La résistance au changement
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La résistance au changement
xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 1 La résistance au changement Lettre Thématique n°4 Ecole de Coaching Thérapeutique www.cree-coaching.com xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 2 “Changer, c’est dire « oui » à ce qui advient au lieu de dire « oui » à ce qui a été. ” Entretien avec dominique Baumgartner* Lettre thématique n°4 Avez-vous une définition du changement ? Dominique Baumgartner : oui, la croissance, le développement, la transformation, le vieillissement : des réalités incontournables de la vie dont le processus échappe la plupart du temps au contrôle de l’organisation et à celui des personnes. Le changement est un « présent » permanent. Il est , quoi que nous fassions. S’opposer à cette réalité est vain. Le changement est un processus de transformation, de mutation, d’accomplissement, de mort et de renaissance. Ceci n’a rien à voir avec le renoncement ou la résignation. Changer, c’est donc accepter ce qui est ; c’est dire « oui » à ce qui advient au lieu de dire « oui » à ce qui a été. Se résigner, c’est rester dans la nostalgie de ce que l’on a connu. Prenons l’exemple de Jean, employé d’une usine qui va fermer. Si Jean vit cette fermeture avec un sentiment de résignation, il va se polariser sur tout ce qu’il a à perdre. Cette peur va le pousser à se * Responsable de la Société CREE 2 / Lettre thématique - n°4 / juin 2004 xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 3 L’ensemble des organisations se mobilise aujourd’hui autour de la conduite du changement. Qu’en pensez-vous ? D. B. : J’utilise peu l’expression « conduite du changement » parce que celle-ci induit le contrôle, la maîtrise d’un mouvement qui , par essence même, nous échappe. Les stratégies de conduite du changement sont liées à des projections sur l’avenir alors que le changement se vit dans le présent , c’est pourquoi je préfère le terme « ajustement au changement ». Dès qu’une entreprise propose un changement, elle provoque chez ses salariés un mécanisme de refus et une volonté de préserver leurs acquis. Tout changement engendre des résistances qui viennent de l’attachement au passé où chacun s’imagine être en sécurité car les évènements y sont connus. Le passé rassure tandis que l’avenir fait peur car il « n’existe » pas. Nous ne pouvons intervenir que sur le présent pour influencer une décision ou modifier une situation. Lettre thématique - n°4 / juin 2004 / 3 www.cree-coaching.com réfugier dans un passé plus rassurant. L’acceptation de cette fermeture d’usine, passe par l’accès aux bénéfices liés à ce changement. Le « comment Jean va accepter cette nouvelle réalité » est son chemin personnel et il n’existe pas de bouton sur lequel appuyer pour accélérer le processus d’acceptation. Nul ne peut intervenir à la place de Jean : nous ne sommes pas dans le monde décisionnel mais dans le monde intra psychique et ce monde là est fait de manifestations et de révélations, non de volonté. www.cree-coaching.com xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 4 Le cycle du changement est caractérisé par cinq phases qui sont : le rejet, la résistance, l’exploration, l’acceptation, l’engagement. Or les entreprises méconnaissent ce processus psychologique. Elles proposent en général aux salariés de faire un saut dans le vide en les invitant à passer sans transition du rejet à l’engagement sous la contrainte d’objectifs à atteindre dans un temps limité. Cette attitude doit provoquer beaucoup de dégâts… D. B. : Les entreprises ont tendance à mettre leur énergie dans l’adhésion au changement. Or confondre l’adhésion d’une personne avec un engagement de sa part, c’est faire fausse route. Adhérer, c’est seulement épouser l’idée de l’autre, être objet du désir de l’autre. Si je m’engage, je suis en revanche sujet de mon désir et je le partage avec l’autre. En obtenant l’adhésion du corps social à un projet qu’il rejette, une entreprise se prépare des lendemains difficiles. Ces résistances au changement nous renvoient-elles à la relation avec la mort ? D. B. : Certainement ! Les résistances par lesquelles nous passons, face au changement, sont une manière inconsciente d’éloigner l’échéance. Une fermeture d’usine, une délocalisation, une réorganisation, une fusion,… sont autant de morts symboliques qui inter4 / Lettre thématique - n°4 / juin 2004 xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 5 Si le changement est incontournable, comment faut-il s’y préparer ? D. B. : Reprenons le cas de la fermeture d’une usine. Les personnes accepteront la réalité de cette fermeture dans la mesure où elles trouvent un bénéfice à la situation. Le bénéfice se manifeste d’abord par le fait de contacter le désir de changer. C’est là que le Coaching intervient en donnant l’opportunité de mettre à jour un désir de changement méconnu : « ce travail pouvait, par exemple, me peser sans que j’ose me l’avouer ». Accepter la pression d’un changement que je n’ai pas voulu, c’est accepter de regarder en quoi le changement extérieur vient éclairer ou se faire l’écho d’un désir de changement intérieur que je ne reconnais pas encore. Il y a changeLettre thématique - n°4 / juin 2004 / 5 www.cree-coaching.com pellent les personnes au plus profond de leur être. L’erreur consiste à prendre les résistances pour de l’opposition et à vouloir les gommer absolument. Il est vrai que nous baignons dans une civilisation qui vit dans le déni de l’impermanence des choses. Parler uniquement de pérennité de l’emploi ou de l’organisation, revient à engager un bras de fer avec un processus qui nous échappe. Il vaudrait mieux aider les personnes à s’ajuster à l’imprévu plutôt que de les figer dans l’illusion de la stabilité. Nous sommes la manifestation même du changement. Être dans le déni de cette réalité nous invalide. www.cree-coaching.com xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 6 ment quand je prends la responsabilité du changement. Or dans de nombreux cas, les plans sociaux (quand ils se déroulent dans un esprit de dédouanement de l’entreprise pour le dérangement ou le mal causé) empêchent la personne d’aller au contact de son désir de changement. Même s’ils apportent un soutien financier non négligeable mais très momentané. C’est avec une qualité de présence que l’on peut accompagner ce qui se manifeste. Faire état de persuasion ou de conviction face à quelqu’un qui est dans le rejet, va aggraver le rejet. Argumenter va augmenter les résistances. Le plus souvent, accompagner le changement c’est s’abstenir de faire pression sur la personne sous prétexte d’accélérer son processus de deuil. Les résistances sont légitimes. À vouloir les évacuer à tout prix, on met en danger le cycle du changement. En acceptant d’entendre que la personne résiste, un chef d’entreprise va gagner beaucoup de temps. Pour qu’une personne puisse dire «oui » au changement, il y a à accepter d’abord qu’elle puisse dire « non ». Reprenons l’exemple de la fermeture d’usine. Quel conseil donneriez-vous à un chef d’entreprise ? D. B. : Nommer d’abord sa réalité. La chose la plus difficile qui soit en fait , car nous ne sommes entraînés non pas à cela mais plutôt à parler de la réalité des autres aux autres. 6 / Lettre thématique - n°4 / juin 2004 6/03/07 8:39 Page 7 Une fermeture d’usine est un changement, une situation qui fait pression sur le corps social. À l’annonce de cette décision, les résistances vont être à la hauteur de la pression. Un chef d’entreprise va se retrouver face à des résistances individuelles - chaque personne est renvoyée à son histoire - et collectives - qui, s’incarnant dans une communauté, forment un champ de force. Pour un décideur, la seule stratégie face à la résistance collective ou individuelle c’est de faire-part de sa décision de manière simple et de transmettre des informations précises et fiables : « Je décide que l’usine sera fermée à telle date » au lieu de « compte tenu de la conjoncture économique, nous sommes obligés d’envisager la fermeture de l’usine ». Chose entendue est déjà à demi acceptée : Il y a donc à rendre les choses entendables or, pour minimiser l’impact de nos décisions sur notre environnement, nous avons la fâcheuse habitude de moduler, enjoliver, déformer nos propos. Un message simple et clair va pouvoir être écouté par le collectif comme par la personne. Si le chef d’entreprise dilue ses propos parce qu’il a peur de l’impact de sa décision, il va être perçu comme un manipulateur. Il sera mal entendu et ce qu’il dit non seulement ne sera pas accepté mais sera interprété. C’est la peur du décideur qui donne vie à la résistance collective et la gonfle comme un ballon de baudruche. Souvent le collectif va Lettre thématique - n°4 / juin 2004 / 7 www.cree-coaching.com xp-théma n°4 www.cree-coaching.com xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 8 s’accaparer les résistances individuelles en les dénaturant : « non à la fermeture de l’usine » est un message - type du collectif, une manière d’affirmer un refus massif. L’individu est plus nuancé. Ses résistances sont subtiles. Le collectif a un rôle d’amplificateur des résistances individuelles. Quel comportement peut-on adopter face aux résistances individuelles ? D. B. : Le changement est un rapport de confiance à la vie. Un chef d’entreprise doit accepter que les résistances individuelles se manifestent, faire savoir qu’il les entend, et s’abstenir de s’y opposer ; or la plupart des décideurs craignent les charges émotionnelles qui sont derrière les résistances. Toute résistance contient une charge émotionnelle, incontrôlable et bloquée et la peur du patron ou du manager est d’être la victime de l’explosion d’une charge qu’il ne va pas savoir gérer. J’entraîne mes clients à prendre la responsabilité de l’impact que leurs décisions auront à la fois sur le collectif et l’individuel. Je les entraîne aussi à trouver la posture juste face à une charge émotionnelle. Souvent les changements en entreprise sont l’occasion d’explosions émotionnelles qui n’ont rien à voir avec la situation proposée. Les résistances sont en réalité une manière de contenir des charges émotionnelles enkystées. On peut avoir cette impression fausse dans la culture 8 / Lettre thématique - n°4 / juin 2004 xp-théma n°4 6/03/07 8:39 Page 9 conception-rédaction, Gilles Forestier, Passage de Cap : Tel 06 11 40 68 84 Création graphique : Philippe Patarin 01 49 77 81 55 CREE - Les Tilleuls - 37, rue Grande 77310 Saint-Fargeau-Ponthierry Tél. & Fax : 01 60 65 95 28 - Mobile : 06 08 26 08 92 E-mail : [email protected] Web : www.cree-coaching.com Lettre thématique - n°4 / juin 2004 / 9 www.cree-coaching.com dominante, qu’il est possible d’éviter la manifestation des charges émotionnelles. Or leur libération est un facteur de développement et de croissance.