Le troisième enseignant - www.edu.gov.on.ca.

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Le troisième enseignant - www.edu.gov.on.ca.
Accroître la capacité
Série
d’apprentissage
professionnel
ÉDITION SPÉCIALE N° 27
Le troisième enseignant
Le milieu d’apprentissage
« Examinez votre espace
d’apprentissage du point de vue du
XXIe siècle. Correspond-il à ce que nous
savons de l’apprentissage aujourd’hui
ou juste à ce que nous avons appris
sur l’apprentissage dans le passé? »
Sir Ken Robinson
The Third Teacher
(2010, traduction libre)
Concevoir le milieu d’apprentissage des mathématiques
et de la littératie, de la maternelle à la 8e année
À quoi ressemblerait le milieu d’apprentissage idéal pour les élèves d’aujourd’hui? Songez
à quel point le monde a changé au cours des trois dernières décennies et à la rapidité avec
laquelle il va continuer à se transformer dans les années à venir. Comment s’assurer que
l’enseignement dispensé répond aux exigences changeantes du XXIe siècle?
Des chercheurs et des professionnels en exercice dans un vaste éventail de disciplines –
éducation de la petite enfance et étude du développement de la personne, psychologie
et science cognitive, architecture et design scolaires – maintiennent que, de nos jours,
la clé de l’apprentissage n’est pas seulement l’espace physique offert aux élèves, mais
aussi l’espace social (Fraser, 2012; Helm et coll., 2007; OWP/P Architects et coll., 2010).
Ils laissent entendre qu’après les parents et les enseignants, le milieu d’apprentissage
est « le troisième enseignant » qui peut renforcer le type d’apprentissage qui optimise le
potentiel des élèves de répondre de façon créative et efficace aux futurs défis ou s’en
écarter. Voici ce qu’écrit Susan Fraser, par exemple :
« Dans une classe, le milieu d’apprentissage peut être un troisième enseignant
s’il tient compte des intérêts des enfants, leur donne la possibilité de montrer
leur raisonnement et favorise ensuite la poursuite de leur apprentissage et de
leur participation. » (2012, p. 67, traduction libre)
De nombreux futurologues soulignent l’importance de l’innovation, de l’entrepreneuriat
et de la créativité dans une ère de mondialisation et de progrès technologiques rapides;
d’autres mettent l’accent sur les aptitudes à communiquer et sur le raisonnement
critique. Tous conviennent que le développement de niveaux élevés de compétence en
littératie et en mathématiques sera le fondement de la réussite; la présente monographie
traite de ce sujet.
Student Achievement Division
Mai 2013
ISSN : 1913 8482 (version imprimée)
ISSN : 1913 8490 (en ligne)
La Série d’apprentissage professionnel a été créée par la Division du
rendement des élèves pour soutenir le leadership et l’efficacité de
Division du rendement des élèves
l’enseignement dans les écoles de l’Ontario. Vous pouvez consulter
les autres documents de la série à l’adresse http://www.edu.gov.on.ca/
fre/literacynumeracy/Inspire/research/capacitybuilding.html. Pour de
l’information, envoyez un courriel à [email protected].
Student Achievement Division
Division du rendement des élèves
Concevoir le milieu physique
VUE D’ENSEMBLE
Un lieu d’émerveillement
et de découverte
« Nous devons songer à créer pour les
enfants des milieux d’apprentissage
propices à l’émerveillement et à la
découverte; dans un milieu qui tient
compte de la curiosité naturelle des
jeunes enfants et de leur instinct
inné pour l’exploration, les enfants
sont passionnés par leur apprentissage
et aiment l’école. »
(Heard et McDonough, 2009,
traduction libre)
C’est à la fois un art et une science de concevoir (contrairement à décorer) un milieu
d’apprentissage qui répond à l’objectif ultime des éducateurs, à savoir développer chez
les élèves un raisonnement indépendant et rigoureux. Par conséquent, en vue de favoriser
la découverte et la réflexion, le dialogue et le partage d’idées, le milieu physique global
devrait comprendre :
• Un grand espace pour le travail et les discussions en groupe-classe, situé près des tableaux
blancs, des chevalets ou des écrans de projection.
• Un espace pour les discussions en petits groupes et en groupe-classe – où les élèves
peuvent voir clairement les représentations de l’apprentissage qui sont affichées sur les
tableaux ou les écrans, et entendre leurs camarades tandis qu’ils échangent des idées.
• Un espace polyvalent qui peut être reconfiguré pour le travail collaboratif et l’enquête
en petits groupes – l’espace doit permettre des regroupements de tailles diverses tels
que par deux, par trois ou plus.
• Des bureaux et des tables aménagés de façon à faciliter la discussion en permettant le
contact visuel avec les camarades et l’enseignante ou l’enseignant, à assurer la circulation
fluide des élèves, et à laisser assez d’espace pour les activités d’écriture collaborative.
• Des zones actives pour le travail d’enquête donnant libre cours à l’imagination et des zones
tranquilles pour réfléchir et explorer la technologie. Toutes les zones doivent être accessibles
aux élèves pour qu’ils puissent communiquer et documenter leur apprentissage en utilisant
une variété d’outils (p. ex., ordinateurs, logiciels, tablettes, appareils photo numériques et
magnétoscopes, caméras de documents, tableaux blancs interactifs).
• Du matériel didactique organisé de façon à ce que tous les élèves puissent y accéder
facilement – ce matériel peut comprendre des logiciels, des applications et des sites Web
éducatifs, du matériel trouvé ou façonné par les élèves, des organisateurs graphiques,
des journaux et d’autres médias, des ressources documentaires, etc.
POUR LES MATHÉMATIQUES
Des élèves qui ont un bagage mathématique démontrent la capacité « de formuler,
d’employer et d’interpréter les mathématiques » (Organisation de coopération et de
développement économiques, 2012, p. 4, traduction libre); ils se considèrent comme des
mathématiciens, car ils savent que les mathématiques peuvent servir à comprendre des
questions importantes et à résoudre des problèmes significatifs, pas seulement à l’école,
mais dans la vie de tous les jours. Par extension, le milieu physique de l’apprentissage
des mathématiques devrait comprendre :
• Des espaces où les élèves peuvent se servir de matériel de manipulation pour résoudre
les problèmes et noter leurs solutions.
• Des espaces sur des tableaux ou sur le mur pour exposer les solutions des élèves (échange
mathématique et bansho). Les solutions des élèves devraient être visibles depuis l’espace
de réunion en groupe.
• Un espace pour afficher les référentiels créés ensemble tels que les termes de glossaire,
et les résumés précédents et actuels de l’apprentissage qui appuient spécifiquement
le développement des grandes idées en cours d’étude.
• Du matériel didactique organisé de façon à ce que tous les élèves puissent y accéder
facilement; ces ressources peuvent comprendre du matériel de manipulation
mathématique, des calculatrices et d’autres outils mathématiques, des textes
mathématiques, et de la technologie portable.
POUR LA LITTÉRATIE
Les apprenants en littératie d’aujourd’hui sont confrontés à « un flot constant d’idées et
d’informations » (ministère de l’Éducation de l’Ontario, 2004, p. 9). Ils ont besoin de stratégies
pour interpréter les textes et de beaucoup de pratique pour construire le sens et repérer les
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partis pris et les points de vue. Par extension, le milieu physique de l’apprentissage de la
littératie devrait comprendre :
• Des espaces où les élèves peuvent parler, écouter, lire et écrire.
• De l’espace sur les tableaux ou les murs pour des textes ou référentiels bâtis, lus ou analysés
avec les élèves.
• Une variété de matériel d’apprentissage souvent trouvé ou façonné par les élèves et par
leur famille, de même que du matériel vendu dans le commerce qui est pertinent à
l’apprentissage des élèves.
• Un espace de rangement central contenant une variété d’écrits d’auteurs et de publications –
de même que du matériel de référence tel que des dictionnaires, des thésaurus, etc.
• Des blocs-notes et du matériel d’écriture divers, placés à différents endroits où les élèves
travaillent pour leur permettre de noter leur raisonnement par écrit.
• Une bibliothèque de classe bien approvisionnée, cocréée avec les élèves, contenant une
variété de formes, de genres et de niveaux de textes – organisés et étiquetés; les choix
de livres devraient être changés régulièrement en fonction des besoins et des intérêts
des élèves et de leur raisonnement à un moment donné.
Concevoir le milieu social
ÉLÉMENTS CLÉS DE L’APPRENTISSAGE DES MATHÉMATIQUES ET
DE LA LITTÉRATIE
L’apprentissage implique à la fois un processus interne d’assimilation des nouvelles informations
et un processus social de discussion et de négociation. Selon Cross, il faut intégrer ces deux
processus dans la conception de milieux scolaires qui optimisent l’apprentissage (2009, p. 906).
D’autres chercheurs en éducation s’entendent pour dire que la connaissance s’acquiert par la
participation sous forme d’idées et en les partageant ensuite avec les autres. Crick et coll. (2007)
suggèrent que pour créer un milieu scolaire qui renforce la capacité d’apprendre, l’enseignante
ou l’enseignant doit établir des relations interpersonnelles positives, respecter les idées des
élèves et encourager l’adoption d’un point de vue.
Les éléments clés d’un milieu d’apprentissage riche sont décrits ci-dessous et sont accompagnés
de quelques suggestions de pratiques de classe qui appuient les élèves d’aujourd’hui.
1. Renforcer l’apprentissage des élèves par la collaboration
Lorsque les élèves ont un sentiment d’appartenance et se sentent en sécurité au sein d’une
communauté d’apprenants, ils se sentent libres de prendre des risques et d’explorer de
nouvelles idées. Ce faisant, ils ont plus de chance d’acquérir ce sentiment au sein d’une
structure établie de façon collaborative. On invite les élèves à réfléchir à des normes
d’interaction et à les établir ensemble. Ces normes, formulées dans les propres mots des
élèves, les aident à assumer la responsabilité de leur apprentissage et de celui de leurs
camarades. Voici des exemples de normes :
• Nous écouterons attentivement les idées des autres pour essayer de comprendre leur
raisonnement.
• Nous mettrons en commun nos stratégies et nos idées pour contribuer à la compréhension
des autres.
• Nous prendrons la parole chacun notre tour afin d’assurer la participation de tous.
• Nous réagirons aux idées des autres avec respect et intérêt (par exemple, en posant une
question au sujet d’une solution ou d’une stratégie, en suggérant une façon plus efficace
de résoudre un problème ou en reformulant une phrase pour clarifier).
• Nous ferons preuve de respect en cas de désaccord, en donnant les raisons pour
lesquelles nous ne sommes pas d’accord. Nos commentaires et nos questions se
concentreront sur l’apprentissage des mathématiques ou de la littératie, et non sur
la personne.
Tous les élèves peuvent
participer activement à
leur apprentissage
Tous les élèves peuvent apprendre
les mathématiques par « l’action, la
communication, la réflexion, la discussion,
l’observation, la recherche, l’écoute et
le raisonnement ».
(Copley, cité dans ministère de
l’Éducation, 2005b, p. 70)
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2. Donner du poids à la voix des élèves par le dialogue
Lorsque l’on fait participer les élèves à un dialogue, on donne à leur voix le poids nécessaire
pour qu’ils puissent développer leur raisonnement critique tandis qu’ils clarifient, articulent,
justifient et résument leurs idées. Le dialogue implique de réagir aux idées des autres,
avec lesquelles on est parfois d’accord, parfois pas d’accord. C’est dans ce « bouillonnement
d’idées » que les savoirs et la compréhension des élèves vont se développer. Les enseignants
appuient ce processus en encourageant différents élèves à apporter leur contribution et
à reformuler ce que les autres ont dit. Il peut arriver que l’enseignante ou l’enseignant
réexprime les contributions des élèves pour favoriser la progression du dialogue.
Une communauté qui renforce
la compréhension
« La communauté offre un milieu dans
lequel les idées mathématiques individuelles
peuvent s’exprimer et être testées par
rapport aux idées des autres […]
Cela permet aux apprenants de clarifier
ce qu’ils connaissent et comprennent,
et d’être plus confiants. »
(Fosnot, 2005, p. 10, traduction libre)
Le dialogue a lieu entre tous les membres de la communauté d’apprentissage; les élèves
se parlent tour à tour, sans attendre l’amorce de l’enseignante ou de l’enseignant. Il se
peut qu’ils questionnent les idées des autres et clarifient les leurs, approfondissant ainsi
la compréhension conceptuelle du groupe. Dans une vidéo récente, Lucy West présente
cinq types de dialogue en mathématiques qui décrivent avec justesse l’apprentissage
de la langue (Maîtres chercheurs en éducation, 2012, traduction libre). Elle souligne
l’importance des aspects suivants pour parvenir à un apprentissage robuste :
• Mémorisation – L’enseignante ou l’enseignant introduit des faits, des idées et des
routines au moyen d’une répétition constante.
• Récitation – Les élèves doivent se souvenir de l’information fournie par l’enseignante
ou l’enseignant.
• Enseignement – L’enseignante ou l’enseignant montre ou explique comment exécuter
une procédure, utiliser une stratégie ou résoudre un problème.
• Discussion – Les élèves partagent l’information, échangent des idées et résolvent des
problèmes ensemble; une discussion efficace vise à diriger les élèves vers une réponse
ou une solution acceptable.
• Dialogue – Les élèves travaillent en vue d’une compréhension commune en écoutant
les idées des autres et en y réfléchissant.
3. Se concentrer sur les solutions et les interprétations des élèves
Dans le dialogue, l’objet de la discussion n’est plus tant la réponse que les processus
et les stratégies. Même si un élève donne une bonne réponse ou fait un compte rendu
bien expliqué, il est utile de lui demander « Comment sais-tu cela? » ou « Dis-nous-en
un peu plus! » pour s’assurer que son raisonnement est solide. Lorsqu’un élève donne
une mauvaise réponse ou fait un compte rendu incomplet, le fait de poser des questions
et d’encourager les élèves à partager leur opinion aide à clarifier le raisonnement.
Un dialogue centré sur les solutions et les interprétations des élèves appuie l’idée que les
concepts et les idées sont reliés les uns aux autres et qu’il existe des moyens multiples
d’aborder un problème ou d’interpréter un texte. Les élèves sont censés étayer leur
raisonnement par des preuves et des exemples de leur travail et du travail des autres.
Au fur et à mesure que les élèves s’habituent à regarder au-delà de la réponse ou de
l’interprétation, ils commencent à voir les similitudes et les différences dans les diverses
solutions. Lorsqu’ils apprennent à exprimer avec respect leur désaccord avec les idées
des autres, leur propre compréhension conceptuelle s’approfondit. Vue sous cet angle,
la diversité devient une force, par exemple :
• Lorsque les élèves examinent des options de sport à l’école, leurs camarades issus
de diverses cultures peuvent décrire des façons différentes de jouer avec le même
matériel, comme des ballons de soccer ou des balles aki, et préparer un tableau pour
expliquer les options.
• Pour traiter de la question du taxage, l’élève peut adopter différentes perspectives
(les intimidateurs, les victimes et les spectateurs) pour développer une conscience
de la responsabilité collective en ce qui a trait à l’équité et au respect.
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4. Encourager la résolution de problèmes du monde réel
Lorsque l’on donne aux élèves la possibilité de résoudre des problèmes du monde réel qui
sont importants et pertinents à leurs yeux, ils constatent l’importance du monde réel dans
leur milieu d’apprentissage scolaire. Étant curieux de nature, lorsque les élèves sont engagés
intellectuellement, ils développent les capacités de raisonnement et les habiletés supérieures
de la pensée qui aboutissent à un apprentissage en profondeur. Poser des questions et
participer au dialogue pour interpréter l’information encourage aussi les élèves à persévérer
dans leurs efforts visant à comprendre et à résoudre un problème. Parmi les stratégies
d’enseignement qui appuient la création de milieux d’apprentissage propices à la résolution
de problèmes du monde réel, citons les suivantes :
• Choisir des problèmes intéressants qui sont reliés à l’expérience et à la vie des élèves en
dehors de l’école et vont stimuler leur imagination.
• Axer les objectifs d’apprentissage sur les grandes idées ou les concepts clés dans tous
les domaines du curriculum – cela offrira des possibilités de dialogue robuste et étendra
l’utilisation pertinente de textes de non-fiction et de matériel d’apprentissage.
Lorsque les élèves ont
le temps d’apprendre
• Encourager l’apprentissage collaboratif et créer des espaces où les élèves participent à
de riches discussions sur leur raisonnement et leur apprentissage.
« Donner aux élèves le temps d’apprendre
implique aussi de leur fournir assez de
temps pour traiter l’information […]
L’apprentissage n’est pas quelque chose
que l’on peut précipiter; l’activité cognitive
complexe de l’intégration de l’information
prend du temps. »
• Donner du temps aux élèves pendant la discussion pour qu’ils puissent formuler leurs
pensées – cela aboutira à une plus grande quantité et qualité de réponses, favorisera le
respect du raisonnement des autres et encouragera la prise de risques.
5. Augmenter l’autoefficacité
L’autoefficacité est la conviction que l’on a la capacité ou le pouvoir d’apprendre; cela
suppose que l’on ait une vision positive de la matière elle-même et de notre capacité à la
maîtriser. Voici quelques idées que les enseignants pourraient examiner pour créer un milieu
d’apprentissage qui augmente l’autoefficacité :
• Faire preuve d’enthousiasme et de curiosité en posant des questions auxquelles les
élèves sont intéressés à réfléchir.
• Valider le raisonnement à tous les stades du continuum d’apprentissage.
• S’attendre à ce que tous les élèves, quelles que soient leurs capacités, participent à
l’expérience d’interprétation au sein de la communauté d’apprentissage en classe et
les appuyer en ce sens.
• Encourager tous les élèves à défendre leur raisonnement au sujet de leurs solutions et
interprétations, et s’assurer qu’ils ont des possibilités de discuter avec un partenaire de
la raison pour laquelle ils ont choisi une stratégie en particulier.
• Reconnaître ses erreurs. Les enseignants doivent aussi reconnaître leurs erreurs pour
montrer aux élèves qu’elles sont normales et que ce n’est pas quelque chose qu’il
faudrait cacher – leur expliquer que les erreurs fournissent aussi l’occasion d’étendre
son savoir et d’approfondir sa compréhension.
(Bransford, Brown, et Cocking,
2000, p. 58, traduction libre)
« Pour devenir compétents, ils doivent
passer des périodes de temps soutenues
à faire des mathématiques – résoudre
des problèmes, raisonner, développer une
compréhension, exercer les compétences
et établir des liens entre les connaissances
acquises antérieurement et celles
nouvellement acquises. »
(Kilpatrick, Swafford, et Findell, 2001,
p. 135, traduction libre)
Augmenter l’autoefficacité ne consiste pas simplement à inculquer des attitudes positives
à l’égard de l’apprentissage. Il s’agit aussi de développer la confiance en acquérant les
compétences applicables. L’enseignement explicite – un exemple de ce que John Hattie appelle
« activer » l’apprentissage – est tout aussi important que le dialogue et le partage d’idées
pour aider les élèves à développer des « schémas cognitifs » qui leur permettent d’acquérir
les compétences dont ils ont besoin pour parvenir eux-mêmes au savoir. Il convient donc :
• de penser tout haut pour que les élèves entendent vos questionnements et constatent que
votre savoir grandit tandis que vous écoutez leurs idées, posez des questions et finissez par
avoir de nouvelles idées sur un sujet d’intérêt;
• de démontrer l’utilisation d’un langage précis de façon à ce que les élèves puissent mieux
exprimer leur propre raisonnement et soient équipés pour partager leurs idées et participer
au dialogue;
• de montrer la pertinence des mathématiques et comment les mots fonctionnent en
mettant en évidence les liens existants au sein d’un concept ou d’un domaine, et ceux
existants entre des concepts et des domaines;
• de fournir une rétroaction ponctuelle et spécifique de façon à ce que les élèves aient la
possibilité de réviser leur travail et de le préciser.
5
Un milieu d’apprentissage en mathématiques pour
les apprenants d’aujourd’hui
ÉQUIPES SUR LE TERRAIN
Des éducatrices et éducateurs dans
une gamme de rôles d’enseignement
et administratifs participant à des projets
d’enquête du ministère et des conseils
scolaires ont livré les commentaires
ci-après.
« Nous savions que pour favoriser un
apprentissage en profondeur, il fallait offrir
à nos élèves un milieu d’apprentissage
riche et stimulant. »
« Nous avons enlevé le matériel qui, selon
nous, entravait le processus d’enquête
et l’avons remplacé par du matériel qui
favorisait la créativité et la résolution de
problèmes. Nous avons décidé de planifier
le matériel pour les élèves et de le
préparer de façon très délibérée […]
Nous avons remarqué la manière dont les
élèves réagissaient au milieu. »
Le milieu de l’apprentissage des mathématiques devrait refléter la beauté et la créativité
qui est au cœur des mathématiques (Clements et Sarama, 2009, p.7, traduction libre);
il devrait également appuyer ce que le National Research Council décrit comme une
« disposition productive » pour la matière. S’il est structuré de façon appropriée, le milieu
d’apprentissage en classe peut être un troisième enseignant qui, au fil du temps, inculque
à l’élève « l’inclination habituelle de trouver les mathématiques sensées, utiles et valables,
et lui fait croire en sa capacité à faire preuve de diligence et en sa propre efficacité »
(Kilpatrick, Swafford et Findell, 2001, traduction libre).
SEPT PROCESSUS MATHÉMATIQUES
Le curriculum de l’Ontario définit sept processus interreliés pour l’apprenante et l’apprenant
en mathématiques d’aujourd’hui. En quoi ces processus encouragent-ils les élèves à devenir
des participants actifs de la création de leur milieu d’apprentissage? Comment ces processus
pourraient-ils évoluer dans le cadre du développement du milieu d’apprentissage des
mathématiques?
Résolution de problèmes : Élaborer, choisir, appliquer et comparer une variété de stratégies
de résolution de problèmes tandis que vous posez et résolvez des problèmes et effectuez des
enquêtes, afin d’aider à approfondir la compréhension.
Raisonnement : Développer et appliquer des aptitudes au raisonnement pour la formulation
et la vérification d’hypothèses, l’établissement de conclusions, et le développement et
l’étayage d‘arguments cohérents.
Réflexion : Démontrer que vous réfléchissez et que vous maîtrisez votre raisonnement pour
aider à clarifier votre compréhension tandis que vous effectuez une enquête ou que vous
résolvez un problème.
Sélection d’outils technologiques et de matériel approprié : Choisir et utiliser une
variété d’outils d’apprentissage concrets, visuels et électroniques, et des stratégies de calcul
appropriées pour approfondir les idées et résoudre les problèmes.
Établissement de liens : Établir des liens parmi les concepts et les procédures, et relier les
idées aux situations ou aux phénomènes tirés d’autres contextes.
Modélisation : Créer une variété de représentations d’idées, établir des liens et les comparer,
et choisir et appliquer les représentations appropriées pour résoudre les problèmes.
« Nous avons appris que le plus fort impact
que nous puissions avoir sur nos élèves est
peut-être de leur parler et d’établir des
liens avec eux. »
Communication : Communiquer le raisonnement oralement, visuellement et par écrit,
en utilisant du vocabulaire et une variété de représentations appropriées, et en observant
les conventions.
(Ministère de l’Éducation, 2005a)
6
Un milieu d’apprentissage en littératie pour les
apprenants d’aujourd’hui
Selon Allan Luke, le défi que les élèves doivent relever aujourd’hui, c’est qu’on leur demande
de lire non seulement le texte, « mais le monde ». On a besoin d’enseigner aux élèves
un répertoire de stratégies afin de leur permettre d’aller au-delà d’une compréhension
élémentaire des textes et de les utiliser à plusieurs niveaux pour un éventail de buts et dans
une gamme de technologies. En Ontario, et ailleurs, de nombreux enseignants se servent
du « modèle des quatre familles de pratiques » (Four Resources Model) de Freebody et Luke
comme base pour concevoir un milieu d’apprentissage.
LES QUATRE RÔLES DE L’ÉLÈVE EN ACTIVITÉ DE LITTÉRATIE
Tous les élèves qui acquièrent des compétences en littératie ont besoin d’expérience et de
pratique dans chacun des quatre rôles de l’élève en activité de littératie. Les enseignants
voudront peut-être réfléchir à l’intégration des quatre rôles dans leur classe en se servant de
quelques questions pour guider leur réflexion. Quels sont les endroits où des comportements
en littératie sont appuyés et évidents dans le milieu d’apprentissage? Comment le milieu
d’apprentissage soutient-il les élèves qui adoptent une approche d’enquête pour façonner
et maîtriser le répertoire d’habiletés qui entrent en jeu lors de la gestion de textes en ayant
recours à des moyens appropriés à divers contextes?
Four Roles of the Literate Learner
Créateur de sens
Décodeur/Encodeur
L’élève utilise ses connaissances antérieures
et ses expériences personnelles pour
construire et communiquer le sens par la
lecture, l’écriture, la parole, l’écoute, l’analyse
et la représentation. L'élève en activité de
littératie forme et communique sa propre
interprétation du texte à la lumière de ses
connaissances et de son point de vue.
L’élève reconnaît et utilise les caractéristiques et structures de textes écrits, visuels
et multimodaux, notamment les graphèmes,
les phonèmes, l’orthographe, les conventions,
la structure de la phrase, l’organisation du
texte et d’autres supports visuels et non
visuels pour décoder les textes.
Utilisateur de texte
L’élève en activité
de littératie
L’élève comprend que l’intention du texte et
le destinataire servent à déterminer la façon
dont le texte est construit : la forme, le
format, le moyen d'expression, la structure,
le ton, le degré de formalité et l’ordre
des composantes. Puis, il utilise cette
connaissance et une variété de processus de
raisonnement pour lire, écouter et analyser,
de même que pour écrire, parler et
représenter des idées.
ÉQUIPES SUR LE TERRAIN
(suite)
« [Le questionnement] est important
dans toutes les disciplines, et non pas
seulement en littératie. Chaque voix
est valorisée, ce qui permet de créer
une communauté respectueuse ayant
une compréhension partagée. Nous devons
étudier à quoi ressemble le discours avec
précision et comment l’intégrer dans le
milieu d’apprentissage de façon délibérée. »
« La participation est ÉNORME! Les liens
avec le monde réel ont motivé les élèves,
et leurs intérêts ont ensuite façonné
l’enseignement. Le personnel enseignant,
impressionné par le niveau de discussion
en classe, a conclu qu’un curriculum intégré
se prête au développement des habiletés
supérieures de la pensée. »
Analyste de texte
L’élève comprend que les textes ne sont pas
neutres; qu’ils correspondent à des avis, des
croyances, des valeurs et des points de vue
servant différents intérêts; qu’il se peut que
d’autres avis et points de vue manquent; que
la conception et les messages des textes
peuvent être interprétés, critiqués, remis en
question au profit d'autres points de vue.
L’élève en activité de littératie décide à quoi
il doit réfléchir maintenant, examine les
possibilités et décide quand agir.
(Adaptation du document intitulé La littératie au service de l’apprentissage : Rapport de la Table ronde
des experts en littératie de la 4e à la 6e année (ministère de l’Éducation de l’Ontario, 2004, p. 72).
7
En bref
La planification du milieu d’apprentissage devrait être délibérée et impliquer tous
ceux qui travaillent dans la classe – enseignants, administrateurs, parents et élèves.
Commencez par examiner vos convictions et votre philosophie
au sujet du développement social, physique et cognitif des
élèves et de leurs besoins d’apprentissage.
Le milieu d’apprentissage reflète-t-il bien les valeurs importantes
définies par l’équipe?
Comment l’espace physique va-t-il être utilisé pour encourager
les élèves à renforcer leur apprentissage et à approfondir leur
compréhension?
Comment le milieu va-t-il refléter une image de l’élève qui
évoque le potentiel et la capacité d’apprendre?
Planifiez le milieu d’apprentissage avec les élèves au préalable.
Les élèves sont-ils inclus et respectés et peuvent-ils se retrouver
dans le milieu d’apprentissage?
Les élèves sont-ils libres d’interagir dans un milieu où ils se
sentent en sécurité et de s’y investir personnellement et de
façon significative?
Facilitez l’adaptation du milieu en fonction des commentaires
des élèves et des observations des enseignants.
Comment l’espace, le matériel et l’organisation du temps
contribuent-ils à favoriser un apprentissage optimal en
mathématiques et en littératie?
Comment les enseignants peuvent-ils offrir du matériel, de la
documentation, du temps et proposer des défis qui permettront
aux élèves d’approfondir leur réflexion?
Le milieu favorise-t-il une réflexion profonde en mathématiques
et en littératie quels que soient le moment et le lieu?
Pensez à ce qui se passe lorsque les élèves entrent dans
la classe et interagissent avec leur milieu.
La classe suscite-t-elle un sentiment d’émerveillement et
favorise-t-elle l’enquête?
Permet-elle aux élèves d’avoir de grandes idées, de partager
ces idées et d’agir ensuite en fonction de ces idées?
Les élèves sont-ils capables d’assumer la responsabilité de
leur apprentissage?
Comment les élèves pourraient-ils communiquer leurs idées
sur leur classe, notamment les changements qu’ils aimeraient
constater?
Assurez-vous que le milieu d’apprentissage évoque
le respect à l’égard des élèves, des familles et des
communautés.
Comment le milieu d’apprentissage va-t-il refléter la diversité
des élèves, des familles et des communautés représentées
dans l’école?
Le milieu d’apprentissage est-il accueillant, inclusif, sécuritaire
et tolérant?
Prenez du recul et réfléchissez au milieu d’apprentissage
que vous avez créé.
Le milieu offre-t-il des expériences qui rehaussent la conscience
multisensorielle?
Le milieu permet-il le choix, la prise de risques et le libre partage
d’idées?
Le milieu permet-il de mettre à profit de façon souple l’espace,
le matériel et les occasions d’apprentissage?
Bibliographie
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