Introduction

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Introduction
Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 2014, 33 (1), 25-28
Introduction
Bien-être animal : quelles évolutions ?
Ce numéro de la Revue scientifique et technique sur les évolutions futures du bien-être
animal a pour but d’explorer un certain nombre de thèmes importants et d’en fournir
quelques illustrations.
Le premier de ces thèmes concerne les caractéristiques du bien-être animal tel qu’il est
perçu par les décideurs politiques, tant au plan national qu’international, à savoir comme
une question complexe, aux multiples facettes, doté de dimensions scientifiques, éthiques,
économiques, religieuses et culturelles majeures, et susceptible d’avoir des effets non
négligeables sur les politiques commerciales (1, 2). Ce thème est traité directement dans
les sept articles de la section 1 (les moteurs des politiques mondiales du bien-être animal).
Cette section fournit plusieurs éclairages sur les interactions des nombreux facteurs en
jeu et donne des indications sur les moteurs prépondérants dans différentes parties
du monde. D’autres articles consacrés aux animaux de trait ou de bât (section 7) et au
contrôle de la rage chez le chien (section 11) dans certaines régions examinent également
ce thème sous des aspects particuliers.
Les autres articles du numéro explorent le deuxième grand thème, qui a trait à la nécessité
de fonder sur des bases scientifiques solides les pratiques de gestion destinées à assurer
un niveau acceptable de bien-être animal. Ces fondements scientifiques sont rappelés
dans le chapitre 7.1. du Code sanitaire pour les animaux terrestres de l’OIE (3) introduisant
les recommandations sur le bien-être animal, en particulier en ses articles 7.1.2,
« Principes directeurs pour le bien-être animal » et 7.1.3, « Fondement scientifique des
recommandations ». Le chapitre expose également les « Principes généraux de bien-être
des animaux dans les systèmes de production animale » (article 7.1.4). Ces principes, qui
privilégient certaines pratiques spécifiques en matière de bien-être animal, sont étayés
par plus d’un demi-siècle de recherches scientifiques (4, 5) couvrant des aspects aussi
différents que :
– les effets de la sélection génétique sur la santé, le comportement et le tempérament
des animaux ;
– l’influence de l’environnement sur le risque de blessures et de transmission de maladies
et de parasites ;
– les effets de l’environnement sur le repos, la motricité et la manifestation de
comportements naturels ;
– les modalités de gestion des groupes d’animaux, permettant de minimiser les conflits
et de donner libre cours à des contacts sociaux positifs ;
– les effets de la qualité de l’air, de la température et de d’hygrométrie sur la santé et le
confort des animaux ;
– la fourniture d’aliments et d’eau répondant aux besoins des animaux et s’y adaptant ;
– la prévention et le contrôle des maladies et des parasites et la mise à mort des animaux
dans des conditions décentes ;
– la prévention et la gestion de la douleur ;
– la mise en place d’une relation positive entre l’homme et l’animal ;
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– la formation des personnes chargées de manipuler les animaux, afin qu’elles se dotent des
compétences et des connaissances appropriées.
La plupart des articles de ce numéro sont animés par cette prise en compte des fondements
scientifiques des pratiques destinées à améliorer le bien-être animal ; certains d’entre eux
posent également la question des prolongements que l’on pourrait envisager à partir de ces
principes de base. Les articles réunis ici n’ont pas pour principal souci de décrire la situation
existante. Il s’agit plutôt de faire le point sur l’état actuel des connaissances concernant des
aspects particuliers du bien-être animal et d’en examiner les conséquences potentielles sur la
gestion du bien-être animal à l’avenir.
La section 2 s’attaque de front à ce thème, avec trois articles qui examinent i) la situation
actuelle et les perspectives futures des nouvelles conceptions concernant les interactions
entre les émotions et la cognition chez les animaux ; ii) l’utilisation d’indicateurs éthologiques
et sanitaires ; iii) les perspectives ouvertes par ces avancées et par d’autres facteurs pour
l’élaboration de normes sur le bien-être animal fondées scientifiquement. L’article qui compose
la section 3 souligne l’importance déterminante des attitudes et des compétences des
personnes qui s’occupent des animaux pour sécuriser le bien-être et la productivité des animaux
d’élevage et des animaux de travail. Ce texte constitue une introduction utile aux deux articles
de la section 4, qui sont consacrés à la gestion des systèmes intensifs de production animale.
Il s’agit d’un sujet important, car le rôle joué par les vétérinaires et les personnels des élevages
va probablement prendre un relief croissant à l’avenir, compte tenu de l’expansion attendue de
ces systèmes de production dans le monde entier. Ces articles examinent les enseignements
qu’il conviendra de tirer de l’expérience passée et les méthodes de gestion scientifique du bienêtre animal dans les systèmes intensifs.
Les quatre articles suivants concernent aussi bien les systèmes de production intensive que les
configurations d’élevage extensif au pâturage. Les deux premiers articles, dans la section 5,
examinent les possibilités d’amélioration génétique de l’aptitude des animaux à s’adapter à
leur environnement. Ces textes s’interrogent ainsi sur les compatibilités et les incompatibilités
majeures entre l’animal et son environnement, qui vont orienter la sélection génétique des
animaux et/ou orienter le choix ou la modification de l’environnement des animaux dans le but
d’améliorer leur bien-être. Les deux articles de la section 6 analysent les possibilités offertes
par la technologie pour améliorer le suivi et la gestion du bien-être. Ils font le point sur les
applications existantes et à l’étude, dont l’objet sera d’améliorer la gestion à distance du
bien-être des animaux élevés sur de vastes étendues de pâturages, et de faciliter le contrôle
simultané de plusieurs paramètres dans les systèmes d’élevage intensif.
La suite du numéro examine successivement les aspects spécifiques du bien-être chez certaines
catégories d’animaux.
Le premier article de la section 7, consacré au bien-être des animaux de trait ou de bât en
Afrique et en Asie, identifie les problèmes, étudie les solutions envisagées et anticipe sur les
évolutions futures. Le deuxième article est consacré aux équidés de travail en Amérique du Sud,
en mettant l’accent sur les stratégies actuellement déployées pour améliorer leur bien-être.
Le bien-être des animaux de compagnie est pris en compte dans les deux articles de la section
8. Le premier analyse l’impact que peuvent avoir sur le bien-être des chiens et des chats les
pratiques d’élevage, mais aussi le comportement des propriétaires et leur style de vie. Le second
examine les problématiques du bien-être associées aux « nouveaux animaux de compagnie » ;
à partir de cette analyse, une liste de vérification est proposée, permettant de déterminer si le
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bien-être de ces animaux peut être assuré dans un environnement familial et s’ils se prêtent ou
non au statut d’animaux de compagnie.
Le bien-être des poissons d’élevage fait l’objet de la section 9, qui contient trois articles. Le
premier introduit le concept de bien-être chez les poissons et explique comment l’évaluer et
le promouvoir ; le deuxième traite de la perception de la douleur ainsi que des causes et des
effets du stress chez les poissons ; le troisième met en avant des éléments clés du respect du
bien-être lors de la capture et de l’abattage des poissons. Pris ensemble, ces articles servent
d’introduction à un domaine relativement récent de l’évaluation du bien-être, dont l’importance
ne cessera de croître parallèlement au développement de l’aquaculture, qui fournit des protéines
à une population humaine de plus en plus nombreuse.
La section 10 est consacrée au bien-être des animaux de laboratoire. Le premier des deux
articles de cette section présente les très nombreux facteurs à prendre en compte lors de
l’examen des raisons qui justifient d’entreprendre une expérimentation, facteurs qui devront
être évalués au moyen d’une analyse dommages–avantages, l’enjeu central étant bien entendu
de minimiser les dommages. Le second article soutient que la validité scientifique des études
recourant aux animaux de laboratoire serait améliorée (et non menacée) par la diversité
biologique accrue qui pourrait résulter des initiatives visant à enrichir l’environnement de ces
animaux afin d’améliorer leur bien-être.
Les quatre articles de la section 11 traitent de la gestion et de l’élimination des nuisibles et
des animaux malades. Le premier présente une approche visant à hiérarchiser les méthodes
de contrôle et d’élimination des vertébrés nuisibles en fonction du degré de prise en compte
du bien-être animal ; le deuxième cherche à déterminer les moyens d’appliquer des méthodes
d’abattoir respectueuses du bien-être animal lors des opérations d’élimination à grande échelle ;
le troisième évalue les procédures d’abattage massif d’animaux dans des conditions décentes
à des fins de contrôle sanitaire ; le quatrième examine des initiatives visant à contrôler la rage
chez les chiens dans les pays en développement et certaines de leurs conséquences en termes
de bien-être animal. Tous ces articles prennent en compte le fait que ces pratiques induisent
des émotions négatives chez les personnes chargées de ces opérations, ainsi que chez les
propriétaires des animaux mis à mort et chez d’autres personnes qui assistent de près ou de
loin à ces événements. Il y est également souligné que si l’urgence dans laquelle sont conduites
certaines opérations d’abattage massif d’animaux justifie parfois le recours à des techniques
moins respectueuses du bien-être animal que celles qui sont habituellement appliquées,
il incombe néanmoins aux personnes chargées de ces opérations de choisir si possible les
méthodes susceptibles d’éviter des souffrances inutiles dans ces circonstances particulières.
Le dernier article du numéro, section 12, envisage un certain nombre d’évolutions futures du
bien-être animal dans le cadre mondial.
D.J. Mellor
Animal Welfare Science and Bioethics Centre*, Massey University,
PN452, Palmerston North, Nouvelle-Zélande
*Partenaire fondateur du Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE)
pour « la science du bien-être animal et l’analyse bioéthique »
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Références
1.Bayvel A.C.D. (2004). – The OIE animal welfare strategic initiative: progress, priorities
and prognosis. In Proc. of the Global Conference on Animal Welfare: an OIE Initiative,
23–25 février, Paris. OIE, Paris, 13–23.
2.Bayvel A.C.D. & Cross N. (2010). – Animal welfare: a complex domestic and international
public-policy issue: who are the key players? J. vet. med. Educ., 37, 3–12.
3.Organisation mondiale de la santé animale (OIE) (2013). – Principes directeurs du bienêtre animal. Article 7.1.2. In Code sanitaire pour les animaux terrestres, chapitre 7.1 :
Introduction sur les recommandations relatives au bien-être animal. OIE, Paris, 305–306.
Page web : www.oie.int/index.php?id=169&L=1&htmfile=chapitre_1.7.1.htm (consultée le
11 octobre 2013).
4.Mellor D.J., Patterson-Kane E. & Stafford K.J. (2009). – The sciences of animal welfare.
Wiley-Blackwell, Oxford.
5. Fraser D., Duncan I.J.H., Edwards S.A., Grandin T., Gregory N.G., Guyonnet V., Hemsworth
P.H., Huertas S.M., Huzzey J.M., Mellor D.J., Mench J.A., Paranhos da Costa M., Spinka M.
& Whay H.R. (2014). – The welfare of animals in production systems: general principles
and the scientific study of animal welfare. Vet. J., 198, 19–27.

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