu
d’investissements dans les autres modèles.
Recherche de la
qualité
- Mesure ou non du taux de rupture magasin,
- Taux de rupture effectif
Evaluer l’attention portée au service client, la rigueur
logistique.
Affectation du
distributeur à un
cadran du modèle
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Productivité caractéristique d’un concept,
caractérisation du concept
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exemple, entre rotations fortes et lentes. La
standardisation des opérations en magasin est
elle aussi en développement au travers notamment du « prêt-à-vendre » développé par Carrefour par exemple dès 2004 pour être déployé
en 2006 mais qui existe depuis de nombreuses
années chez Tesco au Royaume Uni ou chez
les hard discounters. Le prêt à vendre consiste
à présenter les produits, suivant leurs caractéristiques, en cartons, ¼ de palettes, ½ palettes
ou palettes, facilitant ainsi le chargement des
produits par les opérateurs et idéalement, leur
circulation dans la chaîne d’approvisionnement. Bénéfices attendus de cette évolution ?
La réduction des coûts de la supply chain, une
exposition des promotions facilitée, une
maintenance des assortiments permanents
plus aisée, une meilleure visibilité de l’offre et
une amélioration des processus en magasin
pour le contrôle de la péremption, le suivi des
ruptures, la maîtrise du niveau de stock rayon
(ECR 2006). Cette démarche, même si elle ne
peut s’appliquer à tous les produits, vise ainsi
à la fois l’augmentation de la productivité à
tous les niveaux de manutention logistique et
celle de l’attractivité de l’offre auprès des
consommateurs. Tesco a vu son chiffre d’affaires continuer de progresser à nombre de
points de vente constant en dépit de la crise ; le
CATTC/m² a ainsi évolué de £12420/m² en
2004 à £13824/m² en 2008. La productivité
est sans cesse améliorée et le groupe a réalisé
près de 550 millions de £ d’économies en
2009/2010 (prêt-à-vendre, transport, énergie)
et en prévoit autant pour la prochaine année.
Le centre de Bangalore, enfin, dédié au développement des technologies de l’information
au sein du groupe, est une démonstration des
investissements consentis dans ces activités
(3100 employés y travaillent).
Cette recherche d’une meilleure efficacité du
travail aux différents niveaux logistiques s’accompagne d’une réduction du nombre de
références, avec un recentrage notable sur les
marques de distributeur. Cette réduction du
nombre de références est liée entre autres à la
sélectivité des critères d’insertion dans le système logistique : allotissement des commandes, adhésion au prêt-à-vendre, généralisation
de l’usage de la RFID pour accélérer les flux.
Elle est également due à une structuration très
normée de l’offre, par exemple en termes de
MDD, 1er prix, marque fabricant. Même si
l’offre reste ample, la productivité du système
de distribution s’accompagne d’une rationalisation de l’offre et, vraisemblablement, de sa
normalisation. C’est là, sans doute une fragilité du modèle : risquer de se priver de variété,
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les gains de productivité ne compensant pas la
perte de chiffre d’affaires.
Le modèle que nous avons désigné par
« normé/varié » est émergent. Il reste à en valider les caractéristiques précises afin de faire
apparaître les différences par rapport aux
autres modèles autrement qu’intuitivement,
selon la méthodologie proposée ci-dessus.
Plasticité des modèles à différents contextes
Une enseigne peut évoluer et circuler entre les
différents cadrans proposés ci-dessus (figure 1). Cette évolution peut-être interprétée
comme une évolution historique, comme suggéré chez Colin et Paché (2001). Le passage
des distributeurs d’un cadran à l’autre serait
alors seulement lié à un degré de maturité du
secteur de la distribution. On retrouve alors
nécessairement une convergence des comportements des distributeurs vers un même
modèle faisant figure de référent à un moment
donné. Mais l’évolution des distributeurs
d’un modèle à l’autre peut-être liée aussi à un
choix stratégique du distributeur en termes de
management de ses équipes et de son offre. En
effet, s’il nous semble a priori que Carrefour
et Tesco figureront dans le cadran du modèle
émergent « normé/varié », d’autres distributeurs peuvent ne jamais se situer tout à fait
dans ce modèle référent. Le maintien d’un fort
degré d’autonomie en magasin et d’une offre
très large rend difficile la mise en place de la
nouvelle organisation. La proportion de l’assortiment qui pourra être normée, automatisée, ou en prêt-à-vendre, sera inférieure à ce
qui pourra être rencontré dans le modèle
« normé-varié », ce qui réduit l’intérêt de l’organisation. En revanche, la dynamique commerciale, la mobilisation des équipes animées
par le zéro ennui de la responsabilité de l’activité et des résultats restent le bénéfice propre
au modèle « construit/varié ».
La question peut-être abordée différemment
en prenant, par exemple, la formule du retour
sur investissement dans la distribution ainsi
que proposée entre autres par Martin Christopher (2000, p. 51) (voir encadré p. 25).
Le distributeur peut ainsi mettre l’accent sur
la marge (1), sur les ventes/linéaire développé
(2), c’est-à dire la productivité du linéaire, ou
sur les deux à la fois. Dans le cadran
« normé/varié », s’il est possible de maîtriser
les coûts en conservant une offre variée, le
modèle pourrait se traduire financièrement à
la fois par un taux de marge élevé (maîtrise
des coûts) et par une productivité du linéaire
élevée du fait de l’attractivité de l’offre.
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Dans le modèle construit/varié, l’accent est
mis sur l’attractivité et donc le chiffre d’affaires au mètre linéaire, tandis que dans le
modèle normé réduit, l’accent est mis sur le
taux de marge (maîtrise des coûts).
Mais la grille d’analyse que nous proposons
doit également pouvoir rendre compte des
structures logistiques dans différents contextes : différents types de distributeurs, y compris les spécialistes, mais aussi différentes
régions du monde.
Ainsi, la distribution de produits électriques
aux industriels, la quincaillerie industrielle ou
encore la distribution de produits pharmaceutiques, pourraient relever du modèle « construit/ varié » ou « normé/varié » suivant
l’autonomie laissée aux points de vente. C’est
d’ailleurs dans ces secteurs, avec le textile,
que l’on trouve les plus importants investissements en automatisation du picking compte
tenu de la variété. Chez ces distributeurs, l’évolution actuelle vers des développements
d’enseignes, regroupements et restructurations logistiques (Moinier, 2009), la distribution s’organise autour de concepts variés.
Au niveau international en France, l’essentiel
des travaux est dû à Colla (2001, 2008) et
concerne l’Europe. Il y aurait pourtant à
apprendre de comparaisons plus nombreuses
en intégrant les facteurs règlementaires, historiques et culturels. Le cadran « construit/réduit », par exemple, caractéristique du
commerce isolé indépendant, correspond au
modèle d’organisation logistique où la fonction de gros garde tout son sens ; on le trouve
dans de nombreux pays, qu’ils soient développés (Asie) ou en voie de développement.
Des écarts par rapport aux modèles de référence permettraient également de comprendre
les facteurs de développement d’un modèle
plutôt que d’un autre.
L’évolution à l’intérieur de la figure 1 ci-dessus se fait à notre sens suivant les étapes
ci-après. D’abord le commerce indépendant
isolé est majoritaire, avec une fonction de gros
prédominante, ensuite, la distribution se développant, elle se différencie en évoluant soit
vers le modèle « construit/varié », avec l’intégration par les distributeurs de la fonction de
gros, soit vers le modèle « normé/réduit » ;
enfin, ces deux modèles peuvent évoluer vers
le modèle « normé/varié », mais pas nécessairement, ce qui peut accroître la variété des
modèles en présence. Il faut alors étudier les
facteurs qui favorisent l’évolution d’un
modèle à l’autre. Il serait possible alors de
mieux comprendre pourquoi, en Asie, le com-
merce de proximité du type « convenience
store » reste majoritaire en dépit du développement des hypermarchés et supermarchés.
Discussion sur les propositions
et confrontation avec d’autres propositions
Les différents arguments développés ci-dessus rejoignent les propositions de Badot et
Paché (2007) ainsi que celles de Volle et al sur
plusieurs points.
Volle et al distinguent deux business modèles,
le BM-X, centré sur les coûts et le BM-Y centré sur la proposition de valeur au client. Le
modèle BM-X consiste à simplifier la proposition de valeur tout en diminuant les coûts
pour gagner en efficience ; il faut alors alléger
les coûts d’exploitation, externaliser les coûts
et générer des économies d’échelle sur le
retailing mix (standardisation, développement de la franchise). Les développements
précédents montrent que cette standardisation
passe par une centralisation, une faible autonomie au niveau du point de vente, une forte
polyvalence, de faibles investissements
notamment dans le système d’information qui
reste rudimentaire, et une forte intégration de
l’ensemble des fonctions dans la logique de la
réduction des coûts. Ces caractéristiques ne
nous semblent cependant pas propres aux
modèles à bas coûts. Elles sont aussi liées à la
normalisation de l’assortiment qui justifie et
rend possible la polyvalence, l’intégration,
ainsi que la faiblesse des investissements.
L’entreprise Picard, par exemple, n’investit
pas davantage dans les systèmes d’information et est intégrée. Cela n’est pas dû à son
positionnement prix, mais plutôt à la taille
réduite d’un assortiment par ailleurs très
homogène. Autrement dit, les caractéristiques
logistiques d’un modèle type BM-X peuvent
être étendues à des distributeurs ne poursuivant pas nécessairement une stratégie de
domination par les coûts.
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Dans le modèle BM-Y, le distributeur
recherche l’attractivité de sa proposition de
valeur. « Il cherche à créer de la marge non
pas à partir de la rationalisation des ressources et compétences, mais à partir de l’offre. »
Auchan est représentatif de ce modèle BM-Y,
du moins dans la version traditionnelle de ses
hypermarchés. Notre analyse conforte l’analyse faite par Volle et al sur le modèle BM-Y.
En effet, Auchan, qui génère un fort chiffre
d’affaires/m² caractéristique de l’attractivité
forte, connaît une forte externalisation logistique comme proposé par ces auteurs et une
forte activité promotionnelle. Néanmoins, le
troisième modèle que nous proposons, qui
combine de notre point de vue à la fois l’attractivité et la maîtrise des coûts n’apparaît
pas dans l’analyse de ces auteurs. Le dernier
modèle, correspondant à l’indépendant isolé
n’apparaît pas non plus. Or, les caractéristiques logistiques de ce type de point de vente,
même si elles semblent peu intéressantes pour
être rudimentaires, mériteraient davantage
d’attention.
Badot et Paché (2007), suggèrent quant à eux
que la mesure comptable de la performance
logistique n’est pas nécessairement justifiée
dès lors que le concept de point de vente valorise plutôt l’expérience vécue. Du point de
vue de ces auteurs, pour certains concepts, il
peut être plus valorisant de jouer la désorganisation logistique, à la limite la rupture, pour
faire vivre une expérience unique au visiteur
en magasin y compris pour lui donner l’impression qu’il bénéficie d’un prix vraiment
bas. Le texte de Badot et Paché invite certains
distributeurs à être contre-performants, à
jouer le « zéro ennui » contre le « zéro défaut »
pour gagner en parts de marché. Leur
approche reste contingente cependant et ils
proposent un outil, la roue de la logistique,
pour expliquer l’évolution de la focalisation
de la logistique sur la performance comptable
ou commerciale. La « roue de la logistique »
s’apparenterait à la « roue de la distribution » :
au début de l’existence du format, la logistique serait peu importante ; tandis que le format se développe, l’attraction de la clientèle se
fait par un plus grand service à la clientèle
avec une importance accrue accordée à la
logistique ; enfin, lorsque la concurrence s’intensifie, l’importance de la logistique est
réduite à nouveau en raison de la concurrence
par les prix qui s’établit. L’approche est ainsi
double. D’une part, l’accent est mis sur l’importance de la relation entre le degré d’enchantement du consommateur et l’importance
de la logistique : lorsque l’offre est spectacu-
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laire, attractive, l’importance de la logistique
est moindre : la cohérence de l’offre, la qualité
de l’expérience vécue l’emportent sur la rupture observée en magasin. D’autre part, l’accent est mis sur la dépendance de
l’organisation logistique par rapport à des facteurs extérieurs, tels que la manière dont la
concurrence s’exerce. Autrement dit, ce que
soulignent Badot et Paché finalement, c’est la
vraisemblable contingence des modèles
logistiques dans la distribution, en fonction de
l’offre relativement à la demande et en fonction du degré de concurrence. Cela suggère
également qu’il puisse y avoir convergence
des modèles notamment lorsque la concurrence est plus forte : dans ce cas, les ruptures
en point de vente auraient moins d’importance.
Or, ce que l’on observe en cette période de
concurrence forte et de crise, est plutôt un
accroissement des efforts de rationalisation
logistique chez la plupart des acteurs et une
plus grande attention portée aux ruptures :
chez Auchan, qui passe d’une mesure hebdomadaire à une mesure quotidienne en PGC ;
chez ED qui évolue vers l’enseigne DIA, plus
qualitative ; chez Carrefour, le plan de rationalisation concerne largement la logistique. De
la même manière, le niveau de stock, relativement élevé en France jusqu’à présent, fait
l’objet de davantage d’attention : les chefs de
rayon sont incités à suivre cet indicateur et les
enseignes se sont fixé des objectifs de réduction du nombre de jours de stocks. Pourtant, le
stock fait partie intégrante du concept du discount en France comme en témoignent les
chiffres (LSA 25 mai 2010). Or, la présentation massive et le stock faisaient partie intégrante du concept du discount.
Le nouveau cadre de développement de la
logistique de distribution ne s’oppose pas
cependant, comme nous l’avons indiqué précédemment, à ce que les coûts soient réduits
en même temps que l’attractivité accrue.
Tesco ou Carrefour ont pu sortir rapidement
des produits discount pour répondre au nouveau contexte, ce qui témoigne aussi d’une
bonne réactivité. Ces enseignes, par une combinaison habile au niveau régional, parviennent à offrir des produits locaux ou régionaux
sans complexifier les tâches des points de
vente. L’enchantement ne s’oppose donc pas
nécessairement à la vision comptable qui
passe désormais par une organisation scientifique de la distribution.
Ce qui doit évoluer cependant, c’est le mode
de management des équipes : la responsabili-
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sation et l’autonomie en magasin est dans certains cas un élément de la culture d’entreprise
et un vecteur de motivation du personnel. Plutôt que le zéro ennui des consommateurs évoqué par Badot et Paché, les enseignes peuvent
rechercher le zéro ennui des équipes commerciales. Le défi que recèle le modèle
« normé/varié » est alors celui de maintenir un
bon niveau de motivation au sein du personnel
par l’enrichissement de tâches qui pourraient
devenir routinières. De nombreux travaux
portant sur le turnover des employés (Lum et
al, 1998, Griffeth et al. 2000) montrent que ce
dernier est d’autant moins élevé que les personnels sont impliqués dans l’organisation et
satisfaits au travail. Il existe également un lien
entre chiffre d’affaires et implication dans
l’organisation, le lien avec la satisfaction au
travail étant moins clair. Cependant, lorsque
les activités sont très standardisées, les
emplois faiblement qualifiés, ce lien s’étiole
et l’impact du turnover des employés sur le
chiffre d’affaires est nul (Arthur 1994,
Guthrie 2001, Siebert et al 2006). Ce n’est
donc pas tant l’ennui des consommateurs
qu’il faut craindre dans la focalisation comptable et la rationalisation. Celui-ci sera combattu par la capacité des systèmes à offrir
davantage de variété à moindre coût à l’instant
t comme sur une période plus longue avec
l’accélération de l’introduction de nouvelles
variétés. C’est plutôt l’ennui des personnels
en magasin dont les compétences risquent
d’être uniformisées et simplifiées pour devenir indépendantes finalement du chiffre d’affaires du point de vente. « Etre directeur de
magasin, c’est fantastique ! 600 employés,
15 000 à 30 000 clients par semaine –l’équivalent d’une petite ville qui vous rend visite-,
et vous êtes aux manettes ! ». Ainsi s’exprime
Arnaud Mulliez dans l’interview au Nouvel
Economiste en 2009, précisant aussitôt que le
turnover ne dépasse pas 8 % chez Auchan. La
différenciation des modes de management du
personnel est peut-être la clé de la différenciation des modes d’organisation des distributeurs.
Conclusion
Partis de l’idée que, en dépit de convergences
évidentes, les organisations logistiques des
distributeurs peuvent varier en fonction de
leur offre et de l’autonomie des points de
vente, nous avons proposé un modèle à quatre
cadrans susceptible de regrouper l’ensemble
des distributeurs, quels que soient leur
domaine d’activité et leur localisation. Ce
modèle permet d’étudier l’organisation du
distributeur en intégrant les entrepôts/plates-formes aussi bien que les points de vente.
Nous proposons une grille d’analyse de ces
différents modèles qui suppose une collecte
de données et une analyse pour valider la crédibilité de notre proposition. Un certain
nombre de données seront difficiles à obtenir
sous forme chiffrée chez l’ensemble des distributeurs et il faudra alors recourir à des
observations pour la validation (investissement dans les systèmes d’information par
exemple).
Cette contribution, s’appuyant sur des critères
anciens tels que l’ampleur de l’assortiment et
l’autonomie des points de vente, a le mérite de
nous permettre de revenir à des fondamentaux. Bien qu’ayant un parfum de « déjà vu »,
notre approche revitalise l’analyse en mettant
en évidence le développement d’un nouveau
modèle de distribution et en proposant d’autres critères d’analyse des distributeurs. Elle
complète également utilement les modèles
récemment proposés par Volle et al (2008) et
Badot et Paché (2007) en nuançant les apports
de ces auteurs au plan logistique. L’attractivité
et la vision comptable ne s’opposent alors pas
nécessairement, de même que les caractéristiques identifiées par Volle et al dans leurs
modèles peuvent être étendues à d’autres distributeurs que ceux qu’ils envisageaient.
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Logistique & Management
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Entretiens conduits en 2009
Responsable logistique de deux hypermarchés Auchan
Responsable logistique d’un magasin Leroy
Merlin
Responsables de rayon PGC d’un hypermarché Auchan
Responsables d’entrepôt (et visites) Auchan,
Système U, ED.
Exploitation des données des sites internet
des entreprises citées (rapports d’activité
annuels) sur l’année 2008 (avant crise pour la
France).
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Logistique & Management
Logistique, Supply Chain Management
et stratégie orientée développement
durable : une revue de la littérature
Christine BELIN-MUNIER
Université de Bourgogne, Laboratoire ThéMA
[email protected]
La présente étude repose sur l’analyse de 111 articles parus entre 2004 et 2009 sur
l’intégration d’objectifs à la fois économiques, écologiques et/ou sociaux dans la
chaîne logistique. L’examen de l’origine disciplinaire et géographique des auteurs
montre l’intérêt croissant de cette recherche pour le monde scientifique, mais le
nombre de tests reste limité et beaucoup d’études sont encore exploratoires. Une
analyse synthétique des travaux les plus récents paraît donc pertinente.
Après avoir identifié et défini les différents concepts utilisés par les chercheurs
comme la responsabilité environnementale et sociale de la logistique, le
management vert de la chaîne logistique, le management de la chaîne logistique
inversée et le management durable de la chaîne logistique, l’étude recherchera les
principaux leviers du développement durable dans la chaîne logistique et les
répercussions des pratiques durables sur les performances de ces chaînes.
Le développement durable fait l’objet d’une
recherche abondante. Selon Linton et al
(2007) plus de 700 articles sur le thème du
développement durable ont été publiés en
2005 en sciences de gestion. Le développement durable est par ailleurs étudié dans de
nombreuses disciplines. Toujours selon Linton et al (2007) le développement durable
concerne des disciplines très diverses comme
les sciences de la terre et de l’environnement,
la médecine, les sciences des matériaux, l’agriculture et la biologie, l’économie, les
sciences sociales et les sciences de gestion.
Pour le Supply Chain Management (SCM),
l’examen de 8 revues logistiques sur 10 ans de
Abukhader et Jönsen (2004) montre que l’environnement est un domaine relativement
moins traité, quelque soit la revue, en comparaison avec le marketing, le management ou
encore les technologies, techniques et
concepts, mais qu’il est bel et bien présent.
L’appel à communications sur le thème du
Supply Chain Management dans un environnement durable par le Journal of Operations
Management en 2007 a donné lieu à 50 propositions dont 7 ont été retenues pour une publication dans un numéro spécial (n°25).
L’appel à communication sur le thème de la
durabilité et du SCM par l’International Journal of Production Economics a donné lieu à 37
propositions pour 10 publications en 2008
(volume 111) ; celle par le Journal of Cleaner
Production a donné lieu à 42 propositions
dont 15 ont fait l’objet d’une publication en
2008 (dans le volume 116). Pour Pagell et Wu
(2009) l’intérêt pour les SC vertes et maintenant durables croît depuis une dizaine d’années. Face à cette abondance, une revue de la
littérature trouve aujourd’hui sa place. Le travail présenté ici a un double objectif : faire un
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Logistique & Management
état des lieux de la recherche en SCM et en
Logistique sur le développement durable et
mettre cette recherche en perspective avec la
recherche sur le même thème en sciences de
gestion qui lui est antérieure. Les axes de
recherche utilisés par les spécialistes du SCM
et de la logistique permettent-ils d’enrichir les
concepts de développement durable appliqués à l’entreprise par les gestionnaires et de
mieux comprendre les pratiques d’entreprises
et leurs répercussions sur les performances?
Le présent article est donc susceptible d’un
double apport, conceptuel et managérial.
ronnement se retrouvent donc pour plus de la
moitié d’entre elles dans des revues non
logistiques. La difficulté qui en découle tient
à la diversité des axes de recherche, des
concepts utilisés et du langage. L’analyse en
termes de cycle de vie est par exemple plus
présente dans les revues spécialisées en environnement. Il est de notre point de vue cependant important de tenir compte des deux
types de travaux pour garder toute la richesse
de ce thème de recherche, la multi disciplinarité étant un point fort de la recherche en
SCM (Boyer, 2007)3.
Un travail de ce type se heurte cependant à
une difficulté liée à l’origine des travaux de
recherche sur la logistique, le SCM et le
développement durable. La revue de la littérature de Seuring et Müller (2008) sur le
SCM durable pour la période 1990 à 2007
(hors SC fermées, achats publics et demande
éthique) les a conduit à analyser 191 articles
dont 81 issus de revues sur le management
durable ou environnemental1 et 83 de revues
traditionnelles sur les opérations ou le SC2 ;
les articles restant proviennent soit de revues
éthiques (11) soit de revues plus techniques
(16). Des études sur la logistique et l’envi-
Le présent article repose donc sur une revue
de la littérature pour une période allant de
2004 à début 2009 visant à faire un point sur
l’état de la recherche sur le lien entre le développement durable et la logistique et le Supply
Chain management. Les articles ont été sélectionnés après un examen systématique des
sommaires de plusieurs revues de logistique,
de revues généralistes en gestion et de revues
centrées sur la gestion environnementale ou le
développement durable disponibles sur la
base documentaire des revues en ligne de
l’Université de Bourgogne. La démarche
nous a conduits à sélectionner 111 articles.
Tableau 1 : Origine et date de parution des travaux autres que les modélisations :
2004
Revue
2005
2006
International Journal of Production
Economics
Journal of Operations Management
1
1
Production and Operations Management
1
International Journal of Operations and
Production Management
2
2007
2008
1
9
5
1
1
4
3
3
1
1
1
1
5
International Journal of Physical
Distribution and Logistics Management
1
1
2
Journal of Purchasing and Supply
Management
1
Journal of Business Logistics
1
5
2
3
2
3
Total
4
Journal of Cleaner Production
1
Greener Management International
1
Journal of Business Ethic
9
3
4
15
12
1
45
1
10
1
13
2
3
1
1
1
Journal of Environmental Management
7
1
Total
2
1
Autres
Total
6
1
8
2
Logistique & Management
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3
Journal of Supply Chain Management
International Journal of Logistics :
Research and Applications
Total
1
International Journal of Production
Research
1 - Principalement le Journal of
Cleaner Production et Greener
Management International
2 - 2 - Principalement SCM, an
International Journal et le
Journal of Operations
Management
3 - K Boyer (2007), Editorial :
Empirical Elephants –Why
Multiple Methods are Essential
to Quality Research in
Operations and Supply Chain
Management, Journal of
Operations Management,
doi :10.1016/j.jom.2008.03.001
2009
10
1
1
4
13
4
1
4
9
20
29
1
22
9
2
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Logistique & Management
Sur la période, plusieurs revues ont consacré
un numéro spécial au thème de la durabilité :
le numéro 25 du Journal of Operations Management (2007, sur le SCM dans un environnement durable), le numéro 16 du Journal of
Cleaner Production (2008, sur la durabilité et
le SCM), le numéro 111 de l’International
Journal of Production Economics (2008, sur
le SCM durable), le numéro 13.1 de Logistique & Management (2005, sur le développement durable).
Sur les 111 articles, 35 sont des modélisations
de problèmes assez techniques. Sur les 35
articles, 26 sont consacrés à une problématique liée à la logistique inversée (« reverse
logistics ») qui apparaît clairement comme la
problématique dominante. Concernant la provenance des travaux, 11 proviennent de
l’International Journal of Production Economics, 4 de l’International Journal of Physical
Distribution & Logistics Management, et 8 du
Journal of Cleaner Production. Nous retrouvons donc ici les deux origines logistique et
environnementale des travaux. Pour la suite
de l’étude nous avons écarté ces modèles
techniques qui constituent un domaine de
recherche à part entière, pour nous concentrer
sur les autres approches plus stratégiques (76
articles) permettant de mieux comprendre les
concepts (conformément à notre premier
objectif), les pratiques et leurs incidences sur
les performances (conformément à notre
second objectif).
Le tableau 1 donne la revue d’origine et
l’année de publication des 76 articles retenus
pour notre étude. Il montre l’intérêt croissant
pour la question, la grande variété des revues
et les deux sources possibles : revue logistique
ou revue liée au développement durable. L’origine géographique des chercheurs est par
ailleurs très diverse4 ce qui montre l’intérêt
général pour la question.
Pour la suite de l’étude, nous allons tout d’abord rechercher dans ces articles les différents
concepts et pratiques liés au développement
durable décrits par les chercheurs en les mettant en relation avec ceux développés plus
généralement en gestion pour tenter d’évaluer
la pertinence des recherches liant logistique,
SCM et développement durable d’un point de
vue conceptuel et théorique ; dans un second
temps, nous examinerons les facteurs explicatifs de ces pratiques et le lien entre ces dernières et les différentes performances de
l’organisation, pour appréhender la pertinence managériale de ces recherches.
Les concepts et les pratiques
Les concepts de responsabilité sociale
de l’entreprise (RSE) et de développement
durable appliqués à la logistique
Les concepts de responsabilité sociale et de
développement durable sont depuis longtemps intégrés par les gestionnaires pour analyser les stratégies des entreprises. Le
problème de la responsabilité des entreprises,
notamment en matière sociale, n’est pas nouveau. Les auteurs utilisent les notions de Corporate Social Responsability (CSR) ou de
Responsabilité Sociale des Entreprises
(RSE). Pour Ciliberti et al (2008a) les premières formalisations peuvent être attribuées à
Bowen, en 1953. Selon Bowen, intégrer l’intérêt général dans les décisions des entreprises permet à ces entreprises de préserver leur
liberté en écartant le contrôle de la société. A
la même époque, pour Druker5 (1954) la responsabilité sociale des entreprises découle de
leur pouvoir économique. Vingt ans plus tard,
la notion est à nouveau développée par Davis6
(1973) et Caroll7 (1979) et se précise : la responsabilité sociale des entreprises apparaît
comme une démarche volontaire allant
au-delà des contraintes économiques, techniques et légales de l’entreprise. Dans les
années 1980, la responsabilité sociale des
entreprises s’enrichit du concept de parties
prenantes développé par Friedman8 (1984) :
les « stakeholders ». Les parties prenantes
d’une société qui ne détiennent pas forcément
des titres de cette société sont néanmoins
concernées par les décisions qu’elle prend ou
ont une influence sur elle. La responsabilité
sociale de l’entreprise consiste à intégrer leurs
attentes dans les décisions de l’entreprise. A
partir de la fin des années 1980, la notion de
responsabilité sociale de l’entreprise inclut la
notion de développement durable9 ; les décisions de l’entreprise doivent intégrer trois
dimensions : une dimension économique
(condition nécessaire à sa viabilité), une
dimension environnementale et une dimension sociale. Le développement de l’entreprise doit concilier ces trois orientations. Cet
élargissement progressif du sens de la responsabilité sociale en rend les frontières de plus
en plus floues et la transforme en un concept
évolutif et non figé10. Dans ce contexte, quelle
est la part de la responsabilité de la fonction
logistique dans la responsabilité sociale de
l’entreprise ?
Pour Wu et Dunn (1995) il y a déjà 15 ans,
beaucoup de décisions logistiques ont des
répercussions sur l’environnement. Les sché-
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4 - USA : 26 articles, Canada : 8,
Chine : 8, Thaïlande, Taïwan,
Singapour, Indonésie, Nouvelle
Zélande, Philippines : 1, Hong-Kong :
4, Inde : 1, Royaumes Unis :11,
France : 9 dont 3 dans des revues
anglo-saxonnes, Allemagne, Espagne,
Italie : 3, Pays-Bas : 2, Hollande,
Grèce : 1, Suède : 5, Norvège : 1,
Finlande : 1 , Brésil, Philippines,
Emirats Arabes Unis, Australie :1
5 - Cité par Acquier, 2008,
Développement durable et
management stratégiques : piloter un
processus de transformation de la
valeur, actes de l’AIMS.
6 - cité par Ciliberti et al, 2008a et
Acquier, 2008
7 - cité par deHond et Bakker, 2007,
Ideologically motivated activism :
how activist groups influence
corporate social changes activities,
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32, n°3, pp 901-924.
8 - cité entre autres par Dupuis,
2007 ; Ciliberti et al, 2008a.
9 - De Brito et al, 2008 ; Lauriol,
2004, le développement durable à la
recherche d’un corps de doctrine,
Revue Française de Gestion, n°152,
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développement de la responsabilité
sociale de l’entreprise, une analyse en
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Revue d’Economie Industrielle,
n°113, pp 83-105 ; Weber, 2008 ;
Reynaud et al, 2007,La responsabilité
sociale de l’entreprise à l’épreuve de
l’Europe, Revue Française de Gestion,
n°180, pp 109-130 ; Szekely et
Knirsch, 2005, Responsible
Leadership and Corporate Social
Responsibility: metrics for
Sustainable Performance, European
Management Journal, vol 23, n°6, pp
628-647
10 - Dupuis, 2007, La RSE, de la
gouvernance de la firme à la
gouvernance de réseau, Revue
Française de Gestion, n°180, pp
159-175 ; Bensebaa et Béji-bécheur,
2007, Pragmatisme et responsabilité
sociale de l’entreprise, Revue
Française de Gestion, n°180, pp
177-198 ; Sjöström, 2008,
Shareholders Activism for Corporate
Social Social Responsibility : what do
we know?, Sustainable Development,
n°16, pp 141-154 ; Scherer et Palazzo,
2007, Toward a political conception of
corporate responsibility : business
and society seen from a Habermasian
perspective, Academy of Management
Review, vol 32, n°4, pp 1096-1120 ;
Hull, 2008, Sustainable Development:
premises, understanding and
prospects, Sustainable Development,
vol 16, pp 73-80 ; Matten et Moon,
2008, « Implicit » and « explicit »
CSR : a conceptual framework for a
comparative understanding of
corporate social responsibility,
Academy of Management Review, vol
33, n°2, pp 404-424 .
31
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Logistique & Management
mas d’approvisionnement et de distribution
par exemple ont des répercussions sur le taux
de remplissage des véhicules et le mode de
transport utilisé. D’autres décisions comme le
choix des emballages de transport, le choix du
transporteur, la logistique de retour des produits ont également des répercussions sur
l’environnement. Il est donc important pour
ces auteurs d’intégrer la logistique dans l’analyse environnementale. Par ailleurs, les techniques logistiques traditionnelles comme le
juste à temps ou le cross-docking ont des
répercussions sur la performance économique
mais aussi sur l’environnement ; il convient
donc d’approfondir l’analyse de ces techniques en ajoutant à la dimension économique
une dimension plus écologique11. La contrainte environnementale passe progressivement du produit au processus. Aujourd’hui,
pour Ciliberti et al (2008a), la logistique
représentant la moitié de la valeur ajoutée
industrielle, l’étude de la responsabilité
sociale de la logistique est tout à fait pertinente. La responsabilité de la logistique peut
soit se limiter à une responsabilité environnementale soit s’étendre et inclure des composantes plus sociales, mais la plupart des
travaux portent sur l’environnement. Achats
verts, logistique inversée et conception du
produit sont pour Vachon et Klassen (2008)
les composantes du management environnemental.
La prise en compte des problèmes de responsabilité sociale et de durabilité par la logistique (« Responsabilité Sociale de le
Logistique », RSL) induit différentes pratiques dans l’entreprise. L’analyse de 36 articles permet à Ciliberty et al (2008a)
d’identifier des pratiques pouvant être regroupées en 5 domaines : les achats socialement
responsables (16 articles), le transport durable
(8 articles), l’emballage (2 articles), l’entreposage (2 articles) et la Reverse Logistics (8
articles). Le moindre intérêt actuel pour l’emballage peut s’expliquer par l’antériorité de
cette question.
11 - Wu HJ, Dunn, SC, 1995,
Environmentally responsible
logistics systems, International
journal of Physical Distribution
& logistics Management, vol 25,
issue 2, pp 20-39
Pour les achats socialement responsables, les
décisions d’achat sont prises en tenant compte
des conséquences sociales dont se préoccupent les parties prenantes. Pour Carter et Jennings (2004) les achats responsables incluent
les achats environnementaux (appelés aussi
achats « verts » par certains auteurs), et les
achats incluant des critères sociaux et éthiques.
Les transports durables remplissent les
besoins de mobilité en préservant et amélio-
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rant la santé des hommes et l’écosystème, en
assurant progrès économique et justice
sociale, maintenant et dans le futur. Le développement du transport dépend du nombre
moyen de maillons de la chaîne logistique, de
la longueur moyenne de ces maillons, du coefficient de chargement et des éventuels transferts modaux (Allievi Dorosz, 2005). Pour
Quack et Koster (2007), le transport routier
dans les aires urbaines génère en particulier
l’émission de polluants, l’utilisation de fuel
fossile, des accidents corporels, du bruit, la
congestion des centres villes, des vibrations,
une diminution des espaces verts ; il nuit à la
vue, aux infrastructures et aux édifices en
partie historiques. Browne et al (2006) quant
à eux, montrent l’importance du transport
point de vente/consommateur pour la
consommation d’énergie liée au transport, à
travers deux exemples.
L’emballage durable ajoute une valeur en
contenant efficacement le produit et en le protégeant quand il bouge le long de la Supply
Chain. Il sert de support à une consommation
responsable et informée. Il utilise avec le plus
d’efficience les matériaux et les énergies, des
matériaux recyclés, ou encore des matériaux
non dangereux pour la santé et les écosystèmes.
Pour l’entreposage durable, les structures, les
outils de manutention et la gestion des ressources humaines doivent être conformes au
développement durable.
Enfin, la gestion du produit en fin de vie doit
être intégrée à la logistique. Pour Kocabasoglu (2007), la logistique « inversée »
(“Reverse Logistics”) est une série d’activités
necessaires pour récupérer le produit chez le
consommateur pour le détruire ou lui redonner de la valeur. De plus en plus la chaîne
logistique traditionnelle se double d’une
chaîne logistique « inversée » (“Reverse Supply Chain”, RSC). Cette extension a été par
ailleurs renforcée par la législation rendant les
entreprises en partie responsables des produits en fin de vie (notamment en Europe pour
les D3E). Si les retours sont ré-intégrés dans
le processus de production, le circuit devient
fermé (“closed loop”) ; sinon il reste ouvert
(“open loop”). La logistique et le SCM inversés font l’objet d’une recherche abondante,
tant sur le plan technique (26 articles sur 35
pour notre revue de la littérature), que sur le
plan stratégique (21 sur 76). La logistique
inversée n’est pas une image symétrique de la
logistique « aller ». Pour Srivastava (2008),
l’examen de la littérature et 84 interviews de
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Logistique & Management
parties prenantes laisse supposer que la logistique inversée est plus complexe que la logistique traditionnelle : elle doit être plus
réactive, elle est conduite par l’offre et est tributaire du rythme des retours. Elle doit donc
faire l’objet d’une analyse bien spécifique.
Pour French et la Forge (2006), les flux caractérisant la logistique des retours sont très
divers. Les intervenants de la chaîne logistique inversée peuvent être les mêmes que
ceux de la chaîne logistique traditionnelle ou
être des intervenants dédiés à cette nouvelle
chaîne. Pour Gou et al (2008), la collecte des
retours peut s’appuyer sur les structures de la
chaîne « aller » en passant par les centres de
distribution de la chaîne « aller » ou sur des
structures spécifiques de la chaîne « retour ».
La réutilisation des produits passe par le
« remanufacturing » qui est une stratégie de
production dont l’objectif est la revalorisation
de produits usés à travers l’utilisation de composants fonctionnant correctement (Qu,
2008).
L’étude des rapports non financiers de Ciliberti et al (2008a) de 83 sociétés italiennes
(certifiées AA 1000, GRI, GC ou EMAS) permet d’isoler 47 pratiques sur lesquelles les
sociétés communiquent :
• les Achats responsables (24 pratiques) : cités dans 56% des rapports
• les Transports durables (13 pratiques) : cités dans 20% des rapports
• les Emballages durables (2 pratiques) : cités dans 6% des rapports
• l’Entreposage durable (2 pratiques) : cité
dans 1% des rapports
• la Reverse Logistics (6 pratiques) : citée
dans 17% des rapports
Les achats responsables apparaissent donc
comme la pratique dominante, devant les
transports et la logistique inversée. L’entreposage n’est que très rarement cité en 2008.
La recherche sur le lien entre la fonction logistique dans l’entreprise et la durabilité permet
donc d’identifier et de définir des pratiques
spécifiques pour les entreprises. Ces pratiques
sont mises en avant par les entreprises, notamment par le biais des rapports non financiers.
L’étude du lien entre logistique et durabilité
paraît donc pertinente. Mais la logistique
n’est pas limitée aux frontières des entreprises. Elle est de plus en plus inter organisationnelle. La question que l’on peut alors se poser
concerne les répercussions des liens logistiques sur les pratiques et les stratégies des
entreprises en faveur d’un développement
plus durable. L’existence de ces liens permet
de passer de la notion de Responsabilité
Sociale de la Logistique (RSL) à celle de responsabilité étendue à la Supply Chain ou à la
chaîne logistique.
La responsabilité étendue à la chaîne
logistique
La concurrence aujourd’hui est de moins en
moins entre des sociétés isolées et de plus en
plus entre des réseaux d’entreprises, financiers (les groupes de sociétés) et/ou logistiques (« Supply Chains »), le plus souvent
trans-frontaliers (groupes de sociétés internationaux et « global supply chains »). Il n’est
pas étonnant dans ce contexte que la responsabilité sociale de l’entreprise se soit étendue
progressivement aux réseaux logistiques
notamment par le biais des pressions exercées
par les parties prenantes (Rao et Holt, 2005).
Pour Jayaraman, Klassen et Linton (2007)12,
on est progressivement passé d’approches
locales à une approche plus globale du management de l’environnement grâce à la prise en
compte de l’ensemble de la chaîne logistique.
Pour Simpson et al (2008) c’est tout d’abord
l’extension des objectifs de production en
amont qui a fait l’objet de recherche depuis
une quinzaine d’années, mais plus récemment, les chercheurs se sont intéressés à la
remontée d’objectifs tournés vers le développement durable. Ainsi, la responsabilité
sociale ne se limite pas à l’usine de production, mais s’étend à l’ensemble du processus
de la Supply Chain (Schmidt et Schwegler,
2008). Les organisations subissent une pression pour la performance économique tout en
étant considérées comme responsables des
performances environnementales et sociales
de leurs fournisseurs et partenaires (Seuring
S, Sarkis J, Müller M, Rao P, 2008). Une
société peut être tenue socialement responsable de la gestion d’employés d’une autre
société (Cruz et Wakolbinger, 2008). L’efficacité de l’engagement responsable d’une entreprise dépend de celle de toutes les autres
entreprises appartenant à la même chaîne
logistique (Ciliberti et al, 2008b). Dans le
cadre de la gestion de leur chaîne d’approvisionnement et de distribution, les dirigeants
doivent donc étendre leurs objectifs sociaux et
environnementaux à l’ensemble de leurs partenaires de la chaîne logistique (Vachon et
Klassen, 2006). Des critères à la fois environnementaux et sociaux déterminent en partie la
participation des membres à une Supply
Chain (Seuring et Müller, 2008).
La pression en faveur du développement
durable se diffuse le long de la chaîne logis-
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spécial « supply chain
management in a sustainable
environment » du Journal of
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tique dans les deux sens : vers l’amont et vers
l’aval à partir d’une entreprise focale qui peut
être l’entreprise qui gouverne la chaîne logistique ou l’entreprise en contact direct avec le
client ou encore l’entreprise qui décide du
produit offert (Seuring et Müller, 2008). La
revue de la littérature de Seuring et Müller
(2008) leur permet de conclure que la pression
en faveur d’un développement durable
remonte le long de la chaîne d’approvisionnement. La responsabilité se diffuse aussi en
aval pour Cruz et Wakolbinger (2008) et
Kovacs (2008). Pour une marque, la chaîne
logistique est un moyen d’exercer la pression
en faveur du développement durable
(Amaeshi et al, 2007). Toutefois, la réputation
ne se diffuse pas de façon symétrique vers l’amont et vers l’aval. La responsabilité en aval
revient clairement à une société focale mais
pas l’inverse : la responsabilité et la mauvaise
réputation descendent plus facilement qu’elles ne remontent. La demande environnementale diminue au fur et à mesure que l’on
remonte le long de la Supply Chain (Kovacs,
2008). L’observation de la diffusion des codes
de conduite en Chine de Krueger (2007) va
dans le même sens puisqu’elle fait apparaître
une pression croissante sur les entreprises au
fur et à mesure que l’on se rapproche de l’aval.
Les études de cas de Ciliberti et al (2008b) et
Walker et Preuss (2008) soulignent par ailleurs le pouvoir limité des PME pour transférer les attentes du client final sur leurs propres
fournisseurs.
Les liens commerciaux supportés par les liens
logistiques existant entre les entreprises ont
donc conduit à une responsabilité étendue des
entreprises et à la diffusion de certaines exigences environnementales et/ou sociales. La
diffusion de la responsabilité le long de la
chaîne logistique dépend de plusieurs facteurs comme la taille des entreprises et leur
position plus ou moins en aval, dans la chaîne
logistique. On ne peut donc réellement appréhender la responsabilité sociale des entreprises aujourd’hui sans intégrer la chaîne
logistique dans le raisonnement. Cette diffusion résulte-t-elle d’un simple effet domino
(Schmidt, 2005) ou a-t-elle entraîné un changement dans la gestion de la chaîne logistique
(Supply Chain Management, SCM)? C’est ce
que nous allons étudier maintenant.
Les différentes formes de collaboration
et de SCM orientés développement durable
La logistique, non seulement par ses pratiques, mais aussi comme outil d’analyse transversale et globale peut servir de support à une
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stratégie orientée vers plus de durabilité. Elle
permet de mieux cerner les interdépendances.
La collaboration entre partenaires logistiques
peut s’appuyer sur les connaissances qu’elle
apporte. Cette collaboration peut être plus ou
moins étendue. La question de la gestion globale de la chaîne logistique multi-acteurs fait
l’objet de travaux de plus en plus nombreux
depuis une quinzaine d’années (Colin, 2005 ;
Paché et Spalanzani, 2007 ; Belin-Munier,
2008). L’étude du lien entre la responsabilité
sociale et le SCM est encore plus récente
(Ciliberti et al, 2008b). Les auteurs distinguent aujourd’hui trois niveaux de collaboration : la collaboration environnementale, le
“Green Supply Chain Management”
(GSCM) et le “Sustainable Supply Chain
Management” (SSCM) avec la gestion
intégrée de la chaîne logistique qui en découle
(“Integrated Chain Management”).
Pour Vachon et Klassen (2008), la collaboration environnementale est composée d’activités communes et de coopérations visant à
trouver des solutions aux problèmes environnementaux ; cette collaboration concerne les
fournisseurs et les clients et peut avoir des
répercussions sur les performances opérationnelles et environnementales. Comme toute
collaboration, la relation peut s’appuyer sur la
confiance ou le contrôle. Le contrôle environnemental peut utiliser comme outil un système d’information spécifique : le système de
management de la responsabilité sociale de
l’entreprise (“Corporate Social Responsibility Management Systems”). Le système de
management de la responsabilité sociale de
l’entreprise permet de transférer les comportements socialement responsables d’un partenaire à l’autre d’une chaîne logistique et
donne les grandes lignes des principes environnementaux (et sociaux) à respecter (Ciliberti et al, 2008b). Ces systèmes peuvent
reposer sur des standards. Pour Castka et Balzarora (2008), les SC sont de plus en plus difficiles à contrôler car les réseaux sont de plus
en plus décentralisés et indépendants ; le
développement de normes et de standards est
un moyen de diminuer les asymétries informationnelles et de réduire la complexité de la
gestion des SC. Les multinationales jouent un
rôle dans la diffusion internationale de ces
standards. D’une façon moins formelle, le
dialogue, comme support de la collaboration
fournisseur/client, facilite également la compréhension de l’impact environnemental de la
chaîne logistique (Simpson et al 2007).
Lorsque la collaboration environnementale se
diffuse le long de la chaîne logistique et ne se
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limite plus à des dyades localisées, elle
change de dimension. Les auteurs utilisent
alors la notion de “Green Supply Chain
Management” (GSCM). Le GSCM inclut les
initiatives dans la logistique interne et/ou
externe, prises conjointement par les fournisseurs, les distributeurs et les utilisateurs, qui
permettent de réduire voire d’éliminer les
impacts négatifs sur l’environnement de leur
activité (Rao et Holt, 2005). Le GSCM
consiste à tenir compte d’objectifs environnementaux dans les décisions d’approvisionnement, de conception et de fabrication du
produit et dans les décisions relatives à sa distribution. Le SCM doit en particulier intégrer
les problèmes environnementaux liés à la fin
de vie du produit (Srivastava, 2008). Il peut
reposer ou non sur le contrôle (Vachon et
Klassen, 2006). Il vise à améliorer la performance des organisations par rapport à leur
responsabilité sociale, à diminuer le risque lié
à la réputation des organisations, à diminuer
les gaspillages et à améliorer la réactivité des
organisations en cas de changement de réglementation (Simpson et al, 2007). D’autres
auteurs préfèrent parler de management environnemental de la SC (“Environmental
SCM”). Le management environnemental
inclut les relations, les pratiques et les
décisions liées à l’environnement et qui
concernent la conception, l’acquisition, la
production, la distribution, l’utilisation, la
réutilisation et le retrait des produits et services des entreprises (Zsidisin et Siferd, 2001,
cités par Hagelaar et van der Vorst, 2004). Les
deux concepts sont très proches.
Si l’on ajoute à la dimension environnementale, la dimension sociale le SCM devient
durable (“Sustainable Supply Chain Management”). Seuring, Sarkis, Müller et Rao (2008)
définissent le Sustainable Supply Chain
Management dans leur éditorial comme la
gestion du flux d’informations et de la coopération intégrant des objectifs économiques,
environnementaux et sociaux et les attentes
des parties prenantes. On retrouve également
ces trois dimensions de la gestion durable
chez Ciliberti et al (2008b). Pour Pagell et Wu
(2009), une SSC doit être efficace sur les trois
dimensions de la performance : la supply
chain doit être performante par rapport aux
mesures traditionnelles des profits et des pertes, mais aussi par rapport à des conceptions
plus étendues de la performance incluant des
dimensions sociales et environnementales.
Pour Seuring et Müller (2008) le SSCM,
comme le SCM classique, comprend la gestion des trois flux traditionnels de la logistique
(flux physique, flux d’information et flux
financier) ainsi que celle de la coopération le
long de la chaîne logistique. Mais pour être
durable, ce SCM doit en plus tenir compte
d’objectifs par rapport aux trois dimensions
du développement durable, découlant des
attentes des clients et des parties prenantes.
Pour que les entreprises puissent rester dans la
chaîne logistique, elles doivent respecter des
critères sociaux et environnementaux.
La prise en compte de contraintes environnementales modifie les objectifs du SCM mais
aussi sa mise en œuvre. La gestion de la
chaîne logistique devient de plus en plus
intégrée. Le management intégré de la chaîne
(“Integrated Chain Management”) inclut en
plus du flux allant vers le consommateur le
flux repartant de lui ; il intègre les parties prenantes et n’est pas seulement centré sur la collaboration le long de la SC ; il intègre le cycle
de vie et est plus centré sur les flux physiques (Seuring, 2004, Hagelaar et van der
Vorst, 2004).
Si le SSCM, pour tous les auteurs cherchant à
le définir, suppose la prise en compte des
impacts sociaux et environnementaux du
SCM, de notre revue de la littérature, il ressort
cependant que les problématiques des recherches restent très centrées sur la dimension
environnementale. La dimension sociale
semble
toutefois
en
développement
(Tableau 2).
Ces différents concepts théoriques correspondent-ils à des pratiques réelles dans les entreprises ? Seuring et Müller (2008) montrent à
partir de 191 articles que les études empiriques ne mettent pas en évidence de réelle
coordination globale. Pour notre échantillon,
Man et Burns (2006) observent l’impact et le
rôle limité des coopérations pour le développement durable dans les SC dans le cas particulier de la chaîne logistique du papier. Selon
leurs travaux, les efforts sont souvent à court
terme et modestes. Ils dépendent de la perception du public et du poids des partenaires. L’étude de cas de Harwood et Humby (2008)
révèle que la plupart des organisations se
Tableau 2 : Orientation des problématiques
2004
2005
2006
2007
2008
2009
total
environnement
5
5
5
14
16
1
46
Dont Reverse
Logistics
1
1
2
10
7
21
social
1
2
1
2
7
13
3
3
4
6
Orientation
Développement
durable
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focalisent sur un composant de la responsabilité (social, environnemental ou éthique) et
que les organisations effectuent peu de mesures et partagent peu leurs données. Dix études
de cas d’organisations américaines exemplaires sur le plan environnemental ou social de
Pagell et Wu (2009) mettent en évidence des
pratiques pour une SC durable pour moitié
issues des bonnes pratiques logistiques dans
la SC traditionnelle, et donc, non spécifiques.
Strand (2008) met en lumière l’importance de
la confiance dans la relation avec le fournisseur pour plusieurs entreprises scandinaves
réputées pour leur engagement social. Cette
dernière étude est cependant centrée non sur
le SSCM mais sur la relation entre le
fournisseur et le client.
Dans tous les cas, les études empiriques, reposant notamment sur des questionnaires, restent assez peu nombreuses et mériteraient
d’être généralisées pour tester la validité
empirique de ces concepts théoriques. Les
recherches sur le SCM et le développement
durable sont récentes ce qui explique le petit
nombre de tests empiriques ; la revue de la littérature de Seuring et Müller (2008) met en
évidence que sur 191 articles parus entre 1994
et 2007, 70 sont des études de cas (dont beaucoup de cas « réussis »), 40 des théories non
testées, 7 des revues de la littérature, 21 des
modélisations mathématiques et seulement 53
des études basées sur des questionnaires. Par
ailleurs seuls 31 articles ont un sujet à la fois
environnemental et social ; 140 ne traitent que
l’aspect environnemental. Pour notre revue de
la littérature, la répartition est donnée dans le
Tableau 3. Les approches exploratoires et les
études de cas sont les types de travaux
dominants,
mais
les
analyses
de
questionnaires semblent progresser.
Facteurs et performances
Peut-on mettre empiriquement en évidence
des facteurs explicatifs à l’intégration de
préoccupations sociales et/ou environnemen-
Tableau 3 : Types de travaux
Nature de travail
Revue de la littérature
2004
2005
2006
1
1
1
5
6
5
6
1
1
6
12
3
1
Descriptif/exploratoire
Etude de cas
1
Théorique non testé
1
Analyse de questionnaires
3
6
2008
2009
Total
4
1
8
22
1
22
2
éditorial
total
2007
10
9
3
6
5
18
1
2
3
20
29
2
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tales dans la stratégie logistique individuelle
et/ou collective? Cette intégration a-t-elle des
répercussions validées empiriquement sur la
performance et sur quelles dimensions de
cette performance? Nous allons chercher à
répondre à ces deux questions à partir des
recherches visant à déterminer les leviers (et
dans une moindre mesure les freins) de l’intégration d’objectifs environnementaux et
sociaux dans la logistique d’entreprise et les
SC, et les répercussions des pratiques en
découlant sur les performances.
Les leviers des stratégies orientées
développement durable
Existent-ils des leviers spécifiques pour la
logistique? La revue de la littérature de Seuring et Müller (2008) sur le SCM durable fait
apparaître comme facteurs déclencheurs les
pressions de la réglementation (99 articles), la
demande du consommateur (96 articles), les
parties prenantes (90 articles), les groupes de
pression (38 articles), la perte de réputation
(30 articles) ; la recherche d’un avantage
concurrentiel apparaît dans 90 articles soit
moins de la moitié des articles. Pour Seuring,
Sarkis, Müller et Rao (2008), les organisations réagissent en réaction à des pressions qui
ont un grand nombre de sources à la fois internes (employés, direction) et externes (organisations, communautés).
Pour les articles sélectionnés dans la présente
étude, les principaux facteurs explicatifs sont
également la réglementation, la recherche
d’un avantage concurrentiel, la pression des
parties prenantes mais aussi les valeurs du
dirigeant et l’innovation. La réglementation est citée par Srivastava et al (2008), Alvarez-Gil (2007), Walker et al (2008b). La
recherche d’un avantage concurrentiel et/ou
d’un processus plus efficient est un facteur
important pour Markley et Davis (2007),
Vachon et Klassen (2007), Côté et al (2008),
Srivastava (2008), Alavarez –Gil et al (2007).
Pour Ijomah et al (2007), l’étude de 11 cas
montre que la profitabilité est un facteur explicatif important dans le cas particulier du
remanufacturing (avec la réponse aux réglementations environnementales). Le rôle des
valeurs du dirigeant a été vérifié par Alavarez-Gil et al (2007) et mis en lumière dans les
études de cas de Mamic (2005), Ciliberti et al
(2008b) et Pagell et Wu (2009). Si la
recherche de performance opérationnelle est
un facteur, pour Pagell et Wu (2009, étude de
cas) la performance opérationnelle sert également de fondement au développement
durable : une pauvre performance opération-
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nelle inhibe le développement durable. Il
semble par ailleurs qu’il y ait un lien entre
innovation et développement durable mais le
sens du lien n’est pas clairement identifié
(Walker et Preuss, 2008 ; Pagell et Wu, 2009).
La pression des parties prenantes et le risque
lié à leurs réactions négatives en cas de comportement inadéquat de l’organisation est largement évoqué par les auteurs: Pagell et al
(2007), Kosabasoglu et al (2007), Alavrez-Gil et al (2007), Vachon et Klassen
(2008), Ciliberti et al (2008b), Kovacs (2008),
Walker et Preuss (2008), Srivasta (2008), Tulder et al (2009). Ces parties prenantes peuvent
être très diverses et inclure par exemple le
gouvernement, les voisins, les travailleurs, les
organismes à buts non-lucratifs (Vachon et
Klassen, 2006). Les études de cas de Walker et
al (2008 a et b) et de Simpson et al(2007) font
ressortir l’importance des clients et celles de
Pagell et Wu (2009) le partage des valeurs
avec les employés.
Les parties prenantes n’ont pas toutes le
même poids : l’étude de 118 questionnaires
adressés à des industriels espagnols liés à
l’automobile d’Alvarez-Gil et al (2007)
montre que pour l’implantation d’une logistique « inversée », les clients, les employés et
le gouvernement ont plus d’impact que les
actionnaires mais les études de cas de Kovacs
(2008) révèlent un impact limité de la pression du client final sur le choix des fournisseurs critiques. Les parties prenantes
influentes varient donc en fonction des études : clients, salariés, encadrement intermédiaire, organisations diverses, actionnaires,
concurrents. Concernant le rôle des fournisseurs, le test de Simpson et al (2007) sur 56
questionnaires issus de l’industrie automobile
australienne ne met pas en évidence de lien
significatif entre l’implication du fournisseur
et la performance environnementale par rapport aux attentes du client mais l’investissement peut modifier ce lien. Des facteurs
peuvent jouer un rôle d’intermédiation de
l’influence de ces parties prenantes, comme la
formation, la capacité d’apprentissage
(Mamic, 2005).
Des études empiriques de notre échantillon il
ressort donc que les parties prenantes sont
diverses, plus ou moins influentes et que cette
influence peut dépendre de variables médiatrices.
La plupart du temps, un seul facteur ne
déclenche pas à lui seul de changement stratégique. Les facteurs sont généralement combinés, mais leur assemblage varie d’une étude à
une autre. Harwood et Humby (2008), par le
biais d’études de cas, mettent en avant la réputation, les pressions politiques et la motivation
du personnel. Wlaker et al (2008) citent
comme facteurs possibles du SCM environnemental l’engagement personnel des individus
(dont les propriétaires et les fondateurs), l’implication des cadres, des employés, la volonté
de réduire les coûts, d’améliorer la qualité, la
législation (même si la recherche de conformité ne garantit pas une meilleure performance), la pression des clients, des
concurrents et de leurs éventuelles innovations, de la société. Les fournisseurs ne sont
en général pas une force directe. A côté de ces
facteurs, ils citent des freins comme les coûts,
le manque de légitimité, le faible engagement
des fournisseurs, la réglementation, des barrières spécifiques à l’industrie concernée.
Leurs études de cas confirment la variété des
facteurs et des barrières. Carter et Jennings
(2004) montrent à partir de 201 questionnaires que les achats responsables (par rapport à
l’environnement, la diversité, le respect des
droits de l’homme, la sécurité et la philanthropie) s’expliquent directement et indirectement via la culture organisationnelle par le
leadership de la direction, par les valeurs des
employés (via leurs initiatives) et par la pression du client. L’impact de la réglementation
et de la taille n’est pas significatif. Le test a été
répété en 2008 par Salam sur 197 questionnaires à des sociétés Thaïlandaises. Selon cette
dernière étude, les achats socialement responsables sont liés positivement au leadership de
la direction, à la culture organisationnelle, aux
valeurs des employés, à leurs initiatives mais
aussi à la réglementation et aux pressions des
clients.
Ces facteurs peuvent non seulement expliquer
l’orientation stratégique mais aussi déterminer sa réussite. Ainsi pour Miemczyk (2008)
les facteurs de succès d’une logistique
inversée sont les facteurs externes (réglementation, pression des clients) et internes ( ils
dépendent alors de la politique des entrepreneurs) ; à ces facteurs on peut ajouter l’implication des parties prenantes, le soutien de la
direction, la pro-activité. Dans le cas particulier de la logistique inversée, il faut ajouter le
rôle joué par la qualité des inputs, le degré de
coordination verticale ; enfin l’auteur ajoute
des capacités spécifiques (comme le démontage, la refabrication), le mimétisme en cas
d’incertitude. Les pressions peuvent apparaître également comme sources de contraintes en limitant les processus et passent alors du
statut de facilitateur à celui de barrière. Pour
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Logistique & Management
13 - Rubinstein, 2006, Le
développement de la responsabilité
sociale de l’entreprise, une analyse en
termes d’isomorphisme institutionnel,
Revue d’Economie Industrielle, n°113,
pp 83-105; Scholtens et Zhou, 2008,
Stakeholder Relations and Financial
Performance, Sustainable
Development, n°16, pp 213-232
;Weber, 2008, The Business case for
Corporate Social Responsibility : a
Company-Level Measurement
Approach for CSR, European
Management Journal, n° 26, pp
1123-1140 ; Semenova et Hassel, 2008,
Financial Outcomes of Environmental
Risk and Opportunity for US
Companies, Sustainable Development,
n° 16, pp 195-212
14 - Barnett, 2007, Stakeholder
Influence Capacity and the Variability
of Financial Returns to Corporate
Social Responsibility, Academy of
Management Review, vol 32, n°3, pp
794-816 ; Boiral, 2005, Concilier
environnement et compétitivité, ou la
quête de l’éco-efficience, Revue
Française de Gestion, n° 158, pp
163-186 ; Campbell, 2007, Why would
corporations behave in socially
responsible ways? An Institutional
Theory of Corporate Social
Responsibility, Academy of
Management Review, vol 32, n°3, pp
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A Corporate social
performance-corporate financial
performance behavioral model for
consumers, Academy of Management
Review, vol 31, n°3, pp 540-558 ; Hull
et Rothenberg, 2008, Firm
Performance: the Interactions of
Corporate Social Performance with
innovation and industry differentiation,
Strategic Management Journal, vol 29,
pp 781-789 ; Kacperczyk, 2008, With
greater Power comes greater
Responsibility? Takeover protection
and corporate attention to
Stakeholders, Strategic Management
Journal, DOI:10.1002/smj.733
15 - Boiral, 2005;Campbell, 2007 ;
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Dichotomy : the Curvilinear
relationship between Social
Responsibility and Financial
Performance, Strategic Management
Journal, vol 27, pp 1101-1122;
Brammer et Millington, 2008, Does it
pay to be different? An Analysis of the
relationship between corporate social
and financial performance, Strategic
Management Journal, vol 29,
pp 1325-1343
16 - Rubinstein, 2006;Gabriel et
Gabriel, 2007, Diffusion du
développement durable dans le monde
des affaires, un schéma conventionnel,
Revue Française de Gestion, n° 152,
pp 199-213 ; Bollecker, 2007, Vers des
systèmes de mesure des performances
sociétales, l’apport des conventions,
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pp 89-102 ; Bansal, 2005, Evolving
Sustainability : a Longitudinal Study of
Corporate Sustainable Development,
Strategic Management Journal, vol 26,
pp 197-218
les supply chains fermées, la conception doit
par ailleurs prévoir un démontage facile ; il est
donc important d’intégrer la vie entière du
produit dans son analyse (Ijomah et al, 2007).
Si les auteurs travaillent sur des facteurs similaires à ceux de la RSE, la recherche en logistique n’est pour autant pas le simple miroir de
la recherche en gestion. L’intégration de la
chaîne logistique et le SCM peuvent également faire levier ou barrage à l’orientation
vers un développement plus durable de la stratégie des entreprises. La structure de la SC
influence les pratiques orientées développement durable. Si l’on prend le cas du management environnemental, des SC différentes (en
fonction notamment de la différenciation des
liens structurels et de la complexité de l’alliance) combinées à des stratégies environnementales différentes (stratégie orientée crise,
ou processus ou marché) induisent des
besoins d’informations différents pour le
management environnemental et donc des
formes différentes de SCM environnemental
(Hagelaar et van der Vorst, 2004). L’intégration fonctionnelle et l’orientation de la supply
chain ont des répercussions sur le processus
de gestion des retours (Mollenkopf et al,
2007). L’étude de 84 questionnaires (dans le
secteur de l’imprimerie) de Vachon et Klassen
(2006) montre un lien positif entre l’intégration logistique et la collaboration environnementale en amont, un lien positif entre
l’intégration technologique et la collaboration
environnementale en amont et en aval ; une
base fournisseur plus restreinte accroît également la collaboration environnementale.
Inversement, pour Ellram et al (2008), l’avantage concurrentiel découlant d’une orientation stratégique plus responsable est
conditionné par l’intégration de la chaîne
logistique. Une production responsable par
rapport à l’environnement passe par la double
intégration des produits et des processus ; l’intégration supplémentaire de la chaîne logistique permet d’obtenir un avantage
concurrentiel. Pour les SC inversées, la gestion de la relation est un facteur encore plus
important que pour les SC traditionnelles
(Ostlin et al, 2008). La modularité des processus a également une influence sur la pertinence de la logistique inversée (Fernadez et
Kekäle, 2005).
Les leviers sont donc en partie les mêmes que
ceux mis en évidence par les autres recherches
en sciences de gestion. On retrouve l’importance de la réglementation, la recherche d’une
meilleure performance opérationnelle par la
diminution entre autres des gaspillages, l’im-
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portance des parties prenantes, mais aussi les
valeurs du dirigeant. Mais l’intégration et le
SCM peuvent eux-mêmes faire office de
leviers. Il conviendrait cependant de continuer les tests empiriques, les résultats étant
pour l’instant difficilement comparables
d’une étude à une autre du fait de la diversité
des variables prises en compte.
L’impact sur les performances
En sciences de gestion, trois théories expliquent le lien entre responsabilité sociale et
performances : la responsabilité sociale de
l’entreprise se limite à faire des profits (Friedman, 1970) ; la responsabilité sociale améliore les processus de l’entreprise et/ou
permet d’obtenir un avantage concurrentiel ;
la responsabilité sociale de l’entreprise améliore l’évaluation faite par les parties prenantes et diminue le risque de réactions négatives.
Même si le lien paraît être le plus souvent
positif, les résultats empiriques varient beaucoup d’une étude à une autre13 ; cette variation
peut s’expliquer par la complexité du lien14
ou sa non linéarité qui est en partie vérifié15.
Pour d’autres auteurs la Responsabilité
Sociale de l’Entreprise est un mode de coordination alternatif au marché et à la hiérarchie
qui se justifie en fonction du degré d’incertitude, et qui résulte d’un isomorphisme institutionnel16. Qu’en est-il du lien entre une
logistique ou une SC orientée développement
durable et les différentes performances de la
chaîne logistique ?
Des études de notre échantillon il ressort que,
comme pour la revue de la littérature de Seuring et Müller (2008), le lien entre un SCM
orienté vers un développement plus durable et
la performance est le plus souvent positif,
mais que la plupart des études sont partielles.
La dimension sociale est souvent ignorée au
profit de la seule dimension environnementale. L’étude se limite généralement aux dyades. La performance est une performance
perçue (Rao et Holt, 2005 ; Pagell et al, 2007 ;
Markley et Davis, 2007 ; Philipp, 2007 ;
Matos et Hall, 2007 ; Kovacs, 2008 ; Harwood
et Humby, 2008 ; Pagell et Wu, 2009).
La significativité des modèles augmente
lorsque sont introduites des variables
intermédiaires, comme le temps, la capacité
d’apprentissage organisationnelle, l’environnement, le sens amont ou aval du SSCM.
Richey et al (2004) ont étudié l’impact de la
logistique inversée sur la réactivité, la qualité
et la performance économique à partir de 118
questionnaires. L’impact est positif pour les
premières entreprises d’une industrie à
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implanter une logistique inversée et négatif ou
nul pour les dernières. L’avantage concurrentiel semble donc limité aux pionniers. Carter
(2005) a montré l’impact indirect de la responsabilité sociale des achats sur la performance, via l’apprentissage organisationnel, à
partir de 201 questionnaires adressés à des
responsables des achats de sociétés américaines de production de bien de consommation.
L’avantage concurrentiel apparaît donc également conditionné par la capacité d’apprentissage organisationnelle. Pagell et al (2007) ont
montré à partir de 103 questionnaires de
sociétés taïwannaises ou américaines qu’un
environnement dynamique favorisait l’investissement dans le management environnemental source de performance (surtout pour la
réactivité) et de développement durable alors
qu’un environnement hostile favorisait plus
l’investissement dans la relation fournisseur
source également de performance et de développement durable. La nature de l’environnement induit donc la forme du SSCM la plus
profitable. L’étude de 84 questionnaires de
Vachon et Klassen (2008) auprès de sociétés
canadiennes et américaines imprimant des
emballages montre que la collaboration environnementale améliore la qualité, la flexibilité et diminue les délais. Ils n’ont cependant
pas trouvé d’impact significatif sur les coûts.
En amont l’incidence se fait plus ressentir sur
les processus et en aval sur les produits. L’impact dépend donc de la dimension de la performance prise en compte et de l’orientation
amont ou aval du SCM. Rao et Holt (2005) ont
montré à partir de 52 questionnaires (de sociétés des Philippines, d’Indonésie, de Malaisie,
de Thaïlande, ou de Singapour) le lien direct
entre la logistique amont verte (greening
inbound) et la performance économique augmenté d’un lien indirect via la logistique aval
(greening outbound) et la compétitivité, plus
un lien indirect pour un processus de production vert (greening production).Le lien entre
logistique verte et performance est donc bien
un lien complexe et asymétrique.
Pour la Chine, Zhu et Sarkis (2004) ont montré à partir de 186 questionnaires l’impact
positif des pratiques vertes du SCM sur la performance écologique et de façon plus nuancée
sur la performance économique. Ce lien est
d’autant plus fort qu’il existe un système de
management de la qualité. Le JAT a un effet
négatif sur ce lien. L’orientation du SCM a
donc bien des répercussions sur les performances du SSCM. L’analyse de 314 questionnaires par Zhu, Sarkis et Geng (2005) montre
des disparités sectorielles. L’examen de 286
questionnaires
pour
quatre
secteurs
(Chimie/pétrôle,
électricité/électronique,
automobile, énergie) fait apparaître des différences de pratiques et des différences de performance en partie expliquées par des niveaux
d’implantation différents de GSCM (Zhu,
Sarkis et Lai, 2007). Le secteur automobile a
fait l’objet d’une étude particulière (89 questionnaires) montrant une implantation relativement faible du GSCM induisant une
amélioration de la performance environnementale et opérationnelle mais pas d’amélioration significative de la performance
économique. On retrouve ici l’écart entre les
pionniers et les suiveurs, mais uniquement
pour les performances environnementales et
opérationnelles. L’étude de cas montre par ailleurs un lien entre GSCM et innovation. La
disparité sectorielle apparaît de nouveau lors
de l’analyse de 314 questionnaires par Zhu,
Sarkis et Lai (2008a). L’étude de Zhu et al
(2008c) des mêmes questionnaires montre
l’impact positif de l’apprentissage organisationnel, du soutien de la direction et de la pression sectorielle des coûts sur les pratiques
GSCM. On retrouve donc l’impact de l’apprentissage organisationnel mis en évidence
par Carter(2005) et le rôle de l’environnement
de Pagell et al (2007).
Il semble donc qu’une logistique ou un SCM
orienté développement durable, surtout pour
la composante environnementale, améliore la
performance environnementale et en partie la
performance opérationnelle (délais, qualité,
flexibilité, réactivité), mais l’incidence sur la
performance économique est plus complexe
et dépend entre autres de facteurs comme le
temps, l’environnement, l’orientation et le
sens du SCM.
Conclusion
La présente revue de la littérature confirme la
pertinence de la recherche en logistique
appliquée au développement durable et la pertinence de la recherche sur le développement
durable, appliquée en logistique. L’intégration d’objectifs à la fois environnementaux et
sociaux aux objectifs économiques traditionnels des entreprises, l’intégration des parties
prenantes et des flux retours change profondément la nature de la chaîne logistique, qui
devient plus complexe et intégrée. L’approche
logistique du développement durable permet
de mieux comprendre la responsabilité
étendue de l’entreprise avec sa diffusion le
long de la chaîne logistique et la logistique
inversée permet l’intégration de l’analyse du
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cycle de vie dans les prises de décisions. Il
conviendrait néanmoins de poursuivre les études empiriques pour mieux cerner les caractéristiques de cette diffusion qui ne semble pas
obéir aux mêmes règles vers l’amont et vers
l’aval.
Même si globalement la recherche de durabilité est compatible avec l’amélioration de certains indicateurs de performances, la
recherche doit encore être approfondie pour
comprendre les écarts entre les résultats pour
l’instant observés. Il manque encore une analyse globale de la performance tenant compte
de la chaîne logistique, et des analyses basées
sur des critères objectifs de performance.
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Logistique & Management
Comment rendre l’e-logistique plus verte ?
Bruno DURAND
Maître de Conférences en Sciences de Gestion, Université de Nantes, (LEMNA – EA 4272)
[email protected]
Au cours de cet article, nous souhaitons tout d’abord montrer que la vente en ligne
et, plus particulièrement, que l’épicerie en ligne connaissent un essor significatif en
France. Nous voulons ensuite souligner que ces développements ne peuvent plus
s’envisager, notamment du point de vue de la logistique, en dehors de démarches
environnementales. Sans délaisser le volet économique, notre travail de recherche
a donc pour objectif de souligner les enjeux écologiques de l’e-logistique. Ainsi,
après avoir rappelé la mutation récente du modèle logistique de base de la
cyber-épicerie française, nous élargirons notre analyse à d’autres secteurs
d’activité de la vente en ligne (le floral et l’éditorial), secteurs au sein desquels les
prestataires de services logistiques (PSL) jouent un rôle majeur. Cette démarche
nous permettra, au final, de présenter les conditions que la livraison des
commandes en ligne doit progressivement remplir si elle souhaite demain
s’inscrire dans une perspective plus verte.
Le dernier rapport de la GCI (Global Commerce Initiative), institution internationale
qui rassemble à la fois de grands distributeurs
(comme Auchan, Carrefour, Tesco…) et des
industriels reconnus (tels que Coca-Cola,
Nestlé, Procter & Gamble…), montre que la
livraison à domicile (LAD) et que les commerces de proximité sont appelés à progresser
sensiblement dans un univers où le commerce
en ligne devrait s’affirmer (Georget et al,
2008). La LAD pourrait ainsi représenter
entre 15 et 25% du commerce total en 2016.
C’est donc sur ce point précis que nous avons
choisi de centrer notre article, en nous intéressant plus précisément aux conditions qui
devraient permettre à la livraison des commandes en ligne de s’inscrire dans une
démarche écologique. En effet, ne risque-t-on
pas d’assister, si rien n’est entrepris, à un
développement anarchique et, peut-être dans
ce cas, éphémère de la LAD ? N’a-t-on pas
intérêt à favoriser des scénarios qui garantiraient l’optimisation de la distribution finale
(c’est-à-dire celle du dernier kilomètre) à travers des opérations de mutualisation confiées
à des prestataires de services logistiques
(PSL) ?
Notre article se fixe donc comme objectif de
mettre en évidence les stratégies et les scénarios logistiques que le développement du
BtoC impose. Nous avons délibérément fait le
choix de nous concentrer sur le volet transport, dans la mesure où ce dernier est le principal facteur d’émission de gaz à effet de serre
(GES). Il s’agit ainsi, pour nous, d’esquisser
une vision prospective ancrée dans des réalités opérationnelles et de poser les bases de
nouvelles formes d’e-supply chains, plus vertes, ouvrant des perspectives au-delà du « fac-
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teur 2,5 » de réduction des émissions de
carbone. L’objectif visé tient en effet dans l’amélioration de la performance écologique,
c’est-à-dire clairement dans la réduction de
l’écart par rapport au « facteur 4 ».
Au cours de l’article, nous souhaitons tout d’abord souligner le développement significatif de
l’épicerie électronique en France. Nous rappellerons également, dans cette première partie,
les caractéristiques des deux modèles de base
de la logistique du BtoC : la préparation de
commandes sur site dédié (entrepôt ou dépôt)
et la préparation en magasin. Nous y mentionnerons bien sûr les choix stratégiques effectués
par les cyber-épiciers français. Puis, au cours
d’une deuxième partie, nous élargirons notre
regard à d’autres secteurs d’activité de la vente
en ligne, celui des produits floraux et celui des
produits éditoriaux. Nous serons ainsi amené à
montrer le rôle joué par les PSL : absents de
certains scénarios de la cyber-épicerie, les PSL
occupent pourtant, et généralement, une place
de choix au sein des alternatives logistiques du
BtoC. La performance logistique du commerce
électronique, en particulier celle de la livraison
des commandes, est en effet plus à mettre au
crédit des PSL choisis, il est vrai, par le commerçant en ligne que sur le compte de ce dernier. Du fait des difficultés rencontrées lors des
opérations classiques de LAD, nous nous intéresserons en priorité aux acteurs clés de la LHD
(livraison hors domicile), une alternative qui
connaît un très fort développement à l’heure
actuelle. Nous serons enfin amené à préciser
conditions qui devraient permettre à l’e-logistique de s’inscrire demain dans une démarche
plus respectueuse de l’environnement.
Quand la cyber-épicerie tente les
plus hésitants…
Après des débuts hésitants, la croissance du
BtoC connaît désormais un rythme soutenu en
France : son chiffre d’affaires devrait dépasser, selon la Fevad (Fédération de la vente à
distance), les 45 milliards d’euros en 2012.
Sur certains segments de marché (culture,
voyages, informatique, habillement…), près
de 50% des achats se font déjà en ligne, et sur
d’autres (hygiène, équipement de la maison…), le e-commerce enregistre une progression régulière, y compris dans le secteur
délicat de la cyber-épicerie.
La cyber-épicerie française : l’arrivée des
groupements d’associés
Commençons par rappeler que les premiers
cybermarchés français ont été créés, dès la fin
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des années 90, sous l’impulsion des enseignes
du commerce intégré : Auchandirect pour
Auchan, Ooshop pour Carrefour, Houra pour
Cora, Cmescourses pour Casino et Telemarket
pour les Galeries Lafayette. Le démarrage de
l’épicerie en ligne fut, cependant, relativement
difficile en France : cela ne fait finalement que
quelques mois que les taux de rentabilité des
pionniers de la cyber-épicerie sont en effet
devenus positifs. En 2008, le résultat net
d’Ooshop se situait encore à – 14 millions
d’euros pour un chiffre d’affaires de 73 millions, quand celui d’Houra était proche de zéro
pour un chiffre d’affaires de 80 millions (Ranvier et Sury, 2009). Toutes les initiatives ne
furent donc pas couronnées de succès, bien au
contraire, ce qui amena certains distributeurs,
comme le stéphanois Casino, à renoncer prématurément à leur projet.
Aujourd’hui, l’épicerie en ligne semble être
entrée dans une nouvelle ère, comme le pressentait Chétochine (2005). Toutes les enseignes de la grande distribution française même
les plus hésitantes, c’est-à-dire celles du commerce associé, ont finalement hoisi de s’y
positionner. C’est ainsi le cas d’Intermarché
avec son site Expressmarché et de Système U
via CoursesU. C’est même le cas, de manière
plus mesurée cependant, du mouvement
Leclerc avec son cybermarché Expressdrive.
D’autres, encore, font leur retour comme
Casino qui a complètement revu sa stratégie
logistique, point sur lequel nous reviendrons.
La cyber-épicerie connaît, par conséquent, un
certain développement : en décembre 2008,
une enquête conduite par Médiamétrie et la
Fevad estimait à 10% la proportion de consonautes ayant fréquenté le « Top 5 » des cybermarchés français, « Top 5 » composé
d’Ooshop, d’Auchandirect, d’Houra, de Télémarket et d’Expressmarché. Quelle explication pouvons-nous donner à cette progression
de la cyber-épicerie française ?
Revenons, pour cela, à la place que tient la
logistique dans la stratégie des sites marchands. Pour Dornier et Fender (2001), la
logistique est vraiment clé dans le succès (ou
l’échec) des ventes en ligne : elle fait partie de
la transaction. Pourtant, son statut reste
secondaire : quand le consonaute reçoit sa
commande en ligne dans les conditions prévues, il n’y a en effet aucune raison de s’y
attarder. En revanche, quand la performance
logistique laisse à désirer, cela peut être rédhibitoire quant à la poursuite des achats sur le
site fréquenté. En même temps, comme le
soulignent Baglin et al (2005), il y a quasiment autant d’e-logistique que de familles de
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produits. Dans le cadre de l’épicerie en ligne
par exemple, la préparation et la livraison des
produits, aux marges faibles et aux contraintes fortes (encombrement, poids…), nécessite
la mise en œuvre de solutions relativement
performantes. Ainsi, concernant plus précisément la préparation des commandes en ligne,
deux modèles principaux se détachent
aujourd’hui : (1) celui de la préparation sur un
site dédié, soit en amont, sur un entrepôt
régional, ou soit en aval, sur un dépôt de
proximité ; (2) celui de la préparation en
magasin. Détaillons ces alternatives logistiques majeures en prenant soin d’y préciser les
choix stratégiques effectués par les cyber-épiciers français.
La préparation des commandes
sur entrepôt ou sur dépôt
Le stockage sur un site dédié au BtoC, qu’il
s’agisse d’un entrepôt ou d’un dépôt, paraît
une nécessité dès quele nombre de références
du catalogue électronique est élevé et/ou dès
que l’activité en ligne n’est plus marginale
(De Koster, 2002). Trois alternatives sont
envisageables : (1) le stockage de produits à
faible rotation en amont du canal de distribution, sur un entrepôt de fournisseur ; (2) le
stockage d’articles à forte rotation plus en
aval, sur un entrepôt régional dédié à l’épicerie en ligne et piloté par un distributeur ou
bien par un PSL (Abbad et Boissinot, 2009) ;
(3) le stockage d’articles à forte rotation très
en aval, sur un dépôt de proximité dédié à la
cyber-épicerie et géré par le distributeur.
Précisons que la première alternative, celle de
la préparation sur un entrepôt « producteur »,
comporte plusieurs variantes (Durand, 2009).
Limitons nous à celle qui permet de minimiser
le nombre de LAD. L’internaute passe une
commande de plusieurs lignes sur un site marchand. Le cybercommerçant, qui ne joue alors
qu’un rôle d’infomédiaire, la fait suivre aux
producteurs concernés. Ces derniers en effectuent la préparation avant de remettre leurs
colis à un PSL dans le but d’éviter des livraisons multiples. Un regroupement des colis par
client est ensuite réalisé. fois assemblée, la
commande part immédiatement pour être
livrée au cybernaute. La recherche de l’unicité
de la LAD fait incontestablement de cette
variante la plus économique et la plus écologique.
Ajoutons que cette première alternative n’est
pas développée en cyber-épicerie. L’une des
raisons tient dans la caractéristique majeure
des catalogues électroniques des cybermarchés : l’offre y est particulièrement réduite
(quelques milliers d’articles en ligne contre
quelques millions dans l’éditorial). Ainsi, les
produits d’épicerie, qui sont essentiellement
des produits à forte rotation, sont stockés en
aval du canal de distribution sur des sites
dédiés au distributeur, gérés en propre
(comme les dépôts de proximité) ou bien délégués (comme certains entrepôts à vocation
régionale). Concernant la livraison finale, on
note également deux variantes, selon que la
LAD est déléguée ou internalisée (cf.
figure 1).
Dans un premier temps, les enseignes de la
distribution intégrée ont toutes fait le choix,
en ce qui concerne la préparation de leurs
commandes en ligne, de s’appuyer sur des
entrepôts dédiés (warehouse-picking), nationaux ou régionaux, et donc de s’engager dans
des investissements spécifiques, souvent
lourds. A cette première difficulté financière
s’en est ajoutée une deuxième : les sites de
préparation étant peu nombreux, une couverture nationale n’était pas très aisée à mettre en
œuvre. Cora a ainsi réduit celle d’Houra, ne
conservant qu’un département sur quatre. A
l’inverse, Télémarket, le cybermarché initialement francilien, a choisi de se déployer sur
une bonne partie du territoire national par le
biais de Chronopost. De son côté et dans le
cadre de son extension territoriale, Auchan
qui s’appuie pour son site Auchandirect sur
six entrepôts régionaux, implantés dans de
grandes agglomérations, a opté pour la différenciation de ses circuits de distribution.
Auchan a ainsi développé un concept, unique
et original, celui du Chronodrive. Il s’agit de
dépôts de proximité, dédiés uniquement au
stockage et à la préparation d’articles référencés au catalogue électronique, d’où le nom de
depot-picking par analogie au warehouse-picking. Les internautes viennent y retirer et
Figure 1 : Stockage et préparation en aval sur des dépôts
de proximité dédiés, la LAD étant assurée par le distributeur
Source : adapté de Chopra et Meindl (2004)
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régler leurs commandes (se reporter à l’encadré 1), sans pour autant y pénétrer. A ce jour,
une vingtaine de sites fonctionnent en France.
Cette alternative permet de contourner le très
délicat problème de la LAD et c’est sans doute
pour cela qu’Auchan s’est fixé de parvenir à
100 sites d’ici peu (Silly, 2008).
La préparation des commandes en magasin
(ou store-picking)
Ce n’est que depuis peu de temps (depuis
2004), que le store-picking se développe en
France. Dans ce deuxième modèle, les produits sont toujours stockés chez des distributeurs mais, en revanche, tout en aval du canal
de distribution. Les cybercommerçants, qui
optent pour l’adossement à un réseau de
magasins, font le choix d’un processus rapidement opérationnel. Ce modèle repose sur le
fait que la commande en ligne est transmise au
magasin de l’enseigne le plus proche d’un lieu
de vie du consonaute : nous sommes d’emblée
dans les derniers kilomètres. Un préparateur y
prélève ensuite les articles en rayons et, une
fois le panier constitué, la livraison est réalisée
par le commerçant lui-même ou par un PSL
(Hiesse, 2009). Utilisant des infrastructures
déjà existantes, la préparation en magasin se
caractérise par un ROI rapide. Le store-picking possède un autre atout : l’internaute peut
opter pour le retrait de son papier directement
en magasin. Ce modèle comporte un inconvénient quand le volume des commandes est respectable : celui de la perturbation des clients
traditionnels par des préparateurs en activité.
Face à un risque éventuel de fuite de clientèle,
Ogawara et al (2003) suggèrent d’adopter
alors la préparation en entrepôt ou en dépôt.
1 - http://www.expressdrive.fr
Revenons sur l’alternative du retrait qui n’en
finit plus de séduire. Comment parvenir effectivement à une maîtrise des coûts logistiques
alors même que le développement de la LAD
devrait entraîner une hausse des coûts de
Encadré 1 : Chronodrive, l’alternative du depot-picking
Le site permet de passer commande parmi 5.000 produits alimentaires courants. La
commande peut se faire plusieurs jours à l’avance mais il est également possible de
retirer ses achats sans passer commande au préalable, grâce à des bornes interactives présentes sur le parking. La possibilité de passer commande immédiatement réduit cependant le choix de produits.
La zone de préparation et de retrait des commandes (intégrant l’accès des véhicules)
s’étend sur environ 4.000 m². Elle comprend un dépôt et une aire de préparation de
1.500 m². Au moment du retrait, le client valide sur une borne interactive sa référence client correspondante au compte créé sur le site et à la commande à retirer.
Un ticket de caisse est alors imprimé. Il indique au client à quelle place de parking se
stationner. Un livreur charge le coffre du véhicule quelques minutes plus tard. La
clientèle-type est familiale, motorisée et elle réside à environ dix minutes du site.
Source : actualisé de Durand et Senkel (2007)
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transport ? L’équation ne semble vraiment pas
simple à résoudre. De plus, la généralisation
de la LAD ne risque-t-elle pas d’accroître l’émission des GES ? Un certain nombre de distributeurs, dubitatifs face à la rentabilité du
modèle de l’entrepôt et face, plus encore, aux
contraintes de la LAD qu’il impose, a ainsi
préféré attendre pour finalement adopter le
store-picking dans la mesure où ils pouvaient
s’adosser sur des réseaux existants de magasins. Il n’est sans doute pas inutile de rappeler
ici que la LAD des produits alimentaires constitue une réelle difficulté pour peu que ces derniers soient frais ou surgelés, difficulté qui
s’aggrave bien entendu quand le consonaute
est absent au moment de la livraison. L’option
du retrait en magasin, rendue possible par le
deuxième modèle, a convaincu les distributeurs les plus hésitants, et en particulier les
trois groupements français du commerce
associé.
Intermarché en constitue incontestablement
le meilleur exemple. C’est en effet sur 400
supermarchés implantés dans 70 départements qu’Expressmarché, le site d’épicerie en
ligne du Groupement des Mousquetaires,
peut désormais s’appuyer. Intermarché
semble ainsi vouloir tirer parti du maillage de
son réseau de supermarchés : un magasin tous
les 18 km. Si la prestation offerte autorise la
LAD, Expressmarché propose également
deux alternatives de retrait : le retrait en magasin et le drive, cette dernière formule dispensant l’internaute de descendre de son véhicule
(la commande est directement chargée dans le
coffre). Du côté de Système U, le site d’épicerie électronique Coursesu s’appuie sur
environ 250 points de vente. La stratégie du
distributeur vendéen reste, cependant, avant
tout axée sur la fréquentation de ses magasins par les consommateurs. La formule du
retrait y est donc, de loin, privilégiée à celle de
la LAD. Quant au mouvement Leclerc, l’épicerie en ligne semble s’y développer plus par
résignation que par réelle conviction : une
vingtaine d’hypermarchés1 s’est lancée, mais
la LAD ne fait pas partie de la prestation proposée (le drive est la seule alternative).
Les commerçants associés ne sont plus les
seuls, désormais, à miser sur le modèle de la
préparation en magasin. Fervent partisan du
warehouse-picking, Carrefour a ainsi choisi
de s’adosser à des magasins de Nantes ou de
Bordeaux dans le cadre du développement de
son cybermarché sur l’Ouest de la France.
Carrefour expérimente également, en région
parisienne, des points de « prêt-à-emporter »
distincts de ses magasins. Monoprix (filiale
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des Galeries Lafayette), Franprix-Leader
Price et Casino, dont c’est le grand retour,
ont eux aussi choisi de s’adosser à leurs
réseaux de magasins : Monoprix pourrait, de
ce fait, s’appuyer sur un réseau de 300 supermarchés de centre ville ; Coursengo, le
cybermarché de Franprix-Leader Price, se
cantonne à ce jour uniquement sur Paris (50
points de vente) ; Monsupercasino, le cybermarché de Casino, devrait quant à lui bénéficier à terme de l’entropie relative du réseau le
plus capillaire des distributeurs français
(3000 magasins).
Force est donc de constater que le store-picking, longtemps dénigré par les cyber-épiciers français, constitue désormais une
alternative bien présente qui semble d’ailleurs accélérer le développement de la
cyber-épicerie en France. A cela, deux raisons : si la première est financière (ROI plus
rapide qu’en warehouse-picking), la
deuxième raison se veut plus pratique. La
LAD se heurte, en effet, en France au fait
que les consonautes ne sont pas équipés de
boîtes de réception inattendue2, concept
plus répandu au Royaume-Uni et dans le
nord de l’Europe. La conséquence est sans
appel : 30% des LAD échouent parce qu’il
n’y a personne au moment du passage du
livreur (Botella, 2008). Aussi, quand la
LAD peut tenir de l’exploit, inciter l’internaute à pratiquer le retrait en magasin présente un avantage économique certain pour
le cyber-épicier.
Le store-picking constitue donc bien la preuve
s’il en était besoin, que le commerce en ligne
ne signe pas la mort du point de vente. Au contraire, la mobilisation des magasins peut constituer un précieux support à la Net-logistique.
Les cyber-épiciers semblent l’avoir tous compris, rejoignant en cela l’étude du CREDOC
qui montre que les magasins de proximitésemblent les mieux placés pour l’épicerie en
ligne (Pouquet, 2001). Soulignons encore à
travers ces deux modèles de base, modèles qui
font d’ailleurs toujours l’objet de travaux académiques (Marouseau, 2007), le cheminement croisé des acteurs britanniques et
français. La préparation sur site dédié ne s’est
ainsi imposée aux distributeurs anglais, et en
particulier à Tesco, qu’au moment où les
cyber-épiciers français, qui l’avaient initialement adoptée, commençaient à l’inverse à
recourir au store-picking. La tendance à
l’hybridation des modèles est de ce fait
aujourd’hui très perceptible.
Pas d’e-logistique verte
sans mutualisation
Au cours de la première partie, nous nous
sommes concentré sur les modèles de préparation de commandes mobilisés par les
cyber-épiciers français. Nous y avons notamment évoqué les alternatives de remise des
commandes en ligne : la LAD et les deux formes dédiées de retrait, en magasin et en dépôt
de proximité. En fait, notre recherche exploratoire s’inscrit dans une démarche beaucoup
plus large, qui englobe également le secteur
floral et le secteur éditorial. C’est pourquoi,
dans la suite de l’article, nous ne nous limiterons plus au seul domaine de l’épicerie en
ligne, un domaine pourtant très riche du point
de vue logistique mais qui ne permet pas, malgré tout, d’apprécier à sa juste mesure le rôle
croissant que les PSL sont amenés à jouer
dans la logistique du B to C.
Les PSL : une implication variable au sein
des logistiques du BtoC
Afin de dresser un état de l’art partiel de
l’e-logistique française, nous avons adopté
une méthodologie de recherche (se reporter à
l’encadré 2), au cours de laquelle nous nous
sommes donc intéressé à trois secteurs d’activités de la vente en ligne : le floral, l’éditorial
et la cyber-épicerie. Cette revue logistique
nous a permis de constater que les e-supply
chains étudiées s’appuient bien souvent sur
des organisations issues de l’ancienne économie, initiées dans certains cas par la VPC
(Vente Par Correspondance), qui intègrent
déjà un certain nombre de préoccupations
actuelles en matière de logistique urbaine.
Nous y avons noté que l’implication des PSL
y est vraiment très variable : d’inexistante
Encadré 2 : Méthodologie de recherche
La démarche mobilisée est de nature qualitative. Elle s’est déroulée en deux temps
forts. Lors d’une première étape, nous avons entrepris une recherche documentaire,
à la fois académique à travers des articles de référence tirés principalement de Logistique & Management, de la Revue Française de Gestion Industrielle et de Décisions
Marketing, mais aussi managériale grâce à des témoignages d’acteurs de premier
plan parus dans Logistiques Magazine ou dans Stratégie Logistique. Cela nous a permis de dégager les premières caractéristiques logistiques des cybercommerces français. Puis, au cours d’une deuxième étape, nous avons conduit 16 entretiens
semi-directifs auprès d’acteurs de la vente en ligne (cybercommerçants et e-PSL).
Ces entretiens, menés en face à face et d’une durée moyenne d’une heure trente, se
sont déroulés avec des responsables logistiques ou des supply chain managers : 3
ont eu lieu dans le secteur floral (Interflora, Aquarelle et Bebloom), 2 dans l’éditorial
(Fnac et Alapage), 9 dans l’alimentaire auprès des 7 grands distributeurs (Carrefour,
Auchan, Cora, Les Galeries Lafayette, Intermarché, Système U et Leclerc). Les deux
derniers entretiens se sont déroulés en compagnie de directeurs de La Poste et du
PDG de Kiala. Matériau de base de notre recherche, ces entretiens ont fait l’objet
d’une analyse méticuleuse du discours, au sens de Paillé et Mucchielli (2003), qui a
permis de mettre en perspective 12 e-supply chains.
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2 - Une boîte de réception
inattendue désigne une unité de
dépôt tri-température (sec, frais,
surgelé) munie de deux portes :
une du côté de l’habitation à
laquelle le consonaute accède et
une du côté de la rue utile au
livreur. Un foyer ainsi équipé
peut donc être absent au
moment de la livraison.
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chez les cyber-épiciers du commerce associé à
très développée chez les pure-players.
Nous venons de dresser un état de l’art partiel
des alternatives logistiques mobilisées par les
cyber-commerçants français. Force est de
noter que la comparaison des deux processus
de préparation de commandes, le store-picking et le warehouse-picking, n’est pas des
plus aisées. Nous pouvons cependant souligner un niveau de performance plus élevé du
premier processus, quant aux coûts de transport et aux délais de livraison : les distances à
parcourir sont, en effet, généralement faibles
en raison du fort maillage des réseaux existants (par exemple celui d’Intermarché). En
même temps, nous ne pouvons pas nous limiter à ce seul constat : nous avons bien relevé
que des alternatives existaient du côté des
commerçants possédant déjà des magasins,
mais qu’en est-il pour les pure-players et les
VADistes ? Comment parviennent-ils en effet
à livrer leurs clients alors qu’ils ne possèdent
aucun point de vente ? Leur e-logistique
impose un nécessaire recours aux PSL. C’est
pourquoi, il nous paraît primordial d’examiner, maintenant, les solutions logistiques clés,
mobilisables par les « sans magasin ».
Une forte émulation entre les PSL
Comme nous l’avons précédemment mis en
évidence, les acteurs du BtoC sont actuellement attirés par les livraisons hors domicile.
Trois alternatives s’offrent à eux : (1) soit ils
possèdent un réseau de magasins et ils s’y
adossent (par exemple Interflora) ; (2) soit ils
possèdent des magasins mais ils préfèrent utiliser des infrastructures dédiées au
retrait (Auchan via sa solution Chronodrive) ;
(3) soit ils ne possèdent aucun magasin (ou
pas suffisamment) et font dans ce cas appel
aux e-PSL, dans le cadre de démarches volontaires de mutualisation. Intéressons nous à
cette troisième alternative, et plus particulièrement aux offres de Kiala et de La Poste.
Le savoir-faire de la VAD : l’exemple de Kiala
La livraison en dehors du domicile (LHD)
doit en fait beaucoup au savoir-faire des
acteurs de la VAD, notamment à La Redoute
et aux 3 Suisses, à l’origine des premiers
réseaux de points relais. Mondial Relay,
filiale du Groupe 3 Suisses International, en
constitue certainement l’exemple emblématique. Créé en 1997, Mondial Relay dispose
de centres de tri et de plates-formes régionales, qui garantissent aux VADistes comme
aux pure-players une distribution domestique
sécurisée via un réseau de près de 4000 commerçants de quartier. Ce maillage de proximité fait de Mondial Relay un e-logisticien
urbain incontournable : il permet à l’internaute de disposer de ses commandes sous 24
heures, commandes qu’il vient retirer dans un
magasin proche de l’un de ses lieux de
vie (épicerie, station service, pressing, fleuriste…). Ces points de retrait offrent des plages horaires d’ouverture plus larges que celles
des bureaux de poste : certains sont même
Tableau 1 : Etat de l’art partiel de l’e-logistique en France
Type
d’e-supply chain
Offre
Limitée
Produits floraux
Quelques dizaines
de références
Très importante
Produits éditoriaux
Plusieurs millions de
références
Pilotage des flux
Modèle logistique
Implication des P.S.L.
Tiré
Préparation en magasin pour le
brick-and-mortar Interflora
Inexistante
Internalisation des livraisons
Assemblage du
bouquet à la demande
(built-to-order process)
Préparation sur entrepôt dédié
pour les pure-players Aquarelle
et Bebloom
Délégation du transport à des
PSL (Chronopost…)
Stocks importants en
amont chez les
fournisseurs
Poussé
Produits
alimentaires
(cyber-marchés)
Importante
Plusieurs milliers de
références
Préparation sur entrepôt dédié
- internalisé pour le
Délégation du transport à des
brick-and-mortar Fnac
PSL (Chronopost…) et même de
- externalisé pour le pure-player
l’entreposage pour Alapage
Alapage
Poussé
Stocks importants en
aval chez les
distributeurs
traditionnels
Préparation en magasin pour les
distributeurs associés :
Intermarché, Système U et
Leclerc
Préparation sur entrepôt ou
dépôt dédié pour les
distributeurs intégrés :
Carrefour, Auchan, Cora
et Télémarket
(brick-and-mortar)
Inexistante
Système U et Leclerc ne livrent
pas ou peu
Très variable
Carrefour préfère déléguer,
tandis qu’Auchan internalise
Source : élaboration personnelle
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ouverts le week-end ! L’internaute est averti
instantanément de l’arrivée de sa commande
par SMS, e-mail ou bien encore par message
vocal. Ajoutons que l’offre de Mondial Relay
est commercialisée en France par un infomédiaire : Kiala, société belge créée en 2000. Il
s’agit là d’une alternative logistique privée
aux tarifs particulièrement attractifs : en
moyenne de 10 à 15% inférieurs au service
Colissimo de La Poste. Le mérite de Kiala est
d’avoir professionnalisé le système artisanal
des vépécistes, en pariant notamment sur une
identification performante par code-barres.
Expert en livraison aux particuliers, Kiala
s’est également positionné sur le secteur de la
logistique inversée prouvant, avec sa procédure d’échange « Swap » (l’ancien produit
étant récupéré lors du retrait du nouveau), sa
réelle aptitude à collecter les colis qui font
l’objet d’un retour.
Cityssimo : le « petit dernier » de La Poste
Répondre à la demande du BtoC constitue
également un enjeu stratégique pour La Poste,
qui propose trois formules : (1) le service
Colissimo de LAD ; (2) le Chrono Relais de
Chronopost via 3000 buralistes (réseau
à2pas) ; (3) le Cityssimo. La Poste livre déjà
une grande majorité des colis destinés aux
particuliers. La Poste ambitionne d’ailleurs de
s’imposer comme « L’ » e-PSL de référence,
objectif qui ne paraît pas totalement impossible à atteindre dans la mesure où elle peut
s’appuyer sur un réseau de proximité de
11500 points de retrait via ses bureaux de
quartier (Brillet, 2008). Désormais, depuis
2005, ColiPoste propose la solution Cityssimo, un système de consigne automatique
qui permet de contourner le problème des plages d’ouverture des bureaux de poste ou celui
des magasins. L’internaute peut ainsi retirer
ses achats 24h/24 et 7 jours sur 7 : il lui suffit
d’indiquer, lors de sa commande, le point
Cityssimo sur lequel il souhaite être livré. Une
fois le point de retrait livré, le consonaute est
alerté par e-mail ou SMS (servive e-Como).
Un code lui est communiqué et il dispose de
quelques jours pour effectuer son retrait. Une
trentaine de Cityssimo fonctionne aujourd’
hui en France. Certains automates sont adossés à des bureaux de quartier et d’autres sont
installés dans des gares ou des galeries marchandes. A terme, ColiPoste devrait renforcer
son maillage en s’appuyant, en particulier, en
région parisienne sur le réseau de la RATP.
Les conditions d’une e-logistique plus verte
Ne perdons pas de vue que la remise du colis
est sans doute l’opération logistique la plus
délicate du BtoC : le dernier kilomètre, « les
derniers mètres » disent même certains, constitue en effet le maillon faible de l’e-logistique. Il s’agit donc de préciser les conditions
qui doivent permettre aux opérations de LAD
et de retrait de s’inscrire pleinement dans des
démarches plus écologiques, évitant en particulier les kilomètres inutiles. Notre objectif
est de poursuivre ici la présentation des résultats de nos entretiens semi-directifs, en insistant sur quatre facteurs clés : deux concernent
la LAD, le troisième renvoie à la gestion des
retraits et le quatrième porte sur les CDU
(Centre de Distribution Urbaine).
La condition du « 0-commande non livrée »
La LAD pose une vraie difficulté pour peu
qu’elle concerne des produits fragiles et pour
peu, surtout, que le consonaute soit absent au
moment du passage du livreur. Aujourd’hui,
même si des progrès sensibles ont été accomplis, une LAD sur trois échoue encore. Le premier objectif des acteurs du e-commerce
(cyber-commerçants, internautes et e-PSL)
est, par conséquent, de diminuer ce taux d’échec. Il s’agit ainsi de tendre vers le « 0-commande non livrée » et, donc, de réduire les
retours vers leur base des commandes non
livrées. La gestion de ces retours engendre en
effet, du fait des remises ultérieures en livraison, un double impact : (1) financier (du fait
du temps passé) ; (2) écologique en raison des
kilomètres parcourus lors du deuxième passage au domicile de l’internaute. L’identification des différents systèmes de LAD apparaît
alors fondamentale et les travaux de Patier
(2009) et de Bessec (2009) semblent, à ce
titre, précieux en vue d’élaborer des scénarios
permettant de tendre vers le « 0-retour ».
La condition du « tout en une livraison »
En admettant que l’on parvienne demain à
éviter les non-livraisons, un autre problème
émerge depuis quelques mois compte-tenu de
l’accélération du développement des ventes
en ligne. Les consonautes sont-ils, en effet,
prêts à être dérangés plusieurs fois dans une
même soirée à l’occasion de la livraison de
commandes différentes ? Si l’internaute opte
pour la LAD, ce n’est pas pour être dérangé de
manière intempestive à son domicile. Ces
dérangements pourraient donc, s’ils devenaient récurrents, constituer un frein au commerce électronique dans la mesure où ils
contribueraient en plus à l’aggravation de
l’engorgement des centres de vie (Gratadour,
2004). Ne perdons pas de vue, en effet, que le
commerce en ligne ne supprime pas la vente
en magasin et, donc, les déplacements des
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consommateurs (Alligier, 2007). Aussi, il
convient d’identifier précisément les solutions qui permettent de tendre vers le coup de
sonnette unique, c’est-à-dire de construire des
scenarii minimisant dérangements et déplacements. L’organisation de la distribution du
courrier par La Poste (passage du facteur quotidien mais unique) est, à ce titre, riche d’enseignements. Cette problématique logistique
pose inévitablement la question des infrastructures de distribution, en particulier celle
des Centres de Distribution Urbaine (CDU)
sur lesquels nous allons revenir. Il s’agit, en
définitive, de regrouper les commandes d’un
même internaute, « assembler » écrit Yrjölä
(2003), afin : (1) de réaliser une LAD unique ;
(2) de réduire, du fait de la mutualisation, les
kilomètres parcourus ; (3) d’ouvrir des perspectives allant au-delà du « facteur 2,5 » de
réduction des émissions de GES.
La condition du développement harmonieux
des points de retrait
Concernant maintenant les LHD, il convient
de rappeler que si cette alternative se développe, c’est justement du fait des difficultés
rencontrées par la LAD. La solution de la
LHD paraît en effet séduisante car, a priori,
moins onéreuse (du moins pour les
cyber-commerçants !). Mais, qu’en est-il
exactement ? Et surtout, cette alternative ne
comporte-t-elle pas également quelques risques ? Lors d’une LHD, c’est l’internaute qui
se déplace : il passe enlever sa commande sur
un point de retrait de proximité (Durand,
2008). Le retrait peut éventuellement s’envi-
Figure 2 : Le CDU, facteur clé d’une e-logistique plus verte
La condition du nécessaire déploiement des
CDU
Après le mouvement de délocalisation en
périphérie du grand commerce, mais également celui des infrastructures logistiques
majeures (entrepôts, plates-formes…), nous
assistons aujourd’hui à un mouvement
inverse de repositionnement sur des commerces de proximité. Ce « reflux » des marchandises de la périphérie vers le centre de la ville,
au plus près des consommateurs finalement,
pourrait être facilité par la redynamisation, à
des fins logistiques, d’espaces urbains (ELU)
proches de l’hyper-centre, espaces qui existent déjà aujourd’hui, mais à l’état de friches
foncières (ancienne gare, entrepôt ou usine
désaffectée, ancien centre de tri…). Nous
pourrions assister au développement de CDU
au cœur de ces zones, car si la réduction des
nuisances passe bien sûr par une diminution
du nombre de véhicules en circulation et à
l’arrêt, elle passe également par la baisse des
distances parcourues (Boudouin et Morel,
Source : Patier (2002)
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sager sur un dépôt dédié, ce que propose
Auchan avec sa solution Chronodrive. Le
retrait peut encore s’imaginer en magasin,
solution aujourd’hui très répandue : il suffit
d’observer la multiplication des drive chez les
cyber-épiciers. Le savoir-faire logistique de la
VAD peut aussi être mobilisé à travers, cette
fois, des alternatives mutualisées : le succès
de Kiala, leader européen des réseaux des
points de retrait (47 000 unités en Europe), en
est le meilleur exemple et La Poste l’a également compris en lançant Cityssimo. Force est
ainsi de constater que les points de retrait
constituent désormais de véritables outils de
mutualisation et, donc, de massification sur
lesquels les cyber-commerçants n’hésitent
plus à s’adosser. Cependant, si on mesure les
atouts économique et technique de la LHD
(« 0-commande non livrée »), rien ne prouve
pour autant son réel intérêt écologique. Les
travaux de Browne et al (2005) semblent
même montrer que l’alternative de la LHD
peut être contraire à l’objectif de réduction
des émissions de GES. Si elle n’est pas un
minimum organisée, la LHD risque en effet de
se traduire par une multiplication anarchique
des points de retrait et de générer, au final,
plus de déplacements que dans le cadre du
commerce en magasin. L’engouement pour la
LHD ne doit donc pas masquer de probables
difficultés à venir. Il paraît, par conséquent,
fondamental d’identifier l’ensemble des solutions favorisant la réduction des déplacements
des internautes sur des points de retrait et, à ce
titre, de valoriser l’alternative des CDU.
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2002). D’ailleurs, comme le souligne Patier
(2002) par rapport au BtoB, l’accessibilité
n’est pas tout : les lieux de traitement du fret et
leur implantation dans la ville sont tout aussi
déterminants. Bien entendu, en BtoC, cette
remarque garde toute sa validité du fait de la
capillarité des flux : les sites de groupage/dégroupage sont donc absolument
nécessaires et la pertinence de leur localisation est même fondamentale.
Véritable plate-forme d’éclatement (Dablanc,
1998), un CDU est un centre de tri, sur lequel
les commandes sont regroupées par cybernaute. Il s’agit d’un site de proximité à vocation mixte, pouvant tout aussi bien constituer
le point de départ de tournées de LAD courtes
(autorisant le recours à des véhicules électriques) que jouer le rôle d’un point de retrait
(one-stop pickup). Les CDU semblent donc
appelés à se développer dans la mesure où les
points de retrait existants (ceux de Mondial
Relay et de La Poste par exemple), ne sont pas
adaptés aux produits encombrants ou à température dirigée. Directement approvisionnés
par les fournisseurs via des réseaux de plates-formes
prestées
fonctionnant
en
cross-docking (Dablanc, 2007), les CDU
constituent de précieux outils de mutualisation qui devraient permettre de surmonter la
difficulté du dernier kilomètre et de rendre,
ainsi, plus verte l’e-logistique dès que la capillarité de leur réseau sera suffisante…
Conclusion
Au cours de cet article, nous nous sommes
intéressé à la dimension écologique de
l’e-logistique. Plus précisément, nous nous
sommes interrogé sur les manières de rendre
plus verte la logistique du B2C. Nous pouvons
déjà affirmer que la prise en compte de la
composante environnementale ne peut que
favoriser le développement du e-commerce.
Cela signifie que l’e-logistique constitue bien,
quand elle s’inscrit dans une démarche écologique, un réel levier de croissance. Force est
d’ailleurs de constater que les considérations
environnementales, doublées de considérations économiques, poussent aujourd’hui les
cyber-épiciers français à préférer des alternatives logistiques décentralisées (en particulier
le drive). Cela pose également la question de
l’aménagement des ELU de centre-ville et de
périphérie. Le tableau 2, ci-après, reprend les
principaux enseignements de notre recherche.
Demain, des bilans carbone plus fins
devraient nous permettre de vérifier quelles
sont les organisations logistiques du BtoC les
plus performantes, en LAD comme en LHD.
Des bilans écologiques plus globaux sont également attendus afin de compléter ces bilans
carbone. Il convient, en effet, de se montrer
relativement prudent : le bilan d’un commerçant en ligne peut-il être, en effet, considéré
comme positif quand la réduction de son
impact carbone est constatée, mais que le
bilan global des déplacements des internautes
est, lui, négatif ? Conjuguer l’e-logistique
avec les préoccupations écologiques nécessite
donc d’adopter des démarches globales intégrant l’ensemble des acteurs de la filière
concernée, approches pour lesquelles les travaux portant sur les modes de coopération
logistiques au sein du canal de distribution
fournissent un cadre théorique tout à fait
adapté. Enfin, si notre article s’est intéressé
exclusivement à la remise de la commande à
l’internaute, il conviendrait également de se
préoccuper de la logistique inverse des produits et, notamment, de celle des produits en
fin de vie (par exemple la rétro-logistique des
PGC électroniques régis par la directive
D3E). Il s’agirait ainsi de mettre en évidence
comment, en BtoC, la logistique des retours
peut intégrer les préoccupations environnementales et d’y souligner, une nouvelle fois, le
Tableau 2 : Les alternatives vertes de l’e-logistique
Mode de livraison
LAD
Sites de préparation
des commandes en
ligne
Les magasins de proximité, localisés à
quelques
kilomètres
(Interflora,
Intermarché…), sont préférables aux
entrepôts régionaux.
Les points relais mutualisés (Kiala, La
Poste…) sont préférables aux points
dédiés (drive en magasin ou en dépôt).
Points de retrait
des commandes en
ligne
CDU
(Centre de distribution
urbaine)
LHD
Les CDU constituent des sites de proximité à vocation mixte (autorisant la LAD et la
LHD). Confiés à des PSL, ce sont des points de mutualisation qui favorisent le « tout en
un » (« tout en un passage » ou « tout en un retrait »).
Source : élaboration personnelle
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rôle crucial des e-PSL, à l’image de Kiala via
son processus d’échange « un à un ».
Journal of Physical Distribution & Logistics
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Evaluation de la flexibilite des postes
de travail dans une usine terminale
automobile
Aymeric LESERT, Gülgün ALPAN, Yannick FREIN
Laboratoire G-SCOP, Grenoble INP-UJF-CNRS, Grenoble
[email protected], [email protected], [email protected]
Stéphane NOIRÉ
PSA Peugeot Citroën, Poissy
[email protected]
Dans cet article, nous proposons une méthode d’évaluation du niveau de flexibilité
des postes de travail dans une ligne d’assemblage automobile à modèles mélangés.
Cette évaluation repose sur une mesure de la différence entre la capacité maximale
de production de véhicules provoquant un pic de charge et un niveau de
production prévu en fonction d’un équilibrage donné. Cette méthode nous permet
de classifier les postes de travail en quatre catégories. Elles permettent d’orienter les
investissements nécessaires afin d’adapter les moyens de production aux données
prévisionnelles. Une étude de cas industriel est présentée afin d’illustrer la
méthode.
Introduction
Une ligne d’assemblage est une succession de
postes de travail. La fabrication d’un véhicule
sur une ligne d’assemblage automobile nécessite des milliers d’opérations. Les véhicules
avancent en continu et passent de poste en
poste sans s’arrêter et toujours dans le même
ordre. Ils avancent tous à la même vitesse et
sont disponibles pour un opérateur durant un
même laps de temps, appelé le temps de cycle.
L’équilibrage consiste à affecter les opérations aux postes de travail, tel que la charge de
travail sur chacun d’eux soit la plus homogène
possible. L’équilibrage est très complexe
quand il s’agit d’une ligne de montage à
modèles mélangés : chaque modèle de véhicules a ses propres contraintes de précédences
à respecter, pour des raisons d’outillages, certaines opérations devront être regroupées ou
bien obligatoirement affectées sur différents
postes, pour des raisons d’ergonomie, certaines combinaisons d’opérations sont à éviter
pour un même opérateur, …. C’est un traite-
ment long et coûteux, étudié mensuellement à
partir de données prévisionnelles [BOU03].
Pour des raisons de coûts et de contraintes
industrielles, il est possible que l’opérateur
d’un poste de travail ait besoin pour certains
véhicules d’un temps de travail supérieur au
temps cycle. Ces véhicules constituent des «
pics de charge » et contraignent l’ordonnancement des véhicules. En effet, ces véhicules
doivent être espacés pour permettre aux opérateurs de récupérer la surcharge occasionnée
[GIA06]. Cet espacement est garanti au cours
de l’ordonnancement grâce au respect d’une
contrainte d’espacement. Pour garantir le respect de cette contrainte d’espacement, le
nombre de ces véhicules doit être limité. Par
conséquent, cela conduit à contraindre le
volume de certains types de véhicules.
L’équilibrage de la ligne d’assemblage est
réalisé en fonction des données prévisionnelles mensuelles. Or, les données prévisionnelles peuvent comporter des erreurs. Puis, lors
du séquencement des véhicules commandés
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Cet article a fait l’objet d’une
présentation à la conférence
MOSIM’08, Paris,
31 mars - 2avril 2008.
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par les clients, les contraintes d’espacement
ne sont pas toujours faciles à respecter
[LES06b]. Enfin, à tout moment et en présence d’aléas de production, les opérateurs
doivent être capables de travailler en minimisant la sollicitation de renforts. Par conséquent, il est naturel d’envisager de la
flexibilité pour absorber :
• les erreurs de prévisions,
• les difficultés de séquencement des véhicules,
• les aléas de production.
Une ligne d’assemblage, équilibrée sans
flexibilité, i.e. au respect strict des données
prévisionnelles, risque de ne pas absorber
sans surcoût ou sans délai un des 3 phénomènes décrits ci-dessus. A contrario, une ligne
d’assemblage trop flexible peut présenter un
risque d’avoir trop de ressources (main
d’œuvre, matériel, …) et donc un coût de
fabrication plus élevé.
Dans notre article, nous présenterons une
classification des postes de travail en fonction
de différents niveaux de flexibilité. Cette classification a pour objectif de permettre aux
décideurs, en l’occurrence, les responsables
de l’équilibrage de la ligne d’assemblage, de
trouver le meilleur compromis entre les
moyens à mettre en œuvre pour produire les
véhicules pouvant être commandés par les
clients et les différents niveaux de flexibilité
nécessaire pour assurer la production à
moindre frais. Jusqu’à la proposition de notre
classification, PSA Peugeot Citroën ne disposait pas de méthodes pour trouver ce compromis.
Dans un premier temps, nous aborderons brièvement la flexibilité décrite dans la littérature
scientifique en lien avec notre travail. Ceci
nous permettra de définir le périmètre de notre
étude. Dans un deuxième temps, nous présenterons le calcul de l’évaluation de la capacité
maximale de production pour chacune des
contraintes d’espacement. Sans cette information, l’identification des postes de travail à
adapter peut être incorrecte. Puis, nous présenterons nos indicateurs de flexibilité et nous
proposerons une classification des postes de
travail en fonction de différents niveaux de
flexibilité. Enfin, nous terminerons par l’application de cette classification à un cas industriel sur le site de production de Sevel Nord.
La flexibilité
La littérature sur la flexibilité est très abondante. Dans cet article, nous présenterons
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quelques-unes de ces études en lien direct
avec notre travail. Pour les lecteurs, intéressés
par plus de détails sur la flexibilité dans les
systèmes de production et la chaîne logistique, nous les référons aux nombreuses études bibliographiques [SET90], [DET98],
[DSO00], [BEA00], [STE07] et aux articles
des numéros spéciaux [CHA09] existants.
De manière générale, la flexibilité traduit
l’aptitude d’un système à répondre aux modifications de son environnement afin d’assurer
le respect de ses objectifs [GUP89], [ERO99].
A cette définition générale, [UPT94] ajoute la
notion de l’efficience en y associant la prise en
compte du temps, de l’effort et du coût. Des
définitions similaires sont disponibles dans
[PAR99], [ABD99] et [BEN01]. Toutefois,
donner une définition générique pour la flexibilité est très difficile car cette définition
dépend souvent du contexte de l’étude
[PAR99] et peut recouvrer différents types de
flexibilité [SET90].
Face à cette diversité de définitions et par soucis de précision, nous décrivons la notion de la
flexibilité utilisée dans le cadre de notre
article. La flexibilité d’une usine terminale
automobile sera considérée dans ce travail
comme la capacité des moyens de production
à répondre aux aléas de production, aux
erreurs de prévisions, aux difficultés de
séquencement des véhicules en minimisant
les coûts de production.
Dans cette définition, nous retrouvons deux
types de flexibilité précédemment définis
dans [SET90] : la flexibilité en volume et la
flexibilité en mix-produit. La flexibilité en
volume est la capacité du système de production à faire varier son volume de production
pour satisfaire la demande des clients. Et la
flexibilité en mix-produit désigne la possibilité de modifier le portefeuille des produits
dans la production courante pour satisfaire
une nouvelle demande client. Dans les deux
cas, la flexibilité ne devrait pas engendrer des
surcoûts excessifs et le système devrait continuer à faire des profits. La méthode d’évaluation que nous allons présenter dans cet article
est une méthode pour évaluer la flexibilité en
volume. Nous allons indirectement toucher à
la notion de la flexibilité en mix-produit car le
séquencement des véhicules définis dans le
portefeuille contraignent la capacité maximale que l’on peut produire dans une fenêtre
de temps, et par conséquent, la flexibilité en
volume.
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Les besoins de flexibilité
La flexibilité est identifiée comme une problématique inhérente aux incertitudes
[GDR07]. D’autres notions telles que la
robustesse, l’adaptabilité, la réactivité, la stabilité, l’agilité, … sont également citées dans
le cadre de prise en compte des incertitudes.
Toutefois, parmi toutes ces notions, le rôle
central de la flexibilité est mis en évidence
dans [MAR09] pour la prise de décision sous
incertitudes.
Selon l’approche de [COR94a], les deux raisons pour lesquelles une entreprise doit
recourir à la flexibilité sont : l’incertitude et la
variabilité. Dans sa classification, l’incertitude correspond aux évènements qui ne peuvent pas être prévus ou qui ne peuvent pas être
modélisés par des approches probabilistes.
Leur source est interne lorsqu’il s’agit d’aléas
de production ou d’absentéismes, ou externe
lorsqu’il s’agit d’un retard de livraison ou
d’une modification législative. La variabilité
concerne la variation des quantités demandées ou de l’assortiment des produits à fabriquer. Même si la variabilité peut être
prévisible, l’entreprise doit anticiper cette
variabilité en disposant d’un potentiel de
flexibilité. Ce potentiel permet d’absorber ces
variations sans surcoût excessif. Cette
approche est plutôt adaptative car nous
essayons de réduire les impacts de l’incertitude et de la variabilité. Dans cet article, nous
adaptons cette approche adaptative. Des
approches proactives existent aussi (voir par
exemple, [GER93]) mais ne seront pas
considérées dans notre étude.
Pour Corrêa, [COR94b], la flexibilité de la
structure d’un système de production repose
sur 4 éléments qu’il faut ajuster simultanément :
• La possibilité de production (“capability”)
correspond à la capacité de l’entreprise à
produire une certaine diversité de produits,
• La capacité de production (“capacity”)
correspond à la capacité de l’entreprise de
faire face à une variation de volume,
• L’utilisation des ressources (“utilization”)
correspond à la capacité de l’entreprise de
disposer des ressources juste nécessaires au
bon moment,
• L’adaptabilité (“switchability”) corres-
pond à la capacité de l’entreprise à adapter
ses moyens de production aux différents
produits rapidement, facilement et à
moindre coût.
Les études de Corrêa [COR94a], [COR94b]
sont menées dans le contexte de l’industrie
automobile. Par conséquent, nous associons
facilement les éléments vus dans le terrain de
notre étude avec les éléments définis par Corrêa : Pour disposer d’une ligne d’assemblage
automobile flexible, l’équilibrage doit considérer les 4 éléments ci-dessus simultanément.
Les responsables de l’équilibrage doivent
dimensionner les postes de travail pour qu’ils
soient capables de produire les véhicules
commandés par les clients et transmis par la
direction commerciale (“capability” et
“capacity”). Pour répondre à ce besoin, le
nombre d’opérateurs doit être évalué au
mieux pour ne pas être sur ou sous utilisé
(“utilization”). Et, les tâches doivent être
réparties pour permettre aux opérateurs d’absorber les variations et les aléas sans solliciter
l’aide d’opérateurs supplémentaires (“switchability”). Pour parvenir à un bon compromis, il faut mesurer la flexibilité disponible et
l’ajuster à celle demandée.
La flexibilité en ordonnancement
La flexibilité et la robustesse en ordonnancement sont deux concepts très liés [BIL05].
Intuitivement, il est d’autant plus facile de
proposer une méthode robuste, que la flexibilité qui lui est accordée est grande. La flexibilité est le degré de liberté dont on dispose pour
construire un ordonnancement. Et, un ordonnancement est robuste si sa performance est
peu sensible à l’incertitude des données et aux
aléas.
Dans le cadre de notre article, la robustesse est
une résultante de la flexibilité offerte par l’atelier montage. En effet, dans un premier temps,
la flexibilité d’un poste de travail de la ligne
d’assemblage correspond à sa capacité à faciliter le lissage de la charge de travail de l’opérateur lors de l’ordonnancement. Et, dans un
deuxième temps, cette séquence est d’autant
plus robuste qu’elle conserve le lissage de la
charge de travail malgré un aléa de
production.
Les mesures de la flexibilité
Les mesures de la flexibilité que nous trouvons dans la littérature sont toutes autant
variées que sa définition. Il existe différentes
techniques d’évaluation, quantitatif ou qualitatif, par type de flexibilité ou agrégée, …
[BEA00]. Gupta préconise que la mesure de la
flexibilité doit être, elle aussi, conforme à la
nature de la flexibilité et de son contexte
[GUP93]. Comme mentionné précédemment
dans cet article, nous nous intéressons aux
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mesures de la flexibilité en volume. Les sources de la flexibilité en volume peuvent être
très variées : dans le cas des approches adaptatives, les sources majeures de la flexibilité en
volume sont les méthodes de réduction de
temps de changement de série, des technologies avancées de la production, des operateurs
polyvalents et de la capacité supplémentaires
[HAL09]. Ici, nous présentons une mesure
basée sur la capacité supplémentaire de l’outil
de production.
Dans cet article, nous nous sommes inspirés
de l’évaluation de la flexibilité en volume,
proposée par [PAR99]. Cette évaluation, F,
repose sur une mesure de la différence entre
deux limites : la capacité maximale de production, Cmax, et la capacité correspondant au
seuil de rentabilité, Seuil (équation 1).
F=
C max - Seuil
C max
(1)
Dans notre étude, la capacité maximale de
production correspond au nombre maximal
de véhicules provoquant un pic de charge que
nous pouvons produire sans modifier les
infrastructures, ni renforcer les opérateurs par
des appels à des opérateurs polyvalents. Le
seuil de rentabilité considéré représente le
nombre prévisionnel de ces véhicules car les
moyens de production mis en œuvre par l’équilibrage doivent obligatoirement être
capables de produire les volumes prévus.
L’évaluation de la capacité maximale de production n’est pas triviale. Dans la partie qui
suit, nous présenterons le calcul de cette
capacité.
Pour un poste de travail
Dans une usine terminale automobile, chaque
poste de travail peut traiter différents types de
véhicules. Chacun de ces véhicules peut avoir
un temps de traitement sur le poste de travail
différent. Nous utiliserons la notation T i , j
pour représenter le temps de traitement du
véhicule j sur le poste de travail i, et T cycle ,
pour représenter la cadence de la ligne de
montage.
Pour simplifier les calculs, nous avons considéré deux groupes de véhicules par poste de
travail : (i) les véhicules ne provoquant pas de
pic de charge sur le poste de travai i , i.e.
T i , j £ T cycle . Nous utiliserons la notation Vi
pour représenter l’ensemble de ces véhicules.
(ii) les véhicules provoquant un pic de charge,
i.e. T i , j > T cycle . Nous utiliserons la notation
Vi pour représenter l’ensemble de ces véhicules. On suppose que chaque groupe de véhicule a le même temps de traitement. Pour les
véhicules membres de Vi (respectivement, Vi )
nous avons estimé ce temps de traitement par
T inf i (respectivement T sup i ). T inf i Et T sup i peuvent être calculés de différentes façons :
1. Le cas optimiste : Les deux temps correspondent au temps minimum de chacun des
deux groupes de véhicules,
T inf i = min( T i , j ) et T sup i = min( T i , j ).
jÎV i
jÎV i
2. Le cas moyen : les deux temps correspondent à la moyenne pondérée des temps,
T inf i = avg( T i , j ) et T sup i = avg( T i , j ).
Évaluation de la capacité
maximale de production
jÎV i
Nous avons dégagé deux façons de calculer la
capacité maximale de production : statique et
dynamique. Tout d’abord, nous aborderons la
capacité maximale statique et dynamique
pour un poste de travail, puis, pour plusieurs
postes de travail.
La capacité maximale statique
La capacité maximale statique,Q¢ max , consiste
à évaluer le nombre maximal de véhicules
provoquant un pic de charge telle que la
charge de travail de l’opérateur soit le plus
proche possible de l’objectif visé. Dans le
contexte de cette étude, l’objectif visé est
atteint lorsque le poste de travail a un coefficient d’équilibrage correspondant au coefficient d’équilibrage fixé dans les bonnes
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pratiques du groupe, Ke obj . Le coefficient
( Ke obj ) -1 reflète le taux d’occupation de
l’opérateur.
jÎV i
3. Le cas pessimiste : les deux temps correspondent au temps maximum de chacun
des deux groupes de véhicules.
T inf i = max( T i , j ) et T sup i = max( T i , j ).
jÎV i
jÎV i
4. Le cas écrêté : Les deux temps correspondent au maximum des temps retenus par
les équilibreurs. Par exemple, des véhicules rares ayant T i , j >> T cycle sont exclus
des calculs car ils sont gérés différemment
des autres véhicules. Le cas écrêté apporte
donc une correction au cas pessimiste qui
a tendance à surestimer T inf i et T sup i présence de quelques véhicules avec
T i , j >> T cycle .
Avec cette simplification, il est alors aisé d’évaluer la capacité maximale statique pour le
poste de travail i, Q¢ max i (équation 2).
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Qtot * T cycle
(Qtot - Q¢ max i ) * T inf i + Q¢ max i * T sup i
£ Ke obj
Figure 1 : Représentation de la charge de travail d’un poste de travail
(2) Soit
Q¢ max i
T cycle
ê
- T inf i
ê
Ke obj
ê
= Qtot *
ê
T sup i - T inf i
ê
êë
ú
ú
ú
ú
ú
ûú
Où Qtot est le nombre total de véhicules à
fabriquer.
Pour illustrer ce calcul, nous avons considéré
le poste de travail dont la charge de travail est
représentée sur la figure 1. Nous avons simplifié les temps de traitement des deux groupes
de véhicules en considérant la situation correspondante au cas pessimiste (T inf i = 0,30 et
T sup i =1, 20) .
Pour cet exemple, le coefficient d’équilibrage
objectif est Ke obj =112
, (soit environ 89% de la
charge de travail de l’opérateur). Le nombre
de véhicules total à produire par jour de production est Qtot =100. Le nombre maximal de
véhicules provoquant un pic de charge que
nous pouvons produire sur ce poste de travail
est donc 65.
Q¢ max i
T cycle
ê
- T inf i
ê
Ke obj
= êQtot *
ê
T sup i - T inf i
ê
êë
Þ Q¢ max i
ú
ú
ú
ú
ú
ûú
Une contrainte d’espacement peut contraindre plusieurs postes de travail. Chacun de
ces postes de travail limite la quantité maximale de certains véhicules. Par conséquent, la
capacité maximale statique d’une contrainte
d’espacement ne peut pas être supérieure à la
plus petite capacité maximale statique des
postes de travail contraints par la contrainte
d’espacement (équation 3).
(3)
Où Pc c est l’ensemble des postes contraints
par la contrainte d’espacement c.
La capacité maximale dynamique
La capacité maximale dynamique, Qmax , correspond au nombre maximal de véhicules
Dans l’équation (4), N/P correspond au ratio
de la contrainte d’espacement pour un poste
de travail donné. Nous allons dans la suite présenter comment calculer ce ratio et plus précisément les deux termes N et P.
N/P peut être calculé soit en fonction du
volume à produire, soit en fonction de l’espace de travail. Des études précédentes ont
montré que la deuxième méthode est plus
satisfaisante vis à vis de la réalité du terrain
[BOL92a], [BOL92b], [GIA06], [LES06a].
Nous allons, donc, brièvement expliquer le
principe du calcul de N/P en fonction de l’espace de travail de l’opérateur. Pour plus de
détail, le lecteur peut se référer à [BOL92a],
[BOL92b], [GIA06] et [LES06a].
Nous rappelons que, dans la liste des véhicules à engager sur le site de montage, les véhicules provoquant un pic de charge doivent être
espacés pour permettre aux opérateurs de
récupérer le retard accumulé par le montage
de ces véhicules. Cet espacement est réalisé à
l’aide des contraintes d’espacement définis
par un critère (i.e. présence d’une ou plusieurs
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(4)
Pour calculer la capacité maximale dynamique, Qmax , pour un poste de travail, il faut
d’abord calculer le ratio N/P de la contrainte
d’espacement pour ce poste de travail.
Pour une contrainte d’espacement
iÎ Pc c
N
Qmax = ê * Qtot ú
êë P
úû
Pour un poste de travail
1
ê
- 0,30 ú
ê
ú
112
,
= ê100 *
ú = 65
1, 2 - 0,30 ú
ê
êë
úû
Q¢ max c = min(Q¢ max i )
provoquant un pic de charge qui peuvent être
séquencés en respectant le ratio d’une contrainte d’espacement permettant aux opérateurs de travailler sans solliciter l’aide d’un
opérateur polyvalent. Cette capacité maximale est calculée avec l’équation 4.
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Figure 2 : Représentation graphique de déplacements d’un opérateur
Un véhicule provoquant un pic de charge
occasionne pour l’opérateur un retard de
Rsup = T sup - T cycle supplémentaire. Et, avec
un véhicule sans pic de charge, il peut récupérer Rinf = T cycle - T inf .
Le calcul du ratio d’une contrainte d’espacement revient alors à trouver le nombre de
véhicules ne provoquant pas de pic de charge
nécessaire (P-N) pour absorber une succession de N véhicules provoquant un pic de
charge. Les paramètres de N/P sont alors calculés
par
l’équation
5
où
Rmax = ( Max i - Min i ) - T cycle [LES06a].
options sur un véhicule) et un ratio N/P. Dans
la séquence des véhicules à fabriquer, on peut
avoir au plus N véhicules provoquant un pic
de charge (comportant le critère) sur une
fenêtre glissante de P véhicules.
Pour le calcul de N/P en fonction de l’espace
de travail de l’opérateur, nous observons tout
d’abord les mouvements de l’opérateur dans
son poste de travail (figure 2).
Un opérateur affecté au poste de travail, i, travaille dans un espace de travail délimité par
une limite minimale, Min i , et une limite maximale, Max i . Min i sera toujours négative ou
nulle et Max i sera toujours égale ou supérieure au temps cycle, T cycle . Tant que l’opérateur demeure dans cet espace de travail, il ne
gênera pas les opérateurs qui le précédent ou
le suivent sur la ligne d’assemblage. La date
de début du traitement d’un véhicule j sur le
poste de travail i, Di , j , peut commencer dès la
limite Min i et la date de fin de son traitement,
Fi , j peut aller jusqu’à la limite maximale,
Max i .
Les véhicules ayant un temps de traitement
T i , j > T cycle (e.g. véhicule j dans la figure 2)
provoquent un pic de charge. Le retard accumulé par le traitement de ce type de véhicule
peut être récupéré en affectant des véhicules
ayant T i , j £ T cycle dans la séquence des véhicules (e.g. les véhicules j+1 ,…, j+4 dans la
figure 2) . Nous notons que les temps de traitement des véhicules, T i , j , ne sont pas homogènes, comme illustré dans la figure 2. Pour
simplifier les calculs, nous utilisons la même
simplification présentée dans la section 3.1.1.
Par conséquent, un poste de travail ayant une
forte diversité de temps de traitement est simplifié à deux temps : T inf i pour les véhicules
avec T i , j £ T cycle et T sup i pour les véhicules
avec T i , j > T cycle .
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êR ú
ê N * Rsup ú
N = ê max ú et P = N + ê
ú
ë Rinf û
ë Rsup û
(5)
Pour illustrer le calcul de Qmax pour un poste
de travail, nous reprenons l’exemple de la
figure 1. Pour ce poste, l’espace de travail est
limité par Min i =0, et Max i =1,3. Donc, selon
l’équation (5), le ratio à appliquer sur ce poste
de travail est 1/2.
Par conséquent, selon l’équation (4), nous
pouvons,
théoriquement,
engager
1ú
ê
Qmax = 100 *
= 50 véhicules sans provoêë
2 úû
quer de non respects du ratio 1/2.
Pour une contrainte d’espacement
Similairement à la procédure de la section
3.1.2, dans le cas de la capacité maximale
dynamique pour une contrainte d’espacement, nous devons trouver un ratio N/P
unique qui s’applique à tous les postes de travail concernés par cette contrainte d’espacement.
Pour chacun des postes de travail i contraint
par la contrainte d’espacement c, nous évaluons le ratio à appliquer selon l’équation (5).
Pour chacun des ratios différents, nous construisons l’ensemble de ses ratios compatibles
Rc N i .
Pi
Un ratio N j Pj est dit compatible avec un ratio
Pi si toutes les séquences de véhicules respectant le ratio N i Pi respectent également le
ratio N j Pj .
Ni
Ici, nous ne présenterons pas le calcul de
Rc N i mais le lecteur peut consulter [LES06a]
Pi
pour plus d’information. Nous pouvons alors
sélectionner, parmi l’ensemble de ratios compatibles, Pc c (équation 6), un ensemble de
ratio commun à tous les postes de travail.
Cc c = Ç Rc N i
iÎ Pc c
(6)
Pi
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Avec Pc c , ensemble des postes contraints par
la contrainte d’espacement c.
Les parties grises de la figure 1 représentent
cette perte d’efficacité.
Pour produire le plus grand nombre de véhicules sans dépasser la limite maximale de
l’espace de travail, il faut choisir le ratio N c Pc
ayant le rapport le plus élevé (équation 7).
(Qi * Tsup i + (Qtot - Qi ) * Tinf i ) - åTi , j
Nc
= max ( x)
Pc x Î Cc N p
(7)
Pp
Par exemple, considérons deux postes de travail contraints par une contrainte d’espacement, c. Le premier poste accepte un ratio de
1/2 et le deuxième un ratio de 2/5.
L’ensemble des ratios compatibles du ratio
1/2 correspond à Rc1/2 ={1/2, 1/3, 1/4, 1/5,
…}. L’ensemble des ratios compatibles du
ratio 2/5 correspond à Rc2/5 ={2/5, 2/6, 2/7,
…, 1/3, 1/4, 1/5, …}. L’ensemble des ratios
compatibles communs aux deux postes correspond à Cc={1/3, 1/4, 1/5, …. }. Comme
nous souhaitons produire le plus de véhicules
possible avec un pic de charge sur les deux
postes simultanément, nous sélectionnerons
le ratio 1/3 à appliquer.
Les pertes d’efficacité
Q tot
Ptemps j =
j=1
Nous allons illustrer le calcul de cet indicateur
avec le poste de travail dont la charge est
représentée par la figure 1. Les temps de traitement des véhicules sur ce poste de travail se
répartissent selon le tableau 1.
Tableau 1 : Temps de traitement
des différents types de véhicules
Véhicule
Temps de
traitement
Quantité
Véhicules ne provoquant pas de pic de charge
Type 1
0,25 minute
30
Type 2
0,30 minute
35
Véhicules provoquant un pic de charge
Type 3
1,10 minute
5
Type 4
1,18 minute
25
Type 5
1,20 minute
5
La perte d’efficacité due à la simplification
des temps de traitement pour ce poste de travail est de 2,5% de la charge maximale de l’opérateur sur ce poste de travail.
Q tot
Lors du calcul de la capacité maximale dynamique,Qmax , tout d’abord nous simplifions les
temps des postes de travail concernés (Cf.
3.2.1). Puis, nous calculons un ratio N/P pour
chaque poste de travail. Enfin, nous choisissons un ratio compatible et commun à tous les
postes de travail (Cf. 3.2.2) contraints par la
contrainte d’espacement.
A chacune de ces étapes, nous perdons en productivité potentielle et donc en efficacité.
Nous allons présenter quelques indicateurs
pour évaluer cette perte.
Due à la simplification des temps
La perte d’efficacité due à la simplification
des temps de traitement, Ptemps i , correspond à
l’écart entre la charge de travail avec deux
types de véhicules et la charge de travail effective (équation 8). SoitQi le nombre de véhicules provoquant un pic de charge. La charge de
travail avec deux types de véhicules correspond à la somme de la charge de travail des
véhicules provoquant un pic de charge,
Qi * T sup i , et de la charge de travail des véhicules ne provoquant pas de pic de charge,
(Qtot - Qi ) * T inf i . La charge de travail effective correspond à la somme des temps de
Q tot
traitement des différents véhicules, å T i , j .
j =1
Ptemps j =
(Qi * Tsup i + (Qtot - Qi ) * Tinf i ) - åTi , j
j=1
Qtot * Tcycle
( 35 * 12
, + (100 - 35) * 0 ,3) - 59
=
= 2 ,5%
100 * 1
Due au calcul du ratio N/P d’un poste de travail
La perte d’efficacité due au calcul du ratio N/P
d’un poste de travail i, Pratio i , correspond à l’écart entre la capacité maximale statique
(équation 2), et la capacité maximale dynamique (équation 4), d’un poste de travail
(équation 9).
Pratio i = Q¢ max i - Qmax i
(9)
Comme nous pouvons le constater sur
l’exemple précédent, nous perdons la possibilité de produire Pratio i = 65 - 50 = 15 véhicules
car il existe un écart entre la capacité maximale statique et la capacité maximale dynamique. Pour éviter de renforcer le poste de
travail à cause d’un non respect, il faut limiter
le nombre de véhicules provoquant un pic de
charge sur ce poste de travail à 50, soit la capacité maximale dynamique. Par conséquent
quoiqu’il arrive, un dépassement de ce
nombre de véhicules provoquera un non respect et, éventuellement, l’intervention d’un
opérateur polyvalent.
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(8)
Qtot * Tcycle
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Due au calcul du ratio N/P d’une contrainte
d’espacement
La perte d’efficacité pour un poste de travail i,
due au choix d’un ratio N/P compatible et
commun à tous les postes de travail contraints
par la même contrainte d’espacement c,
P¢ ratio i (équation 10), correspond à l’écart
entre la capacité maximale statique d’un poste
de travail i contraint par la contrainte d’espacement c, Q¢ max i , et la capacité maximale
dynamique de la contrainte d’espacement c,
Qmax c calculé en utilisant le Nc / Pc unique pour
la contrainte c (équation 7).
P¢ ratio i = Q¢ max i - Qmax c
(10)
En poursuivant avec l’exemple précédent, si
nous supposons que le ratio d’une contrainte
d’espacement contraignant ce poste de travail
vaut 1/3, la perte d’efficacité due au choix du
1
ratio représentera P¢ ratio i = 65 - ê100 * ú = 32
êë
3 úû
véhicules.
Conseils pour un équilibrage sans perte
Pour minimiser ces pertes, nous préconisons
un équilibrage qui favorise, pour les postes de
travail ayant des véhicules provoquant des
pics de charge, une répartition des tâches qui
aboutit à deux groupes de véhicules avec des
temps les plus homogènes possibles, i.e.
temps de traitement proches de T inf i et de
T sup i .
Actuellement, le coefficient d’équilibrage est
le seul indicateur utilisé par les équilibreurs
pour évaluer la qualité d’un équilibrage, et
ceci est insuffisant. Par conséquent, nous préconisons la prise en compte des ratios, ci-dessus. Conscients que cela n’est pas facile à
réaliser, nous proposons, dans la suite de cette
étude, des indicateurs de flexibilité qui nous
fournirons des informations orientant les
équilibreurs sur les postes de travail à adapter.
Les indicateurs de flexibilité
Dans cette partie, nous allons montrer comment mesurer différents types de flexibilité :
la flexibilité potentielle totale FPtotale et les
flexibilités potentielles supplémentaires
(F.P.S.) présentes dans un équilibrage donné
pour chacun des postes de travail. Les indicateurs de flexibilité potentielle sont calculés
pour chaque poste de travail ayant au moins
un véhicule provoquant un pic de charge en
utilisant le principe de l’équation 1.
Pour PSA Peugeot Citroën, cette mesure se
décline selon le calcul de trois marges de sécu-
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risation dépendantes de différents niveaux
demandés de flexibilité :
• Sans marge de sécurisation ; cela correspond aux données prévisionnelles brutes.
• Avec une marge de sécurisation correspondant à la flexibilité offerte au commerce,
Marge commerce ; cette marge est définie pour
permettre à la direction commerciale d’absorber leurs erreurs de prévision.
• Avec une marge de sécurisation correspondant à la flexibilité demandée au montage,
Margemontage ; cette marge est définie pour
permettre à l’atelier montage d’absorber en
plus des erreurs de prévisions, les difficultés liées au séquencement et les aléas de
production.
Chez PSA Peugeot Citroën, les marges
Marge commerce et Margemontage sont calculées
par une méthode interne à l’entreprise. Cette
méthode est basée sur une étude statistique
des données réelles. Elle donne une estimation de ces marges pour satisfaire 95% des
commandes des clients dans les délais annoncés. A partir de ces calculs théoriques, les
marges sont ajustées en réunion mensuelle
interne, lors d’une négociation avec différentes composantes de l’entreprise [LES06a].
L’indicateur de flexibilité potentielle totale,
FPtotale , est en lien avec le premier niveau de
flexibilité exprimé ci-dessus. Il mesure l’écart
entre la consommation moyenne journalière
prévisionnelle, CMJ, sans marge de sécurisation et la capacité maximale dynamique de
production des véhicules provoquant un pic
de charge, Qmax (équation 11). La CMJ prévisionnelle est calculée en fonction des données
prévisionnelles mensuelles et du nombre de
jours travaillé durant le mois. Et la quantité
Qmax est calculée en utilisant les équations (4)
et (7).
FPtotale =
Qmax - CMJ
Qmax
(11)
Les flexibilités potentielles supplémentaires
correspondent aux niveaux de flexibilité 2 et 3
donnés ci-dessus. Elles expriment l’écart
entre la consommation moyenne journalière
prévisionnelle, CMJ, majorée par une marge
de sécurisation et la capacité maximale dynamique de production des véhicules provoquant un pic de charge sur ce même poste,
Qmax . Cette flexibilité est dite potentielle car
elle correspond à une marge de sécurisation
présente sans modification de l’équilibrage.
Et, elle peut être supplémentaire car elle correspond à une marge de sécurisation qui n’a
pas été nécessairement demandée.
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L’indicateur de flexibilité potentielle supplémentaire pour le commerce (niveau 2),
FPS commerce , mesure l’écart entre la consommation moyenne journalière prévisionnelle,
CMJ, majorée de la marge de sécurisation
offerte au commerce, Marge commerce , et la
capacité maximale de production des véhicules provoquant un pic de charge, Qmax (équation 12).
FPS commerce =
Qmax - (CMJ + Marge commerce )
(12)
Qmax
L’indicateur de flexibilité potentielle supplémentaire pour le montage (niveau 3),
FPS montage , mesure l’écart entre la consommation moyenne journalière prévisionnelle,
CMJ, majorée de la marge de sécurisation
demandée au montage, Marge commerce (en plus
de la marge de sécurisation offerte au commerce) et la capacité maximale de production
des véhicules provoquant un pic de charge,
Qmax (équation 13).
FPS montage =
Figure 3 : Un poste sous dimensionné
Figure 4 : Poste insuffisamment dimensionné
Qmax - (CMJ + Marge comm + Marge mont )
Qmax
(13)
Classification des postes de travail
sans solliciter l’aide ponctuelle d’un opérateur polyvalent.
En fonction de la valeur des trois indicateurs
de flexibilité pour un poste de travail, nous
proposons une classification. Elle compte 4
classes de dimensionnement des postes de travail présentées par ordre décroissant
d’importance :
3. Un poste de travail présentant un risque de
non absorption des aléas et des difficultés
liées
à
l’ordonnancement,
i.e.
FPS commerce ³ 0 et FPS montage £ 0, est un
poste de travail pour lequel les équilibreurs prennent un risque (figure 5). En effet, il peut être plus avantageux de
renforcer ponctuellement le poste de travail que de le sur dimensionner pour le
mois complet. Par conséquent, lorsqu’un
aléa de production intervient ou lorsqu’une difficulté de séquencement est identifiée, le responsable de l’équilibrage
préférera renforcer avec un opérateur polyvalent le poste de travail concerné.
1. Un poste de travail sous dimensionné, i.e.
FPtotale £ 0, n’est pas dimensionné pour
accepter les véhicules prévisionnels (figure 3). Par conséquent, le renforcement
de ce poste de travail sera inéluctable et
nécessitera la mise en place d’une équipe
d’opérateurs polyvalents pour intervenir
fréquemment et rapidement.
2. Un poste de travail insuffisamment dimensionné, i.e.
et
FPtotale ³ 0
FPS commerce £ 0, produit les véhicules prévisionnels mais la variation commerciale
risque de ne pas être absorbée (figure 4).
La flexibilité offerte au commerce est contractuelle et le commerce s’engage à respecter ce volume (CMJ prévisionnelle+
Marge commerce ). Mais, pour les journées où
le nombre de véhicules provoquant un pic
de charge excède la consommation
moyenne journalière prévisionnelle, l’espacement de ces véhicules ne permettra
pas toujours à l’opérateur de travailler
4. Un poste de travail sur dimensionné, i.e.
FPS montage ³ 0 , a un dimensionnement suffisant pour absorber les erreurs de prévisions, les difficultés de séquencement et les
aléas de production (figure 6). Néanmoins,
il faut être vigilant pour qu’il ne soit pas
trop sur dimensionné, ce qui engendrerait
des surcoûts importants. La magnitude de
FPS montage nous permet de détecter la « gravité » du surdimensionnement.
Cette classification permet d’identifier les
postes de travail à adapter en priorité comme
les postes de travail sous dimensionnés ou
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Au mois de Mai 2006, la ligne principale d’assemblage de Sevel Nord comptait 212 postes
dont 194 avec au moins un véhicule provoquant un pic de charge. Pour chacun de ces
postes de travail, nous avons évalué la valeur
des 3 indicateurs de flexibilité potentielle supplémentaire et nous avons classé les postes de
travail selon leur dimensionnement.
Figure 5 : Poste présentant un risque de non absorptions des aléas
Le résultat obtenu est décrit dans le tableau 2.
Nous avons étudié les données selon 4 cas
précédemment décrit : le cas optimiste, le cas
moyen, le cas pessimiste et le cas écrêté. La
colonne « Classe » correspond à la classification que nous avons proposée ci-dessus. La
ligne « SOUS » correspond aux postes de travail sous dimensionnés, « INSUFFISANT »
correspond aux postes de travail insuffisamment dimensionnés pour la flexibilité offerte
au commerce, « RISQUE » correspond aux
postes de travail présentant un risque de ne pas
absorber les aléas et les difficultés de séquencement et « SUR » correspond aux postes de
travail sur dimensionnés.
Figure 6 : Un poste de travail sur dimensionné
La classification donnée dans le tableau 2 a
permis d’identifier un certain nombre de problèmes au niveau de l’équilibrage. Pour quelques postes de travail, nous avons grâce à cette
classification mis en évidence des erreurs
dans le système d’informations de l’entreprise. Par exemple, même dans le cas optimiste, nous avons constaté qu’il y a 5 postes
sous dimensionnés, ce qui montre un réel
souci d’équilibrage. De tels postes de travail
sont aberrants car même dans le meilleur des
cas, ils seront une source de nombreuses interventions d’opérateurs polyvalents.
insuffisamment dimensionnés. Dans la partie
qui suit, nous appliquerons cette classification
à un cas industriel et nous montrerons l’intérêt
de notre classification en nous basant sur le
résultat de l’ordonnancement des véhicules
d’un cas industriel.
Application à un cas industriel
Pour valider notre classification, nous avons
fait une étude comparative entre notre classification et le nombre d’interventions relevé le
24 Mai 2006. Ceci sera présenté dans le cas
écrêté car ce cas nous semble le plus représentatif du terrain (voir tableau 3).
En collaboration avec le responsable de l’équilibrage du site de production de Sevel Nord
au mois de Mai 2006, nous avons étudié le
dimensionnement des postes de travail de la
ligne d’assemblage en utilisant les indicateurs
que nous venons de présenter. Puis, en fonction des véhicules produits le 24 Mai 2006,
nous avons comparé le dimensionnement des
postes de travail et le nombre d’interventions
des opérateurs polyvalents [LES06a].
Dans le tableau 3, nous observons qu’environ
la moitié des postes de travail sont mal dimensionnés (« SOUS », « INSUFFISANT » et
« RISQUE »). Selon le responsable de l’équilibrage du site de Sevel Nord, ces résultats
Tableau 2 : Dimensionnement des postes
Classe
Nombre de postes
Optimiste
Moyen
Ecrêté
5
21
68
INSUFFISANT
2
13
RISQUE
1
6
SÛR
186
154
SOUS
66
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Pourcentage de postes
Pessimiste Optimiste
Moyen
Ecrêté
Pessimiste
142
2,6 %
10, 8 %
35,0 %
73,1%
17
3
1,0 %
6,7 %
8,8 %
1,0 %
9
0
0,5 %
3,1 %
4,6 %
0,0 %
100
49
95,9 %
79,4 %
51,6 %
25,9 %
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sont confirmés partiellement par ses observations. Les interventions se concentrent à 93%
sur les 35% de postes de travail sous dimensionnés. Ceci montre la pertinence de cette
classification. La réduction du nombre de
postes de travail mal dimensionnés devrait
donc permettre de réduire le nombre d’interventions d’opérateurs polyvalents.
Conclusion
Dans cet article, nous proposons une méthode
d’évaluation de la flexibilité des postes de travail d’une ligne d’assemblage dans une usine
terminale automobile pertinente avec les
observations du terrain. Cette méthode contribue, d’une part, à identifier les postes de travail à adapter lors d’un équilibrage mensuel
et, d’autre part, à mesurer immédiatement
l’impact de la modification d’un équilibrage
sur la flexibilité des différents postes de travail. Pour un équilibrage donné, elle permet
d’évaluer le volume maximal supportable par
les postes de travail et la flexibilité supplémentaire disponible. Ceci peut être utilisé
pour évaluer différents scénarios de plan de
production et permettre aux responsables d’équilibrage et de la ligne d’assemblage de trouver un compromis entre le volume à produire
et les moyens à mettre en place pour réaliser la
production.
La gestion de la production sur une ligne d’assemblage automobile s’appuie sur deux étapes successives : l’équilibrage des postes de
travail et l’ordonnancement des véhicules. La
méthode que nous proposons peut intervenir
durant ces deux phases.
Lors de l’équilibrage, les responsables de l’équilibrage de la ligne d’assemblage peuvent
l’utiliser pour valider la répartition des tâches
en vérifiant que les postes de travail peuvent
produire au moins la flexibilité offerte au
commerce (postes présentant un risque de non
absorption des aléas et postes sur dimensionnés). Pour les autres postes de travail, une
étude peut être diligentée pour évaluer les surcoûts liés au manque de flexibilité, et ainsi les
aider à identifier la nature des modifications à
apporter à l’équilibrage en cours pour réduire
ces coûts.
Lors de l’ordonnancement, cette méthode
peut également intervenir pour identifier quotidiennement, en début de journée, les postes
qui seraient insuffisamment dimensionnés par
rapport aux volumes de production prévus
pour la journée. Cette analyse peut constituer
un outil d’aide à la décision concernant l’anti-
Tableau 3 : Comparaison entre la classification des postes
et le nombre d’interventions (cas écrêté).
Classe
Nombre de
postes
Pourcentage de
postes
Nombre
d’interventions
Pourcentage
d’interventions
SOUS
68
35,00%
1041
93,00%
INSUFFISANT
17
8,80%
33
2,90%
RISQUE
9
4,60%
7
0,60%
SUR
100
51,60%
38
3,40%
Total
194
cipation des difficultés et ainsi pourrait aider
les équilibreurs à affecter le personnel nécessaire aux postes susceptibles de ne pas pouvoir assumer correctement la charge de
travail.
Pour le groupe PSA Peugeot Citroën, cette
classification constitue un premier pas vers
une optimisation du dimensionnement de leur
moyen de production. Toutefois, nous pensons que la méthode peut être appliquée chez
d’autres constructeurs automobiles. Le fonctionnement global de la ligne de montage
décrit est classique dans le secteur. Même si le
calcul du volume maximal peut varier selon la
gestion des surcharges, le calcul des flexibilités supplémentaires reste assez général.
L’extension de notre méthode vers d’autres
types d’industrie est potentiellement envisageable. Le calcul de capacité maximale statique est basé sur le fonctionnement d’une
chaîne de montage cadencée (avec une forte
cadence). Et, le calcul de la capacité maximale
dynamique sous-entend une grande diversité
de produit avec un séquencement basé sur
l’espacement des options « lourdes ». Une
industrie avec ces mêmes caractéristiques
peut, en effet, profiter de notre méthode.
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Logistique & Management
Logistique totalement intégrée
lors de la conception d’équipements
pour les pays en développement
Yaovi Ouézou AZOUMA
Université de Lomé, École Supérieure d’Agronomie
[email protected]
Diane RIOPEL
École Polytechnique de Montréal, Département de mathématiques et de génie industriel, CIRRELT
La fabrication d’équipements à petite échelle en Afrique éprouve d’énormes
difficultés d’approvisionnement en matière d’œuvre. Le Soutien Logistique Intégré,
facilite l’exploitation, la maintenance et améliore la durée de service de
l’équipement. Ce concept ne prévoit pas le retour des produits en fin d’usage,
l’organisation de l’approvisionnement en matériaux de récupération et la
protection de l’environnement. À partir d’une analyse croisée des méthodes
utilisées dans les pays industrialisés et des pratiques dans les pays d’Afrique une
démarche logistique combinant le Soutien Logistique Intégré et la Logistique
Inverse : Logistique Totalement Intégrée, peut générer des économies et réduire le
coût de possession.
Introduction
La majorité des pays en développement
(PED) est caractérisée par un faible revenu
national et de ce fait, dispose de peu d’épargne
à investir (Fremy, 2006). Malgré la nécessité
d’une plus grande productivité agricole pour
nourrir une population au taux d’accroissement élevé et l’intérêt du producteur pour la
plus value qu’offre la transformation des produits agricoles, cette situation contraint les
petites et moyennes industries (PMI), particulièrement les équipementiers d’Afrique, à la
fabrication à petite échelle des équipements
agricoles et agroalimentaires (EAA). Face
donc à la faiblesse de la capacité d’investissement des producteurs africains, la survie de
ces PMI réside dans la réduction autant que
possible du coût global de l’équipement qui
influence le coût de possession de l’utilisateur. Pour ce faire, l’une des solutions à ce
problème consiste à minimiser le coût de
revient des matériaux et matières d’œuvre.
Pour y parvenir, nous préconisons l’adoption
à la fois du Soutien logistique intégré (SLI) et
de la Logistique inverse (LI) que nous
appelons Logistique totalement intégrée
(LTI) dès la conception de l’équipement.
Après avoir précisé l’environnement sociotechnique et économique africain puis
démontré la pertinence du concept de la LTI
par rapport à la conception d’équipements
pour ce contexte, nous discutons des résultats
d’enquêtes auprès des équipementiers et des
utilisateurs d’équipements et traitons des
questions relatives au marché de la LI et aux
aspects législatifs, moteurs de la protection de
l’environnement. Enfin, nous présentons une
démarche LTI dans la conception d’EAA pour
l’Afrique.
Démarche méthodologique
Dans le cadre de l’enrichissement des démarches de conception d’équipements pour les
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Les auteurs remercient les
évaluateurs pour leur travail et
leurs commentaires très
constructifs. Ces travaux ont été
réalisés grâce au soutien
financier obtenu de l’UNESCO
dans le cadre de l’Appui des
domaines de programme
prioritaires (2006-2007) et du
CRSNG du Canada.
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Logistique & Management
pays en développement, une étude bibliographique sur les méthodes et pratiques de fabrication et de maintenance dans les pays du
Nord et du Sud (PdS) et une collecte d’informations auprès de 12 équipementiers de 3
pays d’Afrique de l’Ouest respectivement 6
au Bénin, 2 au Burkina Faso et 4 au Togo ont
été réalisées de 2001 à 2004. Au cours de cette
même période, une enquête a été faite auprès
de 28 utilisateurs possédant en tout 71 équipements constituant 21 types de machines, dont
7 agricoles et 14 agroalimentaires. Parallèlement, la validation au Togo de plusieurs résultats issus de ces études a eu lieu au cours de la
conception participative d’une charrette épandeuse de fumures organiques, en ingénierie
concourante (Azouma et al., 2007). Ces travaux qui ont permis de proposer plusieurs
méthodes et outils d’intégration de la fabrication et de la maintenance dans une démarche
de conception pluridisciplinaire pour
l’Afrique (Azouma, 2005) sont croisés avec
une étude bibliographique sur la LI (Gupta et
Isaacs, 1997 ; Rogers et Tibben-Lembke,
1998 ; Guide et Jayaraman, 2000 ; Fleischman, 2001 ; Lambert et Riopel, 2005 ; Yang
et Wang, 2007 ; Feng et Zhijun, 2008 ; Srivas-
tava, 2008). Aussi, en 2008, la recherche sur
le terrain a permis de collecter des informations sur les pratiques de LI en Afrique de
l’Ouest. Cette approche méthodologique permet de prendre en compte ce concept. En
outre, à partir des réalités du milieu, ce travail
étudie la mise en œuvre de chaque critère du
SLI dès la définition d’un équipement. Enfin,
la recherche de relations contribue à une meilleure intégration de ces deux concepts dans
une démarche de conception. Pour une meilleure compréhension de l’analyse des questions abordées et des approches de solution
proposées, il est indispensable de présenter le
contexte de l’étude.
Contexte sociotechnique
et économique africain
Les PME et PMI évoluent dans un environnement contraint caractérisé par les 12 constatations présentées au Tableau 1 sous forme de
contraintes et leurs impacts (Starkey, 1994;
Spinelli, 1996; ONUDI, 2000; Diallo, 2000;
Rozas, 2001; Azouma, 2005; Minouiu, 2005;
Fremy, 2006; Bationo, 2007).
Tableau 1 : L’environnement des PME et PMI
Contrainte
Impact
Faible capacité d’investissement et de pouvoir d’achat des populations Limitation de la productivité et par conséquent du marché commercial
Manque d’accès fluvial à un port maritime
Un tiers de la population totale en Afrique vit dans des pays enclavés (14
pays en tout), sans accès fluvial à un port maritime
Investissements très souvent dominés par les bailleurs de fonds
étrangers et les projets
Déviation des politiques nationales de développement, solutions exogènes
pas toujours adaptées
Accès au crédit très limité
Frein au développement des activités de production et d’innovation
Analphabétisme, production agricole et agroalimentaire à petite
échelle
Ralentissement de l’adoption des techniques et technologies modernes
plus performantes
Secteur informel qui rend difficile l’action des pouvoirs publics en
termes de prélèvement des impôts et de prise de décisions pour les
PME et PMI
Contribution au déficit du budget des États, peu d’entreprises compétitives
sur le marché international
Comportements socioculturels
Empêchement d’une gestion plus rationnelle des entreprises (gestion de
type familial, peu ou pas d’enregistrement et d’analyse approfondie des
informations liées aux activités de production et de maintenance)
Préférences des utilisateurs d’équipements pour les pièces « bon
marché »
Pièces « bon marché » disponibles localement au détriment des pièces
d’origine plus chères mais résistantes à l’usure
Exploitation faible ou irrationnelle des matériaux locaux ou localement Augmentation du coût de possession des équipements fabriqués
disponibles et des dérivés d’activités locales
localement
Importation de produits coûteux et exportation de produits bruts
Fuite des capitaux et la pauvreté : problème d’équité des prix et pas de
valeur ajoutée pour le producteur
Infrastructures de transport, de communication, d’énergie et d’eau
inexistantes ou peu développées dans les zones rurales
Vente de produits bruts, peu ou pas d’unités de transformation et de ce
fait, pas de plus-value pour les agriculteurs
Coûts de l’énergie (électricité et carburant), du transport et des
communications restent encore très chers pour les petites entreprises
Augmentation du coût de possession des équipements et du coût des
produits et des services
Barrières douanières et taxes à l’importation atteignent 20 à 30 %
Certaines décisions politico-économiques pénalisent lourdement la
fabrication locale de matériels : la taxation inopportune des matériaux
importés nécessaires à la fabrication de matériels sur place
Introduction de matériels agricoles et agroalimentaires complets
autorisée en exonération des taxes
Fabrication locale de matériels n’est pas assez encouragée et favorisée en
vue de la maîtrise des technologies
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Logistique & Management
Pertinence de la logistique
totalement intégrée - LI
Soutien Logistique Intégré – SLI
Le SLI est « une approche globale et itérative
du management et des techniques nécessaires
pour assurer à un système, ses performances
aux meilleurs coûts et délais tout au long du
cycle de vie » (Pons et Chevalier, 1996). L’environnement du soutien logistique dit « intégré » est composé du « sous-système
logistique » en corrélation avec le « sous-système équipement ». « Les activités consistant
à spécifier, définir, développer, produire et
livrer en temps utile l’ensemble des produits
constituent le « sous-système de soutien »
(Dumez, 1993). Le SLI est caractérisé par 9
critères qui doivent être en adéquation avec
les besoins et l’environnement de l’utilisateur
d’équipement : la documentation technique,
le plan de maintenance, la formation des utilisateurs, la manutention et le transport, le soutien informatique, les infrastructures, les
approvisionnements (pièces de rechange et
intrants, etc.), le personnel et les équipements
de soutien.
L’armée américaine a introduit un dixième
critère de SLI, le « Design interface » qui se
décline en dix sous-critères : la fiabilité, la
maintenabilité, la standardisation, l’interopérationnalité, la sûreté de fonctionnement, la
sécurité, la maniabilité ou facilité d’utilisation, l’environnement et la disposition des
matières dangereuses, la confidentialité et la
législation.
Ce critère du SLI comprend également 2
concepts : la conception pour la testabilité et
la conception pour l’élimination de l’équipement (US ARMY, 2005 ; Anon.1, 2007). Le
maintien en condition opérationnelle des systèmes interopérationnels tout en garantissant
à la fois la sûreté de fonctionnement et la sécurité puis en prévoyant les risques système, est
très complexe et coûteux. À titre d’exemple,
l’ensemble du système opérationnel d’avions
de combat et d’avions ravitailleurs en vol qui
doit être maintenu en condition opérationnelle par le soutien logistique. En outre,
concernant la protection de l’environnement,
les conditions : les traitements, les risques et
les coûts indispensables à la disposition responsable des armes nucléaires et chimiques
fabriquées par des industries de pointe ne sont
pas comparables à ceux d’une batterie de
véhicule et d’un réfrigérateur fabriqués par
des PME et PMI. Ainsi, en considérant l’ensemble des sous-critères proposés par l’armée
américaine pour le «design interface», ce critère s’apparente plus à un concept en soi qu’à
un simple critère. C’est une approche élaborée surtout pour des systèmes très complexes comme les systèmes d’armement et de
destruction massive, de plus en plus sophistiqués, qui ne convient pas aux entreprises de
production des services et des biens. De ce
fait, un dixième critère allégé de SLI, plus
accessible aux entreprises de type PME et
PMI, est proposé à la section 6.3 qui précise
les relations entre le SLI et la LI.
En Afrique, les forgerons ont acquis la capacité de fabrication et de maintenance de proximité des équipements agricoles manuels et à
traction animale. Les institutions de développement et les équipementiers forment les utilisateurs et multiplient les dépôts de pièces de
rechange en collaboration avec les commerçants. En ce qui concerne les équipements
agroalimentaires et les tracteurs, ces mêmes
conditions ne sont pas très souvent assurées
dans les zones rurales. Il faut alors rechercher
des solutions pour fournir un soutien logistique plus efficace à ces équipements, d’où
l’intérêt de l’adoption du SLI. L’ensemble des
critères du SLI peut être pris en compte à partir de la définition d’un équipement, pour faciliter son exploitation et sa maintenance puis
améliorer sa durée de vie ou de service. Des
solutions pour la mise en œuvre de chaque critère du SLI permettent à une équipe de
conception d’appliquer concrètement ce
concept dans l’environnement sociotechnique
et économique africain.
Logistique Inverse – LI
Des définitions orientées écologie, protection
de l’environnement et meilleure gestion des
flux des retours de produits dans les entreprises, sont données par plusieurs auteurs (Wu et
Dunn, 1995 ; Rogers et Tibben-Lembke,
1998 ; Stock, 1998 ; Rodrigue et al., 2001).
Dans cette étude, nous adoptons la définition
proposée par Lambert et Riopel (2005). « La
logistique inverse est le processus de planification, d’implantation et de contrôle de l’efficience, de la rentabilité des matières
premières, des en-cours de production, des
produits finis et l’information pertinente du
point d’utilisation jusqu’au point d’origine
dans le but de reprendre ou générer de la
valeur ou pour en disposer de la bonne façon
tout en assurant une utilisation efficace et
environnementale des ressources mises en
œuvre ». Elle est illustrée par la figure 1 qui
présente les interrelations entre les deux
aspects complémentaires de la LI.
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Logistique & Management
Figure 1 : Logistique inverse : relations entre la distribution inverse
et la logistique verte (Azouma et Riopel, 2007)
s’agit d’une pratique irrationnelle et non
organisée de la LI.
Pour ce faire, 2 sources d’approvisionnement
s’offrent aux équipementiers : la casse des
automobiles, des tracteurs, des chariots, des
appareils électroménagers et de diverses
infrastructures métalliques et le retour en fin
d’usage d’EAA fabriqués localement ou
importés. L’exploitation de ces 2 sources de
matières par une planification et organisation
rationnelles de stocks doit permettre : de protéger l’environnement en débarrassant les
espaces et ruelles souvent jonchés de ferrailles et de carcasses d’engins; de disposer et
rentabiliser au mieux les matières premières;
de reprendre des pièces et ferrailles pour
générer de la valeur. À partir de l’analyse des
enquêtes sur le terrain et des choix de disposition de la LI, des approches de solution d’intégration sont proposées.
Figure 2 : Étapes du traitement (Lambert et Riopel, 2005)
Marché de la LI
Le modèle intégrateur de la LI se déploie en 5
phases : Barrière, Collecte, Tri, Traitement,
Système d’expédition, dont l’étape de traitement se décline en plusieurs choix de dispositions ou traitements (Figure 2).
En général, 2 raisons majeures sont à l’origine
des retours d’EAA en Afrique : la réparation
sous garantie et le remplacement pour des raisons de mauvais fonctionnement. Cette situation, souvent pas réglementée, est traitée à
l’amiable entre l’équipementier ou le commerçant et le client. Une autre raison de retour
des produits est le recyclage des équipements
en fin de service (Yang et Wang, 2007 ; Feng
et Zhijun, 2008). Ce recyclage n’est pas
encore organisé ni surtout obligatoire pour le
couple «utilisateur - fabricant» en Afrique.
Les mécaniciens, les forgerons, les fonderies
locales et les PMI utilisent des matériaux et
matières d’œuvre d’occasion ou de récupération dans la fabrication et la réparation des
équipements. Par exemple, des tôles, des cornières et des fers ronds récupérés sont utilisés
pour la fabrication ou la réparation d’EAA. Il
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Pirot (1998) écrivait : « les pays africains sont
fortement dépendant des conditions d’approvisionnement en machines et en pièces détachées : problèmes de devises, de délais,
d’acheminement, de disparité de marques et
des modèles ». Face à cette situation, il s’avère
indispensable d’explorer les solutions qu’offrent les potentialités du marché de la LI. En
Afrique, les artisans utilisent principalement
les matériaux de récupération ou les ferrailles
pour la fabrication de tout ou partie d’EAA
(Makinde, 1993 ; Le Thiec, 1996). Les aciers
à ressort, les aciers de voies ferrées et certains
aciers pour les essieux permettent de fabriquer des outils de forge, tels que les dégorgeoirs, les étampes d’enclume, etc., dont la
durée de vie utile est satisfaisante (Stokes,
1994). Au Nord du Cameroun, la récupération
constitue la principale source d’approvisionnement en fer pour 95 % des artisans. Les prix
des matériels souvent de qualité inférieure,
produits par les forgerons, varient entre 40 et
90 % des prix de ceux importés. Au Sénégal,
les pièces sont vendues 2 à 3 fois moins chères
que les modèles d’origine. Par exemple à
Bobo-Dioulasso au Burkina Faso, pays
enclavé, les matières d’œuvre coûtent 20 à
54 % plus cher qu’au Ghana (Ouattara et Ouédraogo, 1998). Les charrettes à traction animale, fabriquées à l’aide d’essieux de vieilles
voitures, sont très répandues au Nigeria, au
Ghana, au Zimbabwe, au Botswana, en
Namibie, au Malawi central, en Tanzanie centrale et septentrionale (Starkey, 1993). Holtkamp (1991) affirme que le succès
remarquable de petits tracteurs d’Ayudhaya
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Logistique & Management
Protection de l’environnement et gestion
des ressources
couche d’ozone et des équipements les contenant (U.E.M.O.A, 2005 ; U.E.A.C, 2005). Ce
n’est pas suffisant, car plusieurs autres
actions, tout aussi indispensables sont entreprises ailleurs pour le développement durable.
Pour preuve, la directive de la Communauté
européenne sur le matériel d’emballage stipule que le client peut le laisser au détaillant et
ce dernier doit en assurer le recyclage (Fleischmann et al, 1997). Cette loi basée sur le
concept allemand, « Green Dot » est également adoptée dans plusieurs pays d’Asie
(Stock, 1998). Par exemple, à Taiwan, « The
Environmental Protection Administration » a
répertorié 16 produits tels que les PVC, les
bouteilles, les véhicules, les acides de batteries, les huiles usées, etc., pour lesquels, en fin
de vie ou après usage, il confère la responsabilité de la bonne disposition et du recyclage aux
producteurs, importateurs et aux détaillants
(Lee, 1997). La directive 2002/96/CE du Parlement européen et du Conseil fixe des mesures visant à prévenir la formation de déchets
électriques et électroniques ainsi qu’à promouvoir leur réutilisation, leur recyclage et
d’autres formes de valorisation. En outre, en
vue de contribuer à la valorisation et à l’élimination des déchets des équipements électriques et électroniques, ainsi qu’à la protection
de la santé humaine, les directives
2002/95/CE fixent des mesures relatives à la
limitation de l’utilisation de substances dangereuses dans ces équipements. Ces directives
sont suivies de plusieurs modifications et
dérogations par rapport aux progrès techniques enregistrés jusqu’en 2006 (J.O.C.E,
2002a) et (J.O.C.E, 2002b). Des modèles
mathématiques sont proposés en vue d’assurer une gestion conservatoire des matières
premières, la réduction des rebuts ou déchets
en optimisant les opérations des réseaux de
chaîne logistique et de logistique inverse
(Kocabasoglu et al, 2007 ; Min et Ko, 2008).
Srivastava (2008) a défini un nouveau
concept, la gestion de la chaîne logistique
verte soit « Green supply chain management GrSCM ». Ce concept préconise l’intégration
de l’environnement dans la gestion de la
chaîne logistique en tenant compte de la
conception, des matières d’œuvre, des procédés de fabrication, de la livraison du produit
final aux clients et de la gestion de la fin de vie
du produit. Cette approche rejoint la
démarche qui consiste à intégrer la LI dès la
conception d’un équipement.
Certes, plusieurs pays africains adoptent des
dispositions règlementant l’importation, la
commercialisation, l’utilisation et la réexportation des substances qui appauvrissent la
Les normes ISO 14000, 14001 et 14004 donnent des directives d’écomanagement (Stock,
1998), promoteur du développement durable
(en Thaïlande) ou de Tinkabi (au Swaziland),
imparfaits sur le plan de la technique, repose
sur la proximité des fabricants par rapport aux
principales régions d’utilisation de leur produit. La plupart des pièces sont disponibles en
1 ou 2 jours. Les tracteurs d’Ayudhaya sont
assemblés à partir de pièces neuves et de composants d’occasion révisés. Au sortir de la
guerre, plusieurs pays ont fait l’expérience de
l’utilisation de pièces d’occasion pour assembler un tracteur « neuf » à des coûts de production sensiblement réduits : RFA, Égypte et
«Jeepney» aux Philippines. Suite à la directive 2000/53/CE, en Europe, dès la construction d’un nouveau véhicule, sont prévues les
procédures de désassemblage décrivant le
mode de démontage, la liste des pièces à récupérer et leur composition (J.O.C.E, 2000). Les
procédures de désassemblage de la Renault
Laguna ont ainsi été transmises aux démolisseurs au moment même de son lancement
commercial (Pimor, 2001). Aux États-Unis,
Gupta et Isaacs (1997) expliquent que le recyclage des véhicules automobiles est en place
depuis plusieurs années et se fait en deux étapes, la première consiste à démonter les pièces de valeur pour les réutiliser et la
deuxième, à envoyer le reste de la carcasse au
recyclage pour les matériaux. Les épaves de
véhicules contenant 80 % de métaux constituent une importante source de matières premières pour les industries de recyclage ou de
métallurgie en Taiwan. Sont également recyclées, les motocyclettes (Lee, 1997). Minner
et Kleber (2001) déclare qu’il y a des raisons
économiques et écologiques de réutiliser les
pièces récupérées de vieux produits, soit pour
les utiliser dans de nouveaux produits ou s’en
servir comme pièces de rechange pour le service après-vente. 70 % des clients considèrent
que leur décision d’achat est conditionnée par
la garantie de pouvoir retourner le produit
(Feng et Zhijun, 2008). Selon ces auteurs, les
fabricants d’équipements très coûteux et
complexes, tels que ceux de l’industrie de
défense, la remise à niveau et la réutilisation
des composants pourraient réduire de façon
substantielle le besoin d’achat de nouveaux
équipements. Ils indiquent également que la
fonction LI est un facteur déterminant dans le
choix d’un fournisseur de service
après-vente.
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Logistique & Management
et moteur de la LI dans les entreprises et sociétés de services dans les pays industrialisés.
Ainsi, pour une meilleure protection de l’environnement et une gestion plus économique
des ressources en Afrique, des directives en
matière de LI sont indispensables pour compléter les dispositions sus-mentionnées.
L’analyse des critères du Soutien logistique
intégré (SLI) et de la Logistique inverse (LI),
les résultats d’enquêtes sur les pratiques de
fabrication et de maintenance d’équipements
agricoles et agroalimentaires, le contexte
sociotechnique et économique africain puis
l’étude des directives de protection de l’environnement promues dans le monde, permettent de proposer des solutions pragmatiques
d’application du LTI dans la conception d’équipements.
Résultats d’enquêtes auprès
des utilisateurs d’équipements
et des équipementiers
Des enquêtes réalisées auprès de 28 utilisateurs d’équipements en Afrique de l’Ouest
montrent que 88 % des agriculteurs choisis de
façon aléatoire pour répondre aux questions
sont analphabètes, mais les transformateurs
ont au moins fréquenté l’école primaire. Il s’agit essentiellement de système de production
Tableau 2 : Matériaux de récupération et leur utilisation dans la
fabrication
Désignation
Utilisation dans la conception
Lames de ressort de véhicule
Ressort en spirales de véhicule
Socs de charrue, becs de soc, pointes de
butteurs, dents de râteau
Châssis de véhicule
Tôles de citernes et de tanks
Bâtis de machines, châssis de chariots, de
charrettes, de remorques
Essieux avant de véhicules
Demi-arbre de camion
Charrette
Remorque
Pièces en bronze des blocs
Bagues, coussinets
Pignons de boîtes de vitesses, chaînes,
roulements
Chaînes cinématiques de matériels
agricoles et agroalimentaires
Pompes hydrauliques de véhicules lourds
Système de levage, presses
Figure 3 : Marché de la récupération à Akodésséwa à Lomé au Togo
de type familial ou coopératif (Azouma,
2005). Au Nord du Cameroun, 71 % des artisans qui fabriquent les équipements agricoles
à traction animale sont analphabètes
(Tchinda, 2000). Une enquête effectuée au
Burkina Faso par Bationo (2007) auprès de 39
unités de transformation agroalimentaire
montre que 71 % des opérateurs ont une formation par « apprentissage sur le tas ». Ces
opérateurs sont d’un niveau scolaire généralement très faible et ont des difficultés pour lire
et écrire. Ce constat doit être pris en compte
dans la caractérisation de la formation à dispenser, dans l’élaboration du manuel d’utilisation et la mise en place du soutien
informatique. Parmi les problèmes que rencontrent les 12 équipementiers interrogés,
83 % considèrent que la disponibilité des
matériaux et des matières d’œuvre est prépondérante.
Les difficultés d’approvisionnement concernent les fer plats de 30 x 10, 50 x 20, 40 x 12,
l’acier au mangano-silicium, les aciers durs,
les barres en acier doux de diamètre 20 à
100 mm, l’acier en inox de diamètre 60 mm, le
tube de diamètre 160 x 16. La plupart de ces
matières ne sont pas fabriquées dans les pays
d’Afrique. Les commandes passées en
Europe, en Amérique ou en Asie ne sont recevables par les fournisseurs et rentables pour
les équipementiers, aux fonds de roulement
souvent limités, qu’à partir d’une certaine
quantité. L’une des solutions adoptées par les
équipementiers pour réduire les coûts de
fabrication et rester rentables est l’utilisation
dans la mesure du possible des matériaux de
récupération (Tableau 2) et (Figure 3). De
façon générale, dans le cas de la conception
des équipements à petite échelle qui caractérise l’Afrique, au regard de la littérature et des
pratiques, il y a lieu de faire les remarques suivantes : au cours du cycle de vie, l’unique traitement de la LI que les équipes de conception
confèrent aux équipements fabriqués, est la
fonction « réparé »; le SLI n’est pas pris en
compte dès la conception de l’équipement; il
n’y a pas encore de législation qui oblige les
entreprises et fournisseurs de produits ou services à intégrer la LI. Ainsi, nos différentes
propositions vont permettre de pallier ces
insuffisances.
Démarche de LTI dans la
conception d’équipements
pour les pays d’Afrique
Nous préconisons 3 types de propositions pour une prise en compte efficace et effi-
Photo: Azouma, 2008.
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Logistique & Management
ciente du SLI et de la LI dans une démarche de
conception pour l’Afrique : 1) principes et
méthodes pratiques d’intégration du SLI dans
la conception; 2) approches de solution pour
l’intégration de la LI dans la conception et 3)
relations et recommandations d’ordre général.
Méthodes d’intégration du SLI
dans la conception
Le tableau 3 indique la démarche d’application du SLI au cours de la conception d’un
équipement pour l’Afrique. Les figures 4 et 5
complètent cette démarche et présentent les
principes d’intégration de la maintenabilité
d’un équipement à concevoir.
La définition d’un Cahier des Charges Disponibilité (CdCD) au cours de l’analyse du
besoin et de l’état de l’art, permet de caractériser en collaboration avec l’équipementier et
les utilisateurs d’un équipement à concevoir,
les critères de fiabilité et de maintenabilité
attendus (Azouma, 2005). Les questions à
prendre en compte concerneront : 1) la résistance des pièces et sous-ensembles à l’usure et
à la rupture ; 2) le taux de qualité des produits
(équipement et produits alimentaires provenant de cet équipement) ; 3) la charge effective
annuelle de travail ou la production agricole
annuelle ; 4) le fonctionnement manuel,
motorisé ou automatisé ; 5) les pannes fréquentes des équipements utilisés ; 6) les coûts
moyens de réparation ; 7) la détermination des
critères de maintenabilité par rapport à l’environnement technologique.
Ces critères de maintenabilité sont : la normalisation et la standardisation par rapport aux
composants des équipements fabriqués localement et aux matières d’œuvre disponibles,
la réduction du nombre de systèmes de fixation, les compétences en maintenance dans le
milieu ou la région d’utilisation, les tâches de
maintenance généralement exécutées par les
utilisateurs, les temps d’attente du réparateur
et la durée moyenne des réparations, les
conséquences vécues de non-maintenance.
Tableau 3 : Méthodes pratiques d’intégration des 9 critères du SLI
dans la conception pour l’Afrique
Critères du SLI
Méthodes pratiques d’intégration
Documentation
technique
Rédaction d’un manuel d’utilisation essentiellement sur la base
de pictogrammes et de symboles
Plan de maintenance
CdCD - Démarche d’élaboration d’un plan de maintenance Maintenance Distribuée pour l’Afrique (MDA) (Figure 4)
Formation des
utilisateurs
Travaux Pratiques : utilisation + maintenance préventive +
automaintenance - Suivi temporaire du couple
« utilisateur-équipement » si possible — Alphabétisation
Manutention et
transport
Automotricité de l’équipement — Réduction du poids de
l’équipement — Désassemblage possible en sous-ensembles
Pour les PME de production agricole et agroalimentaire, prévoir
Soutien informatique un programme de saisie de données aux fins d’analyse et de
maintenance des équipements
Infrastructures
Fonctionner uniquement si possible à partir de la Chaîne de
Approvisionnements
Soutien Logistique du milieu d’exploitation de l’équipement
(pièces & intrants)
(Figure 5)
Personnel
Réseau local de maintenance centrée sur les tâches
- Utilisateurs : Maintenance de niveau 1 (Norme FDX 60-000)
Forgerons ruraux : Maintenance de niveau 2
Mécaniciens : Maintenance de niveaux 3, 4 et 5
Équipements de
soutien
Pouvoir exploiter l’équipement conçu sans équipements de
soutien non intégrés ou avec ceux disponibles localement
Figure 4 : Démarche d’élaboration d’un plan de maintenance
d’un équipement en Afrique
Figure 5 : Chaîne de soutien logistique aux équipements en Afrique
Méthodes pour les EAA
La figure 6 montre le système de LI envisagé
pour les équipementiers d’Afrique avec les
choix de traitement retenus. Considérant que
l’équipementier doit contribuer à l’élimination et à la revalorisation de son produit au
cours ou en fin de service, l’étape de la barrière du modèle intégrateur (Lambert et Riopel, 2005), dans notre cas d’étude, n’est pas
nécessaire.
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Figure 6 : Démarche de la logistique inverse pour les équipementiers
en Afrique
Tri et entreposage
Les équipements sont classés selon les critères d’inspection énoncés et par types : agricole et agroalimentaire. Il faut aménager un
espace pour ranger les équipements en toute
sécurité.
Traitement
Figure 7 : Système d’approvisionnement en matériaux et matières
d’œuvre orienté LI pour l’Afrique
Aussi, les traitements retenus se justifient par
les deux raisons majeures à l’origine des
retours d’EAA évoquées par le contexte
sociotechnique et économique africain décrit
dans le sous titre 3 puis dans la section 4.2.
Collecte et inspection
Les utilisateurs rapportent leurs équipements
à traiter chez l’équipementier ou dans les
points de vente : dépôts ou chez le commerçant. À partir de points de ramassage établis
de commun accord avec les différents acteurs
et en se servant des points de vente comme
centres d’information, il est possible d’envisager la programmation de collectes groupées. L’équipementier devra signer un contrat
ou avoir une entente ferme avec le commerçant sur le retour des produits. L’inspection
permet d’une part de différentier les équipements en fin de service et de ceux partiellement amortis et d’autre part, de s’assurer de la
conformité de la demande du client avec l’état
de l’équipement avant le transport vers
l’atelier de fabrication.
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Nous préconisons 5 choix de traitement. Une
dynamique de R&D au sein de l’entreprise
permet une meilleure exploitation de 2 offres
de service aux clients : la remise à niveau et la
reconfiguration du produit. La remise à
niveau est réalisée sur demande du client ou
sur décision du fabricant pour la revente. Le
recyclage concerne les équipements en fin
d’usage ou service qui subissent des opérations de récupération de pièces puis les carcasses sont vendues à la fonderie.
Le système d’information privilégie les
moyens de communication adoptés par les
différents acteurs : les équipementiers, les
opérateurs dans les points de vente et les utilisateurs. Il s’agit du téléphone ou de la télécopie en zones urbaines, de commissions par
l’intermédiaire de voyageurs, de courriers
transmis par les chauffeurs de véhicules de
transport en commun, des déplacements de
chaque acteur pour affaire dans les zones rurales. Cette approche de LI est complétée par un
système d’approvisionnement en pièces et
matériaux récupérés, illustré par la figure 7 et
plusieurs préconisations. L’équipementier
mène des activités de désassemblage de véhicules, d’appareils électroménagers et de constructions métalliques dans un rayon régional
économiquement accessible; c’est une nouvelle source de revenus : vente de diverses pièces de rechange aux utilisateurs et de la
carcasse aux fonderies. Le dépôt d’équipements neufs par l’équipementier et la reprise
de ceux en fin d’usage rapportés par les utilisateurs dans les points de vente ou chez les
commerçants permettent d’éviter des frais de
transport imputés exclusivement à l’activité
des retours. Les retours vont engendrer trois
offres de service très peu ou pas exploitées : la
remise à niveau et surtout la remise à neuf
comme alternative à la réparation, la reconfiguration d’EAA puis la vente de carcasses
métalliques à des fins de recyclage en fonderie. À partir de l’étude des coûts des réseaux
de collecte et de traitements des équipements
renvoyés, Srivastava (2008) estime que dans
le contexte indien, la refabrication ou la
remise à neuf à petite échelle n’est pas économiquement viable. Fort de cette expérience,
pour la mise en œuvre de la LI en Afrique, il
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faut minimaliser les investissements et traiter
une masse critique d’équipements.
À cet effet, depuis quelques années, des
sociétés indiennes mènent d’intenses activités
d’achat de carcasses de tout genre, véhicules
et constructions métalliques qu’ils exportent
vers l’Inde à partir de plusieurs ports : Lomé
(Togo), Cotonou (Bénin), Abidjan (Côte
d’Ivoire). En dehors des équipements hors
usage collectés dans ces pays côtiers, d’importantes quantités de carcasses arrivent de
différents pays enclavés d’Afrique de
l’Ouest : Burkina Faso, Mali, Niger (Figure
8). Dans le système de fabrication à petite
échelle, il y a souvent des périodes mortes
sans ou avec des productions très faibles. On
assiste souvent à des licenciements temporaires ou « congés techniques » non rémunérés.
Ces temps seront consacrés aux différents
traitements inhérents à l’adoption de la LI :
c’est une nouvelle solution de plein emploi.
Figure 8 : Ferrailles en attente de mise en conteneurs dans le port de
Lomé au Togo
Photo: Azouma, 2008.
Tableau 4 : Les 10 critères du SLI vert
Critère
N
1
La documentation technique
2
Le plan de maintenance
3
La formation des utilisateurs
4
La manutention et le transport
Relations entre le SLI et la LI
et recommandations
5
Le soutien informatique
6
Les infrastructures
L’étude des concepts du SLI et de la LI permet
de relever plusieurs interrelations: la maintenance (réparer ou remettre à neuf les équipements); l’approvisionnement (pièces de
rechange, matériaux et intrants neufs ou récupérés); la manutention et le transport, les critères de facilitation de l’exploitation et des
retours de produits (désassemblage, mise en
kits, portabilité de l’équipement); l’utilisation
rationnelle de l’équipement (amélioration de
la productivité et économie des ressources).
Le SLI doit évoluer vers un dixième critère
adapté aux conditions des entreprises de production des services et des biens qui porte sur
la reprise du produit ou de l’équipement en fin
de service pour une meilleure disposition ou
pour des traitements adéquats. Ce nouveau
critère est conforme aux nouvelles législations déjà imposées aux fabricants en Europe,
en Asie et en Amérique du Nord et qui vont
certainement s’étendre au monde entier.
Ainsi, nous obtenons un concept actualisé du
SLI (Tableau 4) que nous nommons « le SLI
vert », car il prend en compte la gestion
conservatoire des matières et la disposition
responsable des matières dangereuses.
7
Les approvisionnements (pièces de rechange et intrants)
8
Le personnel
9
Les équipements de soutien
10
Le retour des équipements hors usage ou en fin de service*
Plusieurs recommandations sont proposées
pour faciliter et permettre une prise en compte
efficace et efficiente du SLI et de la LI dès la
conception d’un équipement.
• Faire une étude technicoéconomique pour
la mise en place progressive des activités de
la LI dans les PMI : moyens matériels et
techniques indispensables, espace d’entre-
*Nouveau critère introduit dans le SLI
posage, acquisition de plans de désassemblage s’ils existent, organisation du travail
et du système d’information.
• Former les travailleurs aux techniques de
désassemblage et à la disposition des matières dangereuses de façon responsable.
• Élaborer une politique commerciale et de
marketing autour des nouvelles offres de
service aux clients : intérêts des utilisateurs
pour le retour des équipements (indemnités
forfaitaires, offres de conditions incitatives
pour le remplacement d’un équipement
rapporté par un utilisateur) et sensibilisation pour la participation à la protection de
l’environnement.
• Enrichir le répertoire des types de pièces ré-
cupérées (Tableau 2) qui composent les
EAA. Inciter les États d’Afrique à prendre
des directives pour promouvoir la LI, en
faisant obligation aux équipementiers, importateurs et commerçants de reprendre les
équipements pour en assurer les meilleurs
traitements. Ils auront l’obligation de reprendre les équipements en fin de service
sans taxer l’utilisateur.
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Conclusion
Ce travail a permis de proposer un nouveau
concept, la LTI obtenue à partir de l’étude de
la pertinence du SLI et de la LI par rapport à la
conception d’équipements pour les PdS et de
la recherche des interrelations entre ces 2
concepts. Des solutions d’intégration du SLI
et de la LI complétées par un système d’approvisionnement en matériaux et matières
d’œuvre orienté LI puis des recommandations
permettent de prendre en compte la LTI dans
une démarche de conception pour l’Afrique.
Malgré quelques pratiques observées sur le
terrain qui relèvent de la LTI, la conception en
entreprise d’un nouveau produit par une
équipe pluridisciplinaire sera le lieu de la validation de l’ensemble des propositions de cette
étude.
Feng, W. And Zhijun, T., (2008), “Research
on Cooperation with 3PLs in Reverse Logistics”, 2008 International Conference on Wireless Communications, Networking and
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Azouma, Y. O. (2005), Intégration de la fabrication et de la maintenance dans une
démarche de conception pluridisciplinaire
d’équipements agricoles et agroalimentaires
pour l’Afrique. Thèse de doctorat en Génie
industriel UFR des Sciences et Techniques de
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Simulation et gestion des chaînes
logistiques globales dans l’incertain :
application à une filière agro-alimentaire
face à la crise sanitaire
Thi Le Hoa VO
CREM, UMR CNRS 6211 / IGR-IAE de Rennes, Université de Rennes 1
[email protected]
La complexité et les incertitudes liées à l’environnement extérieur d’une chaîne
logistique exigent aujourd’hui une gestion de plus en plus complexe de la chaîne
globale. Modélisation et simulation sont devenues des méthodes courantes
d’amélioration et de pilotage de chaînes logistiques, notamment pour les chaînes
qui sont dans des situations de déséquilibre et d’instabilité. Cet article essaye donc
de mettre en évidence le rôle important de ces outils dans la gestion de la chaîne
logistique globale, principalement les chaînes logistiques multi-échelons, en
illustrant une application de la simulation dynamique d’une filière agroalimentaire dans un contexte de crise sanitaire.
Introduction
Aujourd’hui, la gestion de la chaîne logistique
globale (ou Supply Chain Management en
anglais) est devenue l’une des formes organisationnelles contemporaines les plus courantes. Le terme « Supply Chain Management »
(SCM) a été utilisé non seulement pour expliquer les activités logistiques, la planification
ou le contrôle des flux physiques et informationnels internes ou externes entre les entreprises (Christopher, 1992 ; Cooper et al,
1997) mais aussi pour révéler les problèmes
stratégiques et inter-organisationnels (Cox,
1997 ; Harland et al 1999), discuter d’une
autre forme d’organisation pour l’intégration
verticale (Hakansson et Snehota, 1995) ou
encore pour identifier et décrire une relation
développée par une entreprise avec ses fournisseurs (Narus et Anderson 1995). Il existe
donc une quantité considérable de sujets de
SCM comme : achat, logistique et transport,
marketing, comportement organisationnel,
réseaux, gestion stratégique, système d’information de gestion et gestion opérationnelle.
Par ailleurs, comment faire face aux fluctuations de l’offre et de la demande est une question vitale dans la gestion de la chaîne
logistique globale. En préalable, il est utile de
bien distinguer la stabilité de la Supply Chain
qui réagit à un certain nombre de perturbations, des sources elles-mêmes provoquant sa
réaction au déséquilibre. Ces sources perturbatrices de types endogènes et exogènes sont
souvent à l’origine du Bullwhip Effect1. Tout
d’abord, les perturbations endogènes proviennent du système lui-même. Par exemple, les
décideurs qui estiment que leurs clients ou
leurs fournisseurs prennent des mauvaises
décisions, peuvent choisir de dévier de leur
stratégie de recherche d’équilibre en se constituant un stock régulateur contre le risque de
comportement « non-optimal ». Ce comportement causera ensuite une perturbation chez
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1 - Le Bullwhip Effect, source
majeure d’inefficacité de la
chaîne logistique de
production-distribution, se
décrit par un phénomène
d’amplification des
approvisionnements à chaque
échelon de la supply chain suite
à des fluctuations de la
demande (Lee et al, 1997)
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leurs propres fournisseurs. Puis les perturbations exogènes sont causées par des variations
imprévisibles de la consommation.
De nombreux travaux de recherche ont montré que la structure de la supply chain joue un
rôle important dans les changements comportementaux de la chaîne face aux incertitudes
de son environnement. Selon Sterman
(2006), « the dynamics of supply chain networks arise endogenously from their structure ». Forrester (1961) a montré que les
caractéristiques structurelles de la chaîne
logistique peuvent amener les agents rationnels à amplifier les variations de la demande
causant l’instabilité de la chaîne. En effet, la
chaîne logistique peut être dynamiquement
instable face à des perturbations de production et de consommation en raison des différents délais d’adaptation de capacité de
production et de stock et du feed-back dans les
décisions de régulation entre les acteurs de la
chaîne (Forrester, 1961 ; Sterman, 1989). Taylor (1999) a proposé que les variabilités de la
fiabilité des outils de production et du produit,
de la capacité opérationnelle et de la qualité du
produit soient les causes principales de l’amplification de la demande ou du Bullwhip
Effect. D’autres chercheurs scientifiques
comme Chen et al (2000), Simchi-Levi et al
(2000) et Shen (2001) ont aussi constaté que
des choix d’optimisations locales indépendantes de chaque acteur sans vision globale
sont la cause du Bullwhip Effect.
Dans cet article, nous allons d’abord analyser
les modèles de simulation de gestion de la
chaîne logistique globale dans l’incertain.
Ensuite, nous allons présenter les principes et
les applications de la dynamique des systèmes
dans la gestion de chaînes logistiques en général et des chaînes agro-alimentaires en particulier. Enfin, un modèle de dynamique des
systèmes des flux logistiques de la filière avicole française face à la crise de l’influenza
aviaire sera proposé et analysé pour consolider notre recherche.
Modèles de simulation de la
gestion des chaînes logistiques
dans l’incertain
Depuis quelques années, la modélisation et la
simulation sont des approches de plus en plus
utilisées au niveau du SCM. Ballou (1992) a
montré que lorsqu’on étudie une chaîne logistique composée de plus de deux échelons, la
gestion des stocks de toute la chaîne entière
devient extrêmement difficile pour les analy-
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ses mathématiques et le recours principal est
souvent la technique de simulation informatique. Cette technique est devenue indispensable pour les analyses basées sur l’intégralité
de la chaîne logistique (Wyland et al 2000).
La technique de simulation a été initialement
utilisée dans les recherches sur le comportement et la performance des chaînes logistiques vers la fin des années 1980. Récemment,
cette méthode a été largement utilisée pour
étudier le comportement des chaînes logistiques multi-échelons influencé par les facteurs
exogènes et endogènes (Bhaskaran,1998 ;
Petrovic, 1999, 2001 ; Banerjee et al 2001,...).
En effet, un des facteurs exogènes les plus
importants qui influence le comportement de
la chaîne logistique est la demande des clients.
Une des conséquences catastrophiques de
l’amplification des fluctuations de la
demande de l’aval jusqu’en amont de la
chaîne est le phénomène Bullwhip Effect (Lee,
et al 1997). Différentes recherches sont réalisées pour étudier les causes et effets de ce phénomène. Bhaskaran (1998) a mentionné que
l’échec dans les contrôles de l’instabilité des
planifications résulte d’une moyenne très
élevée des niveaux de stock. Van Donselaar et
ses collègues (2000) ont réalisé un essai par
simulation pour montrer que pour obtenir une
stabilité dans les planifications, il est nécessaire d’utiliser les informations sur la
demande par les clients finaux (les consommateurs) plutôt que par les clients immédiats.
Wilding (1998) a démontré que les effets
chaotiques engendrent aussi l’incertitude
dans les chaînes logistiques. Pour réduire ces
effets, il est important de diffuser le plus largement possible les informations sur la
demande des clients finaux d’aval en amont.
Mason-Jones et Towill (1997, 1998) ont suggéré que le partage d’information peut réduire
l’amplification des variations de la demande
et améliorer l’utilisation de la capacité. Par
ailleurs, Towill et McCullen (1999) ont trouvé
quatre principes pour le flux de matériels :
système de régulation, compression du temps,
transparence d’information, limitation des
échelons appliqués afin de minimiser cette
amplification et le niveau de stock. Selon de
Souza et ses collègues (2000), avec une réduction des délais d’information plutôt que les
délais de matériel, on peut obtenir une amélioration de la performance et une augmentation
de la qualité du service. Récemment, la logistique floue a été introduite en simulation pour
analyser le comportement et la performance
des chaînes logistiques multi-échelons sous
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un environnement incertain (Petrovic,1999,
2001).
La chaîne logistique peut aussi devenir dynamiquement instable lorsqu’elle est face aux
perturbations dans les systèmes de production
par les facteurs endogènes suite aux variations de la consommation. Ces perturbations
surviennent à cause, non seulement des délais
de l’adaptation des capacités de production et
de stock, mais aussi des feedbacks de décision
dans la chaîne entière (Nagatani et Helbing,
2004). Il existe dans la littérature de nombreuses recherches mettant l’accent sur les problèmes de stratégies de pilotage et plus
précisément, sur l’instabilité des flux logistiques (Chopra & Meindl, 2001 ; Helbing et al
2003). Nagatani et Helbing (2004) ont montré
qu’une analyse linéaire de la stabilité d’une
chaîne logistique perturbée permet d’obtenir
une adaptation efficace pour faire face aux
variations de la consommation en aval et aussi
aux fluctuations des capacités de stock en
amont. En effet, ils ont proposé une technique
d’anticipation du niveau futur du stock pour
stabiliser le système logistique. Néanmoins,
cette approche est limitée car les amplitudes
des oscillations sont souvent plus considérables et les effets non-linéaires sont prédominants.
Par ailleurs, les recherches en logistique sont
aussi basées sur les techniques de modélisation et simulation à événement discret. Vorst
van der et ses collègues (2000) ont utilisé la
simulation discrète pour modéliser le comportement dynamique d’une chaîne logistique
agro-alimentaire et évaluer les différentes
structures alternatives proposées pour la
chaîne. Chang et Makatsoris (2001) ont suggéré la nécessité de la technique de la simulation discrète pour les recherches en logistique.
Godding et al (2004) ont proposé d’utiliser à
la fois les modèles de simulation discrète et
les techniques de programmation linéaire
appliquées dans la conception structurelle et
opérationnelle des réseaux de chaînes logistiques de fabrications de semi-conducteurs.
Néanmoins, très peu, parmi les applications,
ont étudié quand et comment la simulation
discrète est réellement utilisée dans les processus de prise de décision pour l’industrie
ainsi que dans les activités de fabrication et de
logistique.
En outre, les simulations dynamiques ont
prouvé leur pertinence dans l’analyse des
chaînes logistiques avec leur système de feedback interactif et hiérarchique intangible
(Pidd, 1984). Les modèles de simulation
basés sur les principes de la dynamique des
systèmes de Forrester (1961) de la chaîne
logistique sont originellement appliqués dans
les systèmes industriels, montrant que la
structure de la chaîne logistique et la gestion
des flux déterminent sa performance. De
nombreux modèles de dynamique des systèmes de chaîne logistique ont été construits
(Forrester, 1961 ; Senge and Sterman, 1992 ;
Thiel, 1996 ; Cheng, 1996 ; Sterman, 2000 ;
Higuchi and Troutt, 2004 ; Kamath and Roy,
2007 ; Rabelo et al 2008…).
Principes et applications
de la dynamique des systèmes
La dynamique des systèmes est l’une des
méthodologies les plus pertinentes et appliquées dans le domaine de SCM qui permet de
comprendre l’évolution d’un système
complexe et changeant. Développée par Jay
W. Forrester (1961) avec les concepts fondamentaux de rétroaction et de délai qui déterminent le comportement du système, la
dynamique des systèmes est devenue un outil
important pour analyser et résoudre les problèmes complexes.
Les concepts de base
Les variables de niveau (stock) et de taux
(flow)
Dans les modèles de dynamique des systèmes, il est important de distinguer deux types
de variables fondamentales : variable de
niveau (stock) et variable de taux (flow). Les
variables de niveau représentent les résultats
accumulés dans le temps. Ce sont des variables qui représentent l’état (physique ou informationnel) du système en l’instant t. Les
variables de taux représentent le taux de changement des niveaux.
En général, l’équation de ce niveau est :
t
Niveau(t) = Niveau(t = 0) +
entrée
- TAUXsortie)dt
t=0
Cette équation explique que pendant un intervalle de temps dt, le changement de valeur du
niveau est mesuré par la différence entre ce
qui entre et ce qui sort. Si un modèle a n
niveaux, il a mathématiquement un système
de n équations différentielles du premier
ordre.
Effets causaux positifs et négatifs et les boucles de feedback
La relation entre deux variables x ® y est une
relation causale, c’est-à-dire la variable
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entrante x a une influence causale sur la
variable sortante y. Une influence positive
signifie qu’un changement de x cause un
changement de y dans une même direction :
une augmentation (diminution) de x cause une
augmentation (diminution) de y. Le signe
« + » indique une causalité positive. En
revanche, une influence négative signifie une
augmentation (diminution) de x cause une
diminution (augmentation) de y (direction
opposée). Le signe « - » indique une causalité
négative. Par ailleurs, Une boucle de feedback
est une succession de relations cause-effet qui
commence et finit avec la même variable ce
qui constitue une causalité circulaire. Le signe
d’une boucle dépend des signes des relations
dans la boucle. Une boucle est positive ou
d’amplification (le signe est « + ») si elle
contient un nombre pair de relations négatives
ou elle ne contient aucune relation négative.
Une boucle est négative ou autorégulatrice (le
signe est « - ») si elle contient un nombre
impair de relations négatives. Les boucles de
feedback positives ou négatives sont les éléments de base des structures dynamiques.
Les délais
Dans la dynamique des systèmes, les délais
jouent un rôle important. En général, un délai
est un niveau dont le flux de sortie est fonction
uniquement du niveau lui-même et de quelques constantes. Des délais importants peuvent intervenir dans les causes et effets. Il y a
deux catégories principales de délais : délais
de matière et délais d’information (lissage).
Délais de matières se trouvent dans les chaînes flux-stock et créent des décalages entre les
entrées et les sorties. Le rôle du délai d’information est de lisser l’historique des informations. En principe, un délai d’information (ou
un délai de lissage de l’information) repré-
Figure 1 : Les étapes principales de construction d’un modèle
de dynamique des systèmes
sente la valeur moyenne ou du moins la valeur
en régime permanent de l’information.
Les étapes principales de construction
des modèles (figure 1)
A partir de l’observation de la réalité d’un système, un diagramme de causalité sera réalisé
permettant de la représenter en montrant les
mécanismes dynamiques du système observé.
Basé sur ce diagramme, un modèle flux-stock
sera développé en élaborant les formulations
mathématiques, notamment les équations différentielles, qui décrivent les relations
cause-effet pour toutes les variables et en
construisant le diagramme flux-stock. Le
modèle flux-stock est donc une façon graphique permettant de représenter en détail la
structure de la chaîne et les boucles de rétroaction présentées dans le diagramme de causalité. Ce modèle sera lui-même simulé faisant
donc objet d’expérimentation à travers la
simulation. Les résultats de simulation vont
nous permettre par induction de comprendre
des phénomènes émergeant de ce système et
ils serviront à proposer éventuellement des
modifications nécessaires.
Quelques applications
La dynamique des systèmes trouve ses applications récentes dans l’analyse de la chaîne
logistique. Par exemple, Riddalls et ses collègues (2000) ont démontré que la simulation
dynamique est la seule méthode pour examiner le comportement global d’une chaîne
logistique. Gonçalves (2003) a utilisé la dynamique des systèmes pour étudier l’impact
endogène de la demande sur l’instabilité du
système. Il a proposé que la demande endogène influence les changements dans les
modes opérationnels avec les pertes de vente
et les boucles de la production poussée. Par
ailleurs, Son et Venkateswaran (2007) ont
proposé une simulation hybride utilisant à la
fois deux aspects, discret et continu, pour étudier les systèmes complexes comme les chaînes logistiques. Rabelo et ses collègues
(2008) ont présenté l’application de la dynamique des systèmes pour prévoir les changements comportementaux dans les chaînes
logistiques de fabrication sous les influences
exogènes et endogènes dans deux dimensions
de temps (court terme et long terme). Selon les
auteurs, cette méthodologie permet aussi d’identifier les causes qui peuvent provoquer un
comportement négatif du système.
Dans la gestion des chaînes logistiques
agro-alimentaires, Cloutier et Sonka (1998)
ont montré « comment la dynamique des sys-
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tèmes peut contribuer à la découverte d’opportunités stratégiques dans l’étude de la
coordination entre les différents maillons
d’une filière agro-alimentaire ». Avec un
modèle de dynamique des systèmes, Vorst
van der et al (2000) ont reconnu que les sources majeures d’incertitude dans une chaîne
logistique agro-alimentaire sont le délai de
prévision, la disponibilité d’information et de
données, les politiques décisionnelles utilisées, les incertitudes inhérentes aux activités
de livraison, des processus, ou de la demande.
Minegishi et Thiel (2000) ont construit un
modèle de dynamique des systèmes appliqué
dans la filière avicole pour expliquer les comportements complexes de l’industrie de la
volaille. Avec ce modèle générique de simulation, les auteurs ont montré des phénomènes
d’instabilité et les moyens de contrôler les
systèmes de la filière face à des fluctuations
importantes des ventes aux consommateurs.
Néanmoins, cette recherche ne s’intéresse pas
au comportement global de la chaîne logistique de la filière qui est simultanément perturbée par des variations de l’offre et de la
demande. Par ailleurs, Georgiadis et al (2005)
ont adopté la méthodologie de la dynamique
des systèmes comme un outil de modélisation
et d’analyse pour étudier les issues stratégiques dans les chaînes logistiques multi-échelons agro-alimentaires. Pour construire leur
modèle de dynamique des systèmes, ils ont
d’abord créé les systèmes de stock générique
avec un seul échelon qui incorpore toutes les
variables d’état et les politiques de contrôle de
stock et planification de la capacité de production. Sur la base de ce modèle, ils ont montré
comment construire les modèles génériques
de la chaîne logistique multi-échelons au
niveau stratégique.
Application à la filière avicole
française face à la crise
de l’influenza aviaire
En France, l’industrie agro-alimentaire est le
premier secteur d’activité en termes de chiffre
d’affaires2. La France reste le leader européen
agro-alimentaire et la deuxième industrie
agro-alimentaire mondiale après les
Etats-Unis en chiffre d’affaires. Avec un
record des ventes à 45,2 milliards d’euros en
2007, la France conserve sa place de troisième
position des pays exportateurs de produits
agro-alimentaires derrière les Etats-Unis et
les Pays-Bas3. Au niveau de la volaille, premières en tonnage dans l’Union Européenne
et sixièmes dans le monde (derrière les
Etats-Unis, la Chine, le Brésil, le Mexique et
l’Inde), les filières avicoles françaises se singularisent par la diversité de leur production4.
Le poulet représente près de la moitié des tonnages produits. La viande de volaille est la
viande la plus échangée dans le monde, et les
flux des échanges internationaux ont triplé
depuis 1990 (de 2,7 millions de tonnes en
1990 à 9,7 millions de tonnes en 2005) selon
l’ITAVI5. La viande de volaille est la seconde
produite en France derrière le porc.
Toutefois, depuis quelques années, la filière
avicole a subi des crises sanitaires comme
l’influenza aviaire et aussi des risques sanitaires émergents tels que les toxi-infections alimentaires de type Campylobacter jejuni.
D’une part, ces problèmes sanitaires ont provoqué des conséquences économiques importantes dues à des défaillances du pilotage à
différents niveaux de la chaîne logistique de la
filière. Par exemple, en six mois de crise de
l’influenza aviaire, l’ensemble de la filière
avicole française a perdu environ le quart de
son activité et les stocks excédentaires atteignent 50 000 tonnes6. D’autre part, la médiatisation des problèmes sanitaires, même non
avérés, entraîne une perte de confiance du
consommateur. Par conséquent, des baisses
de ventes sur le marché français et des pertes
de débouchés à l’exportation en découlent.
Par ailleurs, l’inquiétude des décideurs de la
filière porte essentiellement sur la fréquence
de ces crises et sur leurs effets économiques à
long terme. Nous nous intéressons donc à ces
préoccupations qui nécessitent un ajustement
du pilotage des acteurs de la filière pour faire
face à des perturbations et des incertitudes
provoquées par ces crises en proposant un
modèle de dynamique des systèmes. Ce
modèle permettra d’améliorer la connaissance des comportements logistiques en
matière de gestion des flux en période de
crise.
Problématique de la gestion
des flux logistiques
La filière avicole en général et la filière « poulets standard » en particulier sont organisées
en une succession de phases allant de la production primaire à la distribution et au
consommateur final. Il s’agit d’une « chaîne
logistique multi-échelons » qui présente la
particularité d’un flux poussé en amont et
d’un flux tiré en aval (Figure 2).
De manière plus détaillée, les activités d’élevage en amont de la chaîne sont planifiées plusieurs semaines à l’avance à l’aide d’un
Programme Directeur de Production7 (PDP),
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2 - Source : Xerfi, 2008
3 - Source : Ministère de
l’Agriculture et de la Pêche,
http://panoramaiaa.agriculture.g
ouv.fr/article.php3?id_article=1
98
4 - Source : Xerfi, 2008
5 - Source : ITAVI (Institut
Technique de l’Aviculture),
http://www.itavi.asso.fr/economi
e/eco_filiere/volailles.php?page
=prod
6 - Biaggini, RIA (Revue de
l’Industrie Agro-alimentaire),
2006
7 - Le PDP (ou Master
Production Schedule (MPS) en
anglais) a pour objectif de
planifier les besoins en produits
afin de satisfaire la demande
finale. Il décompose d’abord les
données agrégées (familles de
produits) du Plan Industriel et
Commercial (PIC) en références
finales individuelles. Ensuite, il
planifie sur un horizon plus
court avec des sous-périodes
plus fines la demande réelle et
donc la production de chaque
produit fini. Il révèle l’état des
stocks disponibles par produit
fini et leur évolution sur
l’horizon de planification. Enfin,
il déclenche le processus de
calcul des besoins nets en
références finales, puis en
composants et matières (source :
Logistique Conseil,
http://www.logistiqueconseil.org.
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8 - Les délais exponentiels au
sens de Forrester sont des
retards (delays en anglais)
correspondant à une réponse
d’une organisation suite à une
sollicitation, réponse souvent
non-linéaire.
9 - Source : Xerfi2008
en tenant compte du stock existant. Dans cette
filière intégrée et pour assurer une bonne qualité, les poulets standard vivants dans l’élevage doivent être abattus après un délai
d’élevage fixé à 40 jours. En revanche, les
opérations de fabrication des produits finis
(poulets entiers, produits découpés et élaborés), dans les phases suivantes (découpe,
transformation, conditionnement), sont lancées quotidiennement en fonction de la disponibilité de stock des matières premières et des
demandes réelles. Cela montre que les flux
physiques de la filière ont deux caractéristiques, en amont des flux poussés et en aval des
flux tirés, impliquant une complexité dans la
gestion des stocks et le pilotage des flux logistiques de cette filière. Chaque membre de
cette filière est entièrement lié à un autre
membre en amont et en aval ; la moindre
défaillance de l’un des maillons pouvant
entraîner des conséquences sur l’ensemble de
la chaîne. Ce qui en fait une complexité structurelle de cette chaîne de valeur.
ment non-linéaires. Ceux-ci engendrent des
comportements imprévisibles de la chaîne
(Paulré, 1985). Par exemple, l’ajustement des
encours d’élevage dépend d’un certain
nombre de facteurs, la réactivité des décideurs
correspondant à un comportement nonlinéaire.
Une complexité organisationnelle provient de
la synchronisation entre le volume des stocks
de poulets vivants et le volume des commandes client réelles. En effet, lorsque le volume
de poulets vivants disponibles est inférieur à
la demande actuelle, les entreprises d’abattage doivent faire appel à des fournisseurs
extérieurs nationaux ou internationaux (par
importation). Par conséquent, ils doivent
subir des coûts imprévus à cause de la différence de prix et des coûts de transport. En
revanche, si le stock disponible de poulets
abattus dépasse la demande réelle, les entreprises d’abattage doivent congeler (ou
détruire) leurs produits après cinq jours en
chambre froide en raison de la périssabilité de
ces produits. Cela engendre des coûts supplémentaires par la perte et la dépréciation des
produits.
Modèle de simulation
Une autre complexité organisationnelle
repose sur la succession de différents délais
dits exponentiel8 tout au long de la filière. Différents délais dans la prise de décision comme
par exemple, des durées d’ajustement de stock
rendent la chaîne logistique des flux forte-
Les observations de terrain et les interviews
réalisées auprès des entreprises des quatre
premiers groupes familiaux (LDC, Doux,
Arrivé, Glon) et du premier groupe coopératif
(Terrena) représentant 70% du chiffre d’affaires de toute la filière9 nous permettent de définir les variables pour chaque niveau de la
chaîne. Ces variables vont servir à construire
le modèle. Le tableau suivant présente quelques variables fondamentales.
Figure 2 : Schéma des flux logistiques de la filière poulets standard
Par ailleurs, cette filière est soumise à de fortes incertitudes liées à l’environnement,
notamment causées par la crise de l’influenza
aviaire. En effet, au niveau global, la filière
doit réagir face d’une part, à la forte volatilité
du consommateur (risque de perte de
confiance) dans un contexte de risque sanitaire et, d’autre part, aux problèmes de sources d’approvisionnement en amont de la
chaîne (locales, nationales et/ou internationales). L’incertitude de l’environnement
(demande versatile, offre dépendant de l’épizootie) ainsi que les complexités structurelles
et organisationnelles nous amènent donc à
étudier le comportement de cette filière.
Pour comprendre le comportement des
acteurs et la dynamique de la filière avicole
face à la crise de l’influenza aviaire, nous proposons de construire un modèle de dynamique des systèmes qui représente la
structure de la filière et des politiques réelles
appliquées pendant la période de la crise. Le
modèle se base sur une représentation du système logistique opérant et des systèmes d’information et décision. La structure de la partie
opérante est construite selon des observations
empiriques sur l’organisation technique de
cette filière. La structure des systèmes d’information et de décision correspond à des
micro et macro-mécanismes de régulation
observés pendant cette crise.
Variables du modèle
Diagramme de causalité proposé
Les variables principales décrites dans la
partie précédente sont liées entre elles, et leurs
interactions peuvent être mises en évidence
par un diagramme des causalités pour faciliter
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Tableau 1: Les variables principales du modèle
Parties du
modèle
Demande et
planification
Variables
Définition
Unité de
mesure
Demande réelle
Demande du client final (consommateur) basée
sur les données réelles.
Tonnes/ jour
Taux
d’approvisionnement
total
Taux d’approvisionnement en élevage basé sur la
prévision de vente
Tonnes/ jour
Taux lancement élevage
souhaité
Le nombre de poulets que les éleveurs souhaitent
lancer en élevage après l’ajustement des encours
de l’élevage.
Tonnes/ jour
Encours élevage
Les encours de poulets en élevage
Tonnes
Crise sanitaire
Taux d’influence de la crise sanitaire sur la
production en cours d’élevage
%
Achats externes
La quantité de poulets achetés sur le marché
extérieur (fournisseurs nationaux ou
internationaux)
Tonnes
Abattage
Stock poulets abattus
Niveau de stock des poulets entiers abattus après
l’abattage
Tonnes
Transformation
Stock produits finis
Niveau de stock des produits finis PE et PDE prêts Tonnes
à être livrés
Stock poulets surgelés
Niveau de stock de produits surgelés des poulets
abattus mais non livrés à cause d’un manque de
commandes clients.
Tonnes
Transport
élevage-abattage
Les encours de poulets vivants transportés du
centre d’élevage aux abattoirs
Tonnes
Elevage
Transport
La quantité de produits finis transportés des
Transport
transformation-distributio transformateurs aux grossistes
n
Tonnes
Transport
distribution-vente
La quantité de produits finis transportés des
grossistes aux détaillants
Tonnes
Distribution
Stock grossistes
Niveau de stock chez les grossistes
Tonnes
Vente
Stock détaillants
Niveau de stock dans les points de vente ou chez
les détaillants
Tonnes
Performance
Stock souhaité détaillants Niveau de stock de sécurité que les détaillants
désirent en fonction de la demande réelle
Tonnes
Ecart stock réel-souhaité Ecart entre le niveau stock réel et le niveau de
détaillants
stock souhaité pour les détaillants
Tonnes
Coûts imprévus
Les coûts imprévus que la chaîne subit lorsqu’il y
a des poulets surgelés (coût de surgélation) ou
achetés sur le marché extérieur (coût d’achat
imprévu à cause de la différence de prix et du
coût de transport)
Million Euros
Pertes de produits
La quantité de produits perdus lorsque la Date
Limite de Consommation (DLC) est dépassée.
Tonnes
la visualisation de la structure du modèle
(Figure 3). Les arcs représentent la relation de
causalité entre les variables, les causes (origines de l’arc) et leurs effets immédiats (extrémités terminales de l’arc)). Ces arcs sont
polarisés et montre le sens de l’influence : un
signe (-) indique que si un changement dans la
variable d’origine se produit, la variable de
destination tend à changer en sens contraire et
un signe (+) indique que les deux variables
tendent à évoluer dans le même sens. Il existe
généralement deux types de boucle causale
dans un diagramme : les boucles homéostatiques ou négatives (qui contiennent un nombre
impair des arcs négatifs) ont pour objectif de
ramener le système vers un état d’équilibre et
les boucles de rétrocontrôle positif (qui
contiennent un nombre pair des arcs négatifs
ou zéro arc négatif) ont tendance à amplifier
les causes des phénomènes observés. Nous
avons identifié cinq boucles fermées principa-
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10 - Source : Service Central des
Enquêtes et Etudes Statistiques
(Agreste/SCEES)
11 - La validation du modèle a
été réalisée en tenant compte de
deux aspects principaux :
structurel et comportemental
(Forrester, 1971) (voir Vo (2009)
pour une présentation complète
sur la validation du modèle et les
résultats de simulation)
les (en réalité, nous avons observé qu’il existe
96 boucles dans le modèle proposé).
• Boucle 1 : Cette boucle permet d’ajuster les
encours d’élevage de poulets et par la suite
les poulets matures prêts à abattre.
• Boucle 2 : L’objectif de cette boucle est de
réduire au maximum le surplus de produits
finis non-livrés par rapport à la demande
réelle afin de minimiser les pertes de produits finis par la congélation car ce système
permet de prolonger le cycle de vie des produits frais.
• Boucle 3 : Cette boucle permet de régulariser le niveau de stock des produits finis en
modifiant le volume de fabrication.
• Boucle 4 : Cette boucle permet donc un
ajustement du volume transporté de produits finis vers les détaillants par le niveau
de stock chez les grossistes.
Figure 3 : Diagramme de causalité de la chaîne logistique de la filière
• Boucle 5 : Cette boucle permet d’ajuster ce
volume par l’écart entre le niveau de stock
souhaité et le stock réel chez les détaillants.
De ce diagramme de causalités, nous développons un système d’équations différentielles
permettant de caractériser notre modèle. Nous
nous sommes inspirés du modèle générique
de la chaîne logistique de Sterman (2000) en
le transformant selon les originalités de notre
chaîne logistique à savoir, la représentation
d’une structure particulière de type push-pull
de produits périssables ainsi que la prise en
compte de perturbations simultanées en
amont et en aval de la chaîne.
Résultats de simulation
Analyse comportementale du modèle
Nous allons d’abord analyser le comportement de la chaîne logistique de la filière avicole face à la crise de l’influenza aviaire avec
les données collectées10 sur la production et la
consommation pendant la crise de l’influenza
aviaire en France entre octobre 2005 et mars
2006. Nous avons obtenu la variation de la
production de poulets standard par la simulation en comparaison avec l’évolution de la
demande réelle et de la production réelle
(Figure 4)
En comparant la production obtenue par la
simulation avec la production réelle, nous
avons obtenu une différence relative moyenne
égale à 6,3% signifiant un taux d’erreur « relatif » de 6,3%. Ceci a été considéré comme
acceptable pour valider le modèle11.
Figure 4 : La production obtenue par la simulation en comparaison
avec l’évolution de la demande et de la production réelles
Dans la figure 5, la courbe 2 montre l’évolution de la production d’élevage en fonction de
la propagation de la maladie dans la population animale et surtout de la variation de la
demande réelle illustrée par la courbe 1. Nous
pouvons remarquer qu’il y a un décalage entre
ces deux courbes, c’est-à-dire la production
ne correspond pas vraiment à la demande.
Pour faire face à cet écart entre la production
et la demande, la solution consiste à surgeler
les poulets abattus lorsqu’il n’y a pas assez de
demande et à faire appel à des achats externes
si la production est insuffisante. Cette politique provoque par conséquent, une augmentation des coûts imprévus de 23,4 millions
d’euros et également des pertes de produits de
20.080 tonnes pour toute la chaîne.
Par ailleurs, la fluctuation de la consommation provoque une variation des niveaux de
stock à tous les échelons en aval de la chaîne.
Nous avons observé que la variation du niveau
de stock chez les détaillants est moins impor-
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tante que celle du niveau de stock chez les
grossistes et de stock de produits finis. Cette
variation est dûe aux différents délais de
livraison entre les échelons et de réajustement
du niveau de stock chez les détaillants.
Figure 5. Variation de la demande réelle et de la production obtenue
par la simulation pendant la crise
Ces conséquences de cette polique pendant la
crise nécessitent des politiques plus pertinentes pour, non seulement réagir de manière efficace à des situations de crise, mais aussi
améliorer la performance de la chaîne. C’est
pour cette raison que nous allons continuer à
étudier dans la partie suivante la sensibilité du
modèle sous les effets des différentes perturbations exogènes et à certains délais de réactivité dans la gestion des flux matières.
Analyse de sensibilité du modèle
Notre objectif dans cette partie est d’analyser
l’influence des fluctuations des valeurs des
variables exogènes et des différents délais sur
le comportement de la chaîne afin de proposer
des modifications pour améliorer la performance de la chaîne.
Figure 6 : Variations de la production en élevage face à des variations
type Step négatif
Réponses du système face à différents types
de fluctuation des variables exogènes
La chaîne logistique est influencée à la fois
par la propagation de l’influenza aviaire dans
l’élevage en amont et par la variation de la
consommation en aval. Les facteurs exogènes
de la crise sont donc représentés par deux
variables principales dans notre modèle :
Demande réelle et Crise sanitaire. Nous
allons examiner les effets de différents degrés
de fluctuation de ces deux variables sur le
comportement du modèle selon trois types
d’évolution : (i) variations brutales et durables ; (ii) variations exceptionnelles et répétitives et (iii) variations aléatoires.
Les résultats de simulation montrent que :
• Pour les variations brutales et permanentes (Step + ou -): La chaîne arrive à mieux
réagir face aux baisses de la consommation
et à l’augmentation de la propagation du virus en élevage (Step -) (voir Figure 6)
• Pour les variations exceptionnelles et répétitives (Pulse + ou -) : Il y a une grande différence du niveau de stock chez les
grossistes et les détaillants lorsque l’amplitude des variations est plus élevée (voir Tableau 2).
• Pour les variations aléatoires (Random +
ou -) : La chaîne arrive à assurer une stabilisation au niveau des achats externes quel
que soit l’amplitude des aléas (sauf Random -50%) (voir Tableau 3).
Sensibilité du modèle au délai d’ajustement
demande
Le Délai d’ajustement demande est un délai
pour ajuster le taux d’approvisionnement en
élevage en fonction de la demande réelle
(valeur initiale : 7 jours)12.
Les résultats montrent qu’en augmentant le
délai d’ajustement demande d’1 jour à 13
jours, la chaîne logistique peut limiter légèrement les achats externes et réduire les coûts
imprévus avec un délai d’ajustement demande
plus long (voir tableau 4). Néanmoins, ceci
peut engendrer une augmentation au niveau
de stock de poulets surgelés. Cela montre que
plus le délai d’ajustement demande est long,
plus le niveau de stock augmente.
Sensibilité du modèle au délai d’élevage
Le Délai d’élevage est non modifiable car il
est fixé dans le contrat entre les éleveurs et les
abattoirs (valeur initiale : 40 jours).
Nous pouvons constater qu’une réduction du
délai d’élevage de 5 jours pour répondre plus
rapidement à la variation quotidienne de la
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12 - En effet, la production en
élevage de poulets standard est
planifiée par un plan
prévisionnel de ventes basé sur
un historique des ventes
réalisées lissé sur une période
d’une semaine (7 jours).
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Tableau 2 : Influence des variations type Pulse + et - sur le niveau de stock à chaque
échelon
Pulse
-50%
Pulse
-30%
Pulse
-10%
Pulse
+10%
Pulse
+30%
Pulse
+50%
Stock fabricants (tonnes)
76.325
76.325
76.325
76.325
76.325
76.325
Stock grossistes (tonnes)
941.588
941.999
77.693
88.458
1.269.597
1.471.020
Stock détaillants (tonnes)
1.169.275
1.169.576
337.124
645.509
1.269.721
1.279.089
Tableau 3 : Influence des variations type Random + et – sur les achats externes
Achats externes (tonnes)
Random
-50%
Random
-30%
Random
-10%
Random
+10%
Random
+30%
Random
+50%
40.069
24.668
25.851
24.532
21.591
28.905
Tableau 4 : Réponse de la chaîne à différentes valeurs du délai d’ajustement demande
Délai d’ajustement demande (jours)
1
7
13
Stock poulets surgelés (Tonnes)
41.392
43.348
44.101
Achats externes (Tonnes)
26.598
26.347
25.757
23,5
23,4
22,9
Coûts imprévus (M )
Tableau 5 : Réponse de la chaîne face à différentes valeurs du délai d’élevage
35
40
45
Stock poulets surgelés (Tonnes)
Délai d’élevage (jours)
44.553
43.348
41.753
Achats externes (Tonnes)
25.418
26.347
26.354
22,5
23,3
23,2
Coûts imprévus (M€)
Tableau 6 : Réponse de la chaîne face à différentes valeurs du délai d’ajustement
de surgélation
1
5
9
Stock poulets surgelés (Tonnes)
Délai d’ajustement surgélation (jours)
142.732
43.348
27.060
Achats externes (Tonnes)
68.384
26.347
16.560
61,9
23,3
14,7
Coûts imprévus (M€)
demande peut réduire le volume des achats
externes (voir tableau 5). Néanmoins, cela
engendre une augmentation du stock de poulets surgelés lorsqu’il y a une baisse de la
consommation. En revanche, une augmentation du délai d’élevage de 5 jours peut réduire
significativement le stock de poulets surgelés
sans augmenter les coûts imprévus car les
achats externes restent quasiment constants.
Cela veut dire qu’une prolongation du
délai d’élevage peut être une solution pour
faire face aux variations de la demande
pendant la crise.
Les résultats de simulation montrent qu’une
très courte durée (1 jour) du stock tampon
peut provoquer à la fois un surstock considérable de poulets surgelés et une augmentation
très élevée des achats externes et donc un
grand surcoût pour la chaîne (voir tableau 6).
En revanche, une prolongation du délai d’ajustement de surgélation peut réduire de
manière efficace, non seulement le niveau de
stock de poulets surgelés, mais aussi le besoin
d’achats externes. Néanmoins, en réalité nous
ne pouvons pas prolonger ce délai à cause de
la contrainte de qualité pour les produits frais.
Sensibilité du modèle au délai
de surgélation
Les résultats de simulation montrent que les
fluctuations de la demande client et de la production affectent la stabilité et la performance
de toute la chaîne. Le comportement global de
la chaîne logistique est influencé non seulement par les facteurs environnementaux exogènes mais aussi par les facteurs de contrôle
endogènes tels que les délais d’ajustement et
de production ou les politiques d’approvi-
Le Délai d’ajustement poulets abattus ou
délai de surgélation est la durée maximale
pour les poulets abattus non-utilisés restés
dans la chambre froide avant d’être surgelés
(valeur initiale : 5 jours).
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Logistique & Management
sionnement. En ajustant ces facteurs endogènes, il est possible de réduire les
conséquences liées aux facteurs exogènes et
d’améliorer la performance de la chaîne logistique.
Bhaskaran, S., (1998), Simulation Analysis of
a Manufacturing Supply Chain, Decision
Sciences, vol.29, n°3, pp.633-657.
Conclusion
Chang, Y., Makatsoris, H., (2001), Supply
Chain Modelling Using Simulation, International Journal of Simulation, vol.2, n°1,
pp.24-30.
Nous avons dans ce travail montré que les
chaînes logistiques en général, et les chaînes
logistiques agro-alimentaires en particulier,
ont des caractéristiques complexes dûes à
leurs structures inter-organisationnelles, leurs
produits et aux incertitudes internes (aléas de
production) et externes (variation de la
demande), nécessitant des méthodes pertinentes de la gestion de la chaîne globale.
Précisément, la chaîne logistique agro-alimentaire est un système fort complexe avec
des caractéristiques spécifiques : multi-échelons souvent de type poussé-tiré, la périssabilité des produits, etc. entraînant des
comportements complexes difficiles à prédire. Ces comportements complexes deviennent encore plus difficiles à appréhender
lorsque la chaîne est confrontée à des perturbations provoquées par des fluctuations de
l’offre et la demande. Dans ce contexte, la
simulation présente un intérêt certain. Elle
permet d’étudier le comportement dynamique
global d’une chaîne logistique dans son
ensemble en prenant compte des interactions
complexes entre différentes entités et la structure multi-échelons de la chaîne. L’approche
par la simulation et notamment la dynamique
des systèmes paraît être une base viable pour
les analyses comportementales détaillées de
la dynamique d’une chaîne logistique dans
son ensemble et rend possible l’évaluation des
performances du système existant ou en phase
de conception. Elle propose donc un outil
d’aide à la décision pour la gestion de la
chaîne logistique globale.
Biaggini, F., 2006. Volaille, la crise couve.
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